Re: Bury the hatchet • Rowen

Mer 22 Mar 2017 - 18:13

Il n’osa pas la regarder quand Maxine avoua être capable des pires choses pour que son fils soit en sécurité, mais il acquiesça en silence. Rowen connaissait ça. Du moins, il l’avait vue chez April ; cette férocité protectrice qui la pousserait à des actes inconcevables. Est-ce que seules les mères étaient capables de ça ? Parfois, il se demandait s’il pourrait se transformer pour préserver Rosaleen. Il aimait croire que oui, que ni son âme, ni sa conscience, ni ses principes, ne valaient plus que la vie de sa petite amie. Mais… il n’avait jamais été mis en situation, tout comme il n’avait jamais eu à prendre une vie. C’était parfait jusque-là toutefois… plus encore que de voir la galloise blessée, il était mort de trouille à l’idée de ne pas assurer le moment venu.

Écoutant toujours son aînée, l’artiste avait hoché la tête quand elle assura que Jaden était une garantie pour eux tous et se joignit brièvement à son rire. Oui : la rouquine aurait certainement été capable de le voir s’il avait été métamorphosé, comme lui avait su déceler qu’elle n’allait pas bien. Enfin… pas bien « du tout ». Rowen ne savait alors plus quoi dire à Maxine, ne souhaitant pas risquer de la froisser après que leur relation vienne subitement de s’améliorer mais n’osant pas non plus déclarer qu’il partait. Le courant passait enfin, c’était juste dommage qu’il ait fallu qu’elle échappe de peu à la mort pour que ce soit le cas.

- Oh…, fit-il alors qu’elle lançait le sujet sur Ayden.

Avant même de s’imaginer le ressenti de la soigneuse, ce fut sa propre culpabilité qui lui gicla en plein visage. Soudainement, l’illustrateur craignit que la mère d’Elliot ne le pousse dans des recoins épineux, lui demandant par exemple comment pouvait-il piquer la petite-amie d’un homme dont le cadavre était à peine froid ? Certes, le muet et Rosaleen n’avaient jamais vraiment été ensemble – et la relation que Rowen et la wicce entretenaient n’était pas censée s’être ébruitée – mais… c’était l’impression qui le rongeait.

- Et bien…

Il fut tenté d’écarter le sujet, de prétexter qu’elle allait se remettre, qu’il gérait, mais… ce ne serait ni juste, ni avisé. Il ne pouvait, ni ne devait, garder la galloise pour lui seul. Elle était dans ce lycée depuis le début, ses habitants étaient ses amis, ils avaient le droit de savoir. Et puis, peut-être Maxine serait-elle de bon conseil ? Il ne la voyait pas comme la première dame du camp uniquement en raison de sa relation avec Jaden. Rowen s’éclaircit la gorge avant de se décider à expliquer, baissant légèrement la voix pour que seule son interlocutrice puisse l’entendre :

- Elle, euh… elle ne va pas très bien, bien sûr, et… je crois que… comment dire… elle se sent inutile… elle voit les autres sortir, risquer leur vie, ne pas tous revenir, et elle n’y prend pas part. Ça l’a brisée et… déboussolée, précisa l’illustrateur qui trouva enfin ses mots, maintenant elle est un peu obsédée par… l’idée de… d’être plus forte, de s’endurcir, d’être capable de se débrouiller dehors… je ne sais pas trop comment l’aider, avoua-t-il dans un soupir.

Il avait essayé du moins, mais April et Eli pouvaient témoigner que ça ne s’était pas superbement bien passé.

Jeu 23 Mar 2017 - 9:56

En demandant des nouvelles de Rosaleen, Maxine ne s'attendait pas forcément à entendre qu'elle allait bien. Elle souhaitait que les choses se soient améliorées avec les jours qui étaient passés depuis son retour et le moment où elle lui avait appris. Comme avec la plupart des autres personnes, Maxine avait raconté l'histoire courte : Ayden était mort, tué par un homme. Elle n'avait pas donné les détails sordides et, de toute façon, cela n'aurait rien apporté de plus à la rousse. Peut-être même que si elle avait su exactement comment s'était déroulé les choses, son état serait encore plus alarmant.

Impuissante face aux mots de Rowen, la brune se mordit les lèvres, les yeux fixés sur Elliot. Lorsqu'elle s'adressa de nouveau à l'illustrateur, la voix de Maxine changea. « On le retrouvera. » Avait-elle dit, encore pleine de haine. Doucement, elle alla récupérer son fils pour le prendre dans les bras. « Je peux comprendre son idée de vouloir s'endurcir. Avant qu'il ne m'arrive.. » De l'index elle désigna son visage. « Ça..j'ai demandé à Jaden de m'apprendre à me défendre. » Le front d'Elliot collé contre sa bouche, Maxine y déposa un baiser tout en le berçant doucement. « Comme tu peux le voir, ça ne m'a pas empêché d'arriver dans cet état. Mais ça m'a très certainement permis de revenir en vie. Qu'elle veuille s'endurcir n'est pas une mauvaise chose mais l'extérieur c'est.. » Elle tourna la tête vers Rowen. « Tu sais comment c'est. Elle pourrait avoir toutes les meilleures préparations existantes au monde que ça ne changerait pas grand chose. Et malheureusement je n'ai pas de conseil à te donner pour l'aider mais..j'irai lui parler. » La brune haussa les épaules. « C'est tout ce que nous pouvons faire de toute façon. Tenter de la raisonner. Mais tu sais, avec tout ce qui s'est passé ici et..tout ce qui se passe dehors, les gens changent. Nous changeons aussi et pas toujours dans le bon sens. Peut-être que Rosaleen a besoin de ce changement. Le tout n'est pas de lui interdire ou de la contredire, ça ne ferait qu'empirer les choses. Elle pourrait foncer tête baissée, persuadée d'être prête alors qu'elle ne l'est pas. » En pivotant un peu, elle se mit face à lui. « Il faut plutôt lui montrer comment faire. Parfois protéger ceux qu'on aime ce n'est pas les empêcher d'aller dehors ou d'affronter les rôdeurs. » En disant ça, elle eut un rire. « Si Jaden m'entendait dire ça... Il me fixerait jusqu'à ce que je comprenne toute seule que ce que je dis n'arrivera pas, me concernant. »

Ce sujet de discussion semblait miner le moral du jeune homme. Délicatement, Maxine posa la main sur l'épaule de Rowen. « Ne t'en fais pas. On trouvera bien comment faire. » Et elle laissa un silence, concentrant son attention sur Elliot. Les petits yeux bleus de son fils étaient dirigé vers leur invité. Rapidement, elle releva la tête vers Rowen et d'un coup de menton elle lui proposa « Tu veux le prendre ? » Le bébé prêt à être donné, Maxine attendait que Rowen se décide. Beaucoup de gens n'osaient pas prendre les enfants dans leurs bras, de peur de mal les tenir et de les faire tomber. Mais là, ils étaient déjà installé au sol et si Rowen le prenait à deux mains, Elliot ne risquait pas grand chose.

Ven 24 Mar 2017 - 10:59

Les paroles de Maxine lui firent un bien fou. Elles n’étaient pas forcément positives pourtant : Rosaleen aurait beau devenir plus forte, le danger n’en demeurerait pas moins important. Toutefois, elle mettait le doigt sur les choses qu’il n’était jusqu'à lors plus sûr de croire ; le fait que cette démarche était nécessaire. April s’était ouvertement montrée hostile au fait que la galloise prenne les armes, Eli lui avait même collé un pain, mais l’illustrateur partageait l’avis de l’institutrice. Ce n’était pas une mauvaise chose parce que peut-être, un jour, la rouquine sera obligée de se battre seule. Ce jour-là, il faudrait qu’elle soit prête. Sans compter que oui : si sa petite-amie était à ce point décidée à être capable d’affronter le monde extérieur, Rowen préférait la savoir avec lui. Les gens comme Trey, ou Alex, avaient beau le sous-estimer, il n’en savait pas moins ce qu’il faisait. Le contact sur son épaule le fit légèrement sursauter, il s’était laissé miner sans s’en rendre compte.

- Merci, murmura-t-il avec une esquisse de sourire reconnaissant, je pense que tu as raison…

Encore une fois, il eut l’ait extrêmement étonné lorsque la jeune maman lui proposa de tenir son fils. Vraiment ? Il n’était pas sûr. Brusquement, l’artiste se sentait l’homme le plus maladroit au monde. Hésitant quelques secondes, ses mains semblant chercher l’angle adéquat, il bafouilla un « oui-oui » avant de réussir à soulever le petit Elliot. Il ne pesait rien ; il sentait bon. Cette odeur propre aux bébés, significatives, vecteur de tant de souvenirs. Parvenant à caler l’enfant dans ses bras, l’illustrateur le regardait avec un air attendri.

- Salut toi. Je m’appelle Rowen. Je suis… et bien… disons que je suis quelqu’un qui a beaucoup d’estime pour ta maman.

Bien sûr qu’il ne comprenait pas encore, mais il leva brièvement vers lui ses grands yeux innocents. L’artiste n’osa pas tout de suite reprendre le contact visuel avec Maxine, toujours aussi timide, mais il ne put s’empêcher de partager ce qui lui traversait l’esprit. Un sourire triste flottait sur ses lèvres alors qu’il confiait doucement :

- Quand je tiens un bébé comme ça, ça me rappelle toujours ma petite sœur. Ma… hum-le compagnon de ma mère l’a laissée avant qu’elle n’accouche. Alors… on avait une nounou, mais je l’ai beaucoup aidé quand même.

Il était comme un petit papa de 9 ans, ça faisait rire Anaelle Defreine. C’était sans doute pour ça qu’il se sentait si proche d’elle, connectée même. Plus il tenait Elliot dans ses bras, plus une question se dessinait dans l’esprit de Rowen : et pourquoi pas lui ? Il l’avait déjà dit, et prouvé : il voulait « vivre ». Ne pas uniquement se contenter de manger sa ration pour repousser les morts mais reconstruire quelque chose. Il fallait arrêter d’attendre que quelqu’un vienne les sauver, peut-être que c’était à eux de le faire. Bon, il y avait les risques de la grossesse, c’était un pari extrêmement risqué. Trop. Pourtant, il en rêvait… lui, la galloise, et…

- Ewen était aussi très amie avec Rosaleen, poursuivit-il sur sa lancée, elle la prenait même pour modèle. ‘Leen a ce truc très…, il voulait ajouter « mystique » mais n’était pas certain que Maxine voit ce qu’il voulait dire, elle est forte, tu sais ? Il poussa un petit soupir, elle ne sort peut-être pas en expédition ou n’aime pas utiliser des armes, mais elle est plus forte qu’on croit.

Ça, il en était intimement convaincu. La rouquine avait ce feu sacré en elle, comme un dragon sous les traits d’une jeune femme. Il suffirait simplement de savoir comment le réveiller…

Un véritable travail sur elle même, Maxine faisait véritablement des efforts en laissant son fils aller dans d'autres bras que ceux de la famille Preston. Mais que pouvait il bien se passer ? Rowen n'allait pas partir en courant avec. Même s'il tentait de le faire, il n'irait pas loin avant d'être arrêté par quelqu'un. S'il s'en prenait à lui sur le champ, la brune était là, elle n'hésiterait pas à lui sauter dessus alors, avait-elle véritablement quelque chose à craindre en laissant le jeune homme prendre son bébé ? Non. Elle avait surtout à gagner. S'habituer elle même à devenir moins méfiante, d'être moins maladivement protectrice avec sa progéniture. Malgré tout, sentir le poids s'alléger entre ses mains et voir son fils autre part qu'avec elle commença à la faire angoisser.

Angoisse qu'elle refoula.

Aux premiers mots de Rowen, Maxine se mit à sourire. Mais il s'effaça pour laisser place à une petite moue gênée. Elle ne s'attendait pas à ce qu'il dise une telle chose mais surtout, elle ne s'attendait pas à ce que Rowen ait de l'estime pour elle. C'était un peu..incroyable après tout ? Mis à part l'avoir repoussé, l'institutrice n'avait rien fait d'autre à l'égard de l'illustrateur. Alors pourquoi ? Même si elle se questionnait, Maxine ne l'interrompit pas. Peut-être que de lui même, Rowen lui donnerait la réponse. Mais à la place, le brun se confia au sujet de sa petite sœur, prénommée Ewen. Attentive, le laissant parler comme il le souhaitait, Maxine hocha simplement la tête avec douceur pour lui faire comprendre qu'elle était à l'écoute. Que des hommes abandonnent leurs femmes enceinte lui paraissait si inhumain. C'était un comportement que Maxine n'avait jamais compris et jamais accepté. Elle même avait été élevée par un beau père mais parce que son père biologique était mort avant de pouvoir le faire, non pas par lâcheté. Aux dernières paroles de Rowen, Maxine redressa la tête en inspirant légèrement. « Tu sais.. » Commença elle. « La force ce n'est pas seulement d'affronter l'extérieur. De tuer des morts, de sauver des gens. » Les yeux rivés vers le sol, ses doigts allèrent dessiner des ronds imaginaires sur le sol. « C'est supporter tout ça, d'être réellement fort. De ne pas se laisser abattre malgré toutes les choses horribles que nous pouvons voir ou vivre c'est.. » Elle s'arrêta une seconde pour réfléchir. « Et si on garde cette force, c'est grâce aux gens qui nous entoure. Notre famille essentiellement. Et en parlant de famille, je ne parle pas seulement des liens du sang. Sa famille on la choisi. » Avant il n'était pas rare d'entendre des choses du style « on ne choisis pas sa famille. » souvent dites par les personnes nées au sein de famille défaillantes. Mais maintenant que l’entièreté du monde avait perdu des proches, se constituer sa propre famille était essentiel.

Les yeux rivés sur la petite bouille d’Elliot, il écoutait ce que disait Maxine. Ses mots, encore une fois, le réconfortaient, le confortaient. Rowen, malgré tout la foi qu’il avait en ses croyances et ses convictions, craignait parfois de faire fausse route. Et s’il se plantait ? Si sa manière de voir les choses n’avait plus lieu d’être ? Si le monde ne se découpait plus qu’entre des camps qui ne rivalisaient que par la violence ? L’institutrice assurait que non et par là même, que les gens comme lui, Clive ou Rosaleen avaient encore leur place dans cette époque fébrile. Il leva alors vers elle un sourire reconnaissant et sincère.

- Je… on pense la même chose, assura-t-il.

Le temps d’un silence, il tint encore un peu le bébé dans ses bras. Il grimaçait, tentait de lui soutirer ces fameux rires, bien qu’il ne soit pas encore capable d’assimiler ce que faisait l’illustrateur. Un petit moment de plénitude. C’était ce que lui offrit Elliot, jusqu’à en oublier qu’ils étaient au beau milieu de la salle commune. L’artiste rendit son fils à sa mère et alors, son regard s’attarda involontairement sur les marques qui trahissaient encore le traitement qu’elle avait subi.

Et ensuite ? Que devait-on faire une fois qu’on avait choisi sa famille ? La protéger, bien sûr. Comme lui et April l’avaient fait pendant une demi-année. L’homme qui avait agressé Maxine était-il un incident isolé ou agissait-il pour un groupe ? Est-ce qu’ils devraient craindre de mettre le nez dehors à chaque expédition ? Devaient-ils laisser cet acte impuni ? Toutes ces questions lui tournaient brusquement en tête. Comment punir le crime dans un monde démuni de ses lois ? Étaient-ils même légitime pour condamner la violence, alors qu’elle était la raison pour laquelle ils étaient tous encore en vie ? Rowen sentit indiciblement qu’il était l’heure d’y aller, que le premier pas qu’ils venaient de faire ne devait pas s’alourdir pour ouvrir une vraie voie à de l’entente ; voire de l’amitié. Néanmoins, il ne put s’empêcher de demander à voix basse :

- Tu… est-ce que… vous avez prévu quelque chose pour…, il se racla la gorge, pour retrouver la personne qui t’a fait ça et… tué Ayden ?

Des dizaines d’autres interrogations se cachaient derrière celle-ci. Si le coupable était retrouvé, que feraient-ils ? Avaient-ils de quoi constituer un juré ? Allaient-ils construire une prison ? Serait-il exécuté ? L’illustrateur réalisait alors que l’idée d’une vendetta le terrorisait autant que celle d’un danger « vivant » rôdait dans la métropole. Chaque journée n’était pas qu’une lutte contre les charognes, c’était un combat pour ne pas franchir l’ultime limite, pour garder son humanité. Il n’avait tué personne mais voyait comme April avait été affectée par les meurtres qu’elle avait dû commettre pour qu’ils soient encore là. Elle. Lui.

Encore une fois, faisait-il fausse route ? Même l’homme qui avait brisé Rosaleen, il serait incapable de l’abattre de sang-froid s’il l’avait sous les yeux. La vengeance ne pansait rien, elle ne faisait que montrer le chemin aux cauchemars qui cherchaient la brèche pour atteindre le cœur. Les Dieux se chargeaient toujours de condamner les pires personnes et Rowen mettrait sa main à couper qu’un jour, le violeur de la rouquine ou le meurtrier de son confrère subiront le retour de leur karma souillé.

Doucement, Maxine récupéra son fils et le garda dans les bras. Bien qu'elle ne soit pas particulièrement inquiète lorsque sa progéniture se trouvait entre les mains de Rowen, l'institutrice était tout de même soulagée de le récupérer. Il était avec elle, au creux de ses bras. A de nombreuses reprises, Maxine avait regretté la période de sa grossesse. Durant ces quelques mois, elle n'avait eu qu'une seule envie : Découvrir son bébé. Mais rapidement après sa venue au monde elle avait ressenti tout l'inverse. A l'intérieur d'elle, Elliot ne craignait rien. Il était en sécurité, au chaud, nourrit par sa mère. Une fois arrivé dans le monde, la brune avait senti tout le poids du danger qui planait au dessus de sa minuscule tête.

Berçant un petit peu dans son fils, elle tourna le regard vers Rowen. Puis elle inspira profondément. Sa machoire se crispa et elle ne répondit pas de suite. Après avoir cherché ses mots, elle déposa brièvement ses lèvres sur la tête de son fils et lui embrassa le crâne. « Jaden m'a promis de le retrouver. » Commença Maxine, les yeux rivés vers le sol. « Mais..c'est plus facile à dire qu'à faire. » Elle leva une main dans les airs comme pour montrer qu'elle n'avait pas vraiment de réponse. « Il peut être n'importe où depuis le temps. Peut-être même qu'il était simplement de passage dans ce coin là. On en sait rien.. » Puis elle haussa les épaules, résignée. « Une chose est sûre, Jay ne le laissera pas approcher d'ici. » Mais d'un coup, le regard de la brune devint dur. « Si un jour on le retrouve, je le tuerais moi même. »

Comme beaucoup de gens en colère, Maxine avait eu des mots qu'elle ne serait peut-être pas capable d'appliquer le moment venu. C'était toute sa colère, sa rage, sa douleur qui lui avait fait dire cela. Elliot poussa un léger cri. Une mèche de cheveux brune entre les mains, le petit tirait dessus sans ménagement. « Je ne vais pas tarder à retourner dans notre chambre. Ça va être l'heure du goûter ! » Elle décolla son fils d'elle et lui adressa un large sourire. « Hein oui ? C'est bientôt l'heure ! »

La déclaration de la brune le fit sursauter, alors qu’elle n’avait pas haussé le ton. Le tuer elle-même ? C’était un contraste déstabilisant, de la voir pouponner son bébé et en même temps, proférer de tels propos. Est-ce qu’il n’y avait plus que lui en ce monde pour s’en indigner ? Ou en tout cas, en être choqué ? S’il était un ami de Maxine, il aurait osé lui dire ce qu’il pensait ; que cette rage ne l’aiderait pas, que la mettre à exécution la rongerait plutôt que la libérerait. Ayden était mort, Rowen en était l’un des premiers affectés, parce que Rosaleen l’était et parce qu’il traînait toujours ce sentiment d’avoir « volé » la femme qu’il aimait à son confrère. Mais est-ce qu’il se sentirait mieux en sachant que le coupable était capturé et exécuté ?

Pas vraiment. Pas lui. Il poussa un soupir : au fond, il ne savait même plus quoi penser. Quel était l’avis d’Eli ? d’April ? De Rosaleen ? Il avait l’habitude de les utiliser comme poids de mesure maintenant. Possible qu’il ait faux, possible qu’ils aient pour mission de redessiner leur justice. L’illustrateur ébouriffa ses propres cheveux en balbutiant un timide « je comprends » qui n’était pas non plus un mensonge. Il ne doutait pas que l’institutrice ait pu souffrir ou que ce qu’elle avait traversé eu été atroce. Mais il aurait aimé qu’elle ne laisse pas s’infecter la plus horrible des plaies, celle qu’on ne voyait pas.

L’artiste ne put s’empêcher de sourire en voyant Elliot tirer sur les cheveux de sa mère avec une bouille concentré. Quoiqu’il soit en train de penser, c’était certainement passionnant. Maxine annonça qu’elle n’allait pas tarder à aller nourrir son fils et justement, Rowen estimait l’avoir suffisamment importunée. Non sans une délicate poignée de main au bébé qui était soulevé à bout de bras par la brune, il se remit sur ses pieds en prétextant :

- Pas de soucis, je… je vais y retourner moi aussi.

A quoi ? Il ne savait toujours pas vraiment. L’artiste eut une petite moue compatissante, les yeux baissés vers son aînée, et finit par lui dire quand elle eut levé la tête vers lui :

- Si jamais euh… si jamais tu as besoin – ou Elliot, ou Anna, ou Jaden, il s’arrêta avant de citer tous les membres familles, amis ou alliés des Preston, et que je peux faire quelque chose… dis-moi.

Et même si elle ne demandait rien, il penserait à eux quand il adresserait aux Dieux ses prochaines prières. Qu’ils trouvent la paix, ou au moins des réponses, quoiqu’ils aient choisi de faire – ou quoiqu’il arrive. Ce n’était de toute façon pas à lui de juger leurs actes et encore moins leurs pulsions. Rien n’était parfait, ni acquis, ni évident, ni permanent.