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Carry on...
Jeu 6 Jan 2022 - 21:27
Depuis combien de temps je suis en train de les regarder dormir ? Une minute ? Une heure ? J’en ai pas la moindre idée. Je sais juste que leur souffle a quelque chose d’apaisant. Mais je sais aussi que je m’agite beaucoup trop et qu’à cause de moi, ils dorment pas assez. Alors, pour une fois, je préfère attraper une couverture et je quitte la chambre sans un bruit.
Et je finis par me retrouver dans le salon de la maison d’Eden. Perdue au milieu de nulle part, dans une forêt qui me rappelle les livres que j’ai pu lire. Je me demande s’il y a des farfadets ou des fées par ici. Remarquez, vu les habitants du coin, ça serait même pas étonnant. J’avoue que j’ai vachement de mal à gérer. Leur gentillesse, leur compassion. Ils me laissent respirer, me demandent rien en retour. C’est juste… improbable. Mais quelque part, j’peux comprendre pourquoi Ana a tenu à ce qu’on vienne jusqu’ici. On est dans une espèce de cocon en vrai. Et même si je sais qu’à un moment, ce cocon va finir par m’étouffer, pour le moment, il me permet de pas perdre totalement pied. D’appréhender mes cauchemars, de reprendre des forces.
Dans quelques semaines, ptet même quelques jours, j’finirais par avoir envie de partir. Parce que j’ai pas envie de commencer à m’attacher à eux. Et je suis même pas sûre que c’est pas déjà trop tard, que ce soit Ana, Symea, Rick ou Evan. J’parle même pas d’Eden et des petits, là c’est encore pire.
J’ai un soupir alors que je resserre la couverture autour de moi, que j’attrape un morceau du gâteau que j’ai pas mangé tout à l’heure et que je vais me rouler en boule sur le canapé. Mon regard se perd dans les flammes qui s’éteignent petit à petit et je finis par remettre une bûche. Je reste comme ça de longues minutes, fascinée par le feu, avant de relever la tête quand j’entends du bruit dans les escaliers. Un froncement de sourcils, alors que je me tâte à me cacher, avant que je reconnaisse la silhouette d’Eden. «Oh je… salut. » On a pas vraiment eu l’occasion d’être en tête à tête depuis mon arrivée y a presque deux semaines. Ptet parce que je l’ai potentiellement un peu évitée. Je sais pas quoi dire en vrai. Et j’ai peur de me remettre à pleurer. Alors que j’ai plus le droit de faire ça. «T’arrives pas à dormir non plus ? » Ouais, j’ai toujours été super brillante en déduction, je sais, je sais. Je m’épate encore moi-même un peu plus tous les jours. Et j’ajoute, un peu plus hésitante. «… comment ça va ? T’as l’air de te plaire ici. C’est cool. » J’ai arrêté de lui en vouloir pour un truc sur lequel elle est pas responsable. D’autant que ça changerait rien au final. Ca me ramènera personne.
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Re: Carry on...
Dim 9 Jan 2022 - 20:23
La transition entre Seattle et Sanctuary Point se faisait au fur et à mesure. Ces dernières semaines lui avaient paru un peu irréelles, loin des drames et de l’angoisse des journées qui lui semblaient, parfois, sans fin. Eden était satisfaite, étrangement à l’aise, c’était un peu le compromis auquel elle avait toujours voulu aspirer, une grande communauté l’aurait étouffée, ici, elle avait l’impression de mieux respirer. La vie avait toujours eu cette odeur l’attente de mort, de poudre et de poussière à laquelle on s’habituait mais qui demeurait toujours, s’imprégnant dans les vêtements. Sans oublier qu’elle voyait bien la différence sur ses enfants, l’influence d’un environnement plus sain et une mère qui se noyait bien moins dans l’angoisse de les voir, un jour, mourir de sa propre incompétence.
Mary-Abigail était arrivée quelques semaines auparavant, deux, lui semblait-il. Mais la jeune fille faisait l’anguille, échappant au giron de la mère qu’était Eden. Forcer la conversation n’avait jamais été une option. Seulement, elle voyait bien au regard de la petite rousse, ses grands yeux bleus lui avaient paru plus sombres, moins joyeux. Eden n’avait pas voulu faire de remarques au sujet des cauchemars de la jeune fille, ou des cent pas qu’elle entendait parfois dans le salon. Dormir paisiblement ne lui venait pas encore, Eden trouvait le repos dans un demi sommeil, même si elle avait passé les meilleures nuits de son existence depuis la fin du monde. C’était vers quatre heures du matin, qu’elle entendit le parquet grincer, et elle fut immédiatement réveillée, prête à en découdre. Une longue inspiration, elle comprit vite que la maison n’avait pas été la victime d’un assaillant mais le théâtre d’une adolescente qui ne trouvait pas le sommeil. En descendant, elle la trouva devant le feu, une bûche avait remplacé les braises. Eden descendit, s’emmitouflant dans un gros gilet, depuis que Mary-Abigail était arrivée, ses enfants dormaient dans leur chambre. Même si Adriel n'avait aucune réelle intention de laisser croire qu'il ne dormirait plus avec sa mère. Poppy et Adriel étaient profondément attachés à elle qu’elle le veuille ou non. Eden avait toujours vu ce lien avec beaucoup de bienveillance et une tendresse qu’elle n’avouerait certainement pas.
« Bonjour Mary. » fit-elle, alors qu’elle se dirigeait vers la cuisine pour mettre de l’eau à chauffer. « Quatre heures du matin, c’est presque une grasse matinée. » fit-elle. Elle avait presque dormi cinq heures heures, la présence de Lisandro à côté avait le don de rassurer la mère de famille, elle ne se sentait pas seule si elle devait agir.
« Je dois avouer que la vie est plus paisible ici. C’est …» Elle marqua une pause, cherchant ses mots, ou l’adjectif qui pourrait illustrer son sentiment entre la soulagement et la peur, cette angoisse que ce soit trop beau pour être vrai, l’effroi de se dire que ce calme pouvait cacher une tempête à n’importe quel moment. « Effrayant.» fit-elle, enfin.
Se plaire ? Elle avait beau vouloir la contredire, elle ne le pouvait pas. « Mary-Abigail.. » soupire t-elle, en sachant pertinemment qu’avec la question suivante, elle entrait en terrain miné, mais crever l’abcès ne ferait pas moins mal plus tard. Au contraire. « Que s’est-il passé ? » demande t-elle, préférant ne pas lui demander comme la jeune fille allait. Après tout, il n’était nécessaire d’avoir faire un doctorat pour voir que le départ de Seattle avait été un traumatisme. Était-ce la mère ou la survivante qui posait la question ?
Un peu des deux sûrement, elle était la mère inquiète pour une adolescente et la survivante qui voulait comprendre.
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Re: Carry on...
Ven 14 Jan 2022 - 10:40
L’espace d’une seconde, de quelques secondes même, je me dis que je pourrais être bien ici. Que je pourrais rester avec Eden et les petits, que je pourrais presque retrouver ma vie d’avant. Presque. Et puis, je me rappelle que Johanna est toujours perdue dehors, comme les autres filles. Et que j’ai pas le droit de rester là, à profiter d’un bon feu et de repas que je mérite pas vraiment. Pas tant que j’aurais pas de réponses sur ce qui leur est arrivé. Mais je me sens trop fatiguée pour ça. Trop jeune aussi.
… trop plein de trucs. Et pas des trucs positifs donc.
J’ai un bref soupir, alors que je m’enroule un peu plus dans mon plaid, même si j’arrive à sourire en voyant Eden. Au moins, elle va bien. Les enfants aussi. C’est toujours ça de pris. «Oh il est déjà 4 heures ? J’pensais qu’il était plus tôt que ça. » Au moins, ça veut quand même dire que j’ai dormi quelques heures, plus que ce que je pensais. C’est cool. Je suppose. Je me frotte le nez, laissant filer un silence, avant de froncer les sourcils à sa réponse. «Effrayant ? Parce que c’est trop calme et que t’as peur de ce qui va forcément arriver ? » Parce qu’on va pas se mentir, ça peut pas juste être calme et tranquille. Ca finit toujours pas se casser la gueule à un moment ou à un autre.
Je me fige quand elle reprend, mon regard se perdant dans le vide. J’ai pas envie de lui répondre, mais j’peux comprendre qu’elle ait besoin de savoir. «Je… » Je me mordille la lèvre et je prends une grande inspiration. «J’ai plus la date exacte en tête. Le trois ? Le quatre ? » C’est important ? Pas vraiment. «Ils sont arrivés au milieu de la nuit. On a été réveillées par le coup de roquette. Ils ont visé la chambre d’Oxana directement. Y a… on a rien pu faire. Tout a explosé. Ca brûlait de partout. » Je sens mon regard s’embuer, mais je continue, d’un ton aussi neutre que possible. «Je sais pas ce qui est arrivé à Amalia. Alba nous a emmenées dans la ruelle, derrière le motel. Elle a passé la barricade mais, quand c’était mon tour, ils sont arrivés. Les gens de New Eden. Ils ont commencé à lui tirer dessus, mais je crois qu’elle a réussi à s’échapper. » Un froncement de sourcils. «Ca continuait à tirer dans la cour. Et le feu s’est propagé aux autres chambres. Hope nous a tirées jusqu’à l’autre côté de la ruelle. Elle est passée la première, j’ai suivi avec Kaycee. Mais Johanna a pas eu le temps de grimper. » Je me recroqueville sur moi-même et je souffle, dans un murmure. «Elle a disparu. » Une grande inspiration alors que les larmes roulent sans même que je m’en rende compte. «On a … Hope est partie en courant pour faire diversion. J’l’ai pas revue non plus. Kaycee a dit qu’il valait mieux qu’on se sépare. Et j’suis restée toute seule, cachée pendant des heures. En espérant que Johanna arriverait. » Sauf que ouais, c’est jamais arrivé donc. Je renifle un coup. «J’suis allée me cacher dans le bar où on squattait avec Zoey. Et Axelle m’a trouvée là-bas. » Je me rends compte que j’ai beaucoup de mal à situer les heures, les dates et j’en passe. Ca a pu durer cinq minutes comme cinq heures, j’en sais rien du tout. «Elle m’a emmenée chez Ana, à l’hôtel. Et elle est partie prévenir les autres groupes. J’ai plus de nouvelles non plus. » Tout le monde disparait, tout le monde meurt. «On a… on a fini par partir avant que New Eden nous attrape. On a brûlé l’hôtel et on est partis… mi-novembre ? Un truc du genre. La route ça a été un vrai cauchemar. » J’ai un frisson, repensant aux accidents, aux rôdeurs, aux gens qui ont essayé de nous tuer. «Il restait plus rien du motel. Ils ont tout brûlé, tout cassé. » J’sais pas si elle veut d’autres infos ou pas, si j’en ai dit assez. Alors je finis par tourner la tête vers elle, sans trop savoir quoi rajouter de plus de toute façon.
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Re: Carry on...
Mar 18 Jan 2022 - 16:14
Eden n’avait aucune idée de ce qui avait bien plus se passer. Évidemment, elle avait une vague idée. Après tout, un motel de prostituée face à une communauté religieuse, la purge semblait être la seule réponse imaginable. La mère de famille avait prêché un départ aussi en catastrophe aurait-il été, cela lui semblait être la seule solution possible. Poppy et Adriel n’avaient pas le luxe d’attendre que les filles du motel prennent une décision, Eden n’avait pas pu laisser ce suspens, surtout quand on connaissait désormais les conséquences.
« Forcément.. je ne sais pas. Je ne souhaite pas qu’il arrive quoique ce soit. Mais quand on est habitué à un autre rythme de vie, de survie, de tension de chaque instant, baisser la garde semble toujours être une erreur.» fit-elle. Est ce qu’il arriverait forcément quelque chose ? C’était presque souhaiter qu’une tempête s’abatte sur Sanctuary Point, Eden ne pouvait le concevoir de cette manière. Elle ne le voulait tout simplement pas. Aussi longtemps qu’elle pourrait rester ici, elle imaginait simplement que tout n’était pas beau et magnifique à longueur de journée, et qu’il était préférable de toujours relativiser pour ne jamais être surprise. Ses enfants méritaient la tranquillité de l’enfance, la naïveté des premières années et connaître une mère qui n’avait d’yeux que pour leur éducation et non pas leur simple survie. Elle soupire. « Poppy et Adriel méritent une enfance apaisée. C’est tout ce qui compte. »
Quand Mary-Abigail comment à parler, Eden l’écoute, attentivement. L’attaque s’était passée un ou deux jours après son départ. En parlant de timing … elle hoche la tête. La mère de famille ne pouvait que se féliciter d’avoir eu l’instinct de partir. L’injustice était qu’elle aurait du insister pour que tout le monde quitte le motel, que l’endroit était trop connu de tous pour qu’elles échappent un jour au fanatisme religieux. Les prostituées étaient toujours des sorcières, et les sorcières finissent toujours sur un bucher. « Oxana est morte ? » demande t-elle incrédule, alors que la bouilloire siffle dans la cuisine. Elle se lève rapidement, revenant avec deux tasses dont une qu’elle tendit à la jeune fille. La tasse fumante était un mélange de plantes qu’Eden avait trouvé dans les bois, camomille, tilleul et passiflore, un cocktail qui elle l’espérait, aiderait la jeune fille à trouver le sommeil. De son côté, elle n’avait mit que quelques feuilles de menthe. Elle se rassit. Toutes les filles avaient fini éparpillées au mieux, capturées ou tuées au pire. Une débâcle absolue, mais sur le principe Kaycee avait raison. Il était préférable qu’elles se séparent pour garder profil bas, qu’on les oublient.
« Kaycee a eu raison sur le principe de la séparation. Fuir Seattle était primordial, un groupe de femmes recherchées passent difficilement inaperçu. » Eden soupire, elle ne savait pas quoi lui dire. Que tout allait bien se passer ? Eden ne pouvait pas lui assurer cela. Qu’elle retrouverait sans problème sa soeur ? Ça non plus, elle ne pouvait pas lui assurer. « La route est longue… J’en sais quelque chose. Mais quitter Seattle pendant leur patrouille n’a pas été simple. Quoi qu’il en soit, je suis contente que tu sois en vie Mary-Abigail. » fit-elle simplement. Il n’y avait que si peu de choses à dire. La jeune adolescente devait désormais trouver ce qu’elle voulait faire pour la suite. Chercher sa soeur ? Chercher les filles ? Pour l’heure, Eden estimait qu’il était important qu’elle se repose. Trouver le sommeil ne pouvait pas être une mauvaise chose. « New Eden n’aurait pas laissé un bordel ouvert dans la ville. Le fanatisme religieux ne laisse pas vraiment la place à ce genre d’activités. » à vrai dire, peu de société accepte l’idée d'un Bordel. Les moeurs évoluent peut-être, mais l’opinion sur la petite vertu demeure.
« Qu’est ce que tu comptes faire pour la suite ? »
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- Eden P. St John
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Re: Carry on...
Lun 24 Jan 2022 - 10:39
Je fixe le feu qui continue de brûler quelques secondes sans rien dire, avant de souffler, songeuse. «Cet endroit est improbable. J’ai l’impression qu’il a été bien plus épargné que tout ce que j’ai pu voir jusqu’à présent. » Et, pendant une seconde, j’ai l’impression d’être bien plus vieille que je le suis réellement, sans trop arriver à savoir pourquoi. «Faut pas baisser ta garde ouais. Mais si les petits peuvent être heureux ici, ce serait cool. » Vrai qu’ils méritent une vraie enfance et cet endroit parait plutôt bien pour ça, même si je me sens complètement en décalage.
Et, à sa demande, je finis par lui raconter la fin du motel. C’est toujours aussi douloureux et j’ai toujours les mêmes images qui flottent devant les yeux. A sa question, je hausse une épaule. «Je crois oui. J’vois pas comment on peut survivre à ça de toute façon. Et… je préfère qu’elle soit morte directement. J’ose pas imaginer ce qu’ils lui auraient fait s’ils l’avaient attrapée. » Ca aurait été long, violent et j’en passe. Au moins là, c’est allé vite pour elle. J’ai un vague sourire de remerciement quand elle me tend la tasse et je l’attrape à deux mains, reniflant son contenu. «Ca sent bon. » Ca a un côté rassurant même. Et je continue mon histoire, avec difficulté, avant de soupirer silencieusement quand j’en ai enfin terminé.
J’pourrais même pas dire que ça me fait du bien, parce que c’est pas le cas. Et, à la remarque d’Eden sur le fait que Kaycee ait eu raison, je pique du nez, me sentant encore plus idiote de m’être sentie abandonnée, seule au monde, l’espace de quelques heures. Visiblement, c’est normal donc. Et j’me sens incapable de répondre quoi que ce soit. Je finis par souffler, à mi-voix. «On a réussi à s’en tirer, c’est pas le cas de tout le monde. J’imagine que je peux dire que j’ai de la chance. » Ou quelque chose du genre. Quand elle me dit qu’elle est contente que je sois en vie, je me contente de répondre, avec un sourire sans joie. «Et bah, ça fait au moins une personne comme ça. »
Est-ce que je suis contente d’être en vie ? Franchement là, de suite, pas vraiment. Ca reviendra peut-être plus tard. Ou pas. C’est pas comme si c’était important. «Y a quand même une différence entre fermer un bordel et tout faire péter. Comme s’ils avaient besoin de prouver quelque chose. Et à part que ce sont des connards qui ont peur des femmes, j’vois pas trop là. » Je fronce les sourcils à sa question et je garde le silence quelques secondes. «Survivre, ce sera déjà pas mal. » Un vague sourire et je me frotte le genou, songeuse. «J’pourrais pas rester ici. Pas tout le temps. C’est pas chez moi et j’suis pas sûre que j’arriverais à me sentir bien. » Probablement parce qu’une part de moi se dit que j’ai pas le droit d’avoir tout ça, de retrouver tout ce confort alors que les autres sont perdues. J’saurais pas dire. «Parait qu’il y a des trucs sympas à Olympia. J’pourrais me trouver une planque là-bas. » Je fronce le nez, plongée dans mes réflexions l’espace d’un instant.
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Re: Carry on...
Mar 25 Jan 2022 - 21:15
Oui, improbable, c’était certainement le terme. L’endroit semblait avoir été épargné de temps de choses, le fait d’être isolé avait forcément aidé. La fin du monde était bel et bien tombé à Olympia et ses alentours, personne n’avait été « réellement » épargné par les pertes de proches, les familles déchirées, et bien d’autres choses qui était devenu presque un quotidien. Encore aujourd’hui, les survivants disparaissaient d’un accident fortuit, d’une attaque d’infectés, d’un assassinat dûment exécuté par un autre survivant. Seulement Sanctuary Point avait une forme de sérénité que beaucoup de personnes aujourd’hui auraient bien du mal à apprécier. Loin de l’ingratitude, il s’agissait bien souvent d’une incapacité désormais à trouver le bien là où se trouvait. Après plusieurs années dans l’incertitude des lendemains, un lit et un repas chaud apparaissait bien souvent comme un piège cruel.
Eden boit une gorgée de son infusion. Mary-Abigail avait vécu bien assez de choses pour toute une vie en l’espace de quelques semaines. Eden aurait certainement préféré que l’adolescente soit préservée des épreuves passées et à venir. On ne sortait jamais indemne d’une pareille épreuve.« Oui, j’imagine que c’est mieux de voir les choses comme ça. » fit-elle. Oxana aurait certainement été prise en exemple, humiliée, torturée pour ne pas dire les pires. L’ukrainienne avait déjà eu beaucoup, trop, a subir, il n’était pas nécessaire de rajouter une flèche à la cible. Eden hoche la tête, si elle était partie sans souffrir, peut-être que l’on pouvait se consoler de cette manière, aussi injuste paraissait la mort de la grande blonde.
« Ça ne veut pas dire que la séparation est facile. Ce qui est nécessaire est souvent difficile. » explique Eden en voyant la jeune fille piquer du nez à la mention du fait que Kaycee avait eu raison de au sujet d’exploser le groupe pour mieux fuir. New Eden n’aurait pas pu suivre tout le monde, c’était le jeu, et il y avait souvent des perdants. Le regard d’Eden se pose sur Mary-Abigail, l’adolescente était désabusée, cynique et qui pourrait lui en vouloir ?
Eden avait prévenue Oxana, et lui avait même conseillé de fuir. New Eden et sa doctrine étaient bien trop cruels et avaient bien trop de convaincus, un peu trop capable de se convertir par besoin de pouvoir. La religion avait souvent bon dos dans ces cas de figure. Eden ne voyait pas bien où se trouvait la fameuse charité chrétienne dans l’idéologie de New Eden. Mais la mère de famille n’était pas là pour avoir un débat ou justifier l’injustifiable. Elle doutait fortement que comprendre le comment du pourquoi aiderait l’adolescente qu’elle avait en face d’elle. « Fanatisme religieux et prostitution n’ont jamais fait très bon ménage. De ce que j’ai cru comprendre, ils préfèrent les femmes dociles et soumises. Une mère ne peut pas être libre, une putain ne peut pas être mère. » explique t-elle. « Évidemment qu’ils avaient besoin de prouver quelque chose. Brûler une sorcière a beaucoup plus de poids. » Ainsi le feu purge, et la trace considérée comme impure n’existe plus, et n’avait d’ailleurs pas à exister. Voilà comment New Eden avait du voir les choses au sujet du bordel. Ce n’était pas la peur qui alimentait, c’était le dégout.
« Quand on a peur de quelque chose, on l’évite, on ne veut pas le voir, ça n’existe pas. Ce n’est pas la peur qui les alimente, c’est bien pire, Mary : c’est le dégout. » Eden se masse le front. La peur entraînait bien plus souvent des accidents, le dégout, le dégout c’était bien plus cruel et volontaire.
« Dans tous les cas, sache que tu peux rester aussi longtemps que tu veux. Les enfants sont toujours heureux de pouvoir passer du temps avec toi. Je ne te forcerais pas à rester, et Matias non plus. »
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- Eden P. St John
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Re: Carry on...
Mer 2 Fév 2022 - 9:21
J’suis bien consciente que je pourrais pas rester toute ma vie ici. Parce que déjà, j’ai pas l’impression d’avoir le droit de me poser quelque part aussi longtemps. Mais ça, j’suis sûre qu’un psy dirait que c’est lié à mes récents traumatismes et blablabla. En vrai, c’est surtout que je continue de croire, même si tout me crie le contraire, qu’on aura quand même notre maison à nous avec Johanna un jour. Avec le porche et la balancelle où on pourra s’installer toutes les deux pour boire de la citronnade. Notre endroit rien qu’à nous, que personne pourra jamais nous voler.
Le pire ? C’est que maintenant, j’arrive à bien imaginer l’endroit. Parce qu’il peut ressembler qu’à ces maisons qui nous entourent. Un endroit en paix, loin de tout et de tout le mal qu’on a pu faire à ma sœur.
… et qu’on continue probablement de lui faire.
A cette pensée, mes yeux s’embuent de nouveau et je prends une grande inspiration, me focalisant sur ma tasse alors que je finis de parler d’Oxana. Ca aussi, ça fait mal. Et je souffle, sans trop savoir pourquoi. «Tu crois qu’un jour ça fera moins mal de penser à tout ça ? » Mais au moins, là où elle est, elle souffre plus. J’espère en tout cas. Elle a tellement fait pour nous, pour qu’on soit bien, que j’ai pas envie de croire qu’elle doive payer pour quoi que ce soit.
Je continue de regarder partout sauf en direction d’Eden, qui se fait la voix de la raison. Parce que ouais, j’étais pas prête à me retrouver toute seule au milieu de la nuit. Mais quelque part, c’est pas plus mal. Je sais maintenant que je dois compter que sur moi-même pour me protéger. Que même si des gens sont là, je peux toujours me retrouver seule, à devoir me débrouiller. «C’est pas comme si on avait vraiment eu le choix de toute façon. » Rester ensemble nous aurait peut-être tuées pour ce que j’en sais. Mais au final, je sais pas si le résultat est pire ou pas. J’ai un soupir et je laisse filer un silence alors qu’Eden finit par reprendre la parole.
Et je fronce les sourcils, écoutant chacun des mots qu’elle prononce et sentant une vague de colère, de haine même, face à ces types qui se croient tout permis. « Je t’en foutrais du dégoût. » Je serre les dents et je continue, dans un murmure. «Ils avaient pas le droit de faire ça. Ils ont pas le droit de nous obliger à vivre comme ils veulent eux. On a le droit d’être qui on veut, c’est pas eux qui vont nous apprendre la vie. » Rien que pour ça, je dois survivre, juste pour leur prouver qu’ils peuvent pas toutes nous brûler parce qu’on leur plait pas.
Je finis par relever la tête vers Eden quand elle me dit que je peux rester aussi longtemps que je veux ici. Et j’arrive à esquisser un sourire, surtout quand elle parle des petits. «… ils m’ont manqué. C’est… c’est bête hein, mais j’avais l’impression d’être une grande sœur un peu quand ils étaient là. » Et l’affection que j’ai pour eux, j’ai eu beau essayer de la cacher à mon arrivée, j’ai pas réussi quand ils se sont blottis contre moi pour dormir. «Je me dis que je peux au moins rester jusqu’à la fin de l’hiver. C’est pas la peine que j’aille mourir de froid et de faim j’sais pas où. Et je peux ptet me rendre utile ici. » En attendant de savoir où aller.
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