« Hippocrate mon cul, il peut bien aller baiser des chèvres ! » Au-delà du cliché évident sur les grecs de l'époque la réponse l'irrite plus qu'elle le devrait. Tirant les quelques taffes qu'il lui reste sur sa clope elle finit par balancer le mégot encore fumant d'un geste sec plusieurs mètres plus loin. Un peu trop familière concernant ledit serment – sa mère avait respecté le sien jusqu'au bout alors même qu'elle avait oublié sa fille après tout – elle n'a que faire de promesses passées dans un monde qui ne leur appartient plus. Ce ne sont que des mots, du vent, une bien-pensance qui n'avait plus lieu d'être présentement. Son petit sourire lui fait serrer un peu plus les mâchoires et elle se retient tant bien que mal de lui balancer une autre pique. Son caractère avait trop souvent tendance à lui jouer des tours elle en avait conscience et elle avait encore besoin de lui d'une certaine manière.

Et à prêcher le faux pour savoir le vrai en brodant sur les dires de son ami elle est prise à son propre piège. Son interlocuteur joue sur les mots, sur l'instant précis de la visite de Kara. Mais elle sait que Idriss n'a pas pu se méprendre de la sorte. Il l'a vu avec lui et non les Barnett. Si ce n'était pas ce jour précis ce devait être un autre. Mais elle ne peut rattraper son mensonge et sa maladresse et se rendre compte qu'elle perd le jeu n'aide en rien son humeur déjà massacrante à revenir à des normes socialement plus acceptables. Le golden boy n'y met, de ce fait, pas vraiment du sien et ses mots la perdent encore un peu plus. Relativiser ? Profiter au maximum?Ne pas savoir ce qui peut arriver en ces temps difficiles. Elle rêvait où ce crétin... « C'est une menace ? » Instinctivement sa main droite se porte dans ses reins, là où elle dissimule la lame fabriquée justement par la forgeronne et toujours planquée dans son étui sous sa veste. Invisible, mais diablement efficace. Elle se rapproche lentement d'un pas, réduisant la distance entre elle et l'homme, le visage fermé.

Le quiproquo s'installe, inexorablement. Mais comment pourrait-elle deviner ce qui se cache sous les mots de l'infirmier ? Comment soupçonner l'impensable quand elle n'a même pas les miettes d'une piste sérieuse ? Du coin de l'oeil elle surveille les portes du hangar, espérant y voir rapidement apparaître son géant noir qui surveille d'ordinaire toujours ses arrières. Il le fera, elle en est certaine, surtout après avoir gaffer de la sorte et connaissant son tempérament, mais le timing pourrait être idéal... maintenant. Elle ne connaît que trop peu son vis-à-vis et en cas de problème n'est absolument pas certaine de le maîtriser. Ne jamais sous estimer son adversaire. C'est ce qui l'avait souvent sauvé in extremis par le passé. On sous estimait trop souvent une femme de son gabarit.

« Je te conseille d'arrêter les énigmes maintenant. Ça n'a jamais été mon truc et la patience n'est clairement pas une vertu que je possède. »