Il aimerait la fixer, baisse pourtant les yeux sur son thé. Mieux vaut le boire sereinement, au moins en apparence, que trop parler. La gorgée pourtant ne passe pas, aux révélations de ce qu’Anjali a entendu. La mémoire de Neela a encore fait n’importe quoi. Luther devait nettoyer une expectoration inattendue de sang, Ray avait eu un accident ridicule. Personne n’était en train de se rhabiller, son épouse a inventé des souvenirs pour combler le vide.

« As-tu déjà connue ta cousine capable d’une discussion courtoise ? » Spécifiquement quand elle est énervée, même en ayant tort sur les faits ? « Si c’est le cas, ce ne l’est plus aujourd’hui. » Et dans tout le détachement qu’il essaye d’avoir dans cette foutue conversation, Min-Oh ne peut s’empêcher d’avoir un ton rageux qu’il pourtant se refusait de laisser remonter. Sa femme est malade. Sa femme n’a pas toutes ses capacités cérébrales. Il le sait, il se raisonne qu’elle ne peut rien y changer. Il tente, vraiment, d’être patient à son sujet. Mais ça ? En prime du reste ? Il a un certain mal à l’avaler.

« Je pourrais lui dire ce que je veux, soit elle ne croira pas, soit elle décidera que ce n’est pas suffisant. Pardonne-moi mais mon énergie est mieux placée sur des choses d’importance que je peux effectivement influencer. » Et non parler dans le vide à quelqu’un qui ne désire pas écouter. C’est tout ce qu’il a à dire, sur son refus de communication avec la seule personne dont il espérait vraiment qu’elle sache à minima tenir sa langue.

Un soupir sec sort par son nez. Il se rend compte de son impolitesse face à la messagère qui n’a rien, réellement, demandé. Son regard se relève sur elle, aussi égal qu’habituel. « Il n’y a pas matière à t’excuser de me rapporter de simples faits. Je te remercie d’après pris le temps de le faire. » Même s’il est loin d’être calme, son timbre est sous contrôle à nouveau. « Mon embarras n’est pas de ton fait ou de ta volonté, tu n’as strictement à te reprocher. » Tous les reproches sont à adresser à Neela. Cette foutue femme-enfant incapable de se contrôler. Ce n’est pourtant pas faute d’y investir tout son temps et toutes ses techniques. Elle est incapable de se raisonner.

« Je suppose que je vais devoir avoir une conversation avec mon épouse. » Qu’il refuse de nommer sur sa suivante gorgée de thé. Il n’est pas certain d’en avoir la moindre envie. Comment est-il censé faire confiance à une femme plus portée sur les rumeurs à son sujet que sur la vérité ? Elle n’a, après tout, eu que quelques centaines d’occasions de faire lumière elle-même sur le sujet. Comme s’il n’avait pas assez de problème à régler pour qu’elle lui en créé. Si elle s’ennuie elle n’a qu’à se trouver un hobbie, reprendre ses activités. Mais ça, il ne peut imaginer l’accepter.