Le silence s’alourdissait à chaque seconde. Un peu plus irritant, un peu plus perçant, chaque instant le rendait plus difficile à supporter. L’atteinte et la crainte se mêlaient doucement et Neil resserrait sa poigne sur son arme détestée.
Son regard passait sur l’autre qui rangeait son arme. Déjà ? Le gamin aurait bien passé la nuit comme ça, sur le qui-vive. Ça ne serait pas très bon pour la santé mentale mais il s’en remettrait toujours bien mieux que de se faire surprendre au milieu du salon en pleine nuit. Il restait encore debout, près de la porte, jusqu’à que Daniel s’adresse de nouveau à lui. Un simple hochement de tête, il allait reposer la hache.

Dormir était peut-être un peu trop demandé pourtant après cette frayeur. Le gamin se sentait à peine de se coucher sagement. S’asseyant, il écoutait. Le lendemain ils partiraient d’ici, c’était certain à présent. Le biologiste n’aimait pas rester dans un seul coin apparement, Neil ne pouvait pas lui en vouloir, même s’il aimait à squatter quelques fois la même baraque avant d’en changer, juste le temps d’épuiser les alentours qui ne l’avaient pas encore été.
Bouger, c’était aussi abandonner à d’autres ce qu’ils auraient pu trouver ici bas. Il n’était pas en état de contrecarrer ses plans. Préférant s’allonger face au canapé pour en fixer le dossier. A défaut de sommeil, ça le reposerait.

Nouveaux coups de feu. Des appels plus distincts encore. Une femme, des morts peu après, ils étaient si proches. Tendu à nouveau, il se crispait dans le canapé. Pas un bruit, pas un mot, laisser cette inconnue se démerder face à ces horreurs.
Un cri plus strident le frappe suivi d’un autre qu’il aurait aimé ne pas reconnaitre. Les morts sont bientôt à leurs portes, pour l’instant occupés sur le cadavre qu’ils entendaient depuis un moment. Passant une main sur sa face, le gamin tente de faire abstraction. C’est vrai, dehors ils sont là, ils courent et rampent le monde depuis plus d’un an sans que rien ne semble les stopper. Neil souffle du nez. Dormir n’est plus de mise, il a le bide serré.
Et s’ils voyaient une bride de lumière s’échapper par les volets ? Et si d’autres encore étaient attirés par les cris et détonations ? Et si là maintenant ils étaient en train de venir à eux ?

Une mine grave s’installe sur sa face, il se tourne finalement pour fixer le plafond. Vie de merde, de rien, à juste courir pour ne pas se faire bouffer et trépasser quand même. Son regard tombe sur l’autre type qu’il a décidé de garder près de lui. Il n’a pas bougé non plus, c’est devenu normal de laisser son prochain en danger de mort sans même se poser la question. Monde de merde, gens pourris jusqu’à la moelle.
Tentant un instant de fermer les yeux, le métis ne voit que des images de corps décharnés, de la première horde qu’il a eu l’occasion de voir de près. Et si demain ils tombaient sur ça ? Stagnant juste devant, à deux maisons d’ici-bas. Ce serait possible, mortel, définitif. Probablement qu’il s’enfuirait avec le poney, abandonnerait Daniel à son sort. Ou alors la jument partirait sans attendre son cavalier, pour sa propre survie aussi. A croire qu’on ne pouvait vraiment plus compter sur personne.
Définitivement, il n’allait pas dormir beaucoup.