Etonnamment, ma proposition a vraiment l'air d'emballer Otis. Il me donne quelques exemples de ce qu'il fait et sait faire, et me sort même deux carnets de dessin en plus qu'il pose devant moi. Je reste interloqué une seconde avant de laisser filer - c'est assez rare pour le noter- un petit rire amusé. Rien de moqueur, rien de méchant. Tu avais prévu le coup...? J'attrape de quoi feuilleter. Il a aussi un sacré coup de crayon, et certaines petites images, des croquis ici ou là, attirent déjà mon attention, ce que je montre en les pointant du doigt. T'as déjà de belles pièces. Elles rendraient bien en tatouage. Surtout le floral, on m'en demande souvent, et même si je sais faire, c'est loin d'être ce que je préfère faire.

Sans quitter ses œuvres des yeux, à part une seconde pour le regarder lui, j'acquiesce à sa tentative de positivité. On dirait que le cœur n'y est pas, et c'est compréhensible. Tu sais.. quand j'ai été.. Enfin, quand je n'étais plus là pendant un an, ils se sont débrouillés très bien. Alors quelques semaines, ce n'est rien du tout. Tout ira bien. Bon, entre temps Aamir et Thaïs étaient morts, Bill probablement aussi, Dany, Lexie et les autres étaient partis. J'étais le dernier des Bastards. Mais là, il avait pas besoin de le savoir.

Quelques secondes plus tard, c'est Vendredi qui fait son apparition. Il fait toujours son petit effet et rend plus humain et sympathique, son maître qui ne l'est pas forcément de prime abord. Je le sais. Je ne suis pas à l'aise avec les gens, et je n'ai plus envie de nouer des liens qui pourront se perdre du jour au lendemain. Pourtant, Otis est différent. Je le connais depuis longtemps, maintenant. Je l'ai recueilli quand il était tout bébé. Que je lâche machinalement, expliquant ainsi sa docilité.. Pendant que le métisse fait connaissance, moi je regarde son tatouage. Un pikachu. Original, au moins. Et bien exécuté en prime.

A mon tour, je sors un classeur de mes affaires, soigneusement conservé. J'ai mes flashs dedans, dont des fleurs. Tu peux regarder. Et si rien ne t'inspire, on peut toujours faire le motif ensemble. Je reviens glisser mes doigts sur le furet qui se frotte à ceux de mon compagnon de fortune, et qui émet un petit son de contentement.
Dans le classeur, Otis trouvera un peu de tout, surtout du japonais. Mais aussi des fleurs, quelques personnages, des motifs de Trash. Bref, un peu de tout. Je reporte mon regard sur lui, cherchant à détailler son visage et ses expressions, alors que je retrouve le silence.