« Et putain… Pas un seul venu pour m’aider. » Ce n’était pas faute d’avoir demandé. Je posai une main sur le capot du pick-up le temps de reprendre mon souffle, l’autre posée sur mes côtes douloureuses. Après plusieurs minutes à courir à travers bois, la douleur était devenue quasiment insoutenable malgré l’adrénaline. Chaque inspiration me faisait l’effet de dagues acérées plantées dans mon torse. Ce n’était pourtant pas le moment de flancher. Ils me faisaient tous aveuglément confiance pour me laisser partir seul non ? Je préférais me dire ça, mon ego s’en satisfaisait très bien.

J’avais néanmoins besoin d’un ticket de sortie si personne n’était là pour assurer mes arrières. Je récupérai les clefs du pick-up en même temps que celles de la moto de Zack. « Désolé mon pote… » Je préférais perdre un temps précieux pour la faire grimper à l’arrière du véhicule, ce serait toujours mieux que de mourir à bord de ce pick-up dans l’opération ou de devoir courir dans mon état au milieu d’une horde de rôdeurs chargés d’explosifs. J’aurais clairement dû la prendre depuis le début, à la réflexion… Surtout que le premier concerné ne s’en était même pas soucié. Si je m’en sortais en vie, j’irais récupérer une moto.

Je l’attachai à la va-vite à l’arrière du pick-up en faisant en sorte de laisser suffisamment de place sur le côté pour les cadavres des rôdeurs. Il me suffirait logiquement de la détacher et de l’enfourcher directement pour me sauver le plus loin possible avant que le compteur n’arrive à zéro. Je grimpai ensuite à l’avant du véhicule et mis le turbo pour revenir le plus rapidement possible à la place des discours.

Entre temps, la situation n’avait heureusement pas empiré. Je retrouvais bien la même vingtaine de rôdeurs encore sur place, non loin de leur conteneur d’origine, comme si on leur avait gentiment demandé de rentrer à la niche en attendant mon retour. Ma main écrasa le klaxon à leur hauteur avant que je ne freine non loin des cadavres délaissés par Jeremiah et moi, où le premier était encore affairé avec Zack. « Faites-les monter ! » Je ne savais pas s’ils avaient eu le temps de finir ce qu’ils avaient à faire, mais on n’avait plus le temps. La nette majorité des rôdeurs se détournaient déjà du conteneur pour affluer dans ma direction, même s’il en manquait certains à l’appel.

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Je chope mon couteau et j’arrache les fringues du rôdeur, grimaçant quand je vois les coutures. Ca y est, j’ai la gerbe. Que ce soit à cause de ce je vois ou de ce que je vais devoir faire. J’ai un regard aux alentours avant de murmurer pour moi-même, « allez, un peu de courage. » Et, un ton plus haut, à ceux qui sont pas trop loin. « Vous devriez vous éloigner un peu. Au cas où. »

Quelle idée à la con.

Je plante mon couteau dans la chair et je commence à trifouiller tout ce bordel aussi délicatement que je peux. Je retiens l’envie de vomir quand je finis par tomber sur la bombe elle-même. Parce que le corps a été vidé de ses entrailles pour que ça rentre. Y a plus rien d’autre que la bombe serrée avec du fil de fer autour de la colonne. J’ai un haut-le-cœur alors que je la chope pour l’examiner, les mains pleines de sang.

Et si j’arrive pas trop à jauger la quantité, qui doit quand même pas être énorme au vu de la taille des boites de conserve, je me fige quand je pige le bruit que ça fait. « Putain de merde. » J’enfonce de nouveau la bombe dans le rôdeur et je me précipite vers les deux filles avec les talkies. « Faut prévenir les autres. Les bombes sont… » Piégées ? Ouais bah normal pour une bombe… « … y a des trucs dedans. Quand ça va exploser, y aura des clous, des bouts de métal, qui vont voler un peu partout. Le tout tient dans deux boites de conserve, c’est artisanal. Je pense pas que la portée soit si énorme que ça. Mais toutes les bombes cumulées et les éclats… ça va faire super mal pour ceux qui seront trop près. »

Je renifle un coup et je vais chercher les autres rôdeurs à terre pour les regrouper, grapiller quelques secondes. Et, quand Locke revient avec la bagnole, je grimace à voir ma moto accrochée. « Chier… » Bon en vrai, ça sera encore mieux pour qu’il se tire. Mais je balance un premier corps à l’arrière avant de souffler, en direction du brun. « Faudra que tu te casses vite. Quand ça va péter, y aura des bouts de métal et compagnie qui vont te voler à la gueule. »

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Tout s’enchaîne très vite, et dans le chaos général, Ellie perd totalement le fil. Comme un automate, elle donne l’une de ses grenades à Zack, avant de hocher la tête à sa suggestion. Ça marche. Et si cette distraction-là sert pas non plus, je me mets à poil ? Un trait d’humour qu’elle-même peine à trouver drôle, au vu de la situation. Elle n’attend pas spécialement de réponse du blond, qui se penche de toute façon vers un rôdeur crevé de chez crevé pour le disséquer. Si elle l’observe avec curiosité au début, elle est cependant très vite dégoûtée par ce qu’elle voit, et opère un demi-tour sur elle-même, le cœur au bord des lèvres. Je vais… euh… voir ailleurs si j’y suis.

Elle n’a pas vraiment le temps de s’éloigner beaucoup, cependant, car derrière elle, Zack ne retient pas un juron. Surprise, elle fait à nouveau volte-face et l’aperçoit alors qu’il enfonce la bombe dans la cage thoracique du macchabée. Dégoûtée, elle s’approche néanmoins, assez pour l’entendre prévenir Madisson et Layla. Prise au dépourvu, elle réfléchit cependant au quart de tour. Pendant ses longues semaines de désœuvrement, lors de son arrivée, elle a eu largement le temps de se promener sur la plage et de tourner autour du port. Elle y a souvent croisé Melinda, qui lui a fait visiter le ferry de fond en comble. Peut-être que… Il y a quelque chose à tenter. Agrippant le bras de Zack, elle attire son attention. Vouus croyez que la sirène du ferry serait assez puissante pour les attirer sans qu’on ait besoin de se déplacer nous-même ? Elle souligne indirectement le caractère suicidaire du plan de Locklan. Je crois que Melinda est au poste deux, elle pourrait l’actionner. Pourvu que les garçons acceptent et surtout, soient d’accord pour l’emmener – ou aller prévenir eux-mêmes l’ancienne pêcheuse.

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Horrifiée, je regarde Locklan ramener le cadavre d’un mort à Zack pour qu’il examine le mécanisme de la bombe. J’observe à quelques pas de là alors qu’il trifouille la dépouille. Ce n’est pas vraiment ragoûtant mais cela ne m’atteint pas vraiment. Lorsqu’il trouve finalement quelque chose, il se tourne vers moi pour m’avertir de la présence de clous et de bouts de métal à l’intérieur. Je ne traîne pas, alertant les autres « Ici Madisson, nous avons examiné le mécanisme des bombes. Il y a des boîtes de conserves à l’intérieur, elles sont remplies de clous et de morceaux de métal en tout genre. » Autrement dit… Il ne faudra pas être trop près lorsqu’elles exploseront…

En attendant, il n’y a pas de temps à perdre. En voyant Zack commencer à charger l’une des dépouilles de rôdeurs de pick-up, je me dépêche d’en faire de même. J’attrape les bras d’un des cadavres avant de le traîner comme je peux. « J’aurais besoin d’un peu d’aide… » Que je calme à l’attention de Zack, manquant visiblement de force pour le soulever un peu plus…

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Je me retournai un peu sur mon siège pour compter les cadavres de rôdeurs qu’ils me mettaient à l’arrière. « On a le compte ? » Zack me glissa quelques mots au passage qui m’arrachèrent un grognement mauvais. Des bombes artisanales pleines de bouts de métal ? Je m’étais attendu à pire, en vérité. Ca ne devrait pas faire trembler les abris en souterrain, mais par contre… Je risquais clairement de ne pas m’en sortir si je m’y prenais trop tard pour partir. « J’ai bien fait de prendre ta moto. » Je lui lançai un sourire en coin. « Dis-lui au revoir ! » Si elle ne revenait pas entière, certainement que moi non plus.

Je surpris rapidement la conversation d’Ellie et Zack. Melinda était à la seconde tour de surveillance ? C’était plutôt logique, vu que le quai était juste à côté. « Ok, ok. Plage Sud ! » Je changeais un peu les plans de Layla à l’arrache, mais si le ferry commençait à tonner, il valait mieux que je les ai déjà amenés là-bas, au risque sinon que les morts retraversent la ville en sens inverse. « Maddie, tu contactes la tour ? J’y vais ! » De toute façon, mes nouveaux petits copains ne me laissaient pas trop le choix.

Je leur fais signe de reculer quand les rôdeurs commencèrent à se presser contre l’arrière du pick-up. Je lançai un dernier regard à Zack avant d’appuyer sur l’accélérateur pour enclencher la marche funèbre, me calant sur leur rythme de croisière. Avec la mort aux trousses, c’était tentant d’accélérer le rythme. « Allez, là… Putain. » J’avais la sensation que ces huit prochaines minutes seraient les plus longues de toute mon existence.

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Les messages fusaient dans son talkie. L’on en apprenait un peu plus sur les dispositifs à l’intérieur des morts, un peu plus sur la psyché sadique de New Eden. Les leurs s’organisaient toutefois avec efficacité. L’on trouvait des solutions et l’on tentait d’attirer ces rôdeurs à un endroit où il ferait moins de dégât. Si jusqu’ici le plan avait été de les attirer vers la place au niveau du poste de contrôle numéro un, désormais l’optique du Ferry changeait l’itinéraire de ce convoi mortel qui se préparait.

- Quelqu’un a chronométré le temps ? Demandait l’intendante aux gens qui l’entourait avec empressement.

Une simple erreur de calculation et ils le paieraient tous très très cher. LE klaxon retentissait et Layla repérait le pickup que Mister Reid ramenait. Cela avait l’effet escompté puisque la majorité de cette horde dangereuse convergeait soudainement vers cette source de bruit. Il restait cependant des retardataires, des réfractaires même qui préféraient s’éloigner, se disperser plus loin de leurs congénères.

Ce n’était pas bon et il fallait les neutraliser.

L’Anglaise fonçait donc tout en rangeant son fusil en bandoulière à son dos. Pas de balles pour ne pas risquer de faire exploser ce piège animé. Muni de son simple couteau à cran, Layla put surprendre sa première cible. Attrapant le collet de ce rôdeur, elle le tira suffisamment vers l’arrière pour avoir le champ libre et lui planter sa lame sous la mâchoire. Grimaçant, elle essayait de le retenir pour ne pas qu’il s’effondre trop durement au sol, par peur de l’explosif qu’il portait. Un deuxième rôdeur fut attiré par ce rapide combat et s’approchait dangereusement de l’intendante. Cette fois-ci, l’effet de surprise n’était pas une possibilité. Luttant en essayant de trouver le moyen de prendre le dessus, l’Anglaise était en bien mauvaise posture. NE réussissant pas une manœuvre, elle se retrouvait un peu trop près du rôdeur et ses mains décharnées s’agrippèrent à ses vêtements, essayant de l’attirer à lui, à ses mâchoires claquant dans le vide.

L’Adrénaline permit à l’intendante de se dégager de cette prise et de faire un petit bond à l’arrière pour se mettre hors de portée.

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