Mais j'ai fini toutes mes tâches ! Peste la petite fille, qui croise les bras, assise sur son lit. Hope quant à elle termine de se vêtir chaudement tout en restant à l'aise, sa tête secouée de gauche à droite. On vient d'arriver Violet, il y a toujours quelque chose à faire. Surtout qu'Alex ne manquait jamais d'imagination quand il s'agit de trouver des travaux. Mais face à la mine boudeuse de son enfant, l'ancienne actrice pousse un long soupire las. Je veux que tu ailles voir avec Alex, et si vraiment y a rien à faire, tu peux décorer ta chambre. Du coin de l'œil, elle voit Violet retenir un large sourire heureux, essayant de contenir sa joie. Oui, d'accord, promis.

Hope dépose alors un baiser sur le front de sa fille, avant de prendre la direction de l'extérieur après avoir récupérée deux morceaux de pain - avec l'hiver qui s'annonce rude et tout ce qu'ils avaient perdu, mieux valait se rationner. Salut! Tiens, je t'ai pas vue au repas du matin. Elle fait un sourire radieux à Ulysse, qu'elle rejoint dehors, en lui donnant un morceau de pain. Je.. Tu as quelque chose de prévu aujourd'hui ? Je viens te donner un coup de main. Arrivé depuis peu, c'était le moyen qu'elle avait trouvée pour peut être mieux le connaître, le cerner.

Le nouveau lieu de vie semblait être très prometteur. Le trappeur avait beau être des plus méfiants, et avoir cette étrange sensation depuis qu’ils étaient ici, il ne trouvait, pour l’instant, aucun défaut à cette demeure. Il l’appréciait, d’ailleurs. Au cœur de la nature, tout proche d’un étang, facile à défendre… L’instinct de survie et de protection du trappeur était, pour l’instant, aux indicateurs les plus calmes. Aussi s’était-il enquit de s’investir.

Aujourd’hui, Ulysse devait aller chasser. Le rationnement des survivants arrivait à un certain point qui, s’il n’était point qualifiable de rupture, était toutefois suffisamment inquiétant pour que les initiatives personnes puissent être faisables et envisageables. Et puis, qui mieux qu’Ulysse pouvait entreprendre une chasse et en revenir victorieux ? Pister, traquer, tuer l’animal et le vider et le préparer pour que tout le monde puisse en profiter, seraient sans doute quelques compétences appréciées par le groupe, surtout en ce moment.

N'ayant pas mangé grand-chose au matin, comme tout le monde, le trappeur avait récupéré ses armes, et s’était habillé chaudement. Son fusil de chasse en bandoulière, son couteau à la ceinture et son pistolet à la hanche, le trappeur était prêt à prendre le chemin des forêts. Il savait qu’à cette période de l’année, il aurait plus de chances de croiser du petit gibier que de grands bêtes… Néanmoins, cela ferait de la viande pour tout le monde, ou presque.

La voix de Hope surprit le trappeur qui était d’ores-et-déjà dans toute sa réflexion. Se retournant, il voit une main tendue avec un bout de pain qu’il agrippe rapidement. « Bonjour Hope ! Merci ! Je n’ai effectivement pas manger aujourd’hui. » Dit-il, avant de reprendre. « Eh bien… Je pars chasser. Nous manquons de nourriture, et nous sommes en plein milieu de la nature… Ce serait dommage de ne pas saisir ces opportunités. Ça t’intéresse ? »

Hope observe son vis à vis de haut en bas sans vraiment de gêne. Elle était comme ça, très, trop peut-être, observatrice sans ressentir le moindre embarras. Du moins, tout dépendait du moment. Elle n'était pas méchante, ne jugeait pas les autres, loin de là ; l'ancienne actrice aimait surtout observer. Sans parler que là, devant elle, il y avait un beau spécimen. Si elle ne pouvait pas le toucher avec les mains alors se faire plaisir avec les yeux. Elle restait un être humain, mais n'est pas pour autant une nymphomane prête à sauter sur tout ce qui bouge.

Elle lui offrir un sourire sympathique lorsqu'il l'a remercie, et continu sur sa lancée pour lui annoncer ce qu'il comptait faire. Hope l'écoute attentivement, se doutait bien qu'avec son attirail de chasse, il ne comptait pas pêcher. Mais très vite, elle se fige : Je-qui.. Moi ? Elle se pointe du doigt, surprise par la proposition d'Ulysse avant de se souvenir qu'il était dans le groupe depuis peu. Et que, au final, il ne connaissait pas très bien la maladresse de la trentenaire.

Tu sais à qui tu demandes ça ? Ici on me surnomme madame deux mains et deux pieds gauches ! Elle en vient même à agiter tristement sa prothèse, essayant de sourire. Elle enchaîne malgré tout, haussant machinalement les épaules : Bon après, pourquoi pas après tout ! Je penses pas avoir déjà chassé.. A la limite pêchée mais.. Tout ça là.. Elle désigne les affaires de l'homme, nécessaire à ce qu'il compte faire aujourd'hui. Sous sa supervision d'ailleurs elle s'équipe, pas franchement à l'aise. Mais il y a une chose à laquelle elle n'avait pas pensé de suite : partir en forêt.

Ce n'est qu'une fois prête que l'ancienne actrice s'en rend bien compte. Mmh, on va s'éloigner de beaucoup ? Elle tente de d'atténuer au minimum le timbre inquiet dans sa voix, fixant intensément le bois qu'ils vont traverser. Hope se pince les lèvres, déposant ensuite ses yeux dépareillés sur Ulysse. Elle ne voulait pas être un poids. Je-enfin, on reste ensemble, on va pas se séparer ?

« Eh bien… Oui ? Toi ? » Dit le trappeur, qui ne comprit pas tout de suite le pourquoi de cette question atypique… Lorsqu’enfin les explications arrivent, le trappeur comprend. Ainsi donc, la jeune femme semble être « miss catastrophe » du camp, et, parmi les Expandables, apparemment la moins capable de faire sa part dans tout ce qui à-trait à la survie. Cela le fit plutôt sourire, à défaut de rire sincèrement. Bien qu’il ait passé sa vie seul, il n’appréciait point rire de la souffrance, ou de la misère des autres.

« Hum… Et bien, il est toujours temps d’apprendre et… D’obtenir enfin une main droite, et un pied droit, tu ne crois pas ? » Demandait-il, un sourire bienveillant aux lèvres, alors qu’il replaça la bandoulière de son fusil sur son épaule. « Oh, la chasse, c’est plutôt facile. Je veux dire, quand le territoire regorge de gibier. Quand ce n’est pas le cas, il faut alors pister son dîner et… Enfin… Là, c’est une autre paire de manche. »

D’aucun pourrait dire que le grand et fier trappeur ressemblait à un enfant, à l’instant. S’adapter socialement ne lui était point inné… Ni aisé. Aussi, tenter de créer un lien, avec Hope, ressemblait davantage à l’attitude d’un adolescent tentant de discuter avec une femme pour la première fois.

« Heum… Eh bien, quelques kilomètres ? Notre campement fait du bien la journée, ce qui signifie que le gros gibier fuit l’endroit le jour… En plus, ce sont des animaux souvent nocturnes… Il nous faudra nous éloigner d’au moins deux à trois kilomètres pour tirer une biche ou un chevreuil. » Expliquait-il, avant de s’arrêter. Il commençait à déblatérer beaucoup d’informations, surtout pour cacher son inexpérience en matière de relations sociales. « Ah sûrement pas ! Si tu ne sais pas chasser, tu ferais mieux de rester avec moi. Nous aurons plus de chance tous les deux. Et puis, si nous trouvons un coin suffisamment en hauteur, je pourrais t’apprendre à tirer ton premier gibier ? »

Au moins, elle pouvait compter sur les petites pointes d'humour de son vis à vis pour se détendre un peu, malgré qu'ils allaient devoir s'éloigner du camp et s'enfoncer dans la forêt. J'espère que je vais pas être un poids pour toi ! Si tu vois que j'te dérange trop, faut pas hésiter à me le dire ! Surtout à elle, qui préfère largement une vérité qui dérange. Et puis, il en faut pour réussir à lui faire de la peine. Surtout qu'elle sait voir ses fautes en face.

Elle écoute attentivement les paroles d'Ulysse pendant qu'elle marche derrière lui, ne cachant pas un sourire amusé de le voir si bavard. Ce n'est pas étonnant, vue leur sujet de conversation. C'était presque mignon à voir. Un vrai enfant passionné. D'accord, tant mieux alors, ça me rassure.. Elle n'en dit pas plus. Peut-être plus tard, quand ils apprendront à mieux se connaître. Oh, pour de vrai ? L'ancienne actrice en à presque des étoiles plein les yeux. Olala ! Si j'y arrive, je vais pouvoir craner devant Connor. Blague la blonde, continuant sa route.

Au bout de plusieurs longues minutes de marche, ils commençait à s'enfoncer de plus en plus dans le bois. Hope se râcle la gorge, accélère le pas pour ne pas être trop éloignée d'Ulysse, incapable de détacher son regard de l'environnement. Du coup.. tu survivais comme ça ? Murmure-t-elle, ne sachant pas vraiment quoi dire pour amorcer la conversation. Surtout que ça lui permettait de se détendre.

« Un poids ? A moins que tu fasses autant de bruit qu’une horde, tout devrait bien se passer. » Lui dit-il, offrant un sourire chaleureux et bienveillant à celle qui, de toute évidence, était à deux doigts de paniquer.

Alors que l’idée de potentiellement tirer son premier gibier mit Hope en appétit, et en joie, il était temps de débuter la séance de chasse. Menant la danse, Ulysse regarda le sol pendant les premiers mètres de l’avancée. Son but : analyser le sol. La météo automnale rendait le Nord des USA humides, favorisant la pousse des mousses sur les arbres morts, les racines apparentes, les rocs sortant de terre. La chute des feuilles accompagnait la chute des aiguilles et des branchages des épineux et des conifères, tels que les sapins. Cela créant un tapis d’aiguilles, de mousses et de feuilles, atténuant une majorité des bruits de marche. Un avantage tactique indéniable…

L’avancée était plutôt facile pour le trappeur. S’assurant que Hope suivait, il pouvait compter sur une marche d’environs 3 kilomètres par heure, quelque chose de satisfaisant donc. Les récentes pluies permirent à la terre qui n’était pas recouverte de mousse et de débris végétaux, de mémoriser les empreintes de pas de plusieurs animaux, petits et gros. « Oui, c’était ma vie depuis des années. » Lui dit-il, en s’agenouillant, posant son index et son majeur gauche au milieu de l’empreinte de sabots, mesurant la profondeur et la taille, tentant de deviner les mensuration de l’animal qu’il s’apprêtait à traquer. « J’avais une jolie cabane, faite moi-même. Un saloir à viande, un fumoir à viande et, une réserve de congélation. » Continuait-il, regardant la terre humide qui s’était accrochée sur ses doigts, et dévisageant l’environnement autour de lui.

Il s’approcha alors d’une branche de conifères qui se terminait non loin de la petite sente utilisée par le duo. Sa main droite, propre, vint retirer une petite touffe de poils blancs et roux. « L’hiver, lorsque la chasse était difficile, je me rendais jusqu’au Canada en motoneige, pour ramener d’immenses blocs de glaces. Ils me permettaient de surgeler de la viande toute l’année… » Il lui montre l’empreinte de pas et la touffe de poils. « Un cerf. Adulte… Au moins 150 kilos. » Dit-il, déduisant cela d’après ses observations. « Avec un tel animal, nous aurons de la viande pour tout le monde, sur au moins deux voir trois semaines. Un mois, si nous continuons à nous rationner. Avec les bois, nous pourrons faire des manches de couteaux, ou les vendre à un autre groupe, pour de l’artisanat. Et la peau d’un cerf peut être tannée, et servir de cuir… »

Emporté dans la chasse, et dans la possibilité de ramener quelque chose de véritablement significatif, le trappeur reprit la route pour encore un kilomètre. Là, il trouva une position avantageuse : sous le couvert des arbres, à proximité d’un court d’eau, et face à un terrain ouvert. « Là. » Dit-il simplement.

A ses pieds, il déposa ses armes et son sac, préparant une position de tir à couvert. Un plaid fut posé, de sorte que les deux survivants, allongés, ne ressentent la morsure du froid ni l’humidité du sol. S’allongeant, le trappeur dégaina son fusil qu’il positionna de manière à pouvoir couvrir tout le versant face à eux. La lunette fut réglée… Il ne manquait plus que l’attente.

« Ce point est parfait. » Dit-il, chuchotant, car Hope était tout près d’elle. « Les animaux ont besoin de boire, surtout les grands herbivores. Un cerf est passé non loin, il y’a peu. Il doit être encore dans les parages, et il viendra se désaltérer tôt ou tard. Attendons le ici. » Lui expliquait-il. « L’attente, c’est la majorité du temps que passe un chasseur pour trouver son repas. Le mieux est d’avoir une position en hauteur, et d’être à proximité d’un point d’eau. » Dit-il encore, satisfait à l’idée d’apprendre à la jeune femme, comment s’adapter et comment réaliser une chasse efficace. « Les cerfs n’hibernent pas… Ils s’engraissent pour faire face à l’hiver. Boire est très important pour eux. Nous ne devrions pas attendre très longtemps… Peut-être… » Il réfléchit, regardant les cieux, sa boussole, et soufflant longuement. « Deux ou trois heures. »

Le cadre était reposant, en effet. L'odeur de la mousse, de l'humidité qui donnait cet impression de nettoyer ses poumons en profondeur. Le silence, dérangé par le seul chant des oiseaux. Tout était parfait. Ou presque, pour la blonde. Elle avançant à tâtons, collant le mieux qu'elle le pouvait Ulysse sans pour autant l'empêcher de faire ce qu'il savait faire le mieux. Elle fixe sa capuche sur le haut de son crane, se fait silencieuse, et se contente de profiter au mieux de la balade.

Lorsqu'il commence à répondre à sa question, la blonde se rapproche un peu plus pour l'écouter très attentivement, intéressée pour connaître par quoi il était passé. Comment un homme comme lui a pu survivre dans une situation pareille. Elle se doutait bien qu'Ulysse n'a pas dû galérer plus que ça, et elle en a la confirmation quelques secondes plus tard lorsqu'il lui raconte comment il tuait ses journées. Elle se demande un court instant si elle aurait réussi à tenir, psychologiquement, à être coupée de toutes relations. Pouvoir discuter, boire à plusieurs.. Comment fait-il aussi pour tenir sans relation charnelle ? Ca la dépasse. Par-dessus son épaule, elle observe ce qu'il était en train de faire, ne comprenant pas vraiment ce qu'il faisait avec ses doigts et l'emprunte. Ca va vraiment lui donner des indices précis sur l'animal ? Tu avais une moto neige ?

Elle écarquille les yeux, stupéfaite, avant de reprendre sur un ton plus faible. Tu arrives à comprendre tout ça juste avec ces deux indices ? Lui demandant la permission du regard, elle saisit entre ses doigts la touffe de de poils qui appartient à l'animal, pour regarder de plus près. Vraiment, elle ne comprenait pas ; pour elle, ça pouvait appartenir à n'importe quel animal. La présence d'Ulysse est vraiment une bénédiction pour le groupe. Les enfants seront heureux d'apprendre à faire des couteaux. Sans parler de la viande.. faire un repas copieux ne leur fera pas de mal. Quant aux adultes, ils réussiront à se rationner.

Ils se remettent en route jusqu'à arriver face à un paysage plus que magnifique. Durant de courtes secondes, l'ancienne actrice reste muette, immobile face à tant de beauté. Avec l'horreur qu'ils subissent au quotidien, elle en avait oublié la beauté du monde. S'installant sans attendre sur le plaid récupéré par Ulysse, elle ne se gêne pas pour le coller afin d'obtenir un peu de chaleur de sa part, mais aussi pour se rapprocher du fusil qu'il avait préparé, au cas où. Attendre ne me dérange pas. Murmure la jeune femme, qui croise les bras pour déposer son menton dessus. Et puis c'est pas comme si j'étais accompagné par quelqu'un d'ennuyeux. Elle lui glisse un regard, petit rictus dans le coin de ses lèvres, avant de se concentrer de nouveau sur le paysage devant eux.

Après quelques minutes de flottement, la trentenaire reprends. Et tu.. tu as survécu seul pendant tout ce temps ? Pas de femme ? Pas d'enfant ? .. Pas d'amis ?