Il y a quelques jours, je m'étais salement fait enculer. Au sens littéral. Un stupide gamin était parvenu à me voler des trucs. En soi, j'm'en foutais, il avait pas prit des trucs importants mais c'était le principe de me faire dépouiller qui me rendait grognon. Pire encore, j'avais la sensation de m'être aussi fait trahir par Tori qui m'avait empêché de fracasser la gueule de ce foutu gosse. Le pire dans l'histoire, c'était que mon crédo, c'était oeil pour oeil, dent pour dent alors je savais que je ferai payer à ce marmot son affront. Je l'avais cherché pendant des jours, me renseignant ici et là, en échange de ressources ou de service. Pas de bol pour moi, depuis son larcin, il n'avait pas été revu au NML. Avait-il fui les lieux en espérant que ça se tasse ? Probablement mais est-ce que ça m'empêcherait de le chercher et de lui botter le cul ? Clairement pas. Combien même il aurait pu être dans un énorme groupe d'un million de personnes. Je l'aurais cherché dans tous l'Etat et je lui aurais fait la peau. J'avais imaginé un milliard de façon de lui rendre la monnaie de sa pièce. Lui couper un doigt, lui briser les genoux, le torturer même, jusqu'à ce qu'il demande pardon. Il y avait tant de façon de lui faire regretter ses choix de vie mais pour trouver la bonne, il me fallait déjà lui mettre la main dessus.

Ronchonnant toujours dans mon coin, je m'étais mis à sortir seul, pour ne pas m'énerver plus que je ne l'étais déjà. En dehors de l'alcool et du sexe, la chasse était la seule façon pour moi d'arrêter de bougonner quelques heures. Parlant d'heures, j'avais cru trouver les traces d'un gibier potentiel. Pourtant, il m'a fallut beaucoup trop de temps pour le traquer, la faute à la horde que j'ai vu déboulé. La patience n'était déjà pas mon fort mais y être contraint, ça me rendait de mauvaise humeur du coup j'avais décrété que le premier animal que je trouverai, j'm'emmerderais pas à être tatillon et j'le plomberai directement pour en finir rapidement, contrepartie du temps que j'avais perdu.

Malheureusement... J'ai pas réussi a retrouver le saligaud qui devait déjà être dans le ventre de quelques damnés ou loin dans la nature de Seattle. "Putain !" que je pestais en venant donner un coup de pied dans une bouteille en verre, qui se brisa contre un obstacle. Qu'est-ce que ça me cassait les noix, cette accumulation de poisse ou de karma ! J'savais pas ce que c'était mais dans tous les cas, ça me les brisait au plus haut point ! Et maintenant, j'faisais quoi ? Bah pas le choix, j'allais clairement pas rentrer les mains vides alors je me dirigeais, flingue à la main, vers un lot de bâtiments. Heureusement qu'il y avait toujours des trucs à trouver, même si ce n'était plus grand chose, depuis le temps.

A mesure que je fouinais, je parvenais à détendre mes nerfs puisque j'étais parvenu à mettre la main sur une fin de bouteille, sur quelques vêtements et bouquins mais aussi sur des trucs à bouffer comme du riz et des pâtes. C'était pas grand chose mais au moins ça nous permettrait de tenir quelques jours de plus, avec Tori et Zack. En sortant de mon dernier bâtiment, un mouvement se manifesta dans ma vision périphérique et instantanément je levais ma main dans cette direction, fronçant les sourcils avant de sourire largement. "Tiens, tiens, tiens..." fis-je en m'approchant de quelques pas. "Ne serait-ce pas le petit con de la dernière fois." je poursuivais en glissant mon index sur la détente, montrant clairement que je ne risquais pas d'être clément.

La vie de Milow, d'un point de vu extérieur, était loin d'être bien compliqué depuis qu'il avait rejoint son groupe. Le ventre presque toujours plein, une liberté presque à toute épreuve, il faisait sa vie sans se soucier des autres, et ça lui convenait.
Il était rentré brièvement au camp, entre deux allers-retours dans le coin, mais avait pris soin de ne pas revenir au No Man's Land après avoir été pris littéralement la main dans le sac. Ça avait été très fun de faire tourner ce grand mec en bourrique et il en avait savouré chaque seconde, mais il était loin d'être idiot : il savait que les répercussions pouvaient être affreuses s'il recroisait son chemin.

Il sursauta quand une silhouette sortit au même moment où il allait passé devant la porte d'un vieux bâtiment. Immédiatement, il se courba sur ses jambes, prêt à bondir sur sur l'ennemi ou le rôdeur pour lui planter sa lame dans le crâne, mais ce dernier fut plus rapide.

Un juron resta coincé au fond de sa gorge alors que le canon se braquait directemen sur lui, presque à bout portant. Il eut un mouvement de recul. Trop tard. Ne lui restait que son regard glacial pour tenter de congeler son adversaire sur place. Pas bien efficace, en soit.

Regard qui se durcit un peu plus quand il reconnut ce visage. En même temps que lui, bien sûr. Et l'homme parut jubiler de ce malheureux hasard, à contrario de son cadet, dont le visage exprimait son mécontentement. Ses lèvres étaient vaguement retroussées dans une moue écoeurée. Combien y'avait-il de chances pour qu'ils se retombent dessus, comme ça ?

L'adolescent réfléchit à toute vitesse. Il voulut choisir l'effet de surprise et attaquer, directement, mais l'indexe du type, pressant déjà à moitié la détente, l'en dissuada. Est-ce qu'on pouvait dire qu'il avait peur ? Oui. Milow avait peur, d'un coup. Ce devait être une simple journée de fouille. Il devait rentrer le soir. Et il avait bien peur de ne pas rentrer du tout au vu du regard carnassier du mec.

Alors son visage à lui changea. Il effaça son air mauvais et leva les mains de chaque côté de son corps, se peignant une expression d'appréhension et une attitude bien moins assurée.

- Je … J'suis désolé, okay ?

Il pointa du doigt, son baisser son bras, son sac à dos. Mieux valait la jouer fine et adoucir l'ennemi pour ne pas que la situation ne lui échappe que ce que c'était déjà.

- On … on fait un deal ? J'ai pu choper des trucs, depuis ce matin. Pleins de trucs. J'ai deux bouteilles dans mon sac.

Il remua un peu pour faire tinter lesdites bouteilles et lui prouver qu'il ne faisait pas de bluff.

- Ca et d'autres trucs. Je te laisse le tout. Même mon sac Spiderman. Sans broncher. Et tu me laisses. C'est juste, non ?

Il prit une grande inspiration et souffla lentement par le nez, à l'affût de la moindre expression sur son visage à lui. C'était chaud, là. Il n'aimait pas ça du tout.

C'était noel avant l'heure. Bordel, qu'il était bon d'avoir l'impression que le karma était de son côté pour une fois et honnêtement, je me réjouissais d'enfin avoir ce foutu pisseux bloqué à quelques pas de là. Je pouvais me venger et ensuite, l'univers pourrait bien se charger de me punir en me faisant perdre une godasse, une bouteille ou en me bloquant avec Zack et Tori dans une cabane moisie. Après m'être vengé, je pouvais bien accepter n'importe quelle punition divine, sauf la mort, parce que concrètement, ça me faisait chier l'idée de mourir. Enfin, là n'était pas la question. Comme la dernière fois, le mioche me défiait du regard pour finalement se radoucir dans l'espoir que je le laisse tranquille. Pas de bol pour lui, cette fois, il n'y avait que lui et moi. Pas de petite asiatique, pas de foule pour succomber à sa duperie. J'étais seul maître de son destin.

Encore une fois, je pouvais sentir mes lèvres s'étirer d'une oreille à l'autre, bien trop satisfait par ce heureux hasard. Le gamin se souvenait du magnifique doigts qu'il m'avait fait, du moins j'espérais parce que je comptais bien le lui briser. Peut-être même lui casser les deux, pour lui passer l'envie de voler et de croire qu'il était plus malin que tout le monde. Mon arme était toujours pointé dans sa direction et mon index tapotait même la gâchette, m'offrant une douce sensation d'amusement. C'était une sorte de roulette russe où la petite souris serait forcément perdante si elle ne se pliait pas à la règle du plus fort. Mes yeux se froncèrent d'ailleurs, quand le jeune homme proposa un deal. Ses trouvailles du jours, dont deux bouteilles, contre la liberté. C'était tentant, vraiment mais... Il manquait quelque chose pour laver l'affront passé...

"Ok mais tu vires aussi tes fringues. Tu peux garder tes chaussettes et ton calbut." que je laissais finalement tomber, plutôt amusé par cette idée. S'il n'avait jamais été du camp des bizuteurs en cours, c'était le moment de rattraper tout ça. Est-ce que la demi portion parviendrait à la fermer et à s’exécuter ? Pouvait-il vraiment refuser cette demande qui, au delà d'être humiliante, était quand même plutôt sympa pour avoir la vie sauve. Qu'est-ce que ça faisait d'être comme un crétin, en sous-vêtements, dans la rue ? "Dépêche toi de te foutre à poil. Rapidement, là ! Sinon je tire et ça ira tout aussi rapide mais moins bien fun pour toi." que je menaçais l'adolescent, tenté en plus d'appuyer sur la détente pour laisser partir un coup à côté de son corps. Au moins, ça aurait le mérite d'annoncer que je ne plaisantais pas. En revanche ça finirait par attirer tous les mordeurs alentours et là, il faudrait vite se tirer. Qu'importait. J'étais pas inquiet par ça puisque j'avais trouvé des points de repli en cas de besoin alors l'affaire serait vite réglée.

"J'espère que t'as ma flasque sur toi, quand même. Elle était belle, c'te merde." fis-je simplement en souriant de plus belle. J'avais tout mon temps, personnellement et lui ? Avait-il encore le temps de jouer avec sa vie ? Mon regard descendit rapidement sur son sac à dos Spider-Man. C'était pas ouf comme trouvaille et est-ce que le trésor à l'intérieur vaudrait vraiment le coup ? J'étais persuadé que non mais le contenant était une façon de soigner mon honneur bafouée, alors le contenu n'était pas bien important, pourvu qu'il y ait de quoi nourrir le trio ou quelque chose de pas trop mal à échanger. En plus, il semblait que le gamin était un peu plus grand que Tori alors s'il y avait des fringues en plus, ce serait tout bénef. L'odeur de la revanche était le meilleur des fumets. Qui disait que ça se mangeait froid ? Clairement, le gout n'en était meilleur que lorsque la première opportunité de "juste retour des choses" se présentait.

S'il n'avait pas été si proche d'un flingue chargé et pointa entre ses deux yeux, cette situation l'aurait sacrément foutu en rogne. Non : ça le foutait en rogne quand même. Que le destin se joue de lui de la sorte. Et ce sourire carnassier que l'autre ne perdait .. ça le dégoûtait salement.

Les yeux de Milow glissèrent sur l'indexe du gars qui jouait avec un peu trop de vigueur avec la gâchette. Comme s'il pouvait le retenir par la simple force de son regard.

- Quoi ?!

Il fronça les sourcils et lui lança un regard éberlué. Reculant d'un pas, il s'apprêta à l'envoyer salement bouler, mais le mec ne lui laissa pas le temps d'ouvrir la bouche qu'il surenchérit encore, le pressant un peu plus.

- T'es sérieux, là?! T'as pas ton asiatique pour te rincer l'oeil, plutôt ?

Son cœur s'emballait. Il avait peur, oui, et c'était ça qui lui déliait la langue. Mais ça, ça … Milow n'aimait pas être humilié.

- Putain de pervers, ajouta-t-il un peu dans sa barbe.

Il n'avait personne pour le sortir de cette situation cette fois-ci.
D'un geste rageur, il retira son sac de son dos et sans réfléchir, il l'envoya par en-dessous dans le bras armé de son agresseur, espérant que ça le fasse dévier de sa trajectoire.

Cela fonctionna. Pendant même pas une fraction de seconde. Comme si le type avait anticipé cette contre-attaque.
L'arme à feu, si elle bifurqua un instant le temps d'éviter l'attaque du sac, se repointa immédiatement sur l'adolescent qui eut à peine le temps d'esquisser un pas vers l'entrée du bâtiment. Et cette fois-ci, elle ne resta pas en l'air. Le canon s'enfonça dans son plexus, et Milow se retrouva coincé contre le mur.

Immédiatement, la sonnette d'alarme s'alluma, stridente, à l'intérieur de son crâne. C'était terminé, les conneries. Terminé les tentatives pour s'enfuir. Il voyait déjà le doigt du mec presser la détente. C'était comme s'il sentait déjà la douleur fulgurante lui traverser le corps.

- Okay, okay, okay, j'ai merdé ! Reprit-il immédiatement.

Cette fois-ci, l'autre devait clairement voir qu'il ne jouait plus et qu'il était vraiment effrayé. Sa fierté venait de s'envoler d'un seul coup. Le débit de sa voix s'était accélérée et ses pupilles s'étaient brusquement dilatées sous l'effet de l'adrénaline.

- Je .. j'me mets à poil, t'as gagné, tire pas ! J'suis désolé !

S'il avait pu fusionner avec le mur, il l'aurait fait. À la place, face à cette position de faiblesse, il sentait ses jambes s'emplir de fourmis. Il en avait du mal à respirer.

- J'fais tout ce que tu veux, je jure que j'plaisante pas cette fois !

Evidemment, je me doutais que le gamin ne pouvait pas rester sans rien faire. Une grande gueule, un peu d'intelligence et il se croyait capable d'éviter la mort, juste avec un culot monstre et beaucoup d'affront. Sauf qu'il ne sait pas vraiment qui je suis, ce petit. Je n'avais de cesse de le répéter. J'étais le genre de connard à tirer avant de parler et ça ne m'avait jamais dérangé. Là, concrètement, ça ne me ferait pas de mal de directement expédier ce sale gosse dans les rangs des damnés, en revanche, ça me ferait bien chier de devoir l'exécuter sans m'être venger un peu. Lorsqu'il tenta de me semer en me balançant son sac à la gueule, je repoussais l'attaque et vins immédiatement le bloquer contre un mur avec le canon de mon arme, l'enfonçant contre son torse, l'index à rien d'enclencher le mécanisme qui lui ferait dire adieu à la vie. Mes sourcils s'étaient froncés de plus belle, ma mâchoire s'était serrée de rage et les yeux devaient sans doute envoyer des éclairs parce que le petit se mit à s'excuser, déblatérant un flot de paroles pour me convaincre de ne rien faire. Quel idiot ! S'il n'avait rien tenté de stupide, sans doute que j'aurais été plus clément mais là, il avait dépassé les bornes. Sans un mot, de ma main libre, je détachais ma hachette de son attache et venais coller la lame contre la gorge du jeune homme.

"C'est la dernière fois que tu essayes de te tirer." lâchais-je au bout de longues minutes en ramenant mon flingue contre sa tempe. "Encore un coup comme ça et je me ferai un plaisir de te laisser ici, en kit." que je poursuivais en appuyant un peu plus le métal de mon arme contre son crâne. "Est-ce que c'est clair, petit con ?" chuchotais-je de plus en plus menaçant, pour lui faire comprendre qu'on se foutait pas de ma gueule impunément. Le regard noir que je lui lançais pouvait bien trahir le sérieux de mes propos. Qu'il tente. Oh ça oui, qu'il tente et je jurais qu'il prendrait une correction qui lui ferait pas du bien. En plus, pour peu qu'il ait une famille, j'aurais bien été capable de laisser sa tête sur une pique avec un petit mot qui disait qu'il fallait faire un exemple et quoi de mieux qu'un voleur minable.

Cette fois, je me radoucissais et reculais mes mains pour laisser à l'adolescent le plaisir de respirer. Je crois que s'il s'était pissé dessus ou s'il s'était mis à chialer, j'aurai pu accepter et j'me serai sans doute tirer mais... Ce goût de vengeance... Ca me tenait trop à coeur pour que ça se termine comme ça, alors... "A poil. Entièrement. Cette fois, j'te laisse que tes godasses." ordonnais-je d'une voix blanche. "Et tu me feras le plaisir de ranger tout ça dans le sac." Encore un sourire carnassier, preuve que je ne lui laisserai pas une seconde de répit tant que je n'y aurai pas trouver mon compte. Est-ce que j'en serai fier dans quelques heures ? Non, clairement pas. Ou peut-être que si ? Je ne savais pas trop mais en tout cas, j'aurais au moins l'impression d'être à égalité avec ce chieur. La balle serait au centre et on pourra recommencer à guerroyer une fois qu'on se recroisait, si on se recroisait et si je ne le tuais pas d'ici là. Finalement, je reniflais négligemment et relevais mon âme vers son front. "En fait, non. Garde ton calbut. Ce serait dommage que tu t'fasses choper le vermisseau et que ce soit ça qui te tue." Est-ce que je me moquais ? Complètement. C'était aussi une façon pour moi de retenir mon doigt sur la gâchette qui fourmillait d'envie d'appuyer, de régler cette histoire une fois pour toute.

"Dis moi, c'est quoi le délire de voler, là ?" que je questionnais finalement. "On t'a jamais dit que ça apportait que des problèmes ?" poursuivais-je alors que j'étais pas vraiment bien placé pour parler de moralité, en réalité. Pas que ma rage se calmait mais je voulais savoir. Pourquoi avait-il choisit de se foutre dans la merde. Possible qu'il n'ait jamais pensé que ça arriverait mais choisir une voie d'avenir merdique, ça finissait toujours par nous foutre dedans et sur ça, je savais de quoi je parlais. Pourtant, il fallait que je comprenne. C'était quoi l'idée ? Compenser une perte ? Un rejet ? Un besoin maladif d'occuper ses mains et de sentir qu'il pouvait pisser plus loin que les autres ? Ouais, j'crois que sur le coup, ça me titillait de savoir à quel point il avait envie de se foutre dans un bourbier sans fond.

Son regard suivait la main du mec qui récupéra, en plus du flingue, sa machette. Milow redressa le menton dès lors que la lame acérée se posa contre sa gorge. Il eut envie d'appeler à l'aide, mais savait très bien que ce n'était pas une bonne idée. De même, sa fierté lui donnait envie de ne pas craquer, de le provoquer toujours plus pour prouver qu'il n'avait pas peur, mais … si, il avait peur. Il n'était même pas sur que les larmes qui faisaient briller ses yeux étaient fausses.

Le flingue changea également de position. Okay, là, l'homme faisait en sorte de ne lui laisser aucune porte de sortie.

- Encore un coup comme ça et je me ferai un plaisir de te laisser ici, en kit. Est-ce que c'est clair, petit con ?

L'adolescent papillonna des paupières et se força à respirer par le nez pour se contrôler. Il hocha la tête en se mordillant la lèvre inférieure. Il avait l'impression de suffoquer.

Ce fut comme si son agresseur, en reculant, laisser l'oxygène le loisir de revenir sur Milow. Toujours collé au mur, ce dernier n'eut d'autre choix que de se reprendre comme il le pouvait. Merde alors, il lui avait fanqué une sacrée frousse, là. Est-ce que le plaisir de le voir tétanisé était suffisant pour lui ? Visiblement, pas, puisqu'il semblait décidé à le voir nu.

Lentement, le jeune Lewis se décolla du mur en essuyant les quelques larmes qui s'étaient faites leur chemin sur ses joues d'un revers de main. Il n'avait plus envie de jouer, là.
Son sweat fut retiré dans un mouvement lorsque le mec apporta une précision.

- Quel grand homme, marmonna-t-il pour lui-même alors qu'il lui donnait l'autorisation de garder son sous-vêtement.

S'il s'en sortait vivant, il se faisait la promesse de lui faire payer un jour.
Il souffla longuement par la bouche pour évacuer le stress alors qu'il retirait sa ceinture et déboutonnait son jean, pour relever ses prunelles sur lui à sa question. C'était peut-être une perche, là. En tout cas, un chemin à emprunter pour s'en sortir un peu mieux.

Ses doigts attrapèrent le bas de son t-shirt qu'il retira dans la foulée. Baissant ensuite les yeux, il haussa les épaules et fronça les sourcils dans une expression de tourments.

- Je … j'volais pas, à la base … c'est juste … la seule manière que j'ai trouvé pour survivre.

Son aîné pouvait le constater de lui-même en voyant à présent le torse nu et amaigri de l'adolescent. Ouais, les temps étaient durs, même après cinq années d'épidémie. Et … oui, Milow vivait mieux, avec son groupe. À vrai dire, il ne pouvait plus vraiment se plaindre de la faim, même si les longues années de privations avaient créé de gros troubles alimentaires et l'empêchait de réellement écouter les demandes de son corps.
Et pour le coup, c'était vrai : Milow avait dû voler. Peut-être aurait-il pu emprunter un autre chemin, mais à l'époque, c'était le plus simple à emprunter. À ce jour, il avait également conservé cette habitude, au point d'en faire un vrai problème de kleptomanie.

- Je veux juste vivre, ajouta-t-il en se penchant sur le sac à dos pour y fourrer son sweat et son t-shirt.

Sans jamais le quitter des yeux.
Se redressant un instant, il lorgna sur les armes du mec.

- Vous allez pas me tuer, au moins … ? Je fais tout ce que vous demandez, là. Vous promettez que vous me tuerez pas à la fin ?

Ce serait le pire de se faire abattre après avoir été humilié de la sorte.
Il attendit sa réponse en tenant son pantalon en place, comme si sa parole valait réellement quelque chose. L'adolescent était bien placé pour savoir que le mensonge existait.

Est-ce que voir le mioche les larmes aux yeux me fait plaisir ? Oui. Totalement. Est-ce que je me sens puissant ? Oui. Est-ce que ça m'amuse ? Bof.

En fait, en y réfléchissant bien, ça m'amusait pas plus que ça de faire le connard avec ce marmot. Pas que son sort m'inquiète plus que ça, puisqu'il vivait de ses vols mais parce que j'avais clairement autre chose à foutre. Je l'observais tranquillement qui se mettait à exécuter mes ordres. Il parlait aussi, essayait de s'expliquer et j'aurais presque eu de la peine, s'il n'avait pas voulu jouer au plus malin avec moi. J'étais pas un bon joueur, de toute façon et c'était plus facile pour moi d'arracher et de piller que de demander poliment réparation. De toute façon, à quoi ça servait, d'avoir encore quelques valeurs dans ce monde à la con, quand on rencontrait quelqu'un qui nous prouvait pas A + B que ça ne valait pas la peine d'être amical ? Perso, c'était comme ça que je l'avais pris. Ce débile m'avait prit pour un con, il avait tenté encore une fois en cherchant à s'échapper alors pas la peine de vouloir être sympa. A ses dernières questions, je lui offris un sourire mauvais et j'haussais les épaules. "J'sais pas, ça va dépendre de toi." que je répondais simplement.

Lorsqu'il eut terminé de tout ranger dans son sac, je tendis la main pour lui faire comprendre qu'il devrait se baisser et me ramener mon dû. J'allais quand même pas prendre le risque de le quitter des yeux pour lui laisser l'occasion en or de me la faire à l'envers, j'étais pas si con. Mon arme pointait toujours dans sa direction et une fois la bretelle à l'épaule, je lui fis signe du menton. "Passe devant. J'te rapproche d'un lieu sûr et j'me taille." que je lui annonçais. Quoi ? Il aurait pu trouver ça encore plus humiliant de devoir se balader en slibard jusqu'à un point sauf mais quelque part, j'lui évitais une sale rencontre. C'était même un peu par acquis de conscience, comme si une partie de moi me disait que le karma serait encore plus en colère si j'osais le laisser à sans sort dans cette tenue et sans moyen de se protéger. Je retins un soupir profond qui trahissait ma non envie de "l'aider" mais j'avais appris à l'écouter et à me rapprocher de l'humain que je pouvais être. "J'vais pas te tuer mais j'espère bien ne pas te recroiser de sitôt." que je disais sans plus de manière. "Ouais, parce que n'importe qui t'aurais déjà fais la peau et p't'être que j'aurais dû aussi, mais bon. T'es qu'un sale gosse, j'vais pas non plus m'abaisser à ça." que je poursuivais alors que j'emboitais le pas au petit brun, fixant son dos avec toujours ce titillement dans l'index.

Les premières minutes furent silencieuses et comme s'il s'agissait d'une longue épreuve mentale pour moi, je venais le briser d'un simple "Tu t'appelles comment ?" avant de refaire silence quelques secondes pour reprendre "Moi c'est Peter." Alors j'admettais volontiers que me présenter c'était pas vraiment une bonne idée, surtout si le marmot avait la possibilité d'avoir des gros bras qui chercheraient ensuite à me faire la peau mais j'savais pas trop. C'était peut être un besoin inconscient de me dire qu'après cette rencontre, les compteurs seraient remis à zéro et qu'on pourrait ensuite avoir le plaisir de ne jamais se revoir, du moins, une fois qu'on serait sortit du dédale de rues et d'immeubles.