En retrouvant les autres pour l'arrivée de Ray, Jacob ne sait plus vraiment où se mettre. Voir l'émotion chez son jeune ami, c'est quelque chose qui suscite une vague de joie chez lui, et qui le contraint à sourire. Il a peur de trop en faire, peut-être de le blesser mais à l'évidence, l'homme n'est pas heurté le moins du monde par l'attention alors qu'il en bégaie plus qu'autre chose, comme s'il découvrait qu'il était à ce point possible qu'on l'apprécie ici. Il va sans dire, pour les Ross, Ray est un garçon adorable, et qu'importe ce qu'il peut bien faire, il est largement aimé.

Bon anniversaire, Ray, souffle Jacob en lui rendant son accolade.

Lorsqu'ils se séparent, Jacob lui pose une main sur l'épaule pour le tenir encore un instant, il est si content qu'il soit heureux qu'il ne sait plus quoi faire. Et puis à dire vrai, il n'est pas celui qui en a le plus fait pour lui ! Sa sœur s'est investie à mille pour cent, à croire qu'elle a un don pour organiser des choses. Après le mariage d'ailleurs, il n'y a plus de doute à avoir sur sa capacité à gérer les surprises :

On a prévu un gâteau, c'est Phoebe qui l'a fait et Tasya a arrangé le glaçage, explique-t-il en le désignant, posé sur une table plus loin. Il préfère taire sa participation avec Tasya, parce qu'il n'a pas du tout aidé dans l'histoire. Ses grands mains ont posé plus de problèmes qu'apportés de solution, il est de toute façon plus habile pour du gros œuvre que pour de la subtilité : On a préparé un repas aussi, tu es le roi de la soirée !

Pour cette fois cependant, pas d'alcool. Ou pas qu'il sache ! Mais des cadeaux quand même, achetés avec des bons, ou alors de la fabrication de base pour quand même avoir quelque chose à lui offrir.

L'heure d'accueillir Ray approche à grands pas. Tasya apporte rapidement les dernières modifications au glaçage du gâteau, rajoute quelques petites fraises pour masquer les imperfections et plante 30 bougies dessus. Il y a tout juste la place entre les écritures et les fraises. Le résultat est convenable, ils ont réussi à rattraper le petit loupé du début. Elle suit Jacob jusqu'à la salle à manger où auront lieu les festivités et se met légèrement en retrait, laissant les amis de Ray s'approcher en premier.

Ce dernier arrive et enlève le bandeau sur ses yeux. Comme les autres, Tasya scande alors un "surpriiise". Le tout nouveau trentenaire parait surpris, touché de se voir être le centre de l'attention. Un petit sourire flotte sur les lèvres de Tasya. Elle est contente d'être là. Ce genre de petits moments est toujours agréable à vivre et même si elle connait mal Ray, elle est heureuse pour lui. Les temps sont durs et les relations humaines, l'amitié notamment sont d'autant plus importantes. C'est ce qui permet de tenir le coup, d'aller de l'avant. L'homme en a presque les larmes aux yeux et c'est touchant de le voir ainsi.

« Bon anniversaire » lui souffle-t-elle quand arrive son tour. Tasya adresse un petit regard amusé à Jacob et confie à Ray : «  Et ne l'écoute pas, il a aussi participé au glaçage du gâteau.. » L'important, c'est que le gâteau soit bon de toute manière et vu les talents de cuisinière de Phoebe, il le sera c'est certain. Elle pose une main sur son épaule avec un petit sourire. « Profite bien de ta soirée... » Après tout, un anniversaire ne se fête qu'une fois par an... Puis, elle s'écarte pour laisser la place aux autres.

Tasya surprend alors une conversation par hasard. Elliot qui conseille à Arthur de ne pas se faire coincer. La mexicaine fronce les sourcils.. De quoi veut parler son amie ? Ce ne sont pas ses affaires, mais forcément, elle s'inquiète pour Elliot alors elle gardera un oeil sur eux. La mexicaine se dirige vers Phoebe. «  Est-ce que je peux t'aider à faire quelque chose ? » Elle n'aime pas ne rien faire de ses deux mains et si elle peut apporter son aide.

 
A voir le visage surpris de Ray, ils ont réussi leur coup, et Arthur se fend d’un large sourire. De bonne grâce, il accueille l’accolade du kiné, lui tapotant le dos d’un geste amical. Bon anniversaire, Ray, répète-t-il sur un ton à la fois plus mesuré et plus profond. Organiser cette fête n’a pas été une mince affaire, mais il est sincèrement heureux de voir que cela fait plaisir à son ami.

Avec un sourire, il le laisse partir à l’assaut des convives, remerciant chacun d’entre eux. Du coin de l’œil, il aperçoit Elliot. Aussitôt, un mélange d’émotions toutes plus intenses les unes que les autres l’assaillent et s’il répond à son embrassade, Arthur s’efforce de garder une certaine distance. Il n’a pas oublié l’épisode de la cuisine, et ne sait toujours pas quoi en penser, se débattant avec des sentiments mitigés. Mais il n’en laisse rien paraître, portant toujours le masque du bon ami. Parce qu’ignorer la jeune femme le ferait plus souffrir qu’autre chose.

Surpris par la remarque d’Elliot, il lui lance un regard de travers, avant de balayer l’assemblée des yeux. Même s’ils ne sont pas vraiment au milieu du groupe, et qu’elle a parlé à voix basse, il craint qu’on les surprennent. De quoi tu parles, Elliot ? Si le ton n’est pas froid, il ne laisse aucune place au doute : il ne lui répondra pas ici, au milieu de toutes ces oreilles capables de le dénoncer.

Après un instant de silence gêné, Arthur se décide finalement à bouger. Jetant un coup d’œil en direction d’Elliot – mais prenant soin de ne pas la regarder directement -, il esquisse une grimace. Si tu veux bien m’excuser… S’arrachant péniblement à sa compagnie, il n’attend pas la réponse de la jeune femme et se dirige vers la cuisine. La porte se referme derrière lui et il y reste appuyé un moment, coupé du bruit de la fête qui débute à peine.

La tête entre les mains, Arthur inspire profondément. Rester le même avec Elliot s’avère beaucoup plus difficile qu’il ne le pensait. Toujours, les images de leur dernière rencontre tournent en boucle dans son esprit, se superposant à la réalité. Finalement, il traverse la pièce et rejoint l’évier, où il s’asperge le visage d’eau fraîche. Il faudra bien qu’il se ressaisisse de toute façon. Rien ne doit le trahir. Ni lui, ni elle.

Je sens immédiatement que c’est différent avec Arthur. Je ne sais pas à quoi je m’attendais pour être tout à fait honnête. J’espérais vraiment qu’on pourrait mettre tout ça derrière nous. Que tout redeviendrait identique comme juste avant cet incident dans ma cuisine. Je me force même mentalement à utiliser ce mot, pour donner une dimension plus négative à ce qui s’est passé, parce que je sais que c’est dangereux, parce que je m’en veux pour Cooper, parce que j’essaie d’étouffer les papillons dans mon estomac chaque fois que j’y pense. S’il ne me repousse pas pour une accolade polie, je le sens distant. Physiquement et mentalement.

J’essaie d’être comme d’habitude, je suis réellement contente de le voir en fait, mais il y a un malaise c’est sûr. Il ne me répond pas, bien au contraire il ne souhaite pas partager ça avec moi et ça me blesse. Je devrais sans doute me dire qu’il n’est pas à l’aise de parler de ça aussi près d’autres gens, mais c’est plus fort que moi, je suis piquée dans ma fierté. J’ai l’impression qu’on me prend pour une idiote, qu’on ne me fait pas confiance. Le pire, c’est quand il décide de me planter là, sans être capable de me regarder dans les yeux, sans même me laisser souffler un mot.

Ça, ça fait mal. Mon cœur se serre et je crois que je réalise que j’ai perdu quelqu’un à qui je tenais. Beaucoup. Est-ce que c’est de ma faute ? Est-ce que je peux vraiment me reprocher d’avoir mal agi ? Est-ce que j’y suis pour quelque chose ? La réponse est sans doute bien plus nuancée que je ne saurais le dire. Rien n’est blanc ou noir. J’ai envie de partir. Envie de retourner chez moi et d’oublier un peu ces émotions qui m’habitent et qui alourdissent mon cœur. Je me sens un peu humiliée, rejetée, abandonnée.

Je prends cependant une grande inspiration. Je ne peux pas m’enfuir. Je ne vais pas m’enfuir. Je force un sourire sur mes lèvres et reviens vers les autres. Je ne veux pas lui causer d’ennui, alors il vaut mieux faire comme si de rien n’était, encore une fois, puisque ça a si bien fonctionné la dernière fois…

- Alors, comment on se sent avec une année en plus Ray ? Que je lance joyeusement pour bien vendre ma salade.

Je salue tout le monde avec autant d'attention que possible pour chacun. Les accolades et les regards amicaux me réchauffent sincèrement le coeur et, au moins pour l'instant, me font un peu oublier le reste.

Du coin de l'oeil, je capte le mouvement d'Elliot qui rejoint Arthur, et puis ce dernier qui s'esquive vers la cuisine. Je ne cherche pas à le retenir, trop occupé avec le reste des hôtes et des convives.

Jacob me parle d'un gâteau d'ailleurs, ce qui m'illumine le regard autant que ça me creuse l'estomac. Mon regard file vers le dessert joliment décoré de fraises et de beaucoup... beaucoup de bougies. "Arrangé ?" que je relève alors de sa remarque, avant que Tasya ne précise que Jacob a également mis la main à la pâte. Ceci explique cela. "Et il est toujours entier ?" Je lui avise un sourire taquin. "C'est super, merci." Je gratifie le géant d'une tape sur l'épaule, et en profite pour lui mettre une petite pression entre les omoplates pour l'inciter à se redresser. Déformation professionnelle, mais Jacob présente bien mieux ainsi, et vu l'aura qui se dégage entre lui et la mexicaine, il devrait mettre toutes ses chances de son côté pour lui faire bonne impression.

Je me tourne alors vers Elliot qui approche avec une question assez bateau, mais qui suffit à m'arracher un sourire - ceux-ci sont faciles à venir aujourd'hui. "Hm, je me sens infiniment plus sage et responsable, évidemment." dis-je très ironiquement. En réalité, ça apporte plus d'angoisses qu'autre chose.

Je scrute une seconde les yeux de la blonde avec une certaine curiosité. Arthur en est amoureux, il me l'a lui-même avoué. Ce sera bien sûr un secret bien gardé, mais je me demande ce qui a allumé sa flamme. Et j'espère qu'elle ne la lui mettra pas à l'envers... "Ton mari est à Seattle en ce moment, non ? Tu ne t'ennuies pas trop ?" que je lui demande pour jauger de sa réaction. Je suis à peu près certain qu'elle a trouvé de quoi s'occuper en réalité. Simple curiosité exacerbée par la boisson consommée plus tôt.

D'ailleurs ma faible capacité d'attention me mène à m'écarter un peu pour mettre la main sur un verre rempli... de jus de fruits. Décevant, quoique délicieux. Je profite de passer devant la chaîne hifi pour monter largement le volume de la musique et reviens vers la blonde pour lui prendre tout naturellement la main et lui faire faire une petite pirouette de circonstances. Quand je la récupère face à moi, je lui demande, "Où est Arthur ?" J'ai hâte de danser de manière complètement débile avec mon meilleur ami.

Je pouffe de rire à la réponse de Ray. Ma question était un peu idiote et surtout pour faire la conversation, pour cacher mon malaise grandissant depuis qu’Arthur m’avait fait comprendre qu’il ne voulait pas être en ma compagnie… Je remerciais mentalement le kiné de se prêter au jeu. Il me pose une question qui me refroidit un peu sur le coup. Mon mari… Si effectivement c’est difficile de vivre dans cette grande maison vide, si effectivement je m’ennuie parce que je ne peux pratiquement pas sortir sans être accompagnée, si mon ami me manque, je ne peux pas dire que mon ‘’mari’’ me manque. Je m’en veux, Je ne sais pas ce qui ne tourne pas rond chez moi. Il est beau, patient, gentil, respectueux et on partage cette même haine pour New Eden, mais… je n’y arrive pas. À tomber amoureuse de lui. Ça n’aide pas qu’il ait disparu pendant deux mois, difficile d’essayer de construire une relation par l’absence, mais… il devrait me manquer plus que ça, non ? Je devrais quand même me languir de son retour ?

Au lieu de ça, j’attends le retour d’un ami.

- Euh, oui. Que je balbutie, troublée par mes pensées et les derniers événements.

J’espère que ça passera simplement pour de la surprise, quant à cette question, quant à ce rappel. Je me mords l’intérieur de la joue, par moment je suis vraiment la pire des menteuses.  Je force néanmoins à nouveau un sourire sur mes lèvres, je ne vais pas donner l’occasion aux autres de tenter de me poser des questions, ou même de tenter de me réconforter. Je n’ai pas besoin de tout ça.

Fort heureusement, Ray s’anime un peu, attrape un verre et va augmenter le volume de la musique qui joue en fond. Il revient vers moi et attrape ma main pour me faire faire un petit tour et la mon sourire devient un peu plus sincère. Enfin, jusqu’à ce qu’il me demande où est Arthur.

- Je… crois qu’il est dans la cuisine.

Non, j’arrive plus à feindre que ça me pèse énormément. Je préfère noyer mes mots et ma moue triste dans ma limonade, pour cacher mes états d’âme actuels. Faut que je trouve une excuse pour filer d’ici. Je ne peux pas rester. Je ne veux pas rester.

- J'étais venu pour te faire la surprise, mais je dois déjà repartir ! J'ai du travail pour le journal. Je mens bien sûr, mais c'est pas porte de sortie. Bon anniversaire à nouveau Ray. Je lui offre un beau sourire que je force évidemment.

Puis je fais signe aux autres, toujours avec se même sourire et je file à l'Anglaise.