- C’est normal. Tu vas t’y habituer.

Les armes étaient toujours plus lourdes qu’on le pensait la première fois qu’on les manipulait. La musicienne trouvait que c’était comme une allégorie de la responsabilité qui allait de paire avec le fait d’en avoir une. Et généralement, plus l’engin était dangereux, plus il était lourd. Selene ne dit rien, elle observa sa cadette faire ses essais et comprendre d’elle-même qu’elle ferait mieux de tenir le pistolet à deux mains.

- C’est mieux comme ça. Tu seras plus stable et quand tu es sur le terrain, tu n’es pas là pour avoir du style et te positionner comme dans les films : t’es là pour toucher ta cible.

Et dans la réalité, c’était infiniment plus dur que ce que le cinéma faisait croire. Déjà, toucher une cible fixe à dix ou quinze mètres pouvait être délicat, quand on avait le temps de se préparer et de viser. Alors toucher une tête de rôdeur dans le feu de l’action, quand on n’avait pas le luxe de réfléchir ? C’était complètement autre chose.

- Au début, tu vas apprendre les choses de façon très « scolaire ». Tu vas prendre ton temps, pour bien faire et avoir les bons gestes ; ça, c’est ce que je peux essayer de te transmettre, Selene plissa brièvement les lèvres, Alicia était encore jeune, et pourtant, elle était déjà plus vieille que quand elle-même avait dû apprendre, ensuite, tu verras que c’est ton instinct qui devra prendre le relais : quand tu seras dehors, t’auras pas le temps de réciter tes leçons pour les mettre en pratique.

Mais ça… elle devra le développer seule. La pianiste prit une inspiration et s’approcha : elle allait guider la jeune femme, lui indiquant ponctuellement par quelques tapotements de l’index les endroits dont elle parlait.

- Place-toi bien droite. Détends-toi. Le bras qui tient le pistolet est tendu, l’autre vient le soutenir en dessous. Avance un peu ce pied, écarte tes jambes de la largeur de tes épaules, patiemment, elle attendit qu’Alicia s’applique pour continuer, ensuite, cherche ton œil directeur et ferme l’autre. Tu dois aligner dans ton regard ces deux marqueurs, Selene désigna la hausse à la base du canon, puis le guidon à l’extrémité de la glissière, quand tu vises, c’est ta cible que tu dois voir floue et ton arme qui doit être net, pas l’inverse. Quand tu vas tirer, tu retiens ta respiration, pour ne pas bouger, elle s’écarta, laissant de l’espace à son élève : vas-y, reprends de zéro pour travailler ta position.