Elena eut un rictus compatissant, n’ayant aucun mal à imaginer les derniers instants d’Aamir tels que le pâtissier les décrivaient. La surprise. La peur aussi sans doute. C’était injuste pour l’indien autant que pour Evan qui n’avait rien demandé. Un drame que rien ne pourrait jamais vraiment effacer, avec lequel il devrait vivre pour le restant de ses jours. Ces grands yeux vides le poursuivraient inlassablement…

« Ce n’est pas la même chose, c’est vrai. Tuer ne devrait jamais être un acte anodin de toute façon. Certains disent qu’on finit par s’y habituer, mais je suis contente que ce ne soit pas le cas en ce qui me concerne. » confia la brune, marquée indélébilement par chacune de ses victimes. Certaines plus que d’autres… « Tu ne peux plus défaire ce qui a été fait. Si ne l’avais pas tué, ce serait peut-être Aamir qui serait hanté par ta mort à l’heure actuelle. » L’adrénaline, la peur, la menace des pirates… Thaïs la première avait pensé faire ce qu’elle estimait le meilleur pour les siens…. « Et crois-moi, je préfère que ce soit toi, assis dans ce canapé avec des regrets. Je n’ai pas le moindre remord à ce sujet. » assura fermement la grecque. Les Fuckers n’avaient rien demandé à personne, ils se contentaient de vivre leur vie. Leurs alliés avaient leurs raisons, mais ils étaient responsables de leurs choix. Ils avaient attaqué, ils en payaient le prix aujourd’hui.

« Ne t’excuse pas. C’est mon rôle de vous rassurer et de tout faire pour que vous alliez bien. J’étais mère avant d’avoir Keith d’une certaine manière… » sourit-elle en accrochant tendrement le regard du brun. Ils étaient tous des extensions d’elle-même. Sa famille. Son sang. « Je vais aussi bien que la situation le permet. » répondit-elle dans un souffle. Les images saccadées de Valérian brandissant son arme dans sa direction lui martelaient violemment l’esprit, mais elle se força à les faire taire. Elle refusait de craquer pour le moment. « On a pris la décision de finir ce que nous avions commencé ici… Personne n’est obligé de venir, mais je ne les laisserai pas s’en sortir après ce qu’ils nous ont fait. » informa Elena, le regard obscurci par la colère. « Il est temps de les arrêter, ils ont fait souffrir suffisamment de personnes. » Elle songeait aux otages, à Valérian, et à tous les autres.

Je me retiens de poser la question. De demander si ce n'était pas plus mal, finalement. qu'il soit présent et que ce soit moi qui ne soit plus là. Mais je suppose que ce n'est pas le moment. Et je crois bien qu'Elena est contente de me voir en vie contrairement à lui. Mais je suis rassuré de voir qu'Elena ne m'en veut pas. Que ma présence ici n'est pas minuté comme je le pensais au départ. Pour autant, je me sens aussi coupable de mes propres états d'âmes parce que j'en oublie ceux du groupe. Les morts autour, les difficultés. Et c'est pour cette raison que je demande à Elena comme elle se sent.

- Oui mais on devrait pouvoir t'épauler tout autant. Mais en effet, je me doute que ce n'est pas plus facile pour toi.

Trop occupé avec mes propres adversaires, je ne sais pas vraiment ce qu'il s'est passés du côté des autres. Mais ils semblent avoir fait beaucoup de dégât, c'est une certitude. Mais je vois que ce n'est pas terminé. Elena et les autres semblent tous d'accord pour riposter. Alors, je hoche la tête dans sa direction.

- Tu peux compter sur moi...

Je ne sais pas si je serais capable de faire grand chose ou d'être utile. Je suppose que je dois déjà voir avec Faith ou Chiara si je suis apte à bouger sans me perforer le moindre organe. Je pense que mourir maintenant n'est pas vraiment utile.

- Qu'est ce qu'on va faire...?

« Vous le faites déjà. Tu sais, l’investissement que vous avez déployé pour sauvegarder notre foyer, protéger notre famille, c’est tout ce que je pouvais espérer. Vous m’avez rendue vraiment fière de notre groupe… » souffla la grecque en esquissant un sourire ému. Il y avait eu des dégâts, des blessés, et des relations brisées, certes. Mais Elena s’accrochait à l’espoir que lui avait offert les siens aujourd’hui. Ils ne se battaient pas pour rien. Ils luttaient pour eux, pour leur avenir commun. Et tous ces sacrifices, toutes ces souffrances en valaient la peine, elle en était persuadée.

Et une fois encore, Evan n’hésita pas une seule seconde à s’engager vers la nouvelle bataille qui se profilait. Lui qui avait fui la violence, qui aspirait à une vie tranquille en se joignant à eux… « Tu n’y es pas forcé, Evan, tu sais ? » Elle ne voulait pas qu’il se sente redevable. « Je te l’ai dit lorsque tu m’as demandé de rester ici ; personne n’est obligé de se battre. Rien n’a changé depuis. Et je comprendrais que tu aies besoin de repos après ce qu’il s’est passé. » Elle ne voulait pas qu’il s’oublie en voulant aider. Le traumatisme qu’il venait de vivre n’était pas à prendre à la légère.

« Grâce à Roman et Hayden, nous connaissons leur position et on a suffisamment d’informations pour aller les surprendre. Ils ne s’attendront pas à nous voir arriver. On va les attaquer en pleine nuit et récupérer les otages. On va mettre fin à leur tyrannie. Pour les empêcher de s’en prendre à nous de nouveau, mais aussi pour tous les autres. »

- Je sais que je ne suis pas forcé… Mais je veux défendre ma famille.

Peut-être que je ne l’ai jamais ouvertement dit depuis que je suis ici. Mais Elena m’a permit d’obtenir une famille. Et si je n’ai pas de relation avec tout le monde, si certains sont plus discrets, je considère tout de même le groupe comme ma famille. Ils m’ont donné tellement de chose que je ne me vois pas rester ici. Rester à attendre. Quand bien même mes côtes sont douloureuses. Quand bien même j’aimerai fondre en larme et me rouler dans un coin.

- Je prendrais du temps pour moi quand ça sera terminé.

De toute façon, j’ignore comment je vais rentrer. Mais la détermination d’Elena et la confiance que je lui porte sont suffisantes pour que je suive les yeux fermés. J’écoute les informations qu’elle me donne. Des informations, ils en ont. Attaqué de nuit est dangereux puisqu’ils doivent connaitre la plateforme bien mieux que nous.

- Tu penses qu’on a une chance ?