Ela n'était plus. Et si elle n'avait jamais vraiment discuté avec l'Israelienne, il n'empêchait. Zelda pouvait être perfide, vicieuse, difficile à vivre pour beaucoup. Mais Zelda restait avant tout une adolescente qui voyait l'un de ses repères s'écrouler. Et étrangement, le parallèle lui avait fait rappeler sa propre perte. Repensant à Carter, à cet adieu qu'ils n'avaient jamais eu. A son corps qui devait continuer de déambuler quelque part, à moins qu'un survivant n'ait mis fin à son périple sans but.

Elle avait longuement hésité sur la question. N'osant demander comment elle allait, se doutant pertinemment de la réponse. Personne n'allait bien, après un deuil pareil. Moins encore, quand le corps de la personne n'avait pu être rapatrié. Et à défaut de rester allongé dans son lit en attendant que les nausées s'estompent, elle pouvait bien faire quelques mètres pour s'effondrer dans un autre endroit. Se décidant finalement à récupérer l'objet auquel elle avait pensé, enfilant un pull trop grand pour elle pour masquer ce ventre arrondi qui peinait à apparaître après ces nausées violentes de début de mois qui semblaient ne jamais vouloir s'arrêter.

Le chemin avait été rapide, avant de rejoindre l'extérieur jusqu'à l'habitation de Zelda. Pas vraiment surprise que quelqu'un d'autre ne lui ouvre, assurant qu'elle n'en aurait pas pour longtemps, sans préciser que ce serait évidemment, un temps plus prononcé que les dix minutes qu'elle avait annoncé à Kassandra.
Frappant en douceur a la porte avant de rentrer, avisant la silhouette de Zelda, pinçant légèrement les lèvres. En deuil, évidemment. Sans doute encore sous le choc.

Hey. souffla t-elle à la blonde pour qu'elle ne capte sa présence, lui adressant un petit signe de la main en guise de salut. Sourire aux lèvres, comme si tout était parfaitement normal.

J'ai retrouvé ça, y'a pas longtemps. La pochette du DVD de Jurassic Park présenté à sa cadette, avant de reprendre. J'ai rien de prévu cet aprem, toi non plus. Et j'ai ramené des bonbons encore mangeable donc... Je te laisse allumer le lecteur ?

Ca ne servait à rien, de lui dire ce qu'elle savait déjà. Qu'elle était désolée pour elle, que le temps finirait par tout arranger. Qu'elle avait le droit d'être triste, en colère, à bout de souffle. Quand Carter était mort, elle avait continué comme si de rien n'était, refusant ce deuil qu'elle n'avait jamais réussi à accepter avant un long moment. Alors, pour tous les autres décès, elle ne pouvait s'empêcher de réagir de la même manière.

« Indiana ?! »

Elle savait déjà que ce n'était pas K' qui toquait à sa porte. Le rythme était différent, sans doute un peu moins doux. Elle imaginait qu'il s'agissait de Maya, de son père ou même de son frère. Peut-être Clay' ou sa nympho partiellement domestiquée. Mais pas la compagne de Levi et... la chose que semble visiblement grandir dans son ventre. L'adolescente se redresse et s'adosse contre le montant supérieur de son lit. « Je... J'pensais pas t'voir ici ! » avoue-t-elle, marquée par cet étonnement qui persiste encore.

Et puis ce pragmatisme qu'elle s'acharne à suivre reprend le dessus et la force à se questionner sur la présence de sa visiteuse. Elle observe la pochette du dvd avec surprise. Ca ne lui dit rien, non, de regarder un film. En fait elle a surtout envie de rester seule dans sa chambre. Prostrée sur ce matelas qui, tout comme K', est l'un des rares témoins de sa tristesse. Les yeux rougis de l'australienne, les cernes sombres qu'ils surplombent, valent toutefois bien des mots et prouve ce que l'intéressée n'avouerait jamais à travers le support des mots : elle ne va pas bien !

La voici partagée entre son désir d'accepter cette invitation impromptue et la crainte d'être bien vite bercée par la sollicitude de sa visiteuse. C'est pour ça qu'elle est venue, non ? Pour lui assurer que ça ira mieux et qu'elle retrouvera le sourire ? Qu'Ela l'aimait ? Que maintenant, peut-être, elle veille sur elle depuis ce paradis à laquelle elle ne croit plus depuis bien longtemps ?

« Je n'suis pas sûre que... » commence-t-elle, hésitante, cherchant comment décliner poliment cette délicate attention. Elle l'aime bien, Indiana, Zelda. Mais elle n'imaginait pas que cette dernière puisse se soucier d'elle à ce point. Surtout avec les histoires qu'il y a eu entre son israélien de conjoint et elle. Pourtant elle se trouve bien là, sur le pas de sa porte, alors que d'autres n'ont même pas fait l'effort de prendre de ses nouvelles depuis son retour. « Oh et puis pourquoi pas, hein... » À part se cacher sous sa couette, elle n'avait de toute façon pas prévu grand chose aujourd'hui.

Elle glisse une main dans ses cheveux emmêlés pour libérer son visage et vient glisser ses pieds dans ses pantoufles. Elle suppose que son aînée ne lui en voudra pas si elle reste en pyjama. Ou encore pour l'odeur désagréable qu'elle doit émettre. Elle était quand, sa dernière douche ? Il y a déjà trois ou quatre jours ? Depuis qu'elle a appris, en fait, pour sa mère adoptive. « J'suis pas très présentable... » s'excuse-t-elle. Par principe, surtout. Et pour justifier cette apparence négligée, forgée par la tristesse et les regrets.

« Viens, suis-moi ! » Elle puise dans ses forces pour lui adresser un petit sourire convainquant alors qu'elle la croise. D'un geste du bras, elle l'invite à la suivre dans les escaliers puis jusqu'au salon où trône la seule télé mais aussi le seul lecteur de la maison. « Fais comme chez toi... » indique-t-elle d'une voix marquée par la fatigue et l'indifférence à son aînée. Elle, de son côté, elle se dirige vers la cuisine pour en extirper un peu de thé du frigo. Elle n'en aime pas trop le goût, Zelda. Mais ça se boit. « Tu veux un verre ? » propose-t-elle à Indiana. C'est la moindre des choses, non ?

Elle revient donc avec deux verres - ou n'est-ce qu'un seul ? - auprès de sa visiteuse et se laisse choir dans la fauteuil. Elle observe les images prendre vie sur l'écran sans réellement les voir. Elle l'aime bien, ce film. Mais même si ça fait longtemps qu'elle l'a vu, elle n'arrive pas à ressentir un quelconque frisson d'émotion à son sujet. « On n'parle pas d'elle, d'accord ? » demande-t-elle gentiment sans quitter la télé du regard. Non, d'accord, c'est elle qui est la première à mettre le sujet d'Ela sur le tapis. Mais elle anticipe cette empathie qu'elle craint, sensée apaiser les maux qui, au final, ne fait que les raviver. Et alors que d'ordinaire il est plutôt difficile d'empêcher l'adolescente de s'exprimer, cette fois-ci elle se contente de garder le silence tout en s'enveloppant dans le plaid du salon.

Elle hésite un peu puis glisse simplement contre Indiana pour déposer sa tête sur son épaule. Un peu de chaleur humaine, c'est tout ce dont elle a besoin.

Rien d'étonnant à ce qu'elle soit surprise. Elle ne s'était ni annoncée, ni faite invitée. Elle s'était laissée porter par l'instinct, se contentant de regarder Z dans les yeux sans émettre le moindre commentaire sur son état de fatigue des plus apparents. N'observant pas les yeux rougis, les cernes violacées ou la tristesse qui émanait de son corps. Rien. Attendant seulement qu'elle n'accepte ou réfute sa proposition avant d'acquiescer d'un hochement de tête quand l'adolescente se fend d'un "pourquoi pas". La suivant dans sa chambre alors qu'elle s'excuse de ne pas être présentable, et que la brune lui jette un regard qui en dit long sur la question.

J'ai pas fait attention. Et au pire, tu m'as vue ? Si les vêtements de grossesse n'avaient rien de seyant, tenter de s'habiller à l'époque dans laquelle ils vivaient n'étaient pas au mieux. Et si son ventre arrondi était encore un peu timide pour le nombre de mois accumulé, il n'empêchait. Un pull trop large retombait sur l'une de ses épaules, masquant par la même occasion ses nouvelles difficultés à pouvoir fermer son jean sans soucis.
Et elle l'observe, à nouveau sans mot dire. Acceptant volontiers ce verre qu'elle propose, ignorant sagement les hésitations de l'adolescente à se traîner dans un coin ou l'autre de la pièce. Se laissant tomber sur le fauteuil en sortant de son sac les bonbons acidulés qu'elle à réussit à marchander pour les poser sur la table sous les yeux de Z, la laissant revenir à ses côtés en évoquant le sujet.

Non. Elle n'a jamais été réputée pour ses bavardages. Et sa négation fermement appuyée alors qu'elle lance le film devrait pouvoir rassurer Z sur cette question épineuse. Zelda savait pertinemment que sa mère n'était plus là. Elle n'avait sans doute pas besoin qu'on le lui rappelle incessamment à coup de compassions, ou de regards attristés.

La scène d'introduction du film démarre, alors qu'elle sent la tête de l'adolescente glisser contre son épaule. Jetant un bref regard dans sa direction avant de venir avec douceur passer un bras autour d'elle, la rapprochant un peu plus pour qu'elle soit à l'aise. Tiens. Souffle t-elle en lui tendant les bonbons, lui laissant l'opportunité de se nourrir à son bon vouloir, avant de reprendre avec douceur.

Je suis là. Elle n'évoquerait pas Ela, moins encore la peine qui pouvait l'accabler. Mais au moins, Z le saurait. Sans la regarder, la phrase avait été prononcée avec douceur avant de lever son index en direction du film qui se déroulait.

Tu vas voir. Tu vas adorer, j'en suis certaine.

« C'est vrai qu't'as l'air plutôt... enceinte ? »

Zelda esquisse une petite moue du bout des lèvres. En temps normal elle se serait offusquée. Surtout quelle devine plutôt aisément l'origine de la personne qui l'a engrossée. Mais elle n'a pas la force de s'agacer ni même celle de lâcher un commentaire acerbe sur le psychopathe qui sert, aux dernières nouvelles, de compagnon à Indie. « On est plutôt moches... » souffle-t-elle. Mais ouais, ça a a moins l'avantage de chasser ses petites appréhensions quant à la négligence qui se devine aussi bien sur son corps que dans le choix de ses vêtements.

Elle s'installent toutes les deux au salon, sur ce canapé qui sera témoin de la tristesse de l'adolescente mais également de l'un des plus gros chefs-d'œuvre cinématographiques du siècle passé. C'est à peu près le moment que choisit l'australienne pour évoquer le fait qu'il faudra, justement, ne pas évoquer Ela. La réponse de sa camarade a le mérite d'être aussi sobre que rassurante. Et Zelda hoche la tête en venant prendre place davantage contre elle avant de finalement poser la tête sur son épaule. En signe de lassitude, de fatigue mais aussi de reconnaissance. C'est dans l'adversité que l'on reconnaît ses vrais amis, dit-on. Si c'est bien le cas alors Indie compte manifestement parmi eux...

C'est peut-être pour cette raison qu'elle ne proteste pas, ne serait-ce que pas fierté, lorsque le bras de son aînée se referme délicatement autours de ses épaules. Ou peut-être parce qu'elle est trop attristée pour s'octroyer le luxe de refuser les plus sincères marques de tendresse. L'australienne finit par piocher un peu dans les bonbons que sa visiteuse lui tend. Ils sont délicieux. Mais pas assez pour alléger sa douleur. « Je sais ! » répond-t-elle quand son aînée lui indique qu'elle est là. De simples mots qui veulent dire beaucoup. Elle hésite un peu avant de lâcher un petit « Merci ! » empreint de sincérité. Oui, elle apprécie vraiment la disponibilité de cette femme qui s'est donnée la peine de venir jusqu'ici et qui lui accorde maintenant de son temps.

Mais malgré tout ses efforts, Zelda peine à se laisser absorber par le film qui a commencé. Passé l'intro - fort réussie - du dino en cage et de ce type qui se fait dévorer puis le bout dédié à Alan et sa copine sur le site de fouilles, elle observe ce type plutôt dodu discuter avec ce qui doit être un rat de la finance puis ce tube de mousse à raser - ou est-ce de la chantilly ? - qui servira à cacher et à conserver ce qui doit être des échantillons de dinosaures. « J'le trouve cool, lui ! » Même si de toute évidence, c'est le méchant. « Il m'fait un peu penser à Igor dans GoldenEye, tu sais ? » Ils sont... différents. Pas vraiment menaçants ou intimidants, en fait. Juste... intelligents ? Suffisamment, en tout cas, pour foutre un peu le bordel dans leurs films respectifs !

Et puis il y a ce plan où tout ce beau monde se retrouve dans un hélicoptère à destination de ce qui doit être le fameux parc. Et enfin, ces notes qui parviennent presque à transporter Zelda et à l'emporter loin de ses tourments. « La musique est trop cool ! » En temps normal, elle l'aurait savourée à sa juste valeur. Pour l'heure elle se contente surtout d'exprimer une évidence.

N'empêche que tout ceci, donc, ne parvient pas à la distraire de la disparition d'Ela. Ni, non plus, de la présence à la fois réconfortante et inattendue de son aînée. Ce qui, dans la foulée, oblige l'adolescente à poser cette question qui lui brûle les lèvres : « Pourquoi tu fais ça ? » Est-ce qu'elle se sent obligée de l'épauler au nom d'une quelconque morale. Est-ce par solidarité, par simple empathie ? Parce que c'est ce qu'Indie attend que l'on fasse pour elle le jour où Levi se fera éviscérer par l'australienne ou des rôdeurs ? « Tu m'apprécies pas tant qu'ça, j'me trompe ? » Elles s'entendent plutôt bien mais n'ont jamais été de véritables amies. Sûrement à cause des années qui les sépare, d'ailleurs. Alors oui, pourquoi ?

Sa remarque la fit rire, elle devait bien l'admettre. Sûr qu'elles avaient toute deux connues des jours meilleurs, et certainement des humeurs moins moroses. Et dans le même temps, elles restaient humaines. Si Z avait développé la réputation d'un démon, il n'empêchait qu'elle saignait et éprouvait les émotions comme tout le monde... Souriant alors qu'elles se plongeaient dans le film, riant à sa remarque sur Golden Eye.

Je vois bien. Ma soeur était fan. Appréciant le poids de son corps finalement collé au sien comme une petite soeur avec son aînée, se prenant même au jeu de chantonner l'hymne du film au moment ou Zelda faisait remarquer à quel point il était cool. Ca, c'était sûr et certain oui. Mais ce fût cette nouvelle question qu'elle lui posa alors que Grant découvrait pour la première fois un raptor sorti de son oeuf qui lui fit détourner le regard vers elle.

Pourquoi faisait-elle ça ?

C'est interdit par la loi ? demanda t-elle en haussant les épaules, bien qu'elle ne comprenne ce que sous entendait l'adolescente en faisant remarquer qu'elles n'avaient jamais été vraiment amies.
Songeuse une minute, avant de soupirer. Si la blonde avait insisté pour ne pas parler d'Ela, il n'y avait aucune clause qui mentionnait une autre mère dont le nom ne pouvait être prononcé.

J'ai perdu ma mère moi aussi. Par deux fois, même. C'était en tout cas ainsi qu'elle l'avait ressenti, à l'époque. Quand ma mère a quitté mon père, elle est partie à Cuba sans se retourner. Sans proposer qu'on l'accompagne, rien. C'était la dernière fois que je la voyais, puisque tu connais la suite de ce qui est arrivée dans le monde... Oh bien sûr qu'elle l'avait au téléphone, que sa mère s'était réveillée quelques années plus tard en comprenant qu'elle avait abandonné ses deux filles. Mais ça n'avait pas suffit à l'époque.

J'ai arrêté de l'appeler Maman à ce moment. Et quand il y à eu l'épidémie, les réseaux étaient trop saturés pour que je puisse savoir si elle était en sécurité. Haussant les épaules comme s'il s'agissait d'une simple histoire appartenant au passé, sans relever les douleurs qui pourtant, en avaient découlés.

A l'époque, je me suis juste renfermée sur moi même. Je n'avais pas le temps d'avoir mal, de m'inquiéter de savoir si elle allait bien, si elle était en sécurité. Mais je sais que si j'avais pu, j'aurai aimé avoir quelqu'un qui puisse me comprendre sans avoir besoin d'évoquer le sujet. Et que peut-être, il en était de même pour Zelda. Glissant son regard dans le sien brièvement, avant de reprendre.

Alors, non. On est pas amies, c'est vrai. Mais on à un point commun qui mérite qu'on te soutienne quand ça va pas.

« T'as une soeur ? »

C'est le moment où Zelda se rend compte qu'elle pensait connaître Indiana mais que dans les faits, elle ignore beaucoup de choses sur elle. Et pas uniquement comment elle fait pour supporter Levi et la chose qui grandit dans son ventre... « Elle avait bon goût ! » Si cette dernière ne se trouve pas ici, à Fort Ward, c'est sûrement qu'elle compte dans les rangs des morts, maintenant.

Mais le sujet est probablement sensible. Aussi l'australienne n'insiste-t-elle pas vraiment. C'est juste que, quelque part, ça lui fait du bien de se rappeler que tout le monde a déjà à un moment ou à autre, perdu un être cher dans ce brasier qu'est la fin du monde.

Ce qui intéresse vraiment l'adolescente, en revanche, c'est ce qui motive la sollicitude dont Indiana fait preuve. Car, comme elle le lui fait remarquer, elles ne sont pas exactement amies. Un israélien s'est dressé entre elles. Et Zelda ne peut pas s'empêcher de regretter ce constat. « Non, c'est pas interdit mais c'est juste que... J'sais pas, c'est bizarre ! » répond-t-elle à son aînée. Et les explications ne tardent pas à suivre. Indiana a vécu une situation similaire par le passé. L'australienne parvient, à cause d'Ela, à se mettre à sa place. Et elle comprend donc que l'inverse est logiquement réciproque. Alors elle hoche la tête avant de lâcher un profond soupir.

« J'suis désolée pour ta maman... » finit-elle par articuler. Par parce que c'est ce que la politesse ou la morale exige mais bien parce que c'est le cas. « J'te dirais bien que Cuba est une île et qu'elle est saine et sauve, mais... » Elle hausse les épaules. Les hypothèses ne servent à rien d'autre qu'à entretenir l'espoir. Et l'espoir tue aussi sûrement que les morsures des rôdeurs, aux yeux de l'adolescente. « Et maintenant ? Tu lui as pardonné ? » demande-t-elle d'une voix douce. Elle aimerait pouvoir pardonner à Ela, elle aussi. Mais c'est au-dessus de ses forces pour le moment. Peut-être qu'avec le temps...

Zelda esquisse une petite moue puis se replonge dans son observation du film. Elle y croche, même. Et l'espace d'un instant, quand ce drôle de brin ADN mal fait se met à expliquer comment ils ont réussi à cloner les dinosaures, elle oublie un peu le poids du chagrin. « C'est sérieux, là, cette histoire de moustique coincé dans d'l'ambre ? » Elle fronce les sourcils et plisse le nez. Ca lui semble assez logique, dans le fond. Mais alors... Pourquoi personne n'a jamais songé à cloner des dinosaures jusque-là ? Une armée de vélociraptors, ce serait tout de même super pratique pour exterminer les gens qui osent se dresser contre Fort Ward.

« Juste avant sa mort, Ela m'avait promis de faire des efforts et d'arrêter de partir à tout bout de champ à l'extérieur, avec l'autre péta.. Avec Lenore ! » explique-t-elle. Sans trop savoir pourquoi elle éprouve maintenant le besoin de se confier à sa visiteuse alors que quelques instants plus tôt, elle refusait catégoriquement d'évoquer le sujet. « Elle était consciente de m'négliger ! Et qu'est-ce qu'elle a fait, dès qu'elle en a eu l'occasion ? » C'est rhétorique. Indiana doit sans doute connaître les circonstances de la mort de de l'israélienne. « Elle est carrément allée s'faire tuer ! » Ce n'est pas sa faute, c'est sûr. Mais Ela aurait dû être consciente de ses limites. Le terrain, ce n'était pas sa destinée. Sa mort était... évitable !  Et quelque part, Zelda ne peut pas s'empêcher de la juger volontaire.

Elle hoche la tête puis la pose un peu plus confortablement sur l'épaule d'Indiana. « Ca craint, quand même, non ? » reprend-t-elle tandis que les héros du film prennent place dans deux voitures qui les emmèneront - enfin ! - faire le tour du fameux parc.  « Qu'notre point commun, se soit juste le fait d'avoir perdu quelqu'un de cher ! » Parce que, justement, c'est le cas de l'extrême majorité des autres survivants. « On doit bien avoir d'autres trucs qui nous relient ! À part le fait de s'attacher aux mauvais juifs... » Elle fait un effort pour lever les yeux vers son aînée avant de les reposer sur le film. « Ils vont vraiment sacrifier une chèvre, là ? » Elle est un brin dégoûtée. Ils étaient vraiment obligés de l'attacher ? Ils ne pouvaient pas lui laisser une petite chance, à la biquette ?

Bien sûr, qu'elle en avait une. Hochant la tête en sentant son coeur se serrer en repensant au visage de Tara, la ramenant chaque fois à celui agonisant, de Carter. Tara est à New Eden maintenant. lâche t-elle d'une voix neutre en l'apprenant à Zelda, soupirant avant de hausser les épaules. Je suis venue à Seattle pour la trouver, quand ça à commencé. J'ai su ou elle était juste avant de rejoindre à Fort Ward, après des années de recherches. elle se rappelait encore ce mutisme agaçant qu'elle avait eu lors de sa première rencontre avec l'adolescente, qui avait insisté pour savoir pourquoi elle se trouvait ici. L'observant un sourire un peu triste, avant de reprendre avec franchise, un an et demi après la première fois qu'elles avaient pu aborder le sujet ensemble.

Je sais qu'elle y est allée quand ils recrutaient. Elle cherchait à protéger son petit garçon, sans savoir ou elle allait atterrir je suppose.

Esquissant un bref sourire amusé alors que Z semblait trouver étrange le fait qu'elle puisse être actuellement avec elle sans avoir le statut d'amie, enchaînant sur la perte de cette mère qui au fond d'elle, n'en avait finalement eu que le nom. Pressant brièvement sa main quand elle annonça être désolée, réfléchissant à cette nouvelle question que venait de lui poser la blonde.

Je lui en ai voulu longtemps en tout cas. Des années. avoue t-elle en fermant un instant les yeux pour ne pas se faire surprendre par ses propres émotions depuis si longtemps refoulées au fond d'elle même. Pourquoi ne pas avoir pris plus de nouvelles, me demander si elle m'aimait seulement... C'était comme une douleur qui ne partait pas, qui me mettait constamment en colère. Et un matin, je me suis rendue compte que ça s'apaisait, doucement. Je crois qu'avec le temps, j'ai fini par accepter. Ce qui était fait, était fait. Continuer de lui en vouloir n'aurait finalement servi à rien. Ca ne l'empêcha pas de sourire tristement à cette remarque avant de reprendre. Je crois qu'en fait, tous ceux qui à l'époque me faisaient me sentir aimée, ne sont plus de ce monde. Ou dans le mauvais groupe. Carter, Tara, Denise... Il n'y avait bien qu'ici, à Fort Ward qu'elle avait retrouvé doucement mais sûrement ce concept de l'affection. De l'amour, même.

Riant à sa remarque de moustique coincé dans l'ambre avant de se taire quand l'adolescente reprit la parole, évoquant d'elle même Ela. Comprenant sans problèmes cette douleur qui venait la hanter, sur cette sensation de négligemment, de cette mort qui aurait pu être si facilement évitée. Je suis désolée pour Ela. souffle t-elle d'un murmure, venant rapprocher l'adolescente d'elle pour la serrer avec douceur. Parfois... Les gens ne se rendent tout simplement pas compte du mal qu'ils peuvent faire aux autres. Et c'est à ceux qui restent de devoir vivre avec. Comme Z. Comme elle.

Observant sans plus vraiment les regarder les voitures quitter le parc, alors qu'elle repose son regard sur l'adolescente qui trouve visiblement peu flatteur de n'avoir que ce point commun entre elles deux. Tu trouves qu'il n'y à que ça ? demande t-elle avec un sourire amusé, se tournant un peu plus pour lui faire face.

Voyons voir. On sait déjà qu'on apprécie Jurassic Park toute les deux. lance t-elle en faisant mine de réfléchir, reprenant a sa question sur la chèvre. Ah... Ouais. Mais du coup tu peux rajouter qu'on à la même aversion pour la cruauté envers les animaux sur ta liste. plaisante t-elle pour lui arracher un sourire, redevenant un peu plus sérieuse cependant.

Je pense que sur certains points, on se ressemble plus que tu ne semble le penser. A commencer par le fait d'avoir toute les deux été seule dans un moment difficile. Et si tu regarde bien... On s'en est pas trop mal sorties, finalement. Et on à aussi une obsession pour les sucreries, et une certaine difficulté à accorder notre confiance aux autres.

Après tout, elle n'avait jamais oublié cette première rencontre entre elle deux. A s'observer en chien de fusil, Z la bombardant de questions alors qu'elle s'était acharnée à rester silencieuse.

Tu vois... On à p'têtre plus de points communs que tu t'imagines Z.