Ah, maintenant il savait qu'elle venait du Japon. A force de jouer aux jeux vidéos et de laisser les voix originales, il reconnaissait très bien lorsque quelqu'un parlait japonais -même s'il ne comprenait pas un mot-. Mais au vu de son comportement, cela semblait enfin se dégager pour le grand brun, qui eut l'impression de voir un début de relâchement et de craquage de la nippone. Mais en attendant, il dû se résigner à éteindre sa lampe torche après avoir fait comprendre à la brune que leur vie étaient entre ses mains. Ainsi, il pourrait voir s'il pouvait lui faire légèrement confiance, ou non.
Les rôdeurs se rapprochaient assez dangereusement de la pièce dans laquelle les deux se trouvaient. Kerwan avait la main sur son fusil à pompe, prêt à réagir en cas de GROS retournement de situation. En tout cas, tout était si… silencieux. Mis à part les râles des rôdeurs qui se faisaient entendre de plus en plus, rien d'autre n'était à signaler. L'ancien agent immobilier espérait que ce coup de pression avait réellement fonctionné, et que ce n'était pas juste un coup de bluff.

Et là, la jeune femme décida de rompre le silence, en parlant à voix extrêmement basse. Kerwan se pencha légèrement pour essayer de mieux l'entendre, avant qu'un fin sourire de satisfaction ne vint se fendre sur ses lippes. Voilà enfin une information qui était bien à avoir : elle se faisait traquer. Ca ne l'étonnait guère, à l'ancien agent immobilier, au vu de son comportement. A force de buter des gens, quelqu'un s'était certainement pris pour Bruce Willis et à chercher à se venger. En tout cas, c'est ce qu'il imaginait.
Néanmoins, il ne dit rien. Il préférait attendre. Attendre de voir si elle allait en dire plus, voire si elle finissait par craquer. En tout cas, elle avait au moins remarqué qu'il ne comptait pas la tuer ; juste lui mettre un coup de pression afin qu'elle se calme et ne tente pas de lui remettre une autre balle dans le crâne.

-Je sais bien, dit-il d'une voix basse.

Il se tut, et attendit de nouveau. Pour le moment, il ne comptait pas la détacher. Non, sûrement pas. Elle allait devoir bien négocier pour qu'il la détache. Alors il se décida d'être à nouveau silencieux, attendant de voir s'il en rajouterait encore. Cela se "sentait" qu'elle allait bientôt vouloir redemander à sortir. Mais lui, était prêt à attendre autant de temps que nécessaire. Et LA, finalement, elle proposa une sorte de deal. Voilà enfin quelque chose qui commençait à faire plaisir au grand brun. Son sourire se fit plus grand. Néanmoins, était-elle vraiment sincère ? Il en doutait quelque peu. Mais la situation était telle qu'ils n'allaient pas avoir le choix que de coopérer. Il n'avait pas trop le choix que d'espérer qu'elle n'ose mentir. Autrement il n'aurait pas le choix que de se servir de ses armes contre elle.

-Ok. Par contre, au moindre dérapage, je n'hésiterai pas à me servir de mes armes.

Elle était prévenue. Il décida de rallumer sa lampe et de faire le moins de lumière possible ; suffisamment pour qu'il puisse aller jusqu'à elle et la détacher. Son arme au niveau du bras, il se positionna derrière elle et la détacha alors. Maintenant, il espérait ne pas avoir fait de connerie.

Blablabl, des menaces. Voilà ce que pensait Yue de ce que disais le gars mais tandis qu’il lui déliait les mains, elle se contenta de murmurer un froid « merci ». Dans d’autres circonstances, elle en aurait profité pour le tuer et le dépouiller oui, mais là… un coup de feu signerait son arrêt de mort. Quant à le confronter physiquement, c’était trop risqué. Il était plutôt costaud et armé, le risque n’en valait pas la peine.

A pas de loup, et non sans avoir jeté un regard appuyé à celui qui devenait un complice, la yakuza s’approcha de la porte et écouta. Les sons avaient la fâcheuse tendance à se réverbérer un peu, sans compter que les vocalises particulières des rôdeurs étaient parfois difficiles à analyser avec certitude. Néanmoins, elle pouvait se rendre compte d’une évidence : ils n’avaient pas l’intention de se tirer d’ici. S’ils voulaient faire autre chose que d’attendre ici, ils allaient devoir se bouger.

- Ok…, fit-elle en revenant vers le gars, t’as combien de cartouche ? Tu sais te servir de ton machin au moins , elle désigna son fusil à pompe, notre meilleure chance, c’est d’y aller en force. On sort d’ici, on trace et on déglingue tout ce qui se met sur notre route.

Les rôdeurs seraient pris de court et n’auraient pas le temps de se rassembler pour les condamner. Ce plan nécessitait toutefois de ne pas se foirer et de ne pas bêtement trébucher en chemin. Il faudrait aussi sacrifier leurs tympans parce que des détonations dans ce sous-sol n’allaient évidemment pas leur faire du bien. Il y avait aussi l’inconnu quant au nombre de cadavres et le fait que Yue n’avait plus qu’un demi chargeur mais… elle ferait avec. Au pire, elle réserverait sa dernière balle pour son camarade, il ferait une bonne diversion.

- Si on essaye la discrétion, on va se foirer, argumenta-t-elle d’avance.

Pas assez de lumière, trop d’obstacles et surtout : trop lent. S’ils laissaient aux charognes la possibilité de s’agglutiner, ils étaient cuits. Donc en fait… la nipponne posait la question, mais elle avait déjà fait son choix quant à la stratégie qu’elle allait adopter.