Une fois le dernier dossier d’enquête bouclé, Elijah s’autorise finalement à jeter un oeil à l’horloge accrochée sur le mur non loin: dix-sept heures. Il va pouvoir enfin rentrer chez lui, et… ah, non. C’est vrai. Il en oublie presque l’invitation de Benjamin à venir à son bureau, quelques heures auparavant, après le travail.

Mh. Pour quelle raison le militaire voudrait avoir une entrevue avec lui, seul à seul ? Après tout, on ne peut pas dire que les deux se connaissent vraiment. Ils se sont tout au plus croisés à plusieurs reprises, vaguement, avant de travailler ensembles lors de la descente du Parlour quelques jours plus tôt. Mais soit.

Il arrive audit endroit, pile à l’heure. Bonjour Benjamin, répond-t-il accompagné d’un sourire, politesse oblige. Sans se faire prier il entre dans la pièce, n’attendant pas les instructions du plus jeune pour le faire. Les militaires ont décidément tendance à donner des petits ordres à tout va, une déformation professionnelle particulièrement présente chez eux…

Une fois la porte fermée, Elijah s’installe face à Benjamin, son attention se posant un instant sur le dossier que ce dernier pose sur le bureau. Un café, s’il te plait. Pas sûr que ce soit une bonne idée, mais soit, son sommeil ne s’améliorera sûrement pas même en évitant d’en boire. Merci, dit-il, une fois servi.

Puis il laisse un temps de silence filer. Y a-t-il un sujet dont tu voulais me parler ? Après tout, le militaire ne l’a pas fait venir jusqu’ici pour une pause café et échanger des banalités, c’est-ce pas ? L’ancien agent du FBI n’est certainement pas né de la dernière pluie pour y croire…

Elijah prend le temps d’apprécier la chaleur de la tasse, avant d’en boire légèrement le contenu, tout en écoutant Benjamin. Le remercier pour avoir dénoncé Mason… mais en quel honneur ? Il reste silencieux, laissant le plus jeune parler, avant d’avoir un vague sourire.

C’est tout à fait normal, pourtant. N’est-ce pas ce que l’on attend d’eux, dénoncer les traîtres se cachant dans leurs rangs ? Je n’ai fait que mon travail, cela ne mérite pas des remerciements. Propos pouvant aisément passer pour de la modestie, néanmoins à moitié sincères, tant le besoin de remercier du militaire lui échappe. Il n’y a rien de courageux dans ce qu’il a fait, pas en étant contraint par une absence criante de choix.

Et Elijah se garde bien d’en parler. D’autres auraient tenté de le couvrir, sûrement, mais ils en auraient payé les conséquences. En connaissant le même sort que Mason, sans aucun doute. Puis il a un hochement de tête, quand Benjamin mentionne de nouveau l’ex sheriff. Il nous a surtout trahi, ajoute-t-il tout aussi sérieusement. Que ce soit New Eden, la milice, mais aussi… de manière plus personnelle.

Les apparences et la réalité se mêlent une nouvelle fois dans ses propos: néanmoins, cette déception quant aux choix de son ex collègue est bel et bien présente. Qu’importe s’il les comprend aussi. Alors il le mérite, oui, affirme-t-il, son regard croisant celui du militaire. Le mensonge est total, cette fois-ci: non, personne ne mérite de finir à Colville, à ses yeux.

Elijah n’est pas surpris, quand Benjamin mentionne ensuite le fameux dossier: bien évidemment, qu’il s’agissait d’autre chose. Celui de Mason est clos et déjà remisé aux archives, l’en ressortir n’aurait aucun sens. Mais la manière du trône d’aborder le sujet est quelque peu… étrange, définitivement. Tout comme le choix de ses mots.

J’ai participé à plusieurs enquêtes sur eux, notamment avec le Colonel Phillips, lorsqu’ils ont attaqué un convoi et pris en otage cinq de nos hommes. Nous avions aussi arrêté deux de leurs complices. Si l’une d’entre elle est morte depuis, l’autre se trouve piégée au bidonville, condamnée en procès. Le reste se résume à des traques, et des recherches de leurs planques.
 
Il prend un temps pour boire son café, avant de reprendre. Ce sont des individus anarchiques, sans aucune limite dans leur violence, s’amusant à massacrer nos hommes. Enfin, tout ça est déjà écrit dans ce dossier, tout comme leurs nombreux crimes. Mais il doit sûrement déjà le savoir, s’il l’a lu au préalable, non ? Le rapport écrit par Elijah, concernant sa confrontation avec Deadpool, est aussi dedans. Que veux-tu savoir d’autre, sur le sujet ? demande-t-il, presque mine de rien, curieux de savoir où le trône tente de mener cette conversation. Quelles sont tes intentions, Benjamin Blackbird ?

Au vu des réponses de Benjamin, Elijah est désormais assuré que ce dernier ne vient pas seulement de mettre la main sur ce dossier. Il l’a lu, sûrement dans son intégralité… mais pour quelles raisons s’y intéresse-t-il ? La réponse du plus jeune ne se fait pas attendre, et en réponse, il hausse légèrement les sourcils. Non effectivement, nous n’avons rien trouvé de concret.

Est-il en train d’insinuer que tout le travail effectué jusqu’alors, a été mal fait ? Difficile de le savoir, mais venant d’un trône n’ayant participé à aucune de ces enquêtes, ce serait plutôt risible. Comme c’est indiqué dans le dossier, ils ont l’avantage du terrain, en utilisant les égouts pour se déplacer. D’autant plus qu’ils n’ont pas de planque fixe, et encore moins de QG avéré, ce qui rend leur traque difficile.

Finalement, ce qui semble être le cœur du sujet arrive enfin. Je peux oui. Il s’agissait plus précisément du dénommé Deadpool. Enfin ça, c’est déjà aussi indiqué. Visiblement, il rôdait près des limites de Providence pour en observer la sécurité. Mais il était seul. Puis il a un temps d’arrêt. Il était plutôt agressif. Quand les soldats avec moi ont cru l'apercevoir ailleurs, une fois partis dans une autre direction, il en a profité pour tenter de m’attaquer.

Son regard reste posé sur Benjamin, laissant un silence s’installer, avant de finalement de nouveau parler. Ils n’ont pas de chef, leur fonctionnement est bien trop anarchique, semblable à un regroupement d’individus plus qu’un réel groupe. Une chose est sûre, si le plus jeune lui pose des questions au sujet de sa confrontation avec Deadpool, ce n’est pas par hasard. Surtout peu après la descente du parlour. Heureusement que Mason n’en savait pas plus, tiens.