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Re: Breaking point

Sam 1 Oct 2016 - 14:01

Il s'était retrouvé dans ce taxi et devant chez lui en un rien de temps. Il ne sut dire si ça lui avait paru comme une heure ou seulement cinq minutes, un peu perdu au milieu de tout ça. Gary était comme un rôdeur sur l'instant, qui savait plus vraiment où il allait ni ce qu'il faisait. A la différence près qu'il n'avait envie de manger personne. En fait, il avait surtout envie de voir personne... Il n'y avait bien que Rose qu'il tolérait présentement, même si sa présence lui rappelait l'échec entier de son existence. Il haussa les épaules quand elle lui fit un commentaire sur l'état du salon. Ouais bon... Il s'était peut-être laissé un peu aller, mais pour sa gouverne, ça faisait un moment qu'il n'avait pas touché une goutte d'alcool...

Les cigarettes par contre... C'était la majorité de lui. Mais il se sentait vraiment mal à l'aise de la laisser faire du rangement alors que c'était lui qui vivait ici. Il protesta même en lui demandant d'arrêter de bouger parce qu'elle lui donnait le tournis. Il l'aida à foutre les cadavres de bouteilles dans un grand sac poubelle qu'il ira foutre à la déchetterie quand il y penserait. Et il vida méthodiquement les cendriers pour les nettoyer alors qu'elle aérait la maison en ouvrant fenêtres et volets. Il allait mettre trois semaines à effacer toutes traces du passage de Rose ici.

C'était peut-être ça qui était plus douloureux au fond. Elle était pleine de bonnes intentions avec lui, voulant le couver, lui éviter d'avoir mal pour la mort de son père. Warren Senor n'était pas tout à fait un père exemplaire, alors le faire pleurer par son fils unique, c'était loin d'être facile. Mais la présence de sa femme ici, le fait qu'elle était douce et gentille avec lui, qu'elle lui serve du jus de fruit, c'était sûrement un petit peu trop à encaisser pour tout de suite, et Gary était pas sûr de pouvoir gérer tout ça correctement.

Alors il regarda le verre qu'elle lui tendit, qu'il attrapa maladroitement pour le poser sur la table basse devant lui. Les coudes sur les genoux, Gary évitait juste sagement de croiser le regard de sa femme, et entendit le commentaire de sa femme avec une impression de craie sur un tableau. Elle se rendait probablement pas compte finalement. Parce que si c'était le cas, c'était d'un sadisme sans pareille. Et elle enchaîna avec ses gentillesses. Livrer quelque chose, comme une pizza comme ils avaient l'habitude de le faire pour se mettre devant un film le soir.

Il fallait qu'il mange, il fallait qu'il dorme, il avait une tête de déterré. C'était peut-être pas le commentaire à dire alors qu'il venait de mettre son père en terre, justement. Et sur le coup, il craqua. Gary regarda le plafond le plus longtemps possible pour retenir ses larmes, mais ce fut bien insuffisant quand tout déborda d'un seul coup et qu'il se retrouva comme un con à chialer sur son canapé en se prenant à nouveau la tête entre les mains.

Face à Rose, il n'avait jamais pleuré. Il s'était énervé, très souvent, il avait hurlé, il s'était montré glaçant. Mais hurler, il en avait été tout simplement incapable. Sauf que là, il était chez eux, au milieu de ce salon qui avait eu beaucoup de souvenirs, et le désespoir de voir qu'aujourd'hui il était comme un homme qu'il n'avait jamais voulu être le submergea comme un gamin. Il avait tout foiré dans sa vie, du début jusqu'à la fin. Et la seule personne à qui il aurait voulu s'en prendre n'était plus là pour encaisser ses colères. Ses épaules tremblèrent.

Son père avait bien des défauts, mais il avait été le seul à vraiment comprendre ce qui lui pesait sur le cœur. Quand il lui avait annoncé que Rose était partie, un an avant, son père ne l'avait pas jugé. Il lui avait répété les mêmes choses qu'il lui avait toujours dit gamin, mais cette fois-ci, tout avait soudainement pris sens aux oreilles de son fils. Sauf que pour son père, il n'y avait pas de fatalités, mais encore. Ils étaient des hommes qui aimaient intensément, mais qui le faisaient très mal. Personne n'était fourni à la naissance avec un bouquin pour comprendre. Alors ils avaient appris tout maladroitement.

Et maintenant, le seul qui avait un jour pu le comprendre était mort. Et y'aurait plus personne pour éponger ses souffrances.


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Connor G. Shepard
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Re: Breaking point

Sam 1 Oct 2016 - 14:21


Elle s'était attendue à tout. Tout, avec cette histoire de deuil qui ne passait pas. Qu'il ne se mette à hurler, tempêter, l'insulter éventuellement. Qu'ils en viennent aux mains, qu'il la pousse jusqu'à la sortie et qu'ils concluent sur le fait qu'ils étaient faits pour se haïr jusqu'à la fin des temps. Mais ça...

Ca, non . Elle ne s'y était absolument pas attendue. A ce que son ex mari, qui était en soi l'homme le moins sensible qu'elle ait pu fréquenter de sa vie, se retrouve a pleurer en plein milieu de leur salon alors qu'il disait plus tôt ne pas en être capable... Autant dire que ça la laissait littéralement sur les fesses.
La première seconde, elle se persuada que le martini avait été sacrément dosé avant de comprendre que non. Cette scène sorti d'un roman de science fiction était bel et bien en train de se passer, alors qu'elle paniquait complètement. Hurler et tenir tête dans une dispute, c'était une chose. Mais ça ? Même quand Norman pleurait, elle laissait le soin à la nounou de le consoler tant elle ne savait pas quoi faire.

Pourtant, il allait bien falloir qu'elle bouge, pas rester à l'observer comme ça en mode indifférente.
La tête de déterré. Oh merde, le malaise. Le grand, grand malaise. Mois d'une demi seconde après, elle avait abandonné sa cigarette dans le cendrier pour venir s'asseoir à côté de lui, le serrant dans ses bras sans mot dire alors qu'il relâchait la pression.

Calma te... Je suis une vraie conne, c'est pas ce que je voulais dire ça m'a échappé, excuse moi. elle avait murmuré ses excuses en s'insultant de tous les noms. Qui, dans ce monde, pouvait parler de déterrer ou d'ambiance mortelle à quelqu'un qui venait d'enterrer son père bordel ? En dehors d'elle, tout du moins. Bon dieu, elle aurait mieux fait de rentrer directement à l'hôtel plutôt que d'essayer d'être gentille et compréhensive, et passer pour la dernière des garces. Pardon, pardon, pardon. Elle avait dû prononcer le même mot à peu près 14 fois d'affilé sans respirer, en anglais, en espagnol, et même en français si cette langue l'avait un tant soit peu intéressée.

Pourtant, elle resta là. A conserver cette étreinte, lui murmurant par instant des paroles réconfortantes tandis qu'il relâchait finalement la pression, et que la tempête se calmait. Effleurant sa joue du bout des doigts sans oser le regarder, elle attendit patiemment qu'il se calme de lui même avant d'enfin reprendre la parole avec douceur.

Tu veux que je te laisse tranquille ?

Elle aurait tellement compris, qu'il la foute même dehors de lui même une fois la tristesse passée. Dormir un peu te fera du bien... Fit-elle remarquer en le prenant par la main pour l'aider à se relever du canapé.
Sous le choc, voilà ce qu'elle était. Ses yeux aussi brillaient. Elle avait toujours apprécié le père de Gary, et si lui ne l'avais jamais su, elle n'avait jamais coupé les ponts avec son ex beau père. En cachette, de peur que Gary ne lui tombe dessus. Mais c'était peut-être le moment pour lui dire une chose que Robert lui avait admise un jour.

Tu sais, ton père... Quoi que tu puisse penser, il m'a dit qu'il était fier de ce que tu étais devenu.

Pas besoin de préciser que c'était avant la séparation. Même après, Robert n'avait pas dis un mot péjoratif à l'instar de son fils. A défaut de l'avoir entendu de sa bouche, peut-être que passer le message lui donnerait un peu de baume au coeur.

Tu vas y arriver. Promit-elle en y croyant sincèrement, se décalant pour lui laisser la possibilité d'aller se coucher.
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Re: Breaking point

Sam 1 Oct 2016 - 15:17

Gary ne l'écouta pas s'excuser. Au fond, c'était même pas pour ça qu'il pleurait. C'était un trop plein de beaucoup de choses, et il lui avait fallu un déclic pour lâcher le barrage. Pudique sur ses sentiments, avec la hantise folle de se montrer faible face à des gens. Y'avait bien que son père pour le savoir faible, et pour accepter qu'on le voit comme ça. Parce que lui ne lui ferait jamais de mal une fois à terre. C'était pas le cas de son groupe, de Graam par exemple, où il savait que la moindre brèche causerait forcément sa perte.

Et là, tenu par Rose, il avait l'impression que c'était bien la seule occasion qu'il aurait de pouvoir pleurer pour de vrai. L'homme s'était questionné tantôt de savoir pourquoi il pouvait pas verser quelques larmes, si c'était normal. Le problème avec les gens comme lui, c'était le débordement de sentiments ingérables pour ceux extérieur ; ceux qui étaient pas dans sa tête, qui comprenaient pas comment il fonctionnait. Quand le barrage cédait, c'était beaucoup à encaisser pour celui qui se prendrait cette vague en pleine face...

Mais Rose encaissa, et avec douceur, elle réussit à l'apaiser. Il s'était retrouvé, la tête posée dans son cou, à la tenir par la taille, en cachant ses yeux rougis par le chagrin, sans pouvoir la lâcher parce qu'il aurait été foutu de la perdre. Il secoua la tête quand elle lui demanda s'il voulait qu'elle le laisse. Affronter ça tout seul, avec seulement Clint pour le supporter, ç'aurait été compliqué. Là, il aurait sombré à nouveau dans son pêché favori, il en était sûr. Il se serait laissé aller à la bouteille, alors que ça faisait des semaines qu'il refusait méthodiquement...

Et les derniers mots de Rose lui arrachèrent un sanglot de plus. « Fier de quoi, hein ? » Objecta-t-il comme un gosse en redressant le regard vers la jeune femme. Il se le demandait vraiment, le plus sincèrement du monde, parce que lui avait honte de ce qu'il était devenu, de ce qu'il faisait, de sa manière de vivre, et c'était encore plus compliqué de se l'avouer. Alors s'il avait rendu son père fier un jour, il voulait vraiment savoir de quoi : « Qu'est-ce que j'ai fait qui a bien pu le rendre fier, dis moi ? »

Il s'écarta d'elle pour remettre sa tête dans ses mains. Il se débarrassa de sa veste de costume, ne restant qu'en chemise noire à côté d'elle. Il se sentait mal à l'aise dans cette tenue, comme un putain d'imposteur qui avait rien à faire là. « J'suis paumé. » Admit-il simplement.

L'homme releva le nez vers elle, les lèvres pincées, le visage pâle, la barbe naissante, les yeux toujours aussi rougis et gonflés par les larmes. Alors que ça commençait à se remettre doucement en perspective, qu'il avait fait des efforts qu'il avait juste qu'ici penser insurmontable, voilà où ils en arrivaient... « J'pensais pas qu'il partirait quand je commençais à aller mieux, j'pensais pas que ça l'embarquerait, je... » Il eut un rire sans joie en se perdant à nouveau dans le vide.

Comme en automatique. Il sentait son nez le piquer, les larmes brouiller sa vie, et bordel ce qu'il détestait ça ! « C'est ça mon problème, je pensais à rien du tout. J'ai été un foutu égoïste tout du long et j'ai pensé à que dal, j'étais trop occupé à tenter d'bien faire pour qu'tu reviennes alors que ça donnera jamais rien, et à grogner contre lui parce que j'voulais pas finir comme lui mais... » Nouveau rire sans joie. Mais au moins le son de sa voix arrivait à combler le vide de sa tête...

« Tu devrais me remettre la couronne du dernier des cons, j'ferais bien que tout gâcher de toute façon. J'suis passé à côté de tout, et toi tu me dis qu'il était fier de moi... » Souffla-t-il froidement à sa complice, avant de lui dire : « J'veux pas que tu partes. Mais t'avoir à côté, c'est pire qu'un supplice. »


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Re: Breaking point

Sam 1 Oct 2016 - 15:42


Il à toujours été fier de ta façon de gérer ta vie privée avec ton fils, et le reste.

Le reste. La bande de con. Adjectif qu'elle se garda d'émettre à voix haute par ailleurs. Ce n'était ni le lieux, ni le moment. Par réfléxe, elle récupéra la veste qu'il avait jeté dans un coin pour la ranger. La maniaquerie avait le don de lui faire évacuer la pression face au moment qu'elle était en train de vivre.

Tu ne pouvais pas savoir, et il connaissait tes efforts. Il m'en a parlé. Finit-elle tout de même par admettre devant le regard interloqué de Gary. Faisant une moue, elle finit par rajouter. Je suis toujours restée en contact avec lui, et j'avais emmené Norman à l'hopital le voir, il me l'avait demandé.

Il allait pas non plus lui coller un procès non ? Ce n'était un secret pour personne qu'elle avait toujours adoré son beau père un peu barré et son penchant pour la bouteille.
Ca lui serrait le coeur, de l'entendre se dénigrer de la sorte. Bien sûr, il avait eu ses torts, mais jamais elle n'aurait supposé qu'il s'en serait voulu à ce point. Elle avait même cru qu'il mentait, quand il avait affirmé ne plus toucher une goutte d'alcool alors que c'était bien elle qui avait joué les médisantes. La brune se mordit un instant la lèvre, mal à l'aise avant d'essayer de le calmer avec ses maigres moyens.

Non, c'est pas ça... C'est juste que. T'as eu une vie différente, et voilà. Ca va s'arranger, ça finit toujours par s'arranger... Tu es plus fort que ça. Je le sais, je ne me serai pas battue pendant des années à te hurler dessus sinon.Avait-elle admis avec un petit rire nerveux.

Une mère absente, une relation bizarre avec son père, ses fréquentations... Ils avaient toujours été aux antipodes de par leur mode de vie. Elle allait bien devoir y croire pour deux de toute manière. Elle n'avait pas stoppé leur relation à cause de lui, mais à cause d'eux. Il retombait sans arrêt, et elle se voyait s'effondrer doucement à son tour. Elle ne l'avait juste pas supporté, après des années à se battre pour deux. Sauf que la dernière phrase lui fit l'effet d'un coup de poing dans le ventre. Un supplice, à ce point ? Elle n'avait pu s'empêcher de baisser les yeux vers le sol, presque honteuse. Elle n'aurait jamais dû venir en fait, voilà tout.

Ce n'est pas dur que pour toi. Avait-elle admise du bout des lèvres, croisant les bras contre sa poitrine en préférant regarder ailleurs. Ce n'est pas parce qu'on est plus ensemble, que tout s'efface comme par magie.

Ca n'avait pas été facile pour elle non plus. De passer pour la méchante auprès de son fils sans lui expliquer le fond du problème, recommencer à zéro, refuser un quelconque rendez-vous amoureux parce qu'elle ne parvenait pas à oublier son histoire. Que croyait-il, qu'elle était insensible ? Elle ne voulait pas s'attarder sur ce qu'elle pouvait ressentir.

Donc... Je vais aller dans la chambre de Norman. Je reste encore quelques heures si tu as besoin, et je ne te ferai pas l'affront de rester face à toi si c'est un supplice.

Il n'y avait eu aucune méchanceté dans sa voix, comprenant parfaitement cette douleur interne pour la vivre constamment en miroir. Lui souriant avec une pointe de tristesse, elle vint retirer ses boucles d'oreilles pour les ranger dans son sac, récupérant sa cigarette pour l'écraser. Prudemment, elle était venu déposer un rapide baiser sur la joue de son ex-mari, rajoutant encore.

Essaie de te dormir. Cogiter ne t'aidera en rien.
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Re: Breaking point

Sam 1 Oct 2016 - 16:24

C'était con à dire, mais il avait toujours pensé que c'était plus facile pour Rose que pour lui. Comme si, quand elle avait décidé de quitter le domicile conjugal, elle avait laissé dans le salon ses sentiments et tout le reste pour repartir ailleurs de zéro. Mais elle avait été loin, pour ça, très loin. De lui, et de ce qu'elle éprouvait pour lui. A Seattle. Dans sa première vie, qu'elle avait quitté quand il l'avait mise enceinte sans vraiment le vouloir pour autant. Elle avait retrouvé là-bas tout ce qu'elle avait laissé pour venir à Phoenix, et qui ne l'avait peut-être pas rendu si heureuse que ça.

Gary se tut un instant, essayant de réfléchir à tout ça. Mais son crâne était bien incapable d'être vraiment compétent dans ce domaine, et quand la brune lui dit qu'elle allait rester encore quelques heures, et qu'il devrait se reposer, il hocha simplement la tête. Elle avait raison, comme toujours. Car Rose avait toujours raison sur tout, et que c'était compliqué pour lui de vraiment faire quelque chose de censé dans son état. Elle irait dans la chambre de Norman, pour l'épargner de sa présence et du supplice que c'était.

Mais y'avait une certitude. C'était jamais simple d'être celui qui partait, laissant derrière lui tout ce qu'il y avait. Que ce soit une décision motivée ou la fin d'une vie. Celui qui partait était rarement le mieux loti. Mais de sa position, Gary était persuadée que ça n'avait rien de simple non plus d'être celui qui restait à la fin. The last man standing. C'était pas la position enviable, parce que quand y'avait plus rien pour se retenir, ça voulait juste plus rien dire d'être le dernier. Y'avait pas de fierté à être vivant, quand tout mourrait autour de soi.

____________________

Dans la soirée, Gary s'était relevé de son lit. Il n'avait pas réussi à dormir, encore moins à penser, mais on pouvait dire qu'il s'était plus ou moins reposé, dans les très grandes lignes. Il était allé se mettre dans la cuisine, près de la table, sur l'un des sièges après avoir sorti un verre de vin et une bouteille. Remplissant le premier avec le second, il avait simplement fixé les deux en se demandant ce qu'il foutait, incapable d'en faire plus sur l'instant. Il avait pas le cœur à y tremper les lèvres, à y toucher, à essayer...

Il était juste... Là. Pas tenté par tout ça, la tête encore vide, à se tourner parfois vers son téléphone fixe en s'attendant à l'entendre sonner pour que son père lui demande des nouvelles. Il lui aurait demandé si ça allait, s'il avait bu un truc, comment allait Rose et Norman. Gary lui aurait répondu qu'il faisait tout pour ne pas être un grand n'importe quoi en leur compagnie, et que c'était le seul moment où il ne voulait pas se laisser couler.

Mais ça... ça, il le garderait pour lui. Il entendit seulement du bruit dans la chambre de Norman, et là où il aurait voulu voir la petite tête blonde de son fils, ce fut Rose qui apparut dans le couloir avant de venir se planter à quelques pas de lui en se demandant sur le moment ce qu'il était en train de faire. C'était con à dire encore, mais il se contentait de regarder un verre de vin rouge sans y toucher. Un vin qui était peut-être très bon, mais ça Gary en savait vraiment rien.

« Tu dors pas ? » Demanda-t-il simplement en relevant le nez vers elle. Il avait les yeux secs, parce qu'il avait pleuré tout à l'heure. Sa voix était rauque, enraillée, probablement par le fait qu'il avait aussi la gorge sèche. Il avait besoin de boire, mais avait pas le cœur à le faire. C'était comme se dire que s'il le faisait maintenant, alors tous ses efforts seraient perdus à tout jamais, et ça ne servirait à rien. « J't'ai réveillé. Désolé. » tout du moins, il se l'imagina. Y'avait aucune raison pour qu'elle soit toujours là sinon.


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Re: Breaking point

Sam 1 Oct 2016 - 16:51


Les heures avaient passées, sans qu'elle ferme l'oeil ni même trouve la force de se relever du matelas pour retourner à l'hôtel. De peur que Gary ne fasse une connerie, sans doute. Elle avait passé le temps sur des détails futiles, comme refaire le lit au carré, arranger une ou deux peluches qui traînaient dans la chambre de son fils, avant de terminer assise sur le rebord du lit à relire les dossiers de ses derniers patients en écoutant de la musique douce. Pas la musique classique autorisée en salle d'opération, non. Plutôt de l'instrumental de film, de vieux chanteurs, de Frankie Valli en passant par Sinatra et Bill Halley.
Le rock and roll avait toujours eu le don de calmer ses nerfs, la plonger dans une autre époque ou la vie était tellement plus agréable que la leur. Mélancolique, pensive, l'interlude musicale avait au moins eu le mérite de lui faire penser à autre chose que le chagrin qui régnait dans cette maison qui fût la sienne à une époque.

Tout du moins, jusqu'à ce qu'elle relève la tête en entendant des pas en direction de la cuisine. Fronçant les sourcils, elle avait fini par ranger sa lime et posé ses écouteurs sur le petit bureau en bois pour venir voir pourquoi Gary s'était relevé.
En douceur, elle était entrée dans la cuisine en remarquant le verre plein auquel il ne touchait pas, se contentant de le fixer bêtement. S'adossant contre le chambranle de la porte, elle n'avait pas pu s'empêcher de sourire en constatant qu'il tenait relativement bien le coup. A une époque c'est la bouteille vide qu'il aurait fixé...
Rose avait fait signe que non, s'approchant un peu plus de la table ou il était assis.

Je relisais des vieux dossiers, j'ai fais un peu de ménage... C'est rare que je m'endorme avant une heure du matin depuis le retour à Seattle.

Elle avait soupiré, repensant à l'époque bénie de ses horaires flexibles de toute jeune maman. Terminé les débuts de journée à 9 heure pour rentrer à 19h30. Seattle était une ville plus active que Phoenix, et bosser dans l'un des plus gros hôpitaux de la région ne l'avait pas aidé à conserver des horaires agréables.
En silence, elle avait récupéré le verre de vin en faisant tourner le liquide sombre, avant de jeter son contenu dans l'évier. Pas la peine qu'il ne se tente plus en continuant de le fixer de la sorte. En revanche, la grande bouteille d'eau minérale qu'elle lui posa sous les yeux serait d'avantage utile à sa voix eraillée.

Si tu ne bois pas un peu, tu vas atterrir directement aux soins intensifs. Prévint-elle avant de sortir une énième cigarette de son paquet, se servant un verre de jus de fruit en ouvrant la fenêtre pour laisser l'air filtrer dans la cuisine. Tu as pu dormir ?

Sans doute que non, mais au moins resté allongé l'avait peut-être reposé un minimum. Expirant doucement sa bouffée, elle évita le regard du trentenaire. Après ce qu'il lui avait dit plus tôt, elle préférait éviter d'en rajouter une couche. Tu veux que je demande à Joey de venir te voir ?
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Re: Breaking point

Sam 1 Oct 2016 - 17:22

« Non. » Avait-il tout simplement répondu en la voyant se débarrasser du verre plein dans l'évier de la cuisine. Ça ne lui fit même pas un pincement au cœur. Avant, il aurait probablement tempêté en la voyant faire mais pas là. Il en avait probablement pas le courage non plus et puis... Surtout, a quoi ça les avancerait, hein ? Il soupira pour prendre le temps de réfléchir. Il avait été un peu sec en lui répondant. Non, il n'avait pas pu dormir, non il ne voulait pas voir Joey. « Sinon on va vider cette bouteille, mais pas dans l'évier. »

L'homme prit le verre d'eau qu'elle lui avait tendu, et le termina rapidement. Le frais lui fit un bien fou il fallait l'admettre. Dans cette chaleur de plomb, à Phoenix, en plein mois de septembre, quoi de mieux qu'un peu d'eau ? Rien. S'il avait pu se mettre en entier dans son frigo, probablement qu'il l'aurait fait, mais pour l'instant il avait une invité dans sa maison et mieux valait éviter de passer pour un fou car vu son état, elle aurait tout à fait pu le faire interner ; il garda néanmoins le silence. Un peu plus réveillé après ce verre d'eau il fallait l'admettre.

Et releva finalement le regard vers Rose. Il la regarda droit dans les yeux. Et il se rendit compte de ses traits tirés, de sa fatigue, comme si elle n'avait pas le droit à un sommeil réparateur elle non plus. Pinçant les lèvres, l'homme retomba au fond de son verre vide, rongeant son frein un maximum. Jusqu'ici, il s'était pas mal apitoyé sur son sort, en se disant que ça passerait, et que fallait peut-être se complaire dans son malheur pour avoir envie de s'en sortir à un moment. Mais là... Son ex-femme à côté de lui...

Ouais, non. Il rongea son frein encore un peu, pas certain que la question qu'il allait lui poser lui plairait vraiment. Il avait pas la force d'essuyer une dispute, pas envie de lui envoyer des piques, plutôt résolu à écouter, sans trop savoir si ça changerait quelque chose à son malheur à lui. Y'aurait rien de rassurant dans ce qu'elle pourrait lui dire, rien qu'il avait spécialement envie d'entendre ce soir. C'était peut-être de la politesse, ou peut-être de la connerie, il en était pas certain. Mais il tenta :

« Tu te plais, à Seattle ? » Fit-il d'une voix un peu sèche, grave comme toujours en se rendant compte qu'elle pourrait prendre ça comme un reproche comme elle avait l'habitude. Parce qu'une séparation était jamais simple, et puis qu'essayer de repartir sur des bases solides non plus, c'était pas facile, surtout dans le cadre d'une séparation où l'un avancait, et l'autre pas. Rose était un avion de chasse, elle irait toujours de l'avant parce qu'elle en avait la force. Elle se laissait pas porter. Lui, par contre... « J'veux dire... T'y es heureuse ? »

C'était peut-être parce qu'ils avaient tenté ensemble qu'il était aujourd'hui si misérable. Deux mondes très différents, qui s'étaient entrechoqués. Un mélange instable dans un tube à essai, qui avait pourtant donné un petit miracle inestimable aux yeux de son père, comme à ceux de sa mère. Il se demandait souvent comment eux, si promptes à hurler, avaient réussi à faire quelqu'un d'aussi admirable que leur fils, Norman. Se raclant la gorge pour tenter de réunir un peu de contenance, il reprit pour lancer la discussion :

« T'as pu retrouver Lara, j'suppose mais... » Lara lui manquait pas par contre. Ils avaient jamais vraiment pu s'encadrer tous les deux, jamais. Il lui volait sa meilleure amie, son faire-valoir, elle lui reprenait après toutes ses années sans manquer de lui enfoncer quelques coups de couteau dans le dos avec des médisances bien placées. Mais y'avait pas que Lara dans la vie de Rose et il le savait. Et il y en aurait forcément des nouveaux à un moment, alors peut-être qu'il était temps de l'entendre et de l'accepter : « D'autres gens ? T'as recommencé à avancer ? »


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