On se fera une chouette soirée avec toutes nos pièces rapportées, je te tiens au courant !

Elle avait esquissé un sourire à sa déclaration. Oui. Les rires d'Emily manquaient au paysage. Mais ça n'était qu'une histoire de jours avant qu'elle se remette et qu'elle revienne les enchanter et rendre le quotidien des gens du stade moins insupportable. La nuit avait été rude, elle ne doutait pas que les prochaines le seraient moins. C'était déjà rassurant. Rose lui avait d'ailleurs promis qu'elle serait remise, bien qu'un peu groggy en définitive. Hope avait reçu la nouvelle avec joie, sentant le poids de l'inquiétude la quitter quand elle avait retrouvé son lit de camp pour une nuit fabuleusement courte.

Là, être avec Joshua, ça l'aidait à tenir le coup et à se changer les idées. La fatigue accumulée s'était évacuée en un instant, il en allait de même pour le reste. C'était à croire qu'il l'inspirait. Tenue par sa grande main, serrant ses doigts au sien, elle marchait à son rythme sans gêne aucune, mise à part peut-être les battements de son cœur qui s'accéléraient progressivement et sa respiration un poil plus prononcée. Elle tenta de retrouver son calme, se sentant assez audacieuse sur l'instant. Ou était-ce seulement le fait d'avoir le béguin pour lui ?

Elle se sentit comme une adolescente, vraiment. Son frère se serait moqué d'elle à la voir dans cet état, tout sourire, accroché à un homme qu'il aurait forcément détesté. Car après tout, tous ceux s'approchant de près ou de loin à sa petite sœur était forcément sur sa liste de personnes à abattre. Et s'il avait vu Joshua se mettre face à elle, la stopper dans sa marche, se planter ainsi en venant la coller contre lui, il serait probablement devenu fou. Mais pas autant que Hope à ce moment-là...

Ouh, lâcha-t-elle doucement sans le vouloir.

Il lui avait pris ça. Sous la surprise. Puis, il lui arracha un frisson, une sensation chaude dans son ventre remontant jusque dans sa poitrine. Elle s'attendait à ce qu'il l'embrasse alors qu'elle le voyait se rapprocher d'elle avec douceur. Son regard pénétrant, ses lèvres, tout. Tout était trop beau, et quand elle le vit glisser dans son cou, remonter à son oreille, la pauvre Hope se sentit presque faiblir dans ses bras. Sa poigne se resserra fébrilement dans la paume de ce « garçon fréquentable ».

Même s'il affirmait tout le contraire.

Et il lui fallait reprendre pied pour faire preuve du caractère qu'elle avait d'ordinaire. Se faire avoir par une voix rauque, c'était pas son genre ! Elle s'écarta doucement, posant sa main libre sur le torse musclé de Joshua. Elle joua de son doigt en remontant doucement avec celui-ci, plaçant ensuite sa main derrière sa nuque :

T'es du genre mauvais garçon, c'est ça ? Susurra-t-elle doucement en le regardant droit dans les yeux.

Elle esquissa un sourire taquin, se hissant ensuite sur la pointe des pieds et le tirant à elle. Puis, elle déposa ses lèvres au coin des siennes. Qu'une brève seconde. Et lorsqu'elle s'écarta, se fut pour dire à quelques centimètres de lui :

Mes préférés.

Et ceux que Daryl détestait le plus aussi.

C'était vraiment très.. Mâle, comme attitude, mais il la sentait toute chose, entre ses bras, sa main se refermant un peu dans la sienne. Au moins, il ne se trompait pas, il ne se faisait pas d'illusions sur ce qu'il déclenchait chez elle. Ou alors ce petit tour de charme marcherait sur toute les nanas ? L'idée le traversa un instant qu'il faudrait qu'il essaie sur une autre, et presque aussitôt elle fut chassée par une autre : il ne voulait pas qu'Hope le prenne mal. Oh la vache ! Alors ça – ne vouloir se concentrer que sur une seule fille – c'était quelque chose de nouveau pour lui. Et pourtant !

Elle l'écarta doucement, et laissa son doigt léger remonter le long de son torse, jusqu'à sa nuque où elle glissa sa main réchauffée par le contact de leurs paumes. Elle était plus petite que lui, mais ce n'était même pas grave. Ses yeux rivés dans les siens suffisaient à réduire la distance, et encore plus quand elle commença à se hisser sur ses pieds.

Est ce qu'il était un mauvais garçon ? Il n'avait jamais rien fait de répréhensible, à part peut être un jour ou deux un stationnement non autorisé, ou griller un feu… Pas vraiment le genre de mauvais garçon dont elle devait parler, n'est ce pas ? Après par contre, il avait pas été très cool avec les filles, en avait profité, les avait jetées comme de vieilles chaussettes pour en prendre une autre derrière, et parfois même en même temps. Et pour le coup, il n'était pas sûr que ça plaise à la brunette ça.

Mais il n'eut pas vraiment le temps de lui répondre, parce qu'elle le prit par surprise, le tirant à elle, et venant embrasser très brièvement la comissure de ses lèvres. Il n'écouta pas le reste de ses paroles. Pas que ça ne l'interessait pas, bien au contraire, mais il restait sur sa faim. Comme un fauve affamé à qui on aurait donné un pauvre steak haché. Non non, elle n'allait pas s'en sortir comme ça, clairement pas.

Il remonta sa main lentement, de sa taille à sa joue, et glissant longuement sur son flanc, les yeux plantés dans les siens. Une fois arrivée sur sa joue, il fit glisser ses doigts dans ses cheveux, derriere son oreille, pour s'y assurer une prise, et l'attira à lui, se penchant légèrement pour réduire la hauteur entre eux, et vint prendre ses lèvres, à la fois délicatement, et avec une certaine force, ce qui, quelque part, le caractérisait bien.

Elle goûta ses lèvres avec douceur, presque timidité. Absorbée par la carrure massive de Joshua, les mains posées contre lui à s'accrocher à sa veste, profitant de la chaleur bouillante qui émanait de lui alors que l'échange se prolongeait.

Elle avait cherché ça, elle avait poussé la situation, et elle le savait. Hope se laissa porté par ce baiser avant d'en prendre doucement les commandes. Ses mains remontèrent à la nuque de l'homme, à laquelle elle se pendit sans plus de ménagement, et quand il voulut se reculer sans doute pour voir l'effet qu'il lui faisait, elle le ramena à elle avec gourmandise pour l'embrasser à nouveau. Hope était ainsi : Une femme gourmande en la matière, qui jouait sans cesse cent rôles pour la même personne. Harvey en avait profité longtemps, et elle se voyait bien faire en sorte que Joshua s'y fasse pendant quelques temps.

Les yeux fermés, elle se sépara simplement de lui, à quelques centimètres, son nez effleurant toujours le sien. Elle esquissa un sourire avant de lâcher un soupir. Ça n'était qu'un baiser, se répéta-t-elle doucement en plantant ses iris bruns dans ceux de l'homme qu'elle avait dans ses bras. Qu'un simple baiser qui peut-être ne signifiait rien.
Là, la petite brune avait envie de partir en courant pour aller tout raconter à sa meilleure amie. Comme elles avaient l'habitude de le faire lorsqu'il s'agissait de garçon après lesquels elle courrait, prendre le temps de la soirée pour donner tous les détails sur le baiser en question, sur le garçon en question, à passer un interrogatoire avec la cadette de la famille Moore pour essayer de déterminer si oui ou non elle avait des sentiments pour lui.

Sauf que toutes ces interrogations viendraient bien plus tard. Pour l'instant, elle restait bloqué contre lui, esquissant le même sourire, le regardant droit dans les yeux sans savoir quoi lui dire. Elle était toute chose, et elle en avait perdu sa langue. Ou alors, elle voulait simplement faire autre chose que parler avec cette langue, et ça n'était ni le moment, ni l'endroit. Et autant dire que ç'aurait été bien rapide entre eux. Pour l'instant, le but était d'estimer ce qu'il y avait justement, comment ils se définissaient, et la brune n'était pas certaine de vouloir s'embarquer immédiatement dans cette discussion...

ça pourrait le faire fuir, non ? Il la prendrait pour une nana ne courant qu'après le mariage, qui lui avait mis le grappin dessus en attendant qu'il lui fasse trois ou quatre enfants. Loin d'être le genre de Hope, plutôt du style volage... Mais lui... Avait-il l'habitude de faire ça ? Est-ce qu'il les séduisait toutes à la chaîne avec cette technique ? Fronçant les sourcils, elle se dit sur l'instant qu'elle se devait d'arrêter d'être naïve, et se démarquer des autres d'une manière ou d'une autre. Et tout ce qu'elle trouva à faire, se fut de hausser les épaules en s'éloignant d'un pas de lui, plongeant ses mains fraîches dans les poches de son jean :

Pas mal, souffla-t-elle avec désinvolture et un air de chipie sur le visage. J'ai connu pire.

Et rarement connu mieux. Mais ça, elle s'abstint simplement de le dire, mimant l'impassibilité à même la peau. Alors qu'à l'intérieur, elle était une gamine qui cachait ses joues rougies et qui se retenait de trépigner.

Les promenades avec toi se déroulent toujours comme ça ou y'a des variantes ?

Esquissant un sourire taquin, elle se passa la main dans ses cheveux emmêlés et fut sincèrement étonnée qu'il ait voulu l'embrasser alors qu'elle ne ressemblait à rien de concret.

« Plutôt sympa » ? Ouais. Ils pensaient sans doute aucun la même chose. Se couvrir de compliments aurait été parfaitement bizarre, là, comme ça. Pour cette raison, le « pas mal » et le « plutôt sympa » passaient quand même beaucoup mieux que de folles déclarations d'amours enflammées. Elle ne put s'empêcher d'être un peu gêné, gêne marqué par la rougeur de ses joues devant le gaillard. Et l'envie de recommencer encore une fois pour être sûre et certaine que c'était vrai, et qu'elle avait aussi largement apprécié l'échange.

D'autant plus quand la réponse suivant la laissa parfaitement songeuse. Oui, ça arrivait mais en fait, ça dépendait de la nana, et puis surtout, du moment, de l'humeur, de tellement de données qu'il ne pouvait pas prévoir. Ça peut, comme ça peut pas conclua-t-il sous le regard mitigé de la petite brune. Elle eut un petit sourire moqueur qui annonça la couleur de sa pensée, ou comment cacher qu'il était un coureur de jupons qui avait l'habitude des femmes pour lui faire gober que dans les faits, c'était pas si pire.

Tu devrais être encore plus évasif pour ne pas répondre, sur un malentendu, ça passera, lança-t-elle avec un sourire complice en croisant les bras sur sa poitrine.

Elle n'était pas née de la dernière pluie, elle ne venait pas de tomber du ciel comme un petit ange innocent. Ou alors, ça faisait des années qu'elle ne se faisait plus d'illusions sur quoique ce soit. Et en particulier sur les hommes. Elle savait qu'à chaque fois qu'elle craquait sur l'un de représentant de cette gente, c'était rarement sur le plus sage. Heather pouvait confirmer : entre Harvey qui avait été son amant, Joseph qu'elle avait fréquenté quelques temps et qui l'avait largement trompé avec tout Chicago (bon, elle en avait fait de même), Damien le gros macho qu'elle avait mis à la porte, et bien d'autres,...
Elle ne changerait pas Joshua, il ne la changerait pas non plus. Ç'aurait été présomptueux pour quelque chose qui démarrait et qui n'était défini ni par l'un ni par l'autre. Alors... Il pouvait être l'exception qui confirmait la règle, peut-être. Sauf qu'au fond, elle avait beau s'appeler « Espoir », elle avait arrêté depuis un moment d'espérer après toutes personnes portant un pénis entre ses jambes. L'expérience suffisait.

Pas mal, oui. Elle se passa la main dans les cheveux en répondant à son vis-à-vis : Les voisins de tentes, la doc du camp, c'est même devenu ma copine. Puis, y'a les collègues de Daryl, les amis d'Emily,...

ça commençait à faire. Et parmi le lot, pas toujours des amis. Il n'y avait qu'à voir Dante contre qui elle s'était énervée en lui bouclant le caquet. Enfin... ça n'était clairement pas tout :

Quelques militaires qui font du zèle, aussi, souffla-t-elle finalement en sous-entendant clairement que le zèle la concernait.

Une manière de voir comment il allait le prendre. Peut-être qu'il s'en moquerait, peut-être pas. Et peut-être que ça lui permettrait de déterminer si c'était le moment de voir à poser les bases ?
Non.
Enfin...
Peut-être.

Et toi ? Tu as pu retrouver des gens que tu connaissais ? Des collègues, des amis ?

Hope fut presque fière de son coup lorsqu'elle vit Joshua se raidir sensiblement. C'était perceptible, ça l'avait fait réfléchir, et peut-être, même sûrement, que ça ne lui avait pas plu. Elle garda son sourire amusé en le fixant, avant de l'écouter.

Pas du genre sociable, ok. Ça avait un côté pas mal, puisque ça voulait dire qu'il n'allait pas facilement vers les autres, et donc moins facilement vers les autres filles. Ou alors, elle se fourvoyait totalement et il lui montait la tête avec un gros mensonges. Il lui parla rapidement de ses anciennes fréquentations, qu'il ne considérait pas comme des amis à proprement parlé, mais des collègues qui méritaient de temps à autre de partager un verre avec lui. Soit. Quelques mois plus tôt, si elle l'avait rencontré, elle aurait été contente de savoir qu'il ne la laisserait pas au profil d'une énième soirée bière avec ses copains d'enfance. Ça avait ses avantages.

Mais la fin lui fit ravaler son sourire et même froncer les sourcils. « On peut dire officiellement que t'es ma première amie ici » ?! Elle manqua de s'étouffer en entendant ça. Il se moquait d'elle, n'est-ce pas ? C'était forcément ça ! A part s'il embrassait toutes ses potes comme il l'avait fait, et dans ce cas, elle ne savait absolument pas en parler. Dans tous les cas, elle sentit quelque chose bouillir au fond d'elle, un truc qui allait forcément être naze et la faire passer pour une très mauvaise joueuse. Devait-elle ? Pouvait-elle ?

Elle se retint du mieux qu'elle le put en pinçant les lèvres. Mais là, le terme « amie » lui arracha un sourire ironique et la força à encore mieux retenir ce qu'elle pensait. Très bien. Très très bien ! Il voulait jouer à ça ? Songea-t-elle en toute mauvaise foi alors qu'elle avait commencé. Et bien, elle jouerait aussi, c'était décidé. Sauf qu'elle était capricieuse et mauvaise joueuse de base, et qu'il ne faisait que retourner ses propres armes contre elle. Et puis surtout... Pourquoi elle s'en offusquait ? Elle avait eu droit à un baiser très chouette, c'était peut-être tout ce qu'il y avait à tirer de lui.

Excepté qu'elle en doutait fortement. Non, il y avait mieux à prendre de Joshua. Plus et mieux. Son instinct lui hurlait qu'il cachait bien des secrets comme des talents, et qu'en jouant à chat, elle allait y perdre. Mais elle se retint encore, un temps seulement, avant de voir rouge. C'était trop nul, le mot « amie ». Et c'était très mal jouer que de poser la carte qu'elle s'apprêtait à poser sur la table... Hope ne réussit pas à se retenir plus longtemps, elle haussa les épaules avec le même sourire ironique et lança d'une voix sèche :

Eh bien, vive l'amitié !

Voilà qui souffrait bon le sarcasme, et ce qui suivi souffrait quand à lui bon le mauvais caractère dont elle était muni depuis plus de trente ans :

Salut !

Mauvaise joueuse, donc, et très mauvaise perdante. Ou alors était-ce une autre manière de le faire danser comme elle l'entendait. Parce que lui ne devait pas forcément s'attendre à ce qu'elle tourne les talons avec une moue boudeuse, en croisant les bras sur sa poitrine en mimant vouloir refermer sa veste, et rattrape les escaliers en le plantant là.

Du Hope Serena Cooper tout craché.