Ça fait dix minutes que je me suis arrêtée et que je piétine sur place. Est-ce que j’y vais, est-ce que je devrais rentrer ? Je… j’ai envie d’y aller, mais je devrais sans doute pas… Mais j’ai bu un peu avec ma famille, j’ai même un peu exagéré sans pour autant faire de la merde ! Sauf que la j’y suis seule… Est-ce que je peux me faire confiance ? Est-ce que c’est une erreur ?

Bon sang !

Je cache mon visage dans mes mains et soupire.

La cage à l’air animée ce soir et… j’aime les soirées. Un peu trop, c’est bien ça mon problème. C’était facile à Hungerford Point. Il n’y avait rien sauf nos propres réserves. Donc… je pouvais pas exagérer. Ça allait se voir. Sauf que là, je veux juste… passer du bon temps, pas nécessairement rentrer en roulant. Enfin, si ça n’arrive pas souvent… est-ce que je peux considérer ça normal ? Que ce soit pas mon coté facilement dépendant qui prend le dessus ?

Qu’est-ce que je fais…

Spoiler:

Je sais pas si c’est moi qui manque de bousculer quelqu’un ou si je suis juste dans le chemin parce que je suis en dilemme dans ma tête, mais une femme m’évite de justesse.

- Oh ! Excus… J’ai pas le temps de finir qu’elle me sort quelque chose que je comprends pas.

Est-ce que c’est de l’espagnol ? Y a certains mots qui y ressemblent je trouve. Elle vient sans doute de m’insulter… ce serait mérité puisque j’ai failli la bousculer. Je lui aurais fait gaspiller son verre et… sa cigarette. Je lui aurais tout repayé hein ! Obligé.

- Oh, je euh… non. Je n’ai pas de feu, ça aurait pu être une façon de me faire pardonner par contre… Je me sens tellement bête. Je sais pas si je devrais rester ou partir. Lui parler ou la boucler.

Elle a pas l’air de m’en vouloir au moins. Ouf. Je sais pas ce que j’aurais fait si elle m’avait engueulé… Je devrais filer, vraiment. J’attends juste le bon moment pour lui redire que je suis désolée, histoire d’être polie. J’attends pendant qu’elle allume ce que je comprends finalement être un joint, à l’odeur. L’homme à qui elle a emprunté le briquet ne semble même pas broncher et reprend son chemin. Je… ils se connaissent ? Sinon, j’avoue que j’admire un petit peu la confiance. Tellement tout le contraire de moi.

Contre toute attente, elle me propose un peu de compagnie, un verre même, puis me tend son joint.

- Oh, je… oui. Je suis pas perdue j’habite ici, juste… j’hésitais à entrer et… Pfff, vaut mieux que je me taise. Je dois avoir l’air d’une sacrée tarte là. C’est gentil, je… je vais payer mon verre, je veux pas te couter des ressources. Je suis pas contre de la compagnie, c’est toujours plus intéressant que de boire toute seule.

Juste un verre ou deux, ça ira. Je vais pas sombrer juste en appréciant quelques consommations. Et peut-être… quelques bouffées de weed ou deux. Je prends le joint qu’elle me temps et je tire un peu dessus. Ça va calmer mon anxiété. Je le sais. Elle a dû le sentir et c’est pour ça qu’elle m’en offre.

- Euh, oui, on est plusieurs à habiter ici. En plus des habitués du quartier des conteneurs. Est-ce que tu es de passage ? J’imagine que ça doit être ça vu la surprise.

Elle rigole quand je dis que je vais payer mon verre, puis propose plutôt de s’occuper du premier et que moi je lui en paye un après. Peut-être qu’elle s’ennuie elle aussi et veut un peu de compagnie ? J’espère qu’elle a pas d’idée derrière la tête… je… je suis vraiment nulle pour remarquer ces trucs. De toute façon, je vois pas pourquoi elle voudrait me draguer… moi.

Je tourne un peu la tête pour souffler la fumée un peu plus loin. Ça fait tellement longtemps que j’ai pas fumé, je crois que je sens déjà très doucement la weed faire son chemin à ma cervelle. Je me retrouve bien vite avec le bras de l’inconnue autour de mes épaules, alors qu’elle nous guide vers la cage.

- Hazel. C’est joli Valencia. Bon la suite… Non, elle peut pas me draguer. Pas moi. Elle dit peut-être ça parce que les gens peuvent avoir du mal à dire son nom ? Il est pas difficile hein, mais parfois les gens sont un peu… racistes.

On met les pieds sur la péniche et c’est direction le bar. Il y a foule ce soir ! Il faut qu’on se fasse un chemin parmi tout le monde.