Je me contente de hausser les épaules quand elle me dit qu'elle est pas là pour me dégager. Faudra pas venir chouiner par la suite en disant que j'ai pas été sympa ou je sais pas quoi. J'ai fait un effort, elle en veut pas, tant pis pour elle j'ai envie de dire. Au reste quand elle se présente, m'accordant sourire et signe de la main, je me contente de lui faire un signe de tête pour toute réponse. Elle s'attendait à quoi, que je lui fasse une démonstration de claquettes ? Pas de chances, je suis pas doué pour ça. J'ai toujours eu deux pieds gauches de toute manière. Hope hein ? C'est quand même vachement ironique de s'appeler « espoir » quand on vit dans un monde pareil. Tellement pourri et sans qu'on puisse vraiment s'imaginer avoir un quelconque avenir qui soit pas merdique à souhait.

J'allais la laisser repartir du coup, vu qu'elle était pas intéressée par ma proposition d'avoir un endroit assez safe pour se poser pour la nuit, sauf que voilà que Madame fait des postulats sur le fait que je puisse l'accompagner pour visiter le lieu. Sérieusement ? J'ai bien envie de l'envoyer chier mais le truc c'est que j'ai relativement la flemme d'avoir sa mort sur la conscience si elle se retrouve dans les étages à tomber sur d'autres morts ou je sais pas quoi. Et je risque pas de réussir à dormir si je l'entends hurler dans les étages supérieurs.

Par contre elle marque un point en parlant du fait que j'ai pas vraiment de fringues de rechange et que là je suis crade au possible. Entre la poussière et le sang de ces rôdeurs que j'ai sur moi, c'est pas forcément la meilleure idée de dormir dans cet état si je veux pas qu'un truc débile arrive. J'en sais rien moi, me frotter la main dans le sang en dormant et aller me la coller sur la tronche ensuite. Ah bah c'est le genre de débilités qui pourraient sûrement m'arriver. Lâchant un profond soupir, levant les yeux au ciel, je finis par rejoindre la blonde qui s'est déjà mise à avancer. Ouais ouais, ça va, je viens, que je finis par lui dire sans vraiment chercher à cacher que ça faisait pas partie de mes plans de base. C'est qu'elle est impatiente en plus.

Par contre je te préviens, on prendra pas des risques inutiles juste pour récupérer des fringues ou je sais pas quoi. Pareil pour une piaule. Les cuisines sont sécurisées alors au pire on aura qu'à trouver un moyen d'y pioncer tous les deux. C'est suffisamment grand. Hache sur l'épaule, j'arrive à côté de Hope. Bon, on y va? Avant qu'il fasse nuit noire et que ce soit encore plus merdique à gérer comme histoire.

Un soupir m'échappe à la réponse de la blonde. J'aurais espéré mieux qu'une tirade digne d'un scout. Mais j'imagine que j'aurai pas mieux. Est-ce que je suis le seul à vraiment prendre les choses au sérieux ? A imaginer ce qui pourrait se passer, anticiper le pire pour au moins être préparé à m'y confronter quand il arrivera ? C'est à se demander comment certaines personnes ont pu arriver en vie jusqu'à maintenant. Enfin, à en juger par la prothèse qu'elle a d'un côté elle n'est pas arrivée entière.

Quoi qu'il en soit, je décide de la suivre. Histoire de pas avoir sa mort sur la conscience. J'imagine que ce sera déjà pas si mal. Mais alors qu'on entre dans l'hôtel, j'avoue que moi aussi j'ai un petit temps de surprise. Regardant autour de nous, j'ai presque du mal à croire que cet endroit soit encore en si bon état. Comme si finalement, il a avait été isolé du monde entier. De la décrépitude des bâtiments, de la misère humaine, de la nature reprenant ses droits. Mais je me reprends rapidement, secouant légèrement la tête pour sortir de mes pensées avant de me racler la gorge. On devrait pas se déconcentrer. On sait pas ce qui pourrait se réveiller ici. D'ailleurs je me contente d'un regard en coin vers elle quand elle éternue avant de vite observer les alentours pour m'assurer que rien n'a bougé. On dirait pas. Tant mieux.

Par contre pour éviter d'autres déconvenues, je viens défaire mon écharpe sans même m'en rendre compte que Madame en a profité pour s'esquiver et aller préparer une connerie au niveau de la réception. En l'entendant parler à nouveau, je tourne la tête vers elle et soupire un peu. J'avoue que c'est amusant, mais pas vraiment raisonnable. Quoi, vous me proposez même pas la suite? Bah ouais, je vais pas non plus lui mettre un vent. Je suis un connard mais pas une merde non plus. Quoi qu'il en soit, je lui tends mon écharpe. Tiens. Met-la sur ton nez et ta bouche. Ça t'évitera de respirer trop de poussière.

Je me tourne à nouveau, histoire d'essayer de repérer comment monter au niveau des chambres. Je remarque bien vite les ascenseurs et un peu plus loin je finis par trouver les escaliers. On commence par le premier étage ? Ou bien t'avais un autre plan en tête ? Ça coûte rien de demander.

Insupportables. Et je les veux fines, les bulles, que j'ajoute en jouant encore le jeu de la blonde avant de laisser l'ombre d'un sourire passer un court instant sur mon visage. Évidemment, il disparaît assez rapidement et laisse à nouveau place à mon expression habituelle. Comme si je faisais continuellement la tronche, quoi. Bref. Faut dire qu'on est pas là pour jouer à un jeu débile. On risque notre peau à venir nous balader dans cet hôtel pour... je sais même plus quoi, des fringues c'est ça ? Bien un truc de meuf ça. Enfin, sans vouloir être sexiste hein ! Juste que perso... Je m'en fiche un peu de ce à quoi je ressemble quoi. Tant pis si mes fringues sont sales. De toute façon, je vis dehors donc en partant de là... Avoir une dégaine de clodo, ça va avec.

Quoi qu'il en soit, on reprend notre sérieux et on décide d'explorer dans un premier temps les étages. Je hoche donc la tête aux mots de Hope avant de gravir les marches à ses côtés. Mains serrées autour de ma hache, prêt à bondir en cas de danger, je reste attentif au moindre mouvement. Au moindre bruit. Mais à vrai dire, il n'y a pas grand chose à remarquer à part le silence à peine perturbé par le bruit de nos pas résonnant dans ce couloir vide de toute âme qui vive à peu près. C'est louche.

Sourcils froncés, je regarde autour de nous mais ne remarque rien qui puisse vraiment me dissuader d'accepter sa proposition de nous séparer. C'est pas forcément une super idée en soit, parce que c'est toujours ce qui fait que ça finit par mal se passer dans les films d'horreur. Mais d'un autre côté, on couvrira plus de terrain plus rapidement et on pourra en finir avec cette histoire de shopping. Mh. On peut. Mais on reste à maximum trois chambres d'écart. Histoire de pouvoir se rejoindre en cas de pépin. C'est pas vraiment une question, en fait. Et sans attendre davantage, je viens ouvrir une première porte qui n'est pas fermée à clé. D'un signe de tête, je fais signe à la blonde d'y aller quand moi je vais plutôt m'atteler à déverrouiller la porte de la chambre d'à côté. On sait jamais. Peut-être qu'il peut y avoir un truc intéressant dedans, du coup.

Appelle si t'as besoin d'aide, que je lui dis avant qu'elle entre, me concentrant ensuite à nouveau sur mon crochetage.