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Re: Los chismes
Mar 23 Jan 2018 - 20:24
Tellement de temps perdu à s’éviter, alors qu’ils avaient besoin l’un de l’autre. Lisandro le savait, il avait besoin d’Eli. Mais dans cette obstination à vouloir lâcher-prise et abandonner, il s’était détourné de la personne qui l’aiderait le plus à surmonter cette épreuve. Volontairement, dans un sens. C’était plus facile que d’y faire face, plus facile de se laisser sombrer que de survivre. Tout un temps, il avait hésité. Jusqu’à ce qu’Andrea le secoue une bonne fois pour toute et le force à affronter sa peine et sa douleur. Sans elle, il n’était pas certain d’être encore là aujourd’hui. Ce qui les liait, Eli et Lisandro, était quelque chose de fort et de précieux, le chilien aurait dû le savoir et ne pas s’en détourner comme il l’avait fait. Ce n’était pas de sa faute s’il lui ressemblait tant. Si son regard lui rappelait celui d’Alma, provoquant le manque. Un gouffre profond dans son cœur.
Maintenant. Son cœur s’emballa un peu, inquiet. Le simple fait de savoir qu’Eli était déjà passé dans leur chambre le rendait nerveux. Lisandro n’était pas vraiment pressé de franchir le pas, mais il savait qu’avec le mexicain à ses côtés, il ne reculerait pas. Inutile de préciser qu’il n’avait pas encore osé y remettre les pieds, Eli pensait l’action facile. La vérité c’était qu’il avait préféré attendre le garçon plutôt que de s’y rendre seul. Choisissant la facilité encore, celle d’être acculé, de ne plus avoir le choix. Il devait y aller. « Je… Oui… Allons-y alors. » Fit-il, un peu hésitant. C’était important, pour la suite. Pour le deuil et la cicatrice dans son cœur. Alma lui manquerait toujours, mais il se devait d’avancer, pour lui, pour elle. Et pour cette nouvelle famille à naitre. Andrea avait raison, ils avaient besoin l’un de l’autre. Penser que Lisandro n’avait pas sa place dans ce tableau, c’était à nouveau fuir une responsabilité qui lui incombait. Ils étaient une famille, tous. C’était pour cela qu’il avait entreprit de renouer avec tous ceux à qui il avait tourné le dos. Il avait commencé avec Juliet, qu’il avait aussi laissé tomber, avant de se lancer auprès d’Eli. Même si c’était le garçon qui avait fini par le trouver, le chilien aurait pu rester dans l’ombre, attendre qu’il parte. Il l’avait déjà fait. Mais cette fois-ci, il était là et il ne fuirait pas. Ensemble, ils se dirigèrent vers les chambres.___________________
Hésitant sur le seuil, Lisandro avait fait quelques pas à l’intérieur, sans savoir où se mettre. C’était sa propre chambre, mais revenir ici après tout ce temps le tétanisait un peu. Il ne savait pas par quoi commencer. Eli était un peu plus assuré, il sort un carton avant de tirer un sac de sous le lit. Le cœur de Lisandro a un raté. « Non. » Répondit-il à sa question. Puis il se força ; un pas, puis l’autre et il vint s’assoir sur le bord du lit – comme s’il s’apprêtait à décamper. « Non, je ne suis pas revenu depuis … » Avoua-t-il dans un souffle. Il n’osa pas toucher au sac, qui appartenait à Alma. Il reconnaissait les objets à l’intérieur, c’était avant qu’ils n’arrivent à la prison, avant même de retrouver Eli à Georgetown. Il se pencha néanmoins, jetant un œil timide à l’intérieur. Il s’était juré de ne pas fuir, de rester là et de faire une partie du travail qui s’imposait. Il laissa Eli sortir les objets, choisissant de garder ce qui serait utile à la prison, ce qui ne le serait pas. Ce qui était important de garder. Jusqu’à tomber sur un foulard encore en parfait état, élégant, mais mal adapté aux intempéries hivernales. Lisandro se pencha, en silence, l’attrapant avant qu’Eli ne le fasse et le ramenant devant lui, entre ses mains. Le regard fixé sur les motifs raffinés, fleuris aux extrémités façon encre de chine, il était perdu dans un souvenir. « Je pensais qu’elle l’avait perdu, j’n’y pensais plus. » Lors d’une de ses sorties, alors qu’elle était blessée, il l’avait fait patienter un peu trop longtemps dans cette chambre d’hôtel délabrée. Il était parti cherché de quoi manger et sur la route, il lui avait rapporté ce foulard pour se faire pardonner. Elle l’avait quand même grondé, avant de mettre le foulard au cou du chilien pour le ramener à elle, l’embrassant pour la première fois. Elle avait eu peur pour lui. Il ne s’y était pas attendu, même si l’envie lui était déjà venue. Un souvenir, précieux pour le chilien. Lisandro regarda Eli, un peu gêné. « Je lui avais offert avant… avant qu’on te retrouve à Georgetown. J’étais parti chercher à manger … Bref. Euh… Je voudrais le garder. » Sa voix tremblait un peu, son regard partait à la dérive alors qu’un nœud se créait dans sa gorge. C’était difficile d’être là, au milieu de toutes ces affaires. Alma avait si naturellement investi les lieux qu’il n’arrivait pas à s’y sentir à sa place. Pas sans elle. Sans oser le regarder, il ajouta encore quelque chose, un peu maladroitement. « C’est précieux … Ce que tu as avec Selene. Chaque instant compte. »
And I know this is the truth, 'cause I've been staring at my death so many times. These scary monsters roaming in the halls, I wish I could just block the doors and stay in bed until the clock will chime. I felt like I won, but I wasn't done. The nightmare repeats itself every time
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Re: Los chismes
Dim 4 Fév 2018 - 15:53
L’ambiance est assez particulière ; la cellule réhabilitée en chambre à coucher prend des airs de sanctuaire. J’ai l’impression, égoïste sûrement, d’en être le premier gardien. Mais après tout, ouais… l’héritage d’Alma est d'abord le mien. Même s’il est plus psychologique que matériel. Je scrute discrètement le regard du chilien posé sur le foulard, en prenant soin de ne pas me faire prendre à détailler ses expressions. Ça semble véritablement intime. Les moments qu’ils ont passé ensemble… Je n’ai que quelques rares indices pour essayer de recoller les morceaux. C’est pourtant, dans cette vie où chaque instant compte, un pan important de celle de ma mère. “Tu peux,” le garder. “n’t’en fais pas. J’suis sûr qu’elle a apprécié. Elle avait l’habitude de bien s’habiller dès qu’elle le pouvait. Ça devait être quelque chose qui lui manquait.” Sans qu’elle ne le dise jamais, bien sûr. J’en ai fait assez, des séances de shopping interminables en sa compagnie pour en être convaincu.
Pour ce qui est de Selene, sa remarque heurte un point sensible. Une possibilité effrayante ; celle qu’elle ne survive pas à l’accouchement ou même, plus simplement, que l’un de nous se fasse avaler par la ville comme tant d’autres avant. J’me pince brièvement les lèvres, soulevant un pull roulé en boule pour le replier doucement sur mes genoux. “J’sais.” De la même manière qu’Alma nous a été arrachée, l’épée de Damoclès pend au dessus de nos têtes à tous. “J’crois que Selene s’est faite à l’idée qu’elle pourrait y rester pour le bébé.” Un bel euphémisme ; elle se sacrifierait volontiers pour le nouveau-né, et j'n'ai pas mon mot à dire. “Moi, j’ai… plus de mal, tu t'doutes.” Parce que si les choses se passent mal, je me sentirais plus impuissant que jamais. Que je viens de perdre l’une des femmes de ma vie et qu’il est encore bien trop tôt pour que je laisse partir la suivante. Et J’espère tellement être crevé avant qu’elle ou notre enfant ne disparaisse. Ça m’achèverait, de toutes manières. “On en a parlé à un moment, maintenant on évite le sujet, pour “profiter” justement. J’sais que c’est c’qu’il faut faire, mais… merde, ça ira mieux quand ce sera passé.” J’esquisse un sourire forcé, pose le vêtement proprement plié au fond d’un carton vide. Comme si, finalement, l'accouchement serait l'unique grosse prise de risque à venir.
Histoire de rester un peu sur terre, je glisse, “Ça sera c’qu’on garde pour réutiliser.” en désignant le carton que je remplis. Penser efficace, pratique. Mais ça ne semble plus si facile d’imaginer Sarah, Andrea ou qui que ce soit passer les vêtements d’Alma. Alors j’ajoute tout de suite, un peu nerveusement, “Pas… pas tout de suite, hein. Quand… on en aura vraiment besoin.” Si possible jamais, qu’il reste au moins son odeur d’enfermée dans un misérable carton au fond d’un placard. Je relève un rapide regard vers Lisandro avant de reprendre la tâche. C'est vraiment bizarre de prendre ses vêtements, de les toucher alors qu'ils sont vides. Sur les imprimés écaillés d'un T-shirt je passe le bout du pouce, luttant entre l'envie de fondre complètement dans le pathétique et celle de rester droit face au chilien. "Tu n'm'as jamais raconté en détail comment ça s'était passé, quand vous n'étiez qu'tous les deux." Je n'sais pas si c'est le meilleur moment pour y revenir. Mais quitte à brasser les souvenirs... "De quoi vous parliez ? Et euh..." J'retourne la question sur ma langue avant d'oser l'articuler un peu plus bas, "Comment ça s'est fait... entre vous ?" Il devra educlorer le discours, sans doute, mais ça n'empêche que l'histoire m'intrigue autant qu'elle est susceptible de me déranger. Cela dit, cette fois, je promets de faire la part des choses. De n'pas m'énerver.
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Re: Los chismes
Mer 21 Fév 2018 - 23:03
C’était un souvenir précieux ce foulard. Un souvenir simple, mais précieux. La soie entre ses doigts lui rappelait bien plus que ce premier baiser échangé ; il avait son odeur et lui rappelait la douceur de sa peau. Et ce fut un souvenir moins douloureux qu’il ne l’imaginait. Une douce surprise alors que le chilien n’avait trouvé la force de venir ici que sous l’impulsion d’Eli. Ces lieux le hantaient depuis sa disparition, il savait qu’elle était là, partout entre ces quatre petits murs. Cette chambre était minuscule et pourtant, elle recelait des souvenirs et une présence telle qu’elle les envahissait tous les deux. Lui, du moins. Il ne savait pas ce qu’il en était d’Eli, mais cette chambre, c’était beaucoup moins la sienne que celle d’Alma. Sans doute parce que Lisandro n’y dormait plus depuis ce fameux jour. Il était plus facile de se cacher dans l’infirmerie que d’affronter cette pièce et son fantôme. Il froissa le foulard entre ses doigts, résistant à l’envie de l’amener jusqu’à son visage pour y respirer son odeur. Il jeta un coup d’œil à Eli, qui l’observait en lui disant de le prendre, rajoutant quelques mots sur sa mère. Il eut un petit sourire à l’image d’Alma toujours bien apprêtée. « Oui, ça lui ressemble bien. »
Lisandro regarda à nouveau le foulard avant de le glisser dans la poche de sa veste, désireux de ne pas en faire de trop devant le garçon. Elle était sa mère, et il le respectait beaucoup trop que pour se laisser aller à ces souvenirs. Il y avait des choses qu’il valait mieux garder pour soi. Des émotions inutiles à partager. Eli reprit la parole, pour annoncer quelque chose de bien sombre. Lisandro regarda le jeune homme, un peu soucieux. Pour lui, mais pour Selene qui se préparait à cette éventualité. C’était possible en effet, mais tous les deux, ils avaient besoin de croire que c’était possible, ils avaient besoin de cette force et de cette rage, pour que Selene et le bébé survive. « C’est un risque, en effet … » Dit-il, un peu songeur. Il capta le regard du garçon, s’y ancra avec le peu d’assurance qu’il lui restait. « Elle survivra, on ne perdra plus personne, je te le promets. » Une promesse audacieuse, mais ils avaient besoin d’y croire. Eux deux, mais les autres aussi. La mort d’Alma avait secoué les deux hispaniques et ébranlé le reste de la prison. Fragilisant certains liens, en renforçant d’autres aussi. Lisandro avait découvert une facette d’Andrea qu’il ne connaissait pas. De tous, elle était celle dont il ne s’attendait pas à avoir besoin pour avancer.
Eli désigna les cartons : celui-là, pour ce qu’on pourra réutiliser. Cela serra un peu le cœur de Lisandro, un instant. Le malaise semblait partagé car Eli rajouta quelques mots. Quand ils en auront vraiment besoin . Jamais, il l’espérait. C’était difficile d’imaginer Sarah, Juliet ou Andrea utiliser les affaires d’Alma. Selene à la rigueur, elle était de la famille à présent. Mais même cette image était quelque peu difficile à imaginer. « Oui, je suppose qu’on en aura besoin un jour… » Dit-il, un peu évasif. Il n’était pas spécialement pressé que ce jour arrive. Lisandro fit comme Eli, prenant les vêtements un à un pour les ranger dans les cartons. Vite perdu dans les souvenirs confus qui se mélangeaient dans son esprit, il failli manquer la question du mexicain. Celle-ci ne manqua pas de le surprendre, et de lui faire baisser les yeux, un peu honteux. Il se sentait un peu comme pris en faute ; en secret, il avait aimé sa mère. La question allait se poser un jour ou l’autre. « Eh bien … » Il se tut, fronçant les sourcils pour rassembler ses mots et ses pensées. « C’est de toi que nous parlions, c’est parce que je te connaissais qu’elle ne m’a pas assommé à coups de batte et laisser pour mort aux rôdeurs. » Fit-il avec un léger sourire. Un peu d’humour ne faisait pas de mal. Il regarda ailleurs, alors qu’il continuait à chercher comme lui parler d’elle, comment lui parler d’eux. « On a passé pas mal de temps ensemble avant de te retrouver à Georgetown. Nous avons eu du temps pour apprendre à nous connaitre. Elle parlait beaucoup de toi, c’est pour ça que nous avons décidé de garder tout ça secret… » Il avisa le garçon, se sentant coupable. « Ce n’était pas l’idée du siècle, je te l’accorde. » Vu la façon dont il l’avait appris, clairement, ça n’avait pas été une bonne idée. Eli leur en avait voulu, jusqu’à ce fameux jour. Autant de temps perdu, pour eux trois. C’est le cœur un peu lourd qu’il continua de ranger les affaires d’Alma. « Je suis désolé, encore, pour tout ça. » Ces moments étaient si précieux, garder le secret avait été stupide et blessant. C’était déjà surprenant qu’Eli ne l’ait pas découvert plus tôt. « Ta mère était une femme vraiment… unique, exceptionnelle. » Sa voix tremblait un peu, l’émotion le prenait et il se tut. Il avait pleuré devant Andrea, devant Juliet. Mais il ne pouvait s’y résoudre devant Eli.
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Re: Los chismes
Mer 7 Mar 2018 - 22:23
Elle survivra, on ne perdra plus personne. Et il en fait promesse. C'est un peu tendu, non ? Le scénario le plus probable, c'est qu'on tombe chacun comme des mouches les uns après les autres. Apparemment le destin a le goût de faire partir ceux que j'aime en premiers, donc... Si le bébé survit à l'accouchement, Selene n'a que peu de chances d'en réchapper. Et si c'est le cas, ce sera au chilien de s'inquiéter. J'ai franchement le sentiment de marcher dans un champ de mine. Parfois, j'me dis que je m'éviterais bien du stress en me faisant moi-même péter. Je n'en dis rien, bien sûr, et me contente de répondre un sourire convaincu.
Vient ensuite le déroulé de son histoire avec Alma. Le début, les premières étincelles. Ça parlait de moi ? Merde. Ça devrait me faire plaisir, et pourtant ça me tire le coeur droit vers les tripes. J'me pince les lèvres, attentif, rassemble une force surhumaine pour ne laisser filer aucune larme. Ça m'étrangle, pourtant. Alors j'baisse les yeux, l'écoute comme on tendrait l'oreille pour un conteur. J'esquisse un sourire un peu brusque, amusé, quand il admet que se cacher n'était pas la meilleure de leurs options. Ça l'était, je crois. Ils auront profité un peu. Sans que je n'leur saute tout de suite à la gorge, comme un con.
Mécaniquement, je passe la paume sur un pull déjà plié sur mes genoux, accorde un soin maladif à la faon dont le tissu se froisse pour bien le lisser, parfaire les contours. Ça m'aide à assimiler sans craquer.
"Elle l'était." Exceptionnelle. J'aurais dû le lui dire de son vivant. J'aurais dû lui rendre ses "je t'aime".
***
C'est un phénomène étrange qui frappe les nouveaux parents durant les premières semaines de vie de l'enfant. Il faut apprendre à changer une couche, gérer les vomis, les pleurs, les nuits écourtées, l'angoisse permanente, un désespoir pour une sieste de deux minutes. Alors, on flotte. Et putain, c'que je flotte. Rêve, réalité, ça commence sérieusement à se mélanger. Ce matin - je crois que c'était le matin, j'ai passé cinq minutes à comater quand je me brossais les dents avant de réaliser la confusion entre le dentifrice et la bouteille de shampoing. Le pire ? J'ai haussé les épaules et j'ai fait avec. Quand il a fallu renforcer les barricades dans l'après-midi, je me suis endormi debout, la joue contre une planche étrangement confortable. Là, je couche Effy, et m'apprête à profiter d'une heure ou deux de mon existence en la laissant sous la surveillance de Selene. Ça se ressent comme une trahison, un coup bas, mais putain... j'en ai besoin.
Retour dans la salle principale, pour piocher un sachet dans la réserve de tisanes. J'me sens tellement vieux à balancer la verveine-tilleul au bout de mes doigts. 'Sont loin, les bières et les joins, les bringues jusqu'au petit matin. Je m'apprête à emmener le tout dehors avec une casserole pour allumer un petit feu. Et à travers la vitre, j'aperçois Lisandro et Andrea. Main dans la main. Sur le coup, je n'tique pas, hausse les épaules et fais avec.
***
C'est le lendemain, au reveil - bon, à 4h30, au deuxième réveil - que, sous les cris de la gamine et en prenant une peluche du berceau pour l'amener au sein de Selene, que je réalise. "Holly shit !"
Et je laisse la maman toute aussi confuse que moi, me rhabille et vais toquer à la chambre du chilien, à quelque pas de là. Pour ma défense, la notion du temps... est aussi abstraite que le reste. Quand il ouvre enfin, je le fixe quelques trop longues secondes en silence, avant de souffler, suppliant pour des réponses mais pas assez éveillé pour trouver les mots, "Toi ? Et... hier.... Andrea ?"
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Re: Los chismes
Mer 21 Mar 2018 - 16:52
Il avait eu besoin de promettre. Ne plus perdre personne. C’était audacieux et pourtant. Ils avaient tous besoin d’y croire un peu, même si personne n’était dupe, Eli y compris. A une époque, le garçon l’aurait cru sans sourciller, mais depuis leur arrivée à la prison – et encore plus depuis qu’elle n’était plus – Eli avait grandi, mûri. Retrouver Selene avait changé bien des choses pour lui qui avait dû assumer un nouveau rôle, de nouvelles responsabilités. Et puis Alma était morte. Il n’y avait pas fardeau plus lourd à porter. Tous les deux mettaient le temps pour surmonter cette épreuve, chacun à sa manière. Et petit à petit, ils se rapprochaient à nouveau, pour surmonter ça ensemble. En posant les yeux sur Eli, Lisandro su qu’Andrea avait raison ; ils avaient besoin l’un de l’autre. Comme une famille. Ils étaient les plus à même de comprendre ce que l’autre avait pu ressentir par la mort d’Alma. Ils auraient tout donné pour elle, jusqu’à leur vie. Et jusqu’à ce jour, les deux hommes s’évitaient, consciemment ou non, ils portaient leur fardeau seuls, alors qu’ensemble, la douleur était plus douce à supporter. Lisandro s’en rendait compte, maintenant. Et en reprenant le rangement de ses affaires, il fit la promesse silencieuse à Eli, de ne jamais plus le laisser tomber comme il avait fait ces dernières semaines.
***
Quelques temps plus tard, la naissance d’Effy vint bousculer la vie des habitants de la prison. Ce fut un éclat de lumière, une lueur d’espoir, qui est venu prendre possession de leur cœur, jusqu’à rendre certaines personnes plus audacieuses qu’à l’ordinaire. Aussi, Lisandro avait eu le culot de poser ses lèvres sur celles d’Andrea qui, contre toute attente, lui avait rendu son étreinte avec la même passion. Depuis, il y avait eu quelques jours de flottements, un temps d’attente. Était-ce une erreur ? Était-ce une bonne idée ? Un peu lâche, Lisandro avait laissé Andrea trancher pour eux. Une patience récompensée rapidement alors que la brune était revenue vers lui pour exiger passion et discrétion, surtout. Le chilien s’en était amusé, mais bien trop heureux d’avoir trouvé une échappatoire à sa douleur, une nouvelle musique pour son cœur, il avait suivi le mouvement sans discuter des termes du contrat. Cela étant, le chilien était un joueur et un emmerdeur. Jusqu’à voler à sa belle ses baisers qui risquaient d’être vu. Il s’en fichait complètement. Il se demandait même comment les habitants de la prison n’étaient pas déjà au courant. Mais cet interdit avait quelque chose d’excitant et puis surtout, cette histoire n’était que pour eux deux. Ce jour-là, Andrea et Lisandro discutaient dans la cours, l’homme eut l’audace d’entremêler ses doigts aux siens, et elle ne s’échappa pas. Mais l’un comme l’autre ignorait que le geste ne passa pas inaperçu. Plus loin, l’une des personnes dont la révélation de cette liaison inquiétait quelque peu, capta cet éclat de tendresse encore secret pour le reste de la prison.
***
Vaguement, le chilien fut réveillé par les pleurs de l’enfant à quelques pas de sa chambre. Mais le sommeil lourd, il se retourna dans son lit sans sourciller. Ce n’est que quand on vint frapper à sa porte qu’il émergea, difficilement. Il attrapa un pull, à passer au-dessus de son pantalon, et alla ouvrir. A cette heure, cela pouvait être important. La porte s’ouvrit sur un Eli sous le choc, qui le fixait intensément. Face à son silence, Lisandro mit quelques secondes s’inquiéter de ce qu’il était arrivé. Était-ce Effy ? Selene ? Mais le garçon prit finalement la parole… Pour lui parler d’Andrea. Lisandro fronça les sourcils et mit quelques instants avant de comprendre où il voulait en venir. Une fraction de seconde, le chilien se raidit, un soupçon de culpabilité lui serra le cœur avant qu’il ne décide de se braquer, comme il savait si bien faire. « C’est pour ça que tu me réveilles à cette heure ? » Dit-il un peu morne. « On n’peut pas en parler plus tard, avec un café ? » Il ne niait pas, ne cherchait même pas à s’excuser ni à s’en cacher. En réalité, Lisandro se sentait coupable face à Eli, face au souvenir d’Alma dans son regard, mais plutôt que d’y faire face, Lisandro jouait à la tête brûlée.
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Re: Los chismes
Mer 28 Mar 2018 - 22:41
“Noooooon Lisandro !” Gueule de déterré, j’ai la voix qui déraille et reconsidère tout juste, “Du café, oui… Non, après.” C’est mission impossible de rendre cohérentes les pensées qui fleurissent au hasard dans mon esprit. Le café, ça m’fait penser à Ian, j’me demande bien ce qu’il est devenu. Puis le goût fait envie. Mais c’est pas le moment, là faut qu’on parle tout de suite, sait-on jamais que ce soit un bref instant de lucidité et que dans une minute il me soit arraché. Un bordel qui fait que je me prends le front dans la main, ferme les yeux une seconde avant de le confronter plus franchement, pour avouer très sincèrement, “Si on en parle pas maint’nant, j’vais oublier, sérieux.” J’me passe une main dans les cheveux, l’intention de les remettre en place est louable mais le résultat est pire encore. “Avec l’arrivée du bébé j’crois que j’suis un peu.. euh… déphasé.” C’est à ça que ressemble la vie dans un aquarium ? Ça sonnerait pareil, j’en suis sûr.
Sans plus de précautions, je me glisse devant le chilien pour entrer dans sa chambre. Ça fait bizarre. De voir un lit sans entendre des cris. Qu’est c’qu’il doit être tranquille ici… J’suis jaloux, merde. J'me sens même coupable d'abandonner Selene avec le monstre le temps d'une conversation. J’me retourne vers lui. “T’sais, l’autre fois quand tu disais que.. hm, tu regrettais de m’avoir caché le truc avec Alma ? C’était émouvant putain.” J’marque une petite seconde de pause, qu’il ait le temps de cogiter. Il devrait tout de même percuter. Puis je hausse les épaules, “Tu r’commencerais pas sciemment hein ? J’veux dire, ce serait… pas mal con. Pas vrai ?” Levant un sourcil, les yeux plantés dans les siens. Et puis un peu plus bas, s’alourdissent d’un air dubitatif. Il a toujours eu une moustache ?
Je cligne des yeux, chasse les étoiles et reviens à nous. Sauf que l’engouement du premier élan commence à passer, et ça me pèse sur les épaules. Un coup de pied au cul pour retourner dans le monde des rêves. J'm'asseois rapidement sur le bord de son lit, pose les coudes sur les genoux. "Juste... M'oblige pas à te tirer les vers du nez." Un léger air de reproche. Le mal est fait, mais qu'il saisisse la perche que je lui tends pour se racheter.
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Re: Los chismes
Dim 8 Avr 2018 - 10:08
Lisandro était mal réveillé et un peu bougon. Mais Eli en face de lui était carrément à l’ouest. Effy ne faisait pas bien ses nuits encore. Le chilien était un peu contrarié, et n’avait pas les idées suffisamment claires pour la diplomatie et la délicatesse du sujet. Enfin, était-ce vraiment si délicat à dire ? Pas vraiment. Mais c’n’était pas vraiment comme ça qu’il avait prévu de lui parler de ce qu’il vivait avec Andrea. « Effy fera bientôt ses nuits, t’en fais pas. » Dit-il machinalement, il était un peu contrarié et cela s’entendait un peu. Mais c’était la fatigue, et la contrariété d’avoir été pris sur le fait. Eli force le passage et Lisandro soupire en refermant la porte de sa chambre, un peu vaincu. C’n’était pas l’heure, mais visiblement, on ne lui donnait pas vraiment le choix.
Lisandro s’adosse à une armoire, parce que l’appel du lit est beaucoup trop fort et qu’il avait besoin de toutes ses maigres facultés pour faire face au garçon. C’est là qu’il prononça un prénom que Lisandro ne voulait vraiment pas entendre. Alma. Lisandro croisa les bras sur son torse et baissa le nez vers le plancher. Il savait qu’ils allaient y arriver, à un moment. Il savait qu’à un moment, la question d’Alma serait remise sur le tapis, et il ne pouvait décemment pas dire à Eli que ce qu’il vivait avec Andrea, c’était justement pour ne plus souffrir de la mort de la mexicaine. La culpabilité gagna son cœur, alors que le souvenir d’elle remontait à la surface. Lisandro évitait soigneusement le regard d’Eli. Il ne voulait pas… Salir la mémoire d’Alma. Mais mentir à Eli n’était pas vraiment une solution non plus.
Juste... M'oblige pas à te tirer les vers du nez. Nouveau soupire. Lisandro redressa la tête, sans pour autant regarder le garçon. Il aurait voulu chercher les mots, mais il était trop tôt pour enrober ses paroles de miel. Puis, Eli était capable d’oublier en retournant se coucher. « Tu te fais pas de film, Andrea et moi… On couche ensemble. » Il ne parlait pas d’être ensemble. Ce n’était pas ça. Ils n’étaient pas ensemble. « Mais c’est pas… C’n’est pas comme avec Alma, c’est pour ça qu’on n’veut pas le dire. On n’est pas ensemble, on couche ensemble. » Point. Et puis, s’il y avait la mémoire d’Alma pour lui, il y avait la mémoire de Ben pour elle. « On a tous les deux perdus les personnes qu’on aimait… On ne cherche pas à les… remplacer. » Là, il haussa les épaules avant de regarder Eli avec, comme un semblant de provocation. Qu’il ose lui dire qu’il salissait la mémoire d’Alma, le chilien ne se laisserait pas faire. Il n’avait pas de compte à lui rendre. Aucune obligation. Et s’il n’approuvait pas, tant pis ! Même si en réalité, le regard qu’Eli poserait sur lui après ça lui faisait peur. Le garçon était ce qui se rapprochait le plus d’une famille pour lui, un fils qu’il n’a jamais eu. Alors oui, le jugement d’Eli importait, même s’il prétendait le contraire.
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