Re: This fire in my skin.

Carmen soupira. Visiblement, il n'avait pas oublié les raisons qui l'avaient amené à l'éviter royalement pendant la semaine. Soupirant longuement, la brune reprit la parole.
Il y à une différence entre le nombre de truc que j'ai à faire dans la semaine, et les moments ou je suis uniquement de garde, tu ne pense pas ?

A quoi ça aurait rimé, de lui dire clairement qu'elle n'avait eu aucune envie de le croiser de la semaiine de toute manière, à part amener une nouvelle dispute ? Elle préféra le dire d'une autre manière. Plus douce, plus diplomate éventuellement. J'avais besoin d'être seule. Je suis comme ça. Par moment, je ne supporte plus l'entourage et je cherche des moments pour être tranquille.

Ce qui était vrai. Elle avait eu ce besoin impérieux de se retrouver seule avec elle même et Jolan, quand elle ne courrait pas partout pour renseigner les éclaireurs ou gérer le ravitaillement. En silence, elle l'observa créer son espèce de ... personnage en mégot -qui faisait réellement ça, seigneur - avant qu'il ne fasse remarquer l'avantage du toit.

Quand je fais les gardes seule, c'est là ou je m'installe. avoua t-elle avec une ébauche de sourire en baissant le regard sur le sol avant d'écraser son propre mégot, l'écoutant râler sur le fait que son meilleur ami se sentait bien ici. Qu'est-ce qui te dérange ? Il ne t'oublie pas pour autant.

Il revenait. Bon... Haussant les épaules, la Navajo s'était tournée vers le ciel pour apprécier la douce lumière procurée par les étoiles, songeuse. Au moins, la soirée se déroulait normalement, sans qu'ils n'essaient d'en venir aux mains, bien au contraire. C'était presque agréable de ne pas l'entendre se pavaner ou chercher des crosses. Mais quand il revint, elle devait bien admettre qu'elle était surprise. De là ou elle était elle entendait suffisamment la musique pour la reconnaître, alors qu'il chantait les paroles en lui tendant la main. Elle n'avait pu s'empêcher de rire sincèrement en le voyant faire, secouant doucement la tête.

Tu n'es pas sérieux...

Visiblement, si. Hésitante, elle finit néanmoins par se relever avant de se retrouver contre lui pour danser un semblant de slow, du moins supposait-elle. Hésitante, elle finit néanmoins par venir glisser sa main dans la sienne, posant la seconde sur son épaule se prêtant au jeu, tant par le calme de la soirée que pour un lointain souvenir de l'ancienne époque ou tout allait bien, se prêter même à murmurer les paroles de la chanson. Elle ne les connaissait pas aussi bien que celles de Sinatra, mais ça s'y prêtait aussi bien pour la situation.

I'm in a world appart, a world where roses bloom lâcha t-elle avant de sourire, relevant les yeux vers Kareem. Pour une fois, c'était sincèrement agréable de le voir ainsi. Un peu plus normal, humain. Presque charmant sans ce côté lourd qu'il aimait arborer habituellement. Je ne t'aurai jamais imaginé amateur d'Armstrong... avoua t-elle alors qu'ils continuaient de tourner lentement.

Besoin d’être seule ? Mais elle faisait ce qu’elle voulait, non ?

« Je n’ai pas besoin que tu trouves un prétexte pour me fuir. » Soupira-t-il. Il comprenait très bien pourquoi. Et il n’en avait pas vraiment honte d’ordinaire. Sauf là, parce qu’il s’agissait de Louve, et qu’il se détestait lorsqu’on le voyait au plus bas. Et inutilement de parler de son meilleur ami, ça n’était pas son comportement à lui, fondamentalement, qui le gênait. C’était autre chose : « C’est cet endroit qui me dérange. »

Il eut tout juste le temps de récupérer sa musique et de revenir. Musique ramenée par l’ami qu’il appréciait le plus ici. De sa voix grave, il chanta les paroles avec une certaine exactitude, une maitrise que peu de personne lui connaissait. Kareem insista pour qu’elle se lève, pour qu’elle vienne à lui. Lorsqu’elle céda du terrain, il l’embarqua avec une assurance qui le définissait à merveille. Louve eut tout juste le temps de se remettre sur ses jambes qu’il la fit tournoyer en saisissant sa main fermement, et la ramena contre lui fermement. Une main contre sa taille, l’autre tenant sa paume, il y mêla lentement ses doigts en la regardant droit dans les yeux :

« And when you speak, angels sing from above… Everyday words seem to turn into love songs » Chanta-t-il sur la voix de Louis Armstrong qui jouait à ses oreilles. Il confia à la brune l’un des écouteurs pour qu’elle en profite, continuant à la faire bouger lentement sur ce classique qu’il appréciait : « Je suis un grand amateur de Jazz, et de blues. J’avais un vieux tourne-disque chez moi, et des vinyles dont tu ne suspectes même pas l’existence. »

Lentement, il la fit basculer en arrière avant de la remonter à lui. Un sourire charmeur aux lèvres, dont il avait le secret. Il y avait tellement de choses qu’elle ne suspectait pas sur lui. De l’endroit d’où il venait, à sa famille ou à son mode de vie. Lui avait trop conscience que tout aurait pu être très différent si son père ne s’en était pas mêlé :

« A dire vrai, j’avais même une très belle collection. » Avoua-t-il, regrettant de ne plus l’avoir avec lui. « Et je joue du piano. » Son sourire s’étendit, il n’avait rien de carnassier ou provoquant comme d’ordinaire. Il y avait seulement cette pointe de nostalgie alors qu’il en parlait : « Un vrai virtuose. »

Ses doigts tapotèrent sur la hanche de Carmen, remontant le long de sa taille pour suivre l’enchaînement des touches dégringolant sur le clavier du piano :

« C’était ce que je voulais faire avant que mon père ne m’oblige à suivre sa voie. » Il la fit tournoyer une dernière fois avant la fin du morceau, et quand la musique se tut, il la ramena contre lui habilement : « Les choses auraient été… Bien différentes pour moi si j’avais suivi mes passions. » Chuchota-t-il non loin de son visage, un sourire énigmatique aux lèvres.

Pourquoi il te dérange ?

Qu'est-ce qu'il pouvait bien reprocher au ranch après tout ? La population, le fait qu'ils soient considérés comme des sauvages aux yeux des autres ? Peut-être les trouvaient-ils différent de lui, de son passé luxueux et de sa capacité à survivre sans rien devoir à personne ?
Mais elle n'eut pas le loisir d'en savoir plus que déjà, la danse commençait. Et elle devait bien admettre qu'elle était en train de s'amuser en cet instant précis, même si elle ne montrait pas forcément. Il savait danser, et pour le peu qu'il lui restait dans ce domaine, elle ne s'estimait pas trop mal comme cavalière. Il réussit même à lui arracher un rire en la faisant basculer, tout en lui expliquant son parcours.

J'adorai Franck Sinatra. confia t-elle en continuant la danse. J'avais pas de tourne disque, mais le lecteur CD de ma cuisine me suffisait amplement. admit-elle avec un sourire, étonnée de l'entendre se confier de la sorte sur son passé. Silencieuse, elle n'en rata pas un mot, frissonnant au contact de ses doigts pianotant le long de sa hanche.
C'était injuste, de ne pas l'avoir laissé faire ce qu'il voulait de sa vie. Jamais elle n'aurait imaginé que derrière son masque de tête de con finie, cet homme puisse avoir des affinités de ce style avec tout ce qui touchait au jazz et au piano.

Il y à un piano bar pas très loin de Tacoma. lentement, il l'avait à nouveau collé à lui, surprise par cette promiscuité nouvelle entre eux ou aucun des deux n'essayait d'étrangler l'autre. Si ça te manque, on pourrait bien aller voir si il est toujours en fonction...

Elle avait oublié ces petites choses agréables de la vie depuis la mort de Jasper. Le plaisir d'une discussion simple, d'un clair de lune, ou d'une discussion sur le jazz.
C'est injuste, que ton père ne t'ai pas laissé choisir ta voie. souffla t-elle en relevant les yeux vers lui, bien qu'elle n'y connaisse rien en directive familiales. Dans son propre cas, elle avait fait le choix de rester barmaid jusqu'à devenir sa propre patronne. Malgré les réticences de sa grand mère, ou le fait qu'elle sacrifiait sa propre vie pour assurer un meilleur avenir à ses soeurs. Alejandra avait pu faire ses études de médecine, et Ana devenir infirmière alors...
Sans doutes que les choses auraient été différentes pour lui oui. Et pourtant, malgré qu'il semblait avoir fini de discuter, il ne l'avait pas pour autant lâchée. Et pour une fois, elle ne se sentait pas en danger dans ses bras. C'était une nouvelle sensation qu'elle ne chercha pas à identifier, avant de lui rendre l'écouteur. Si tu n'as qu'Armstrong en cd, je pourrai te faire écouter les miens. proposa t-elle avec une douceur rare, avant de rajouter. On devrait reprendre un peu la ronde, avant d'attaquer un deuxième morceau de jazz.

Ce n'était pas pour autant qu'elle s'était reculée.

« Sinatra. » Répéta-t-il avec grand sourire. « Quel artiste. »

Il l’avait aimé aussi. Killing me softly faisait partie de ses références en matière de musique. Pour autant, il avait aussi beaucoup apprécié les musiques des vieux western spaghetti. Est-ce que ça valait Gary B.B. Coleman pour autant ? The sky is crying. Lui se souvenait de la reprise d’un virtuose lors d’une soirée dans un club classe d’un collègue, à La Nouvelle-Orléans. La voix se rapprochait de celle de Coleman, mais plus encore, il y avait quelque chose de vibrant à l’intérieur, qui avait touché une corde qu’on effleurait qu’à peine chez lui.

Y penser lui donner envie de jouer. C’était incroyable comme cette musique était capable de le faire chavirer aussi simplement. Il y avait quelque chose de fou à l’intérieur, de profondément sauvage, à la fois très humain également. Un aspect de sa vie que seul le piano était capable de retranscrire, au fond. Il était loin le gamin turbulent de Dubaï, devant se pencher corps et âme pour la religion et une éducation prestigieuse. C’était sans doute parce que la musique représentait cette émancipation, cette liberté folle de l’âme, qu’il l’avait toujours adoré. Le Jazz en particulier. Le Blues, pour les moments plus tristes.

« On ira. » Assura-t-il, vu qu’il en crevait présentement d’envie.

Et il n’y avait présentement plus rien pour faire taire cette soif à l’instant. A part, peut-être… ? Il se garda de le suggérer, puisque Louve n’était à l’évidence pas intéressé. Il eut un petit rire en y pensant, parce qu’il savait présentement que c’était complètement faux. Elle donnait l’air de rien, mais c’était son corps qu’il avait entre ses doigts, et sa main qu’il tenait toujours fermement dans la sienne. Ses yeux sombres plantés dans les siens, avec toute l’intensité du monde en cet instant.

« Il n’y a rien d’injuste. Ce qu’il m’a appris m’a été bien plus utile. Aujourd’hui encore. » Rectifia-t-il. Avait-il été plus heureux ainsi ? Pas vraiment. Pas plus malheureux non plus, ceci dit. Alors, Kareem se contentait de ça. De la certitude qu’il n’avait pas vécu cette autre voie, donc il ne pouvait pas savoir vraiment ce que ça valait. « Je n’aurais probablement pas connu autant le succès que dans mon métier, il y a des gens davantage faits pour la musique que moi. » Murmura-t-il à son égard. « Tu les as gardé ? » Ses disques. « Je te les prendrais. »

Pour les soirées trop longues, à ne pas pouvoir fermer l’œil, à se demander comment tuer le temps, la musique ferait son office. Mieux valait reprendre la garde visiblement, en tout cas ce fut ce que Louve exigea sans se reculer de lui pour autant. Son sourire s’agrandit, imperceptiblement. Il ramena la main de la navajo contre son torse, la tenant fermement dans la sienne. Ses pupilles la scrutèrent longuement, son oreille se prêta à son souffle profond et lent. L’instant s’étira. Avant qu’il ne s’éloigne d’un pas et ne la relâche.

« Bien, allons y. » Souffla-t-il en faisant comme si de rien.

Il avait déjà descendu les premières marches de la terrasse pour se retrouver sur le chemin terreux qui cernait le ranch.

Il avait beau dire le contraire, pour elle, c'était injuste. En d'autres circonstances, si elle avait eu Jolan avant l'épidémie, elle aurait fait en sorte que son fils puisse vivre ses rêves, qu'il souhaite devenir vétérinaire ou mécanicien. Tant qu'il puisse s'épanouir dans sa vie personnelle. Mais Kareem et lui étaient issus de deux mondes bien différents, et si elle ne parvenait pas à comprendre sa situation, lui avait certainement du mal à comprendre la sienne.
Au moins, cette idée de piano bar semblait lui avoir redonné le sourire, songea t-elle d'un air rassuré sans qu'ils ne se soient encore lâché. J'adore My way.C'est un classique, mais elle m'émeut à chaque fois. admit-elle avec un sourire mélancolique, se remémorant le nombre de fois ou elle avait pu verser une larme en écoutant la voix suave de Sinatra sur cette musique.

Il pouvait bien prendre ses disques, si ça apaisait un peu son âme. Par chance, j'ai pu récupérer presque l'intégrale de ma discographie. Sinatra, Jersey Boys, Benny Goodman...

Elle s'abstint bien de préciser que Jasper avait récupéré ses Cd, préférant plutôt faire remarquer. J'y tiens énormément. J'accepte de te les prêter à condition de les récupérer. Ils ont une valeur très particulière à mes yeux.

Elle pourrait toujours écouter en boucle la voix lancinante de Tengo Calderon en attendant. A défaut d'avoir un quelconque attrait pour sa culture latine, elle devait bien avouer qu'elle ne disait pas souvent non à un morceau ou deux de raeggeton.
Elle avait émis l'idée de reprendre la ronde, sans bouger. Alors, quand Kareem avait rapproché sa main de son torse, la Navajo avait senti son coeur manquer un battement, s'interdisant de respirer en se demandant si ils n'allaient pas franchir un pas dans le relation étrange. Son souffle vint chatouiller sa gorge alors que ses muscles se tendaient, avant qu'il ne reprenne comme si de rien n'était. Immobile, elle reprit enfin sa respiration quand il s'éloigna de quelques mètres, avant de le suivre à son tour sans faire de commentaire, songeuse.
Et si, ce jeu lui plaisait finalement ? Si elle aimait le fait qu'il agisse comme il venait de le faire, en la traitant d'avantage comme un être humain qu'un objet qui l'obsédait constamment parce qu'elle ne cédait pas ? Un instant, elle se mordit la lèvre, profitant de l'obscurité pour ne pas trop cacher ses pensées houleuses, finissant néanmoins par rattraper le brun par le bras pour l'inciter à ralentir. Je préfère cette facette de ta personnalité. avoua t-elle en braquant ses yeux en amande sur lui, parvenant même à sourire. Tu parais plus... Humain. Simple. précisa t-elle. D'avantage que lorsque tu fais ton lourd.

C'était gentiment dit, et un léger rire s'échappa même de ses lèvres avant de reprendre la route comme si le moment fusionnel entre eux n'avait pas existé. L'espace d'une demi seconde, sans doute dût-il lire son trouble dans son regard, alors qu'elle profitait du silence de la nuit pour approcher légèrement son visage du sien. Peut-être que finalement, elle aimait ce fait de tester leurs limites communes. Et sans doute aurait-elle fini par frôler ses lèvres, histoire de retrouver une seconde la douceur de ne penser à rien, si un infime craquement de branche n'était pas survenu. D'être humain, elle repassait à ce qu'elle était devenue. Une survivante qui se méfiait du moindre bruit suspect. Tu as entendu ?

Sa voix s'était faite murmure, alors que d'un mouvement fluide elle s'emparait de son tomahawk. Cela pouvait aussi bien être un rongeur qu'un wendigo en mal de chaire humaine.

« Bien sûr que je te les rendrais. Mais je risque de les user à force de les écouter. » Fit-il avec un sourire amusé par la remarque.

Pensait-elle qu’il allait les garder, les lui voler ? Avait-il une tête à faire ça ? Retirant et rangeant ses écouteurs avec précaution, il se sépara d’elle pour s’avancer vers les alentours du campement. L’orée du bois n’était plus visible depuis un moment déjà, l’activité de la nuit impliquait des bruits étranges tout autour d’eux. Un mélange abstrait entre un silence pesant et une cacophonie évidente. Distrait, il fut ramené dans la conversation par la main de Carmen sur son bras, pour le pousser à ne pas aller trop vite. Ses yeux sombres devinèrent sa silhouette à ses côtés, à peine éclairée par la lune à moitié pleine au-dessus d’eux.

« Facette ? » Répéta-t-il en fronçant les sourcils.

Plus humain. Simple. Il ne sut trop comment réagir. Devait-il la remercier ? Lui rire au nez ? Il hésita sur la marche à suivre, par principe. Il ne voyait pas en quoi ce charme soudain, semblant faire effet sur elle dans l’immédiat, était si différent de ce qu’il était d’ordinaire. Etait-ce parce qu’ils ne se disputaient pas que ça fonctionnait ? Suffisait-il qu’il se montre conciliant avec elle pour réussir à en faire quelque chose ? Etonnant.

« Aucun humain n’est simple, par définition. » Souffla-t-il alors qu’il la voyait, imperceptiblement, se rapprocher de lui.

Son sourire aurait pu s’étendre encore un peu. Mais il se figea, restant patient, comme pour la laisser venir à lui. Il se garda de lui dire qu’il n’était pas lourd. Juste ce qu’il fallait pour piquer son intérêt, la ramener à lui, l’aimanter. Combien de temps dura l’instant suivant ? Il ne sut le déterminer, il se contenta du peu, jusqu’à ce qu’un bruit ne les tire tous deux de ces entrefaites. Raidi, redressé, comme un animal traqué, il porta instinctivement sa main à son arme pour la sortir de son rangement. La lame visible, avancée, il se tourna vers la provenance en essayant de discerner une forme dans la pénombre :

« Oui, très bien. » Grogna-t-il dans la foulée, progressant doucement jusqu’au premier piège qu’il voyait aux abords du campement.

Un râle s’éleva dans la foulée, semblant être plus proche encore. Puis, il y eut un bruit équivoque, quand la créature s’embrocha dans le pièce, bras tendu devant pour essayer de les saisir. Kareem donna sa torche à Carmen pour qu’elle l’éclaire, alors qu’elle lui montra finalement ce qu’ils cherchaient. Soupir agacé, il se porta jusqu’à son niveau, attrapa le bras à sa portée et le retourna. Sa lame s’enfonça profondément au niveau du menton jusqu’au crâne, avant de percer par le front. Problème géré. Est-ce qu’il y en aurait d’autre ? Espérons que non, parce que Kareem avait plutôt envie de revenir aux bases.

« C’était que ça. » Souffla-t-il en repoussant vers l’arrière le mort pour qu’il se défasse de son piège. « On en était ou ? » Demanda-t-il finalement en se retournant vers Louve pour la scruter. Il revint vers elle avec une lenteur calculée.

Peut-être qu'aucun humain n'était simple finalement. Tout aurait été plus simple si les caractères étaient d'avantage manichéen. Le noir, le blanc. Elle n'avait jamais su réellement quoi faire du gris. Trop compliqué à gérer, trop... nuancé à son goût. Et si le personnage de Kareem semblait surtout d'une aura des plus obscure, il semblait ce soir qu'il possède finalement une facette un peu claire, plus humaine. Elle n'en fit cependant aucun remarque, bien trop occupé à braquer sa torche sur ce qu'il restait d'être humain face au wendigo qui venait de s'écrouler à leurs pied, la faisant légèrement grimacer. Au vu de son apparence, nul doute qu'il avait dû faire partie des premiers morts de l'épidémie. Sa peau semblait littéralement glisser sur ses os, et au vu de sa maigreur c'était même un miracle qu'il parvienne encore à tenir debout alors...
Carmen soupira longuement, fouillant les poches du cadavre pour en extraire un porte feuille et une boîte d'allumette couverte de sang séchée et clairement inutilisable. Rien d'intéressant... souffla t-elle en direction de Kareem alors que ce dernier demandait clairement ou ils en étaient, visiblement motivé à reprendre ce lent moment de latence qu'ils avaient vécu quelques secondes plus tôt.

J'en sais rien.lâcha la Navajo, hésitant sur la marche à suivre. Je sais jamais réellement quand tu joue ou pas, alors j'avoue que je suis légèrement perplexe sur la marche à suivre avec toi.

Elle ne voulait pas être son jouet. Et en même temps, un besoin difficilement répressible de se retrouver face à lui ne cessait de grandir en elle. Maudit soit Kareem, ses petites danses, et son côté humain. C'était tellement plus facile de le détester en réalité. Pourtant, il était là, à quelques centimètres d'elle, son souffle lent venant chatouiller son cou. J'ai jamais su me laisser aller. admit-elle en haussant les épaules, croisant les bras contre sa poitrine dans une vaine tentative de conserver son air indifférent. Lui en revanche, semblait ne vivre que pour le lâcher prise, et si sa proposition indécente de l'aider à faire de même était terriblement tentante, elle devait bien admettre que c'était encore difficile dans son esprit.
Elle ne sut réellement à quel moment elle avait fait un pas en avant, se demandant même si elle n'avait pas tout simplement trébuché contre une pierre. Un bref instant, ses lèvres vinrent toucher les siennes dans un baiser chaste, presque timide. Et si l'espace d'un battement de coeur, il lui sembla que son esprit s'était apaisé dans un geste aussi simple qu'elle ne pensait plus retrouver après des mois de deuil, elle se recula vivement sans prendre le temps de laisser à Kareem la peine de savourer l'instant. Si l'instant était savourable, du moins.

Désolée. parvint-elle à articuler sans savoir si elle était effrayée par l'action en elle même ou cette sensation d'avoir été hypnotisé par le serpent biblique. J'peux pas me permettre ça. On est en pleine ronde en plus, c'est trop risqué.

C'était bien vrai. Ils venaient tout juste d'achever un wendigo, un second pourrait surgir à tout instant.