Je lui rends un doux sourire, secouant la tête à ses paroles. « Tu ne t’imposes pas du tout. C’est toujours agréable d’avoir de la visite, encore plus quand c’est une amie comme toi. » Sa douceur et sa gentillesse sont toujours les bienvenues, surtout en ces périodes troublées. « Alors tu viens quand tu veux, d’accord ? »

Evidemment, c’est un sourire fier qui se dessine sur mes lèvres quand elle s’extasie sur le nom de mon fils. Je suis heureuse de voir que tout le monde trouve qu’il lui va bien, sans oublier néanmoins que ça peut aussi juste être pour me faire plaisir. Peu importe, dans le fond, ça fonctionne. Et ça ne mange pas de pain. C’est sans la moindre inquiétude que je lui tends Noah pour qu’elle le prenne dans ses bras, les fixant avec tendresse quelques instants, avant d’écouter le reste de ses propos.

Et j’ai un bref soupir à ce qu’elle me raconte. « Papa aussi a été très marqué par ce qui s’est passé à Glenwood. C’est là que je me dis que nous avons quand même de la chance ici, que nous sommes bien protégées. » Le reste m’arrache une grimace. « Je me pose la même question. Si les gens veulent du changement, ce n’est pas en essayant de détruire ou de blesser les autres qu’on les écoutera. Ils m’ont terrorisée en septembre et… j’ai eu peur qu’ils fassent du mal au bébé. » J’ai encore un frisson rien que d’y repenser.

J’attrape la tasse qu’elle me tend, humant la tisane avec une inspiration gourmande. « Oh, ça sent vraiment très bon Nell ! C’est parfait. » Et, pendant une seconde, j’ai l’impression de me retrouver avec maman, il y a des années de ça. La bienveillance et la douceur de la brune y sont bien évidemment pour beaucoup, mais ça me met les larmes aux yeux sous le coup de l’émotion. Il se passe trop de choses et ce cocon est presque inespéré.

Oh que ça faisait chaud au cœur de la trentenaire d’entendre tout ça. C’était bien sûr plus que réciproque, mais Nell n’avait pas voulu supposer des choses quant à sa jeune amie.

- D’accord ma chérie. C’est pareil pour toi de toute façon.

Ce serait trop bien de pouvoir passer plus de temps avec Lynn, sa famille et son petit bout de chou chéri. Charlie aurait un ami de plus ! Et ce serait trop beau de les voir tous les deux ensemble. Berçant toujours le petit Noah, la fleuriste écoutait sa jeune amie tenant des propos similaires aux siens.

- Je suis désolée pour ton papa. Vraiment, toutes ces guerres… je me demande si elles sont tant nécessaires. Je veux dire… enfin… Pour nous protégez oui, mais… Nell soupirait à s’en fendre l’âme. J’aimerais tellement que les violences cessent. Il doit y avoir un moyen de vivre en paix. Il doit y en avoir un… concernant les rebelles et bien… J’ai peur moi aussi. Tellement peur qu’il arrive quelque chose à Charlie ou à Steve. Il y a trop de dommages collatéraux. Et trop peu de changement par la violence…

La petite brunette sourit tendrement lorsque son invitée dit que le choix de la tisane est parfait. Ça faisait bien plaisir à Nell de l’entendre, mais elle remarquait aussi rapidement les yeux remplis d’eau de la jeune Lynn.

- Oh ma chérie… Elle se rapprochait alors pour passer son bras libre autour des épaules de la blonde, la serrant fort contre elle. On vit dans un monde compliqué hein ? Et en plus il se passe plein de choses inquiétantes en ce moment. Puis tu as Noah… C’est normal d’être émotive, d’accord ? Ne t’en fais pas en tout cas, je pleure tout le temps moi, donc il y a pire que toi. Plaisantait Nell, déjà avec quelques larmes dans les yeux.

Elle en riait bien évidemment, mais ça la touchait toujours de voir la peine des autres.

Une fois de plus, je me rends compte du bien que ça me fait de discuter avec Nell et de cette bulle de bien-être qu’elle arrive à créer autour d’elle. La voir sourire, l’entendre rire réchauffe le cœur et je me sens terriblement bien. Elle me fait beaucoup penser à maman à sa façon bienveillante de veiller sur les gens.

Au reste, j’ai un hochement de tête, la mine songeuse. « On aimerait juste le meilleur pour nos proches, ceux qu’on aime. Je sais que ce qu’ils font est important, mais j’ai peur pour eux. Tout le temps. » Encore plus avec tout ce que papa a pu m’apprendre. Mais je sais que je dois garder la tête haute et faire au mieux. « Tout ira pour le mieux. J’ai envie de croire que Dieu continue de veiller sur nous. Après tout, c’est grâce à lui si nous sommes là toutes les deux non ? » Peut-être que nous pourrions l’être dans de meilleures conditions, mais je sais surtout que ça pourrait être pire. Alors, autant apprécier le moment présent.

Forcément, sa présence et sa façon de faire font remonter bon nombre d’émotions. Et je lui rends son étreinte sans même y réfléchir, inspirant longuement alors que j’essaie de sécher les larmes naissantes. « Oui, c’est… difficile. » Pour autant, elle arrive à me faire rire avec ses quelques mots rassurants. « D’accord. C’est juste que… j’ai envie que tout se passe bien pour lui. Pour Charlie. Pour tous ces petits miracles. » Après tout, c’est ce qui compte le plus non ?

Finalement, je reprends ma tasse et la discussion repart de plus belle. Entre rire et émotions, entre anecdotes de bébé et tout simplement de vie ici, je repars de là le cœur gonflé d’amour et de bien-être. Sans savoir que c’est la dernière fois que j’aurais l’occasion de passer du temps avec Nell. Sans savoir que tout notre monde sera chamboulé et que, sans elle, il n’aura plus jamais la même saveur.