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Re: La saveur du bonheur? ft Bobby

Ven 29 Juil 2016 - 14:02

L’accolade de l’Irlandaise prit par surprise la pathétique créature hébétée. Depuis Breann, il n’osait plus faire de ces gestes si tendre, si humain, si douloureux. Sentir les battements de cœur de l’ange de la compassion résonner dans ce corps parfait faire écho au sien débordant de tendresse fit naitre un apaisement et une joie dans l’âme si pure du golem de chair. Avec une délicatesse surprenante pour la force physique qu’il était capable de déployer, les bras du mineur enveloppèrent la taille de l’Irlandaise. Ces quelques instants parurent pour le colosse comme un croisement entre la magie et le surnaturel. Comme si les deux êtres s’étaient construit des parois translucides autour d’eux. Leur refuge provisoire avait la légèreté d’une bulle de savon, mais la densité du plus résistant des remparts construits par l’homme. Le mal, les aberrations, les tourments et la folie de ce monde disparate et le chaos pouvaient frapper de toutes leurs forces impies les protections invisibles. Mais à l’intérieur de cette contrée, l’être céleste et le monstre n’entendaient en rien les attaques pathétiques des calomniateurs. Les deux âmes pouvaient laisser couler les flots du sablier du temps à leur guise. Choisir ce moment et le graver dans la pierre brute de leur mémoire pour ce souvenir de ce moment de paix et d’harmonie.

Mais l’ange à la chevelure qui reflétait le soleil dans toute sa magnificence rompit ce moment symbolique et doux. À contrecœur, le géant laissa la divine apparition prendre un peu de distance. Mais la joie qui inondait les traits sublimes de la jeune femme masquait complètement l’astre qui scintillait dans le ciel. Pendant un instant, une minute ou une heure, le géant reconnut l’allégresse et le rayonnement aveuglant de l’Irlandaise. Robert se revit alors dans la tour de surveillance ou bien dans les bois en compagnie de l’être qui prenait toujours de plus en plus de place dans son cœur tourmenté et lézardé de cicatrices. Le golem de chair aurait tellement aimé dire à l’époque ce qu’il ressentait, ce qu’il éprouver. Mais sa gêne maladive avait pris le dessus et la chance et le hasard, ces enfants de chienne insouciantes du mal qu’elles proféraient, avait séparé le duo hors norme. Maintenant la journaliste avait plombé le peu d’assurance que l’homme difforme avait prise avec les femmes et il se doutait qu’aucune femme dans ce bas monde ne pourrait l’aimer. Dans ce débordement de tendresse et d’euphorie passager, Abigail parla du soleil selon les traditions celtes. C’était exactement ce que la gente féminine représentait pour le colosse disproportionné. Un sourire attendri et compréhensif s’apposa délicatement sur les lèvres exsangues de Robert. Il pourrait passer des jours à les laisser bercer par la voix chantée de l’Irlandaise. Pour l’ouïe amoindrie du mineur, les inflexions des mots de l’ange étaient une symphonie céleste. Un vent d’été soufflant doucement entre les feuilles des arbres de la forêt. Du rire cristallin d’une chute d’eau ricochant sur des pierres polies.

Mais l’empathique créature sentit alors la noirceur revenir au galop. Cette entité qui semblait maintenant prendre un malin plaisir à damner l’essence divine de celle qu’il considérait comme un ange. Il ne resta qu’un instant, faisant chuter la température de plusieurs degrés. Une main glacée venait de saisir le cœur du géant et le tordre. Il aurait tellement voulu prendre ce fardeau et le rajouter au sien, délivré du mal qui affligeait son amie retrouvée. Le regard bleuté de la bête se perdit alors dans ceux de l’Irlandaise, essayant de la réconforter avec son apaisement et sa bonté infinie.

La jeune femme sembla se raccrocher à la main tendue du géant et celui-ci fit un sourire où la bienveillance scintillait de mille feux. La question de l’ange stabilisa alors l’esprit lent et faible de la créature. La belle voulait savoir pourquoi la bête était cet univers de tendresse, de tolérance et de candeur. Tendant sa main immense et rugueuse pour englober la douceur de la soie qu’était celle de la jeune femme, Robert avala sa saline. Souriant bêtement, il prit quelques instants pour attraper ses pensées vagabondes.

Robert- Je ne sais pas Abi… Euh… La majorité des gens, même ma maman, me considèrent comme un monstre. Papi m’appelait son petit troll quand on allait dans le bois pour le moonshine.

Laissant une joie infuse transparaître sur son horrible faciès balafré, repensant à ce vieil homme qu’il n’avait que peu connu, Bobby continua son récit.

Robert- Ce n’était pas méchant troll… Euh… Il disait est souvent que le troll était un géant de grande force, naïf, mais très gentil… Euh… Trop gentil pour ceux qu’ils le tourmentaient. Que je devais être un troll et de ne pas tomber dans la méchanceté. Tu sais que je pourrais faire beaucoup de mal ? Ben je ne veux pas… Car je sais c’est quoi avoir mal.


Faisant rouler son pouce sur le dos de la main de l’être divin, il continua ses explications tortueuses.

Robert- On a toi et moi un bon fond…. Je le sais et je le sens. Et le truc du soleil c’est ce que je pense de toi… Aussi rajoute la gentillesse et d’autres belles choses. Souvent c’est les dames qui voient en dessous de ma laideur. Donc elles sont aimantes et voient la beauté. Je sais que c’est impossible qu’une femme m’aime à cause de mon dehors… Euh… Mais je suis heureux que des anges acceptent que je sois près d’eux.

Un sourire conciliant et doux embellit les traits atypiques de l’homme.

Robert- Tu voudrais être mon soleil ? Car tu es là et tu me fais sentir bien… Euh… Je trouve souvent des surnoms aux personnes qui comptent beaucoup pour moi. Aussi même si tu ne te vois pas comme ça, dis-toi que l’important c’est ce que je vois en toi… Euh… Tu es une personne de bien et tu le seras toujours pour moi.

Un sourire immense se propagea comme un incendie de forêt sur les lèvres exsangues de la chose. Une espièglerie et une joie chaleureuse scintillèrent dans le regard bleuté si pur de l’homme. Le ton rocailleux s’éleva avec tendresse dans la petite chambre.

Robert- Mami venait de l’Irlande, tu sais… Euh… Je connais trois chansons que je vais chanter juste pour toi… Euh… Personne d’autre. Dannyboy, Shenandoah je crois et Loch Lamond… Non Loch Lomond, tu veux les entendre… Euh… Choisi si tu veux.

Au choix de l'ange, le don caché de la bête se réveilla de manière si juste et harmonieuse que c'était un appel à sa beauté intérieur et sa bonté infini...

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