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Re: Still alive

Lun 27 Fév 2017 - 9:24


La question semblait vraiment tomber dans la mare. L’autre type n’y avait jamais pensé, ça paraissait assez évident soudainement. Il n’avait sans doute vraiment personne près de lui, une lueur serait apparue dans ses yeux, au moins un semblant de détermination à quelque chose. Là il n’y avait rien, absolument rien du tout qui lui venait à l’esprit. Neil acquiesçait à la réponse, survivre comme une fin en soi. Ce n’était pas terrible comme carburant. C’est ce qui empêchait le gamin d’abandonner sa quête, être à nouveau désœuvré comme il l’avait été presque toute sa vie durant, au moins les dix dernières années. Cette vie l’avait déprimé plus que tout, il ne voulait pas recommencer, pas encore se trainer comme une coquille vide à attendre qu’on le pousse dans une situation tout aussi minable que le reste.

Daniel semblait partager le sentiment. Le gamin le fixait, gardant un fond de bol de bouillon intact. Les mots fusaient trop vite pour qu’il y réfléchisse vraiment, ou que le texte eu été préparé. Ce type avait vraiment hait son existence. Neil comprenait, surement mieux que la plupart qui regrettait leur vie d’avant. C’était quoi sa vie ? Glander, s’ennuyer jusqu’à la torpeur, se taper des putes parce qu’il était incapable d’avoir un dialogue normal, ne jamais être foutu de rien faire avec ses dix doigts ? Franchement, il partageait le sentiment de liberté. Il voyageait maintenant, c’était la merde, il risquait sa vie chaque instant dehors, mais il vivait presque pour la première fois. La vie avait quelque chose de tangible à présent.

Le brun continuait, le latino écoutait sagement. Lui aussi avait semé des morts sur sa route. Neil en avait abandonné à leur sort. Ce type-là était désorbité, plus que lui encore, lui, il avait sa jument à tenir en vie au quotidien. C’était déjà quelqu’un, une responsabilité, quelque chose qui lui ramenait les pieds sur terre et qu’il pouvait considérer accompli à la fin d’une journée.

« Amen. » Il levait son fond de bol avant de l’avaler. Probablement que ses papilles n’avaient plus de gout depuis un moment, mais ce n’était pas mauvais à vrai dire. Il avait surtout l’habitude de gâteaux secs et de chips, alors un repas chaud, aussi bizarre qu’il soit, était parfait.
Le gamin se tournait au-dessus son épaule avant de se levait finalement. La jument commençait à somnoler, encore toute harnachée. Ils resteraient ici cette nuit, il n’y avait pas à tergiverser, autant la soulager au possible. Il revenait vers elle pour détacher le filet, le posant sur un dossier de chaise avant de caresser le chanfrein dans toute sa longueur puis de l’embrasser doucement. Brave Roxanne, probablement qu’elle lui survivrait. Cette jument était intelligente, plus que certains humains qu’il avait pu croiser. Elle l’avait porté dans les pires moments et maintenant était tout pour lui.
Il détachait la sangle sous le ventre pour retirer la selle lourde de ses sacs, la posant mollement sur la table. Le tapis, une autre caresse dans le dos et il pouvait revenir.

Revenu à sa place il fixait un moment les flammes qui dansait dans l’âtre. Il faisait bon ici, lumineux aussi, chaleureux en définitive. Le calme retombait, un silence de presque mort même, mais ça ne le dérangeait pas plus que ça. Il se reculait, toujours les fesses au sol, pour s’adosser au canapé et se perdre un temps dans ses pensées. Le monde avait changé, les règles s’étaient écroulées sous le poids de leur propre futilité. Il n’y avait plus tant place à la banalité à présent, tous devaient courir, plus aucun enfant n’était innocent.
Ils avaient de la chance en définitivement, nos deux désœuvrés, ce nouveau monde leur convenait. Neil reposait les yeux sur le type, le jaugeant silencieusement. Il se demandait ce qu’avait pu être sa vie à lui pour qu’il en reste si hargneux à présent.
« Fais-moi rêver. Tu faisais quoi comme taf avant ? » Comme la question était un peu indiscrète, peut-être, il enchainait. « Moi je promenais des chiens. » Un sourire venait gratuitement. Si c’était pas le job le moins survivaliste du monde, le plus pourri et ridicule à la fois. L’autre pouvait difficilement faire pire.  
 
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Re: Still alive

Lun 27 Fév 2017 - 21:30

Des chiens, hein ? Daniel aurait presque pu répondre que, lui aussi, c’était ce qu’il faisait. Cela n’aurait pas été un mensonge à proprement parler, juste une simplification sommaire et franchement grossière. Dans plusieurs situations, il se serait probablement contenté d’une réponse de la sorte. Il n’aimait généralement pas remuer cette époque révolue, qui le ramenait à Aiko. Cependant, le jeune était sympathique, et il n’avait parlé sérieusement à personne depuis déjà un bon moment. Aussi, il s’autorisa à retourner de vieilles roches pour en exposer le contenu.

- Heh. J’en connais une ou deux à propos des chiens. Je suis… j’étais… biologiste. Zoologiste. Écologiste. Peu importe. Choisis ton terme. La nuance est plutôt mince. Elle varie d’un type à l’autre. Je passais mon temps à parcourir le globe. Aller ici, puis là-bas. Au nord, au sud, d’un bout à l’autre du monde… Tout ça pour donner apporter mon aide à des collègues. Des instituts de recherches m’appelaient, et j’allais y passer quelques semaines, quelques mois pour guider leurs projets. De la recherche sur l’écologie animale, voilà ce que je faisais. De l’observation, de la documentation… J’écrivais des articles, je travaillais sur des bouquins avec quelques équipes. J’étais surtout consultant, à vrai dire. À part deux ou trois projets que je menais par moi-même. Mais, je n’ai jamais été capable de rester en place bien longtemps. Alors m’impliquer partout c’était, disons, plus intéressant pour moi.

Il acheva son repas et posa sa vaisselle de côté. Le ventre plein – pour une journée post-apocalyptique – il profitait maintenant davantage de la chaleur que dégageaient les flammes. Étirant le bras, Dan ramena une bûche près de lui et l’ajouta prudemment à celles qui grillaient dans le poêle. Quelques-unes s’effondrèrent sous le poids de la nouvelle et le brasier reprit de plus belle, projetant des lueurs plus vives sur le mur du salon. Par sécurité, Daniel vérifia une nouvelle fois les fenêtres condamnées du coin de l’œil, mais elles étaient toujours aussi opaques. Ils ne risquaient rien pour l’instant.

Daniel tira son sleeping bag près du feu et s’étala dessus, croisant les bras derrière sa tête. Il n’avait jamais été un maniaque du confort. Souvent, dans ses premières années de recherche, il avait dû dormir à même le sol sur des surfaces bien moins confortables que le plancher chaud d’une vieille maison. Il n’aurait aucune difficulté à dormir. Du coin de l’œil, il observa l’animal qui servait de compagnon à Neil.

- Tu promenais les chiens… tu faisais du cheval, aussi ? C’est la tienne ? Ou tu l’as prise après… tout ça ?

Sourcils à demi froncés sous la curiosité, il laissa son regard se perdre dans les craques du plafond, qui semblaient vibrer à la lueur des flammes. Instinctivement, sa main gauche glissa le long du tissu pour se poser sur sa garde de sa machette. Il ne dormait jamais sans ses armes ; peut-être était-ce l’une des raisons qui expliquaient sa survie jusqu’ici. Ça, et peut-être beaucoup de chance, à moins qu’il ait simplement été le seul de ceux avec qui il avait voyagé à savoir agir et réagir adéquatement.

Et Aiko ? Là-bas, de l’autre côté de l’océan, des années après leur dernier adieu. Était-elle toujours en vie ? Non. Il valait mieux ne pas y penser. Il ne devait pas y penser à l’époque, quand il était le seul dans sa merde. Mieux valait ne pas y penser maintenant que tout le monde traînait dedans. Au lieu de cela, il laissa ses pensées dériver sur le cheval, et sur les souvenirs plus heureux qu’il lui rappelait. Il se souvenait particulièrement avoir été mordu par un de ses damnés herbivores, dans le dos, sournoisement. Rien de bien dangereux ni de trop douloureux, aussi attachait-il l’expérience à un souvenir positif et amusant malgré tout. Un sourire amer étira le coin de ses lèvres. Une fois de plus, il étouffait ses pensées sombres à coups d’idées ridicules. Et Neil, lui ? Quels démons pouvaient le hanter, dans cet après-monde ? Qu’avait-il pu laisser derrière lui, avec la chute de la société ? Qu’avait-il été obligé de faire pour se garder en vie, depuis le début de cette histoire ?

- Ton père… Tu as dit qu’il t’avait donné rendez-vous à Seattle. Ça remonte à longtemps ? Je veux dire… Quand l’as-tu vu pour la dernière fois ?
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Re: Still alive

Lun 27 Fév 2017 - 22:26


Neil écoutait docilement en le regardant. Daniel avait eu une vie trépidante en comparaison, pleine de voyages, de trucs très importants, à coté il avait vraiment l’air con. Promener le chien d’une voisine, c’était le truc le plus significatif qu’il avait accompli de sa vie. Ça et avaler un litre de bière en faisant le poirier. Le gamin commençait à se demander du coup ce qui poussait ce genre d’homme à execrer sa vie. Il avait eu des voyages pour étancher sa soif de liberté, mais ça n’avait pas dû suffire.
Le métis ne pouvait pas vraiment s’imaginer, il n’avait même jamais quitté l’appartement de sa mère, ni Salem avant les évènements. Surement qu’avoir une famille devait être compliqué, il aurait quand même bien aimé, juste pour voir ce que ça faisait. Ils n’avaient jamais vécu qu’à deux ces vingt dernières années, alors se projeter dans un mariage, un job et tout ça… il avait un certain mal.

« J’en ai fait quand j’étais petit, j’ai eu le temps de m’y remettre. » Il jetait un œil à la jument qui le fixait. « Je l’ai trouvé dans le parc olympique, on était perdus tous les deux alors… on s’est plus quitté depuis. » Il tendait un bras vers le nez chaud pour le caresser. C’était sa ponette maintenant, depuis plusieurs mois déjà. Ils mangeaient, dormaient, avançaient ensemble. S’il la perdait il arrêterait. Il n’aurait plus de raison de continuer, la vie serait un calvaire trop grand pour ses épaules mal assurées.
Finalement il décidait de s’installer sur le canapé, tout allongé. C’était moins confortable qu’un lit mais suffirait bien pour la nuit. Il virait ses pompes et câlait sa tête sur l'accoudoir. Il l’avait déjà fait du temps du chalet et de Fawn, et préférait toujours garder un œil sur la porte d’entrée. D’ici il était plutôt bien posé, Roxanne pourrait venir le réveiller sans trop de difficulté le lendemain matin.

Le type le questionnait encore, Neil lui accordait son attention le temps de l’écouter et revenait à fixer le plafond à son tour. « J’ai reçu un sms y a un an et je l’ai vu… en chair et en os j’veux dire… y a bien quatre ans, cinq peut-être. » Une vague moue accompagnait la constatation. Ils n’avaient jamais été très proches, pas les vingt dernières années, ils étaient presque des étrangers. Il reposait les yeux sur le type. « Honnêtement j’pense qu’il est mort hein. Mais j’ai plus personne d’autre alors… » Alors il chassait la baleine blanche, pour rien, en sachant pertinemment qu’il ne la trouverait pas.
Ça lui faisait au moins une occupation.
Parfois il se demandait, si vraiment un jour il se retrouvait face à lui, qu’est-ce que ça pourrait donner ? Leur relation avait toujours été distante, presque froide, Neil lui en avait toujours voulu d’être parti. Maintenant que tout s’était écroulé, il était surement temps d’enterrer les vieilles querelles. Il doutait que ça suffise pourtant, ils ne partageaient rien, ne s’entendaient pas, se foutaient en rogne juste à se regarder. Probablement que c’était une meilleure chose qu’il soit mort, ils n’auraient pas à s’affronter à nouveau comme deux coqs en rut.

« Tu comptes rester dans le coin ? J’veux dire, essayer de t’installer ? » S’il ne comptait plus descendre, ni remonter, ni tenter la mer, ni le reste de terre, il n’y avait plus que ça alors. S’arrêter de courir, décider de se poser finalement. Encore fallait-il trouver l’endroit. Pour l’instant c’était encore calme en montagne, les morts n’étaient pas le pire souci, c’était de loin la famine. Il en avait fait l’expérience, deux mois consécutifs de disette, et ce n’était pas faute de faire des trajets régulier pour chercher de la nourriture. Il n’y avait rien là-haut, juste ce qui acceptait de pousser quand la neige ne s’emmêlait pas.
« Je vais rester dans le coin un moment. »
 
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Re: Still alive

Mar 28 Fév 2017 - 17:29

Un sms ? Au début de cette histoire ? Heureusement pour Neil, il ne semblait pas se faire d’illusions. Si par miracle son père était toujours en vie, Daniel voyait mal comment il pouvait encore être au même endroit. Par les temps qui courraient, stagner devenait difficile. Les calamités n’attendaient pas bien longtemps avant de s’abattre. À force de rester au même endroit, on finissait par les attirer. Il n’y avait qu’à penser à toute cette route qu’il avait entreprise depuis la chute du monde. Combien de kilomètres avait-il parcourus, et combien de planques avait-il visitées ? Et, surtout, combien de gens avait-il perdu en chemin ?

Cependant, malgré tout, il parvenait à comprendre vaguement l’intérêt du jeune. Lui, une fois à Vancouver, il n’avait pas cherché un instant à retrouver les siens. Ceux qu’il connaissait, il les considérait déjà comme morts. Mais Neil était jeune et avait son histoire à lui. S’il tenait à chasser cette chimère, il pouvait bien le faire. De toute façon, ce n’était pas comme si le temps lui manquait. Dan devait admettre cependant que le garçon bougeait lentement. Un an et des poussières… pour marcher d’un état à l’autre… avec un cheval en plus, ça faisait peu. Surtout lorsqu’il considérait sa propre route depuis.

Une main sous sa tête, l’autre sur la garde de sa machette, Dan pinça légèrement les lèvres quand Neil lui demanda ce qu’il comptait faire. Rester dans le coin, s’installer ? Pas vraiment. Il aurait été exagéré de dire qu’il prévoyait faire quelque chose. Il agissait plutôt en nomade opportuniste. Un peu comme un ours blanc qui parcourait les étendues glaciales de l’arctique à la recherche de nourriture.

Un sourire triste se dessina sur ses lèvres. Un ours. Aiko avait l’habitude de le comparer à ces animaux, qu’il avait étudiés dans ces premières années. Il les affectionnait particulièrement. Ces grands prédateurs imposants incarnaient une force de la nature remarquable, pure. Un autre souvenir entaché par les regrets que jetait Aiko. Avec une moue déçue, Dan chassa les souvenirs qui s’y rattachaient et laissa son regard dévier vers le feu.

- À vrai dire, je n’ai pas vraiment de plan. Je vais là où est la nourriture. Si je trouve quelque chose de bien dans les parages, j’y resterai aussi longtemps que ce sera profitable. Et quand les choses se corseront, eh bien, je verrai. Je préfère ne pas trop me fier à des prévisions. Je prédis les aléas des rôdeurs avec une moins bonne efficacité que les météorologues prévoyaient le temps.

Il haussa les épaules doucement – ou, plutôt, il les remua vaguement en vue de sa position bien avachie.

- Pour l’instant, la région ne semble pas être trop mal. Y’a de quoi se nourrir, c’est certain, et une bonne quantité de refuges. Il y a bien quelques rôdeurs, mais je n’ai pas encore croisé de horde, et les gens ne semblent pas être bien nombreux, donc je suppose que les dangers restent limités. J’ai fait quelques mauvaises rencontres, un peu plus au nord. Je sais me débrouiller, mais je ne tiens pas à tenter le diable. Vaut mieux éviter les ennuis que de sauter dedans.

Ceci dit, il expira doucement. Il repensait particulièrement à sa première mauvaise rencontre à Vancouver, au port. Peut-être aurait-il dû réagir différemment. Se montrer plus ferme, plus rapide. Plus compétent. Aujourd’hui, en tout cas, il n’hésiterait pas. Il le savait. Une part de lui le lui susurrait, comme une curieuse promesse à lui-même. Aiko avait l’habitude de le comparer à un ours ? Alors, il agirait comme tel. Rien ne pouvait venir à bout d’un ours. Pas plus les intempéries que les autres animaux.

- Tu sais un peu ce qu’il y a dans la région ? Je suis passé par Seattle il y a quelques semaines, mais je n’ai pas été là bien longtemps. Quelques jours à peine, et j’ai évité le centre-ville, je me dirigeais encore vers le sud à ce moment.
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Re: Still alive

Mar 28 Fév 2017 - 19:28


Neil non plus n’avait pas vraiment de plan. Il allait juste rester dans le coin, peut-être retourner à Salem un jour ou l’autre. Il connaissait un quartier plutôt confortable, avec des haies très hautes, des jardins, même un bassin sur le côté. La maison de Molly semblait tout indiquée quand il s’agissait de trouver un paradis dans ce bordel. Elle était partie pour un camp dans les premiers instants, il se demandait souvent si ça avait tenu. En janvier il était encore debout, ça il le savait, mais en un an… mieux valait ne pas y songer trop fort. Salem était de l’histoire ancienne à présent, il était dans un autre état, avec une nouvelle vie.

« Je connais surtout la forêt et la montagne qui va avec, à l’ouest. Je suis pas encore entré dans Seattle. Je sais qu’il faut pas aller à Gig Harbor, y a une meuf là-bas, une vraie psycho et je crois qu’elle a tout un groupe de timbrés avec elle. » Et les hunters. Il ne les avait pas croisés en personne mais la simple vue de leur scène de crime lui filait des frissons en y repensant. « Y a plusieurs groupes de timbrés même. T’approche pas de cette zone. »

Son regard se posait sur la jument qui venait doucement faire deux pas dans sa direction pour lui humer les cheveux, faire semblant de les mâchonner un peu. Il fermait les yeux un instant, confortable. « Dans la forêt j’ai croisé personne d’hostile, et j’y suis resté bien six mois. Y a au moins trois hordes mais avec les montagnes on les esquive facilement. Franchement les morts c’est pas un problème là-bas. » Il avait bien risqué sa vie quelques fois, mais c’était surtout à cause de Roxanne. Seul, sur ses pieds, il ne s’était jamais vraiment fait peur. Il avait même pris l’habitude de se balader sans arme aucune et n’en était pas mort pour autant. La vie était bien meilleure dans ce temps-là. L’esquive suffisait à tout, pour les gens, pour les morts, pour les animaux. Il avait même ses petites techniques perso pour se nourrir sans effort à base d'eau de bouleau.
« Je te le conseille pas en hiver par contre, y a cinquante centimètres de neige de partout. J’ai failli crever de famine là-bas, c’pour ça que je suis descendu. » Peut-être que les gens de la ferme étaient morts déjà, qui sait. Avec le spectre de Morgan qui rôdait, tout pouvait arriver. Putain de meuf. Il s’en voulait un peu de les avoir abandonnés à leur sort, mais il n’avait pas eu le choix. Survivre seul, il en était capable, porter quatre types à bout de bras, ça, c’était au-dessus de ses forces. Il aurait fini par mourir à leurs côtés, ça n’aurait strictement rien apporté.

Levant une main pour caresser le chanfrein, il rouvrait les yeux quand la ponette se détournait. Son regard glissait du plafond jusqu’au feu, puis au type. « Ça ressemble à quoi Seattle maintenant ? »
Le gamin flippait à l’idée d’y foutre les pieds. Toutes les villes qu’il avait croisées avant les bois étaient dévastées, des ruines fraiches qui sentaient encore le sang de leurs habitants. Ça grouillait de cadavres ou de groupes plus ou moins hostiles, si c’était encore le cas ici aussi, mieux valait sans doute s’abstenir. Comme Daniel il préférait éviter les ennuis, préférant se faire patient. Un an déjà qu’il devait y rentrer, il commençait tout juste à caresser l’idée, peut-être.
 
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Re: Still alive

Sam 4 Mar 2017 - 21:24

Neil semblait bien connaître les environs. Et – cela ne surprenait pas Daniel – la région de Seattle semblait se résumé au même bric-à-brac que toutes les autres qu’il avait visitées depuis son départ du nord. Peut-être ferait-il mieux d’essayer ailleurs ? Peut-être qu’avec un bon bateau, il pourrait trouver une île, quelque part. Avec suffisamment de matériel, il pourrait s’installer confortablement. Pêcher, et peut-être planter quelques graines pour avoir des légumes. Cependant, il doutait de trouver un tel endroit. Les chances étaient trop minces. Pour le sud, il se fierait à l’avis de Dennis et, pour le nord, à son propre opinion. Restait peut-être l’est. Peut-être que, quelque part entre le pacifique et l’atlantique, il pourrait trouver un coin plus tranquille.

À moins de traverser l’océan ? Non. C’était encore plus ridicule. Les morts causaient problème par ici, il n’osait imaginer comment c’était dans les pays surpeuplés d’Europe et d’Asie. Et l’Australie ? Jamais il ne parviendrait à se rendre jusque-là. Il savait naviguer légèrement, mais pas au point de traverser le monde. Accoster au Japon, puis descendre peu à peu jusqu’à Sydney ? Stupide idée. Dan le savait, elle ne surgissait que pour cacher une question muette, celle de la survie d’Aiko. Il chassa une énième fois ce visage persistant de son questionnement et décida que Seattle convenait très bien pour l’instant puisque, de toute façon, elle se résumait à ressembler à tout ce qu’il connaissait.

- Je ne suis pas resté longtemps, pour être honnête. Mais, si tu veux mon avis, ça ressemble à tout ce que tu trouveras sur des kilomètres et des kilomètres. Les villes grouillent de morts et, comme tu l’as dit, on ne reste jamais bien longtemps sans tomber sur un imbécile. Les petits coins comme ici sont bien un temps mais… on finit par tout vider.

Pensif, Dan se redressa légèrement et étira le bras pour attraper le tisonnier. Il l’utilisa pour remuer légèrement les bûches crépitantes, et en jeta une nouvelle dans le brasier.

- J’ai passé suffisamment de temps là-haut à mon goût. J’ai eu ma dose de neige ; je ne compte pas courir après. Je veux bien croire que les forêts sont plus tranquilles, et qu’il y a un peu de gibier et de lapins – enfin, de lièvres, je veux dire – mais je commence à me demander si ce n’est pas tout autant suicidaire que d’affronter les intempéries ainsi. Je vais peut-être retourner un peu envers Seattle. Avec un peu de chance, il y a peut-être un coin plus tranquille. De quoi que je pourrais barricader, entretenir… Un endroit facile à approvisionner sans attirer les rôdeurs.

Il haussa les épaules. Ce n’était pas le plan du siècle, mais c’était déjà un début de plan. Il verrait bien en temps et lieu. D’ici là, Daniel n’était pas du genre à se monter des bateaux de grandeur. D’un geste prudent, il posa le tisonnier près de lui et récupéra ses allumettes et les vieux journaux avec lesquels il avait allumé le feu. Les titres annonçaient de vieux débats de l’ancien-monde. Corruption du gouvernement, déforestation en Amazonie, lapidations au Moyen-Orient… Autant de problèmes disparus, envolés avec le reste de leur monde. Il rangea les restes du journal dans son sac et se réinstalla sur son sac de couchage qui, à son avis, aurait bien profité d’un coup dans la laveuse. Au moins, il pouvait se consoler : ce n’était pas la pire odeur qu’il avait senti de sa vie. Celle-là devait se disputer entre celle des rôdeurs et de la merde d’ours.

- Il y avait un zoo, à Seattle…

Fronçant les sourcils, Daniel se redressa à nouveau, comme frappé par une inspiration soudaine. Un curieux sourire se dessina sur ses lèvres.

- Oui. Je me souviens, merde. Pendant mes études, j’ai travaillé pour celui de Vancouver. Alors, après, j’ai donné quelques conférences pour eux, et je me souviens d’avoir parlé à cette fille… Eva ? Maeva ? Je sais plus. C’était après une conférence sur les espèces parapluie. Elle avait les cheveux blonds. Je crois qu’il y avait eu un glitch dans les horaires, nos présentations avaient été inversées. Quelque chose dans le genre. Elle venait de Seattle. Enfin, du zoo, je veux dire.

Personnellement, Dan n’avait jamais mis les pieds là-bas, mais il avait une idée sommaire de ce à quoi le zoo pouvait ressembler. Comment s’appelait-il, déjà ? Wood… Woodland Park Zoo, oui. Il hocha la tête brièvement, comme pour approuver ses propres pensées.

- Ça pourrait être une idée. Enfin, à supposer que la place ne soit pas pleine et qu’il n’y ait pas déjà des gens dedans. Il pourrait y avoir de quoi s’arranger comme il faut, là-bas. Avec toutes les installations arrière, les structures pour héberger les animaux dangereux, je suis certain qu’il y aurait moyen de s’arranger quelque chose de sympa. À l’heure qu’il est, il ne doit pas rester grand-chose des animaux. Un peu de ratatouille et quelques vieux os, avec de la chance. Les morts ne devraient pas être bien intéressés par la place. Si personne n’est dans les parages, ça vaudrait peut-être le coup d’y jeter un coup d’œil.
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Re: Still alive

Mar 7 Mar 2017 - 9:08


C’était ça le plus emmerdant. A force de faire, de fouiller et de piller, toutes les ressources industrielles finirait un jour par disparaitre. Combien de temps encore la population survivante pourrait se baser là-dessus ? Combien pouvait encore se targuer de savoir faire des rideaux à partir de rien ? Il fallait s’installer, c’était le seul moyen d’avoir une production renouvelable, de ne plus dépendre de ressources déterminées. Mais où ? Comment ? Tout finissait toujours pas s’écrouler. Et les médicaments ? Personne ne savait plus les manufacturer sans une installation complexe et électrique. La merde. Ils y étaient jusqu’au cou.
Neil écoutait toujours l’autre. Lui aussi comptait partir vers Seattle, peut-être qu’ils pourraient faire un bout de route ensemble ? Pour l’instant leurs objectifs se ressemblaient. Survivre, ne plus courir après les boites de conserves, ne pas tenter de trucs risqués.

« Un truc en hauteur, ils lèvent jamais la tête. » Un truc qu’il avait remarqué pendant qu’il faisait le con sur les crêtes. Pourvu qu’il soit un peu haut et silencieux, aucun mort ne le remarquait. Il pouvait se balader facilement, même naïvement avec cette technique simpliste.

Le gamin ne décollait plus de sa couche, bien calé sur son canapé. Ça avait presque l’air d’une soirée pyjama dans le monde qu’ils squattaient. L’autre était soudainement excité, presque amusé, Neil le matait de l’assise à la tête. Le plan se dessinait finalement. Des grandes grilles, solides pour résister aux assaults d’animaux bien plus lourds que les hommes, ça commençait à vraiment ressembler à quelque chose de faisable.

« Pas mal. J’crois que ça vaut le coup de regarder. » Il se redressait sur le coude pour le regarder. « J’ai squatté une ferme pendant quelques mois, si y a assez de terre pas dégueulassée par les morts j’peux faire un truc, j’ai toujours ma pelle. » Il faudrait encore la nettoyer de la souillure des décomposés avant de même essayer mais…
« Et avec un chirurgien, chuis sûr que dans le bordel vétérinaire y a deux trois trucs à récupérer. » Le vieux avait décidé de le former à reconnaitre tous les produits possibles, faire de lui un assistant digne de ce nom. Les bandages, le désinfectant, ça ferait bien l’affaire pour eux. Définitivement, le zoo commençait à ressembler à une idée viable. Le sourire revenait comme rarement depuis que cette merde de virus leur était tombé dessus. Ils avaient une possibilité de s’en sortir, elle était palpable. Il se voyait déjà là-bas, la jument dans un box en forme de cage à lion. Il y avait surement même des sucreries planquées.

Soudainement plein d’une énergie enfantine, il se levait pour fouiller un sac de selle sous le regard désabusé de la jument. Il revenait avec son atlas routier, se rapprochant du poêle pour avoir de la lumière. Calé en tailleur à coté de Daniel, il feuilletait jusqu’à Seattle, remontant la ville au fil des pages jusqu’à tomber sur les zones les plus vertes de sa carte.
« Woodland Park Zoo. C’est ça ? » Regard à Daniel, sourire, il tournait son bouquin pour compter la distance à vue de nez. « C’est au Nord de Seattle. Ça nous fait bien entrer dans la ville mais avec la jument j’pense pouvoir repérer les lieux sans trop de danger. » Plus discrète qu’une voiture, plus mobile, plus économe en ressources, Roxanne était la meilleure amie du voyageur en zone sinistrée. Nouveau regard à son tout nouvel acolyte par la force des choses, il souriait tranquillement, confiant dans leur plan. « Il nous faudra peut-être une pince pour forcer les cadenas. »
 
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