S’occupant de ranger les dernières lessives qu’elle avait faites, Nell écoutait d’une oreille distraite Stoot qui s’occupait de vider tout doucement la chambre d’ami. Elle avait bien voulu l’en empêcher avec sa convalescence, mais son époux n’avait rien voulu entendre.

Pourtant, au bout d’un moment la pause semblait s’imposer tandis que le silence s’installait dans la pièce d’à côté. Un rire s’échappa des lèvres de la trentenaire en entendant son homme lui demander comment ils appelleraient leur enfant.

- Je sais pas, tu as des idées ? C’était quelque chose qu’elle avait envie de voir avec lui.

Grant n’avait pas vraiment voulu s’impliquer à ce niveau lui, lui disant lui faire entièrement confiance. Ça avait peut-être été le cas, peut-être qu’il savait réellement que Nell choisirait quelque chose qui lui plaisait, mais pour la grande anxieuse qu’elle était, la trentenaire avait perçu cela comme un petit désintérêt. Steve lui était différent. Plus joyeux, plus excité, plus impliqué. Son cœur battait toujours un peu plus fort à chaque fois qu’elle y pensait.

- Hmmm. Faisant mine de réfléchir, Nell secouait plutôt la tête dans la chambre, bien amusé par la nouvelle question qui lui était posée. Garçon ! Elle avait choisi au hasard, n’ayant pas encore du tout une idée sur la chose. Son corps finirait par lui offrir quelques signes sans doute, mais… tout ça lui importait si peu.

Avoir cette chance, c’était déjà le plus beau cadeau du monde. D’avoir trouvé quelqu’un à aimer avec cette force, d’être aimé en retour, puis de pouvoir fonder à nouveau une famille… Jamais la fleuriste n’aurait pensé pouvoir vivre tout ça encore et en mieux.

- Bien sûr ! Répondait-elle une fois de plus de la chambre lorsqu’il fut question de baptême. Ce serait une belle occasion de réunir les gens qu’ils aimaient, mais cette fois le nombre serait limité.

Son mari et elle avaient visiblement la même vision des choses. Hors de question que ce jour tourne mal à cause d’invités surprise ou de problèmes apportés par des connaissances. Les derniers mariages avaient été des plus éprouvants et c’était la paix que recherchait le couple Lee.

Nell s’arrêtait finalement de ranger les vêtements lorsqu’elle entendit pour une énième fois Stoot lui dire qu’il l’aimait. Jamais elle ne se lasserait de l’entendre, bien qu’il le lui répétait encore plus souvent depuis qu’il savait pour leur grossesse. C’était attendrissant.

Délaissant les tiroirs, la brunette allait rejoindre son mari dans la chambre d’ami, le découvrant adossé au mur. Elle le rejoignait et se laissait doucement glisser au sol à ses côtés.

- Moi aussi je t’aime. Lui répondait-elle en lui déposant un tendre baiser sur la joue. Se blottissant contre Steve, elle nouait son bras au sien, observant les progrès de la chambre. Tu sais, nous avons encore six mois pour voir à tout ça, ne te surmène pas. Lui répétait-elle à son tour.

Nell prenait une grande inspiration, puis soupirait de bien être alors que Steve disait qu’il serait un vrai papa gâteau. Ce n’était pas possible d’être aussi attendrie et amoureuse, ça ne devrait pas être permis, songeait la petite brunette tout contre son époux.

- Merci. Lui soufflait-elle avant de lui déposer un baiser sur la joue.

Avec Mason et Armand, il ne se surmènerait pas autant et pourrait guérir mieux. C’est tout ce qui importait à Nell. La chambre du bébé pourrait toujours attendre, un simple berceau dans leur propre chambre suffirait. Le plus important était la santé de l’homme qu’elle aimait éperdument.

Écoutant la liste des prénoms que lui donnait Steve, la fleuriste pouffait de rire avec lui, puis réfléchissait un peu.

- Hmmm… Elle essayait quelques combinaisons dans sa tête. Dylan Lee, Maxwell Lee, Nikolaus Lee… Impossible de ne pas sourire. Est-ce qu’on lui donne seulement ton nom ou nos deux noms ? Ça peut changer la donne. Soufflait-elle taquine.

Ça aiderait sans doute à faire un choix, l’un ou les deux changeait drastiquement la consonance et les guiderait un peu au niveau des choix. Déjà quelques idées lui venaient en tête, mais lorsqu’elle sentit la main de Stoot trouver la sienne, le silence ce fut à nouveau dans son esprit. Seul le battement de son cœur retentissait dans ses oreilles.

De la chance ?

Son cœur se tordait douloureusement dans sa poitrine alors que son mari lui avouait qu’il ne se souciait plus trop de vivre ou non, avant. Ça lui faisait mal d’entendre ça, malgré l’importance que son homme plaçait en elle. Nell sentait néanmoins une grande vague d’amour l’envahir tandis que sa moitié reprenait la parole, la complimentait, la remerciait, l’aimait. Comment ne pas fondre d’amour un homme pareil ? Comment ne pas mourir d’amour pour Stoot ? La brunette se blottissait contre son époux et le serrait contre elle de toutes ses petites forces.

- Je t’aime tellement. Soufflait-elle. C’est moi qui ai de la chance. Malgré mon âge, malgré tout ce que j’ai perdu, je t’ai trouvé toi et tu as bien voulu de moi. J’ai été amoureuse avant, mais jamais comme ça. Tu me fais me sentir tellement plus forte, plus aimée que je ne l’ai jamais été, plus en sécurité, plus apaisée. Je ne sais pas ce que je ferais sans toi.

Elle n’ose trop avouer d’ailleurs que s’il ne s’en était pas sorti au Bidonville, elle se serait sans doute laissé dépérir. Jamais elle n’aurait pu se remettre d’un deuil pareil, pas maintenant qu’elle avait gouté à cet amour si intense, si prenant.

- Pas encore, non. Murmurait Nell en fermant les yeux, le nez caché au creux du cou de l’homme de sa vie. Oh un repas ce serait une bonn…


Elle s’interrompait immédiatement lorsqu’elle entendit ce que proposait Stoot. Rouvrant les yeux, elle s’écartait un petit peu. Déjà quelques larmes venaient brouiller sa vue. Émotive par nature, c’était tellement pire à chaque grossesse, mais voilà… Nell était tellement touchée qu’elle pleurait doucement.

- Outre que tu ne sais pas quand te reposer, tu es vraiment parfait hein ! Plaisantait-elle, avant de venir lui voler un baiser empli de toute la tendresse dont elle était capable.

Les deux noms… ça la touchait, bien plus qu’il ne pourrait se l’imaginer. Jamie et Bailey n’avait eu que le nom de leur papa eux. C’était un peu la tradition. À l’époque, ça ne lui avait pas posé souci, ainsi allaient les choses, mais aujourd’hui. Alors qu’ils avaient tout perdu, alors que ses parents étaient morts… Son nom de famille devenait un peu son legs, prenait une importance toute nouvelle à ses yeux. Ce bébé serait porteur de sa survie, porteur de cet espoir qui avait vaincu le monde dans lequel ils vivaient aujourd’hui.

Martins-Lee. Ça sonnait bien aussi aux oreilles de la petite brunette. Et ça ouvrait tout plein de possibilités de prénoms en « i », ce que Nell trouvait mignon comme tout. Réfléchissant un tout petit instant, elle cherchait alors quelques prénoms avec cette consonance.

- Frankie Martins-Lee, Georgie Matins-Lee, Charlie Martins-Lee… Es-tu un petit Henry ? Ou un petit Louis ? Peut-être une petite Lily ou une petite Holly ? Faisait Nell en souriant et caressant son ventre.

Peu lui importait, tant qu’ils pouvaient prendre soin tous les deux de cet enfant. La brunette relevait rapidement la tête pour plonger ses yeux clairs dans ceux de son mari, alors qu’il lui disait qu’il l’aurait choisi dans n’importe quelle vie. La fleuriste avait l’impression que son cœur fondait un peu plus à chaque déclaration de l’homme qu’elle aimait.

- Tu caches bien ton romantisme aux autres, ma foi. Le taquinait la trentenaire, avant de soupirer d’aise tendrement. Elle mourrait d’amour pour Stoot, il n’y avait pas d’autre façon de l’expliquer. Oh, si on pouvait l’avoir demain ! Ce serait le plus beau des cadeaux. Se disant, la brunette saisissait doucement la main de son mari pour se remettre sur pieds elle aussi.

Avant de pouvoir lui demander si ça allait, vu sa blessure, elle se laissait guider jusqu’à leur chambre, avant de se poser sur le lit et d’être rejointe par Stoot. Une fois de plus, Nell se blottissait contre lui, l’écoutant alors qu’il lui peignait un joli tableau de paix, d’amour, de sérénité.

S’ils parlaient peu des problèmes de Walla Walla, de New Eden même, ils semblaient néanmoins savoir qu’il y en avait. Nell avait un peu peur à dire vrai. Peur d’avouer que cet endroit n’était pas le paradis qu’elle espérait. Peur des répercussions. Peur que cela attire des soucis à son mari. Peur qu’il décide d’agir à la suite de ses dires. Non, il fallait le préserver, les préserver. Le plus longtemps possible. Ignorer ce qui n’allait pas. Suivre les lois. Essayer de vivre paisiblement.

Elle lui volait donc un énième baiser, tendrement, avant de cacher son petit museau au creux du coup de son mari.

- Tant que je suis avec toi. Chuchotait-elle. Chaque endroit où nous vivrons sera la plus belle des maisons.