Elle n'aurait su dire comment elle avait convenu de ce rendez vous avec la nouvelle colocataire de Maddie et Nathan. Une histoire de concours de tir, tout en sachant pertinemment qu'elle n'était pas encore experte en la matière. Elle avait néanmoins honoré sa promesse, attendant l'ex pilote sur la place centrale de la ville, bras croisés contre sa poitrine, patientant.

Se contentant d'un sage hochement de tête quand elle était venue la rejoindre, la rejoignant sans mot dire en direction de la place de tir ou commencerait leur concours. Pas forcément bavarde, pour changer. Se contentant d'observer en silence sa posture, son port de tête, ne cherchant pas forcément à être discrète.

Alors, comment ça se passe avec Maddie et Nathan ?

Tentant un brin de conversation pour la politesse, tout de même. Elle avait promis à Levi de se sociabiliser un peu plus après tout, ce n'était pas pour rester taciturne tout le long du trajet. Venant allumer une des rares cigarettes qu'elle s'autorisait pendant le trajet, avant de reprendre.

Ils te donnent pas trop le rôle de la chandelle, ça va ?

Elle n'oubliait pas son premier repas avec eux, après tout. Ni ce déni exceptionnel dont ils faisaient preuve quand ils engageaient le sujet. Quand à elle, la brune s'adaptait finalement plus vite que prévu à sa nouvelle vie en compagnie de Levi et Sean. Ayant parfois l'impression d'être devenu un cliché ambulant, à déjeuner en compagnie de celui qui partageait ses nuits et l'adolescent dont elle commençait à pas mal s'attacher à force de passer du temps avec.

Et étonnamment, cette nouvelle routine lui convenait plutôt bien. Elle s'y plaisait, et continuer de s'acharner toujours autant à remplir les objectifs imposés par Levi.

Jetant son mégot quand elles arrivèrent au lieu de tir, faisant glisser la sangle de son sac en bandoulière pour le faire tomber au sol, venant attacher ses cheveux lâchés pour qu'ils ne viennent pas la gêner au cours de l'exercice.

La vie avec Maddison et Nathan n’est pas la plus désagréable qu’on puisse imaginer. En fait, je me plais bien avec eux, ce sont deux francophiles et c’est déjà un excellent point. De plus, Maddison est l’assistante de June, avoir de bons rapports avec elle. Je pense qu’elle serait en mesure de m’aider à construire mon projet et à le présenter. Peut-être que je me fais des idées à ce sujet, car je n’en ai simplement jamais parlé, mais c’est l’impression générale qu’elle me donne. Nathan, je suis un peu plus réservée, il semble avoir subi des choses ces derniers temps et il me semble moins ouvert. J’ai décidé de ne pas l’embêter trop à ce sujet.

En arrivant, j’ai remplacé deux personnes, un israélite appelé Levi et sa petite amie, Indiana. Je n’ai pas encore parlé avec Levi, je n’aime pas particulièrement la culture du moyen orient, encore que les Israéliens me dérangent un peu moins, le fait qu’ils fassent le « ménage » là-bas peut-être ? En revanche, j’ai eu l’occasion d’échanger quelques mots avec Indiana, elle était d’une compagnie assez agréable, au point que nous avions décidé de nous revoir pour aller tirer un peu. Oui, je considère que je dois continuer à m’entrainer, un concours en quelque sorte. Comment en étions nous arrivés là ? C’est une question à laquelle je n’ai pas encore de réponse. Oui, ça peut paraitre étrange, je sais.

Mais le fait était là, nous étions sur le pas de tir, Indiana me demanda comment ça se passait dans la maison. Ma réponse fut sincère : « ça se passe plutôt bien pour le moment, j’apprécie que l’on puisse parler français de temps en temps. Dans un pays comme celui-ci, ça me fait beaucoup de bien et je sens quand même qu’ils tentent de m’intégrer un peu, mais il ne faut pas se mentir. Ils sont presque sur un petit nuage actuellement. Je les comprends.» Oui je les comprends, j’étais un peu comme eux au début de ma relation avec Dany, moins avec Bastien. J’ai un sentiment nostalgique dans la poitrine, que je chasse en attachant mes cheveux et en allant chercher deux fusils. Des AR-15. Encore. Mais ça fera l’affaire.

Pendant que je vérifie les chargeurs et que je triture les organes de visé, à mon tour de poser des questions à Indiana : « Raconte-moi ton histoire, comment tu es arrivées ici et comment tu as finit dans les bras de Levi ? »

Ca se passait bien. Après tout, Nathan et Maddie n'étaient pas les personnes les plus horribles de la ville, il allait sans dire. Bien que comme le fit souligner la française, ils étaient sur un petit nuage. Manière assez polie de dire qu'ils avaient probablement les hormones en feu, à ce stade déni excessif qu'ils possédaient tous deux. N'émettant aucun commentaire sur la question, préférant d'avantage rebondir sur le mal du pays d'Adrienne. C'est cool de leur part, si ça peut te faire du bien. Déjà que l'apocalypse était difficile à vivre, elle n'imaginait même pas en tant qu'expatriée. J'te demanderai bien ce que tu pense des Etats Unis, mais je doute que le climat soit propice à ce genre de question. Avait-elle fait remarquer d'un sourire un peu amer, la remerciant d'un signe de tête en récupérant l'AR-15 qu'elle lui tendait, triturant presque instinctivement la visée avec ces gestes que Eddie lui avait fait répéter encore, et encore, jusqu'à ce qu'ils ne deviennent instinctifs pour elle.

Cependant, elle s'arrêta bien rapidement dans son intervention en écoutant les nouvelles questions de la française, relevant un regard impassible vers elle. Si elle ne voyait aucun inconvénient à discuter de son arrivée, parler de sa relation avec Levi c'était tout autre chose. Non pas qu'elle en soit gênée, ou honteuse. Les faits étaient là, et le brun la faisait se sentir bien en sa présence. Mais une telle tentative de s'immiscer dans sa vie personnelle... C'était quelque chose qui la faisait doucement tiquer. Hésitant une seconde à lui tirer dessus pour changer de sujet, tout en se rappelant que ce genre de choses n'était toujours pas autorisé en ville. Changement de plan, donc.

D'abord Zelda, qui avait savamment mimer un rapport sexuel avec ses mains pour demander si elle couchait avec Levi, maintenant Adrienne. A croire qu'elles s'étaient passé le mot.

Quelle ... Curiosité. Avait-elle soufflé avec son éternel air impassible, revenant à ses vérifications. Mon histoire est pas différente de celles des autres. Toute ma familles et amis sont certainement morts. J'avais un groupe, mort également. J'ai survécu en solo quelques mois, et je suis tombée sur Levi alors que je crevais d'une sale bronchite. J'viens de Tacoma, je suis venue ici pour chercher ma soeur, et Levi me file un coup de main pour ça.

Quand à Levi... Et lui tomber dans les bras. Sérieusement, qui disait encore ça ? Mais peut-être que pour une fois, prendre les choses au premier degré pouvait être une porte de sortie. Oh, toute une histoire ça. A l'anniversaire de Stan, j'avais un peu trop bu et après le ventriglisse je lui suis littéralement tombée dessus en essayant de me relever.

Ca aurait pu. Sucre, lassé de la voir sobre, avait bien dosé ses verres. Mais ça lui permettait surtout de passer pour une grande ingénue qui n'avait pas compris que la française souhaitait les détails croustillants de sa vie privée avec le militaire. Lui offrant une ébauche de sourire comme si elle se rappelait d'un fait amusant, avant de reprendre.

Et toi ? Comment tu es arrivée ici alors ? Maddie et Nathan m'ont dit que tu étais pilote, c'est ça ?

Spoiler:

Elle s'était attendue à entendre du négatif, elle même ne portant pas l'amérique spécialement dans son coeur. C'était certes, le pays qui l'avait vu naître, mais ... et après ? C'était le pays qui avait accepté le racisme que subissait sa mère, ou sa soeur. Et personne n'avait jamais trouvé rien à y redire. Néanmoins, elle ne s'était pas attendue à une telle avalanche de reproche de la part de la française alors qu'elle l'écoutait sans mot dire, hochant légèrement la tête.

Ca à le mérite d'être clair. S'était-elle contenté de faire remarquer en haussant les épaules. Pas ses affaires si elle crachait sur l'amérique moyenne. Elle ne risquait pas de s'offusquer pour ça. L'écoutant reprendre la parole, alors qu'elle parlait de son passé commun jusqu'à sa rencontre avec Jacqueline et Edward qui l'avaient ramenés ici. Je vois. avait-elle soufflé par politesse, alors qu'elle semblait si impatiente à l'idée de rejoindre le ciel. Ca, c'était bien quelque chose qui ne la passionnait pas. L'aviation en tout genre. Hélicptère, coucou ou Boeing, elle s'en fichait pas mal. Les airs et l'altitude ne lui convenaient que si elle avait un endroit ou s'accrocher, et trouver de bons points d'observation pour poursuivre son chemin. Pas plus, pas moins.

A son tour, elle vint viser et tirer, peu étonnée de manquer la cible. Elle était encore trop impatiente, pas assez posée dans sa respiration. Pourtant Edward le lui avait rabâcé, de cesser de respirer au moment de tirer. Mais l'acte en lui même n'était pas encore assez instinctif pour qu'elle l'éxécute sans réfléchir. C'est pas encore impeccable. Je suis plus douée aux armes blanches. Avait-elle marmonné, se répétant comme un mantra les conseils de son précepteur sur l'art de faire mouche.

Et tu pense que c'est possible ? Voler à nouveau ?

L'idée lui paraissait quelque peu incongrue. Ca faisait pas mal de ressources, mais si le jeu en valait la chandelle... Alors pourquoi pas ?

Tu me parlait de Levi un peu plus tôt. Vous avez eu l'occasion de discuter ? s'était enquise à nouveau, cherchant à entretenir la conversation avec la française qui commençait à se préparer pour son nouveau tir.
Elle savait que l'avis des uns et des autres différaient, concernant Levi. Comme Zelda qui le fuyait comme la peste par exemple. Mais si elle s'était enquise de leur couple, c'est que ça devait plutôt bien se passer, non ?

Comme elle disait, ça avait le mérite d’être clair. Je n’ai jamais caché mon mépris pour les Etat-unis. Cela ne semblait pas la choquer plus que cela, tant mieux. J’aurai grincé des dents si elle avait osé dire du mal de la France de cette manière, cependant, ça aurait été de bonne guerre et j’aurai difficilement pu lui en vouloir. Je la regarde tirer, c’est simplement lamentable. Son commentaire me laisse de marbre, je préfère ne pas en parler immédiatement. Non, à la place, je prépare mon tir, suspendant mon geste pour continuer la conversation.

Indiana semble dubitative quand je parle de revoler, ou curieuse peut-être ? Je ne saurai dire. En tout cas, je ne manque pas de lui expliquer clairement que c’est un rêve, mais pas une chimère : « C’est tout à fait possible, les machines ne sont pas à l’abandon depuis si longtemps. Le carburant est très spécial, inutilisable dans une voiture, on peut espérer en trouver de grandes quantités. Cela demanderait des moyens et un objectif, mais rien n’est impossible. » Non en effet, rien n’est impossible pour les français. J’ai des plans, des idées, qui se dessinent d’eux même sous mes yeux alors que je parle de ça. J’aimerai tellement pouvoir reprendre les commandes d’un P-51, qui pourrait m’empêcher de voler en rase-motte au raz de bâtiment ? Je saurai trouver les bons mots pour créer le besoin d’avions dans cet endroit ! Je me fais confiance pour trouver les arguments, sinon je ne suis plus une De Castel !

« Levi ? Non, je n’ai presque pas échangé avec lui. Pas plus que le nécessaire en fait. Je n’ai pas parlé à tant de monde que cela d’ailleurs, maintenant que j’y pense. Tu peux me parler un peu de lui ? Je serais curieuse de savoir quel genre de personne il peut être, du point de vue biaisé d’une rampante qui ne sait visiblement pas tenir une arme à feu ! « Regarde la posture que je prends quand je tires, les jambes plus large et ne sois pas crispée, détendue comme un chat. » Je ne suis pas une experte en tir, loin de là, je n’ai qu’une formation « sur le tas » et ma bonne vue. Mais je pense pouvoir donner des conseils à la jeune femme.

J’épaule le fusil, je prends une position stable, j’aligne les organes de visée et je tire. En plein cible, efficace, précis ; comme toujours. Cependant, je m’efforce de ne pas apparaitre mesquine ou suffisante. Je vole et elle non, c’est déjà assez honteux, je ne vais pas en rajouter.

C'est sûr, mais ça pourrait être un bon point pour tout ce qui touche à la surveillance. Avait-elle admis après l'explication d'Adrienne, quand au fait de pouvoir voler de nouveau. En tout cas, ça serait plus rapide de détailler ce qu'il y a autour du fort que de grimper sur le toit des immeubles. Ils commencent tous à s'effondrer maintenant, de toute manière... On peut pas dire que ce soit le même genre de voltige.

Ca lui était égal qu'elle veuille faire joujou dans les airs. Mais si cela pouvait ramener une meilleure vision de la ville, et l'espoir de trouver de nouveaux camps des New Eden... Elle ne crachait pas dessus. Elle avait beau prendre son mal en patience, elle se demandait toujours à quel moment elle allait bien pouvoir retrouver Tara. Et les jours qui s'écoulaient la séparaient chaque fois un peu plus de cette soeur tant recherchée.

Hésitant, quand elle demanda à ce qu'elle ne lui parle de Levi. Il y avait bien des choses à dire en réalité, mais ça ne concernait qu'elle et lui. Le fait de trouver de l'apaisement en sa compagnie, une certaine compréhension de son caractère. Mais c'était des termes qu'elle ne se voyait pas émettre à haute voix. C'est un mec bien. On peut compter sur lui.

En tout cas, elle, le pouvait sans hésiter. Ecoutant les remarques de la brune en se contentant de hocher la tête, visant à nouveau la cible en bloquant cette fois-ci sa respiration avant d'appuyer sur la détente. Cherchant à se détendre comme elle le lui conseillait, alors que la balle venait au moins effleurer la cible, y creusant un léger trou sur le côté.

Au moins, c'était moins catastrophique que la première tentative qui s'était évadée dans l'espace temps. Haussant les épaules l'air de dire que ce n'était rien, pas vraiment du genre mauvaise perdante dans ce domaine. Si elle ne doutait pas qu'elle commencerait bientôt à s'habituer à ce type d'arme, au moins avait-elle pu déjà développer des capacités dans tous les autres domaines. D'avantage corps à corps que jouer à cache cache avec l'ennemi pour l'instant.

C'est moins mauvais qu'avant en tout cas. Fit-elle remarquer en revenant charger l'arme, s'habituant petit à petit à son poids. J'ai jamais touché à ces trucs avant mon arrivée ici.