Est-ce que j’aimais l’église ? Non. Je m’arrangeais de manière générale à ne pas y assister en inventant une raison ou une autre. Parce que c’est long, chiant et que je ne suis simplement pas croyant du tout. Je suis donc généralement présent, la tête dans la lune à me demander combien peut bien peser un vitrail ou la grosse statue de Jésus derrière le pasteur. Autant dire que mon cerveau était généralement bien loin de toute religion. Aujourd’hui pourtant, je me suis bien rendu compte que si je n’y allais pas, j’allais finir par avoir quelques problèmes. Autant ne pas attirer un peu plus l’attention.

J’avais fait l’effort de ne pas m’habiller de manière…. Disons peu respectueuse. Ce qui est d’ailleurs assez chiant parce que je serais bien capable d’aller là-bas avec un jogging. Élément le plus confortable de ma petite armoire. Mais bon. Autant ne pas attirer l’attention avec des vêtements inappropriés. Déjà qu’on me regarde bizarrement de temps à autre à cause de la longueur de ma tignasse. Je ne veux pas en rajouter.

Je m’étais finalement glissé au milieu pour passer le plus inaperçu possible. Finalement, c’est à côté de la brune ayant sauvé mes fesses au mariage de Neela que je me retrouve installé. A dire vrai, mis à part un remerciement rapide pour éviter une catastrophe, autant dire que je n’ai pas tant discuté avec la jeune femme. La messe démarré et… c’est parti pour plusieurs heures. Personne ne s’imagine à quel point c’est difficile pour moi d’être concentré sur quelque chose qui ne m’apporte pas d’intérêt. Alors que le discours n’a démarré que depuis quelques minutes, je détourne le regard sur les quelques personnes présentes. Il y a certaine tête que je connais, d’autres absolument pas. Mon regard se repose finalement sur Peyton dont le regard avait finalement dévié sur le sol.

- Est-ce que ça va ?

Dis-je en murmurant. Je sais bien que parler n’est pas une bonne chose. Encore moins dans une église. D’ailleurs, je ne sais même pas ce que j’ai le droit de faire ou non durant la messe. Crier Amen et basta ? Aucune idée. Mais elle a l’air… un peu triste, au fond.

La demoiselle sursaute et j'affiche une légère grimace. Le con, j'ai du lui faire peur. C'était pas vraiment le but de la manœuvre, non plus. D'un autre côté, parler pendant la messe, ce n'est pas bien vu, non plus... Je pense. Elle se trompe dans mon prénom mais ça ne me surprend pas vraiment. Il y a beaucoup de monde à NE, je ne la connais pas. Que de vue, tout au plus. Alors, je ne m'attendais pas réellement à plus.

- Evan. Ca va. Tu as l'air juste... un peu triste.

Bon, à ce stade, elle peut m'envoyer pétre puisqu'elle n'a pas réellement à me répondre. Le but n'est pas d'avoir une thérapie quelconque, au fond. Juste de... Je ne sais pas vraiment pourquoi je lui pose la question, non plus. Et quand elle me réponds, je dois avouer que je suis un peu surpris aussi. Pas par ses propos mais plus sur le fait qu'elle prenne le temps de le faire. Rien ne l'oblige.
Je comprends ce qu'elle veut dire. Les temps ne sont pas rassurant mais comment je peux rassurer quelqu'un quand je fais parti de ceux troublant la paix qu'elle réclame, finalement ? Mon regard croise le sien et j'ai presque mal au coeur.
Et j'avoue ne pas savoir réellement quoi lui répondre.

- J'aimerai pouvoir te rassurer.

C'est tout. Je ne vois pas quoi lui dire, la pauvre. Parce que j'ai du mal à dire le contraire que ce qui me vient en tête. Elle a foi en dieu et pas moi. La preuve, je n'écoute rien du discours. Pourquoi un Dieu laisserait autant de chose arriver ? Non, je ne pense pas pouvoir être croyant en quoi que ce soit. Si ce n'est moi et c'est déjà pas mal.

- L'être humain est complexe... Certains jugent que la vie devrait être différente, ici.

Je me met dans le panier sans pour autant l'avouer à vive voix. Je ne peux pas en parler librement. Mais il est simple de penser ça quand on voit tous les évènements qui ont déjà pu se produire ici.
Je dois avouer que je fais preuve d'un certain selfcontrol pour ne pas réagir quand elle parle de communauté pacifique. Je n'appelle pas ça une communauté pacifique. Mais je ne peux lui en vouloir d'avoir cette vision des choses. Je suppose que c'est rassurant.

Je n’affiche finalement qu’un sourire dans sa direction. Je ne me sens pas plus adorable que ça. C’est juste… Je ne sais pas. Probablement un besoin de m’attarder sur autre chose que moi-même. Empêcher de réfléchir en quelques sortes. Ce n’est pas plus mal de s’intéresser aux autres pour s’oublier un peu. Bon, je ne sais pas si c’est une bonne stratégie à adopter.

- Je me dis juste qu’il est mieux de s’entraider même si je ne sais pas si je peux vraiment t’aider. Parler, ça aide des fois.

Bon ok, c’est pas vraiment le moment de parler mais. Je vois bien que ma phrase est interprétée de façon… négative. En soit, est-ce que c’est ce que je pense ? Que l’on pourrait vivre autrement. Sans autant de règle, sans forcer le mariage et la religion ? Oui. Mais est-ce que je peux le dire dans une église ? Voir même ouvertement ? Pas du tout. J’agite donc la tête de droite à gauche.

- Non. Je ne pense pas comme eux.

Autant dire que c’est un mensonge mais je pense être suffisamment convainquant. Et je n’ai pas fait de grabuge quelconque. Pas encore, du moins. Pas pour être soupçonné de quoi que ce soit. Mais de ce que je vois, si elle semble inquiète, elle n’a pas l’air d’être le genre à s’insurger et à dénoncer. Est-ce que je vais lui dire la vérité ? Non, pas du tout. Lorsqu’elle pose ouvertement la question, je fronce lentement les sourcils, agitant une nouvelle fois la tête.

- Non. Nous sommes en vie et vivons correctement. Il faut être fou pour remettre tout en cause et oser nous mettre en danger.

Est-ce que je peux me laver la langue avec du savon ? Mon regard se tourne quelques secondes autour de nous. Je ne veux pas non plus que la conversation n’attire des ennuis. Que ce soit de mon côté ou du sien. Surtout du sien, au fond. Potentiellement, tant pis pour moi. Je me rends compte que je dois probablement faire un peu plus attention. Pourtant, je suis persuadé que mes propos n’ont rien de négatif. Bon, si Peyton se méfie, il est normal qu’elle cherche un peu plus loin dans mon discours.