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Re: Duck's stories

Lun 15 Aoû 2022 - 0:19


Les choses sont fugaces, fragiles, mêmes celles que l’on pensait acquises. Elle est si loin cette nuit au milieu de l’enfer des Divas, passée sur le toit de cette caravane à caresser le rêve aussi doux que fou d’une vie simple et pleine d’amour a deux. Il avait fallu tant d’épreuves, tant de larmes et de souffrance pour tromper le sort et se retrouver, Daemon et moi. J’avais manqué la première occasion d’être sienne par bêtises, la seconde par crainte d’aller trop vite, autant dire que j’avais fait de mon mieux quand le destin m’avait laissé une toute dernière chance d’être avec l’homme que j’aime.

Un mariage, un bébé, une famille, cette possibilité de vivre presque collé serré sans jamais se lasser l’un de l’autre, de chanter, rire et continuer a rêver ensemble. Daemon m’avait promis une vie ou je pourrais danser autant que je le voulais et il me l’avait offerte avec cette générosité qui lui était propre. Quant à moi, je m’étais engagée a ne jamais le laisser oublié qui il était, et j’allais bientôt réaliser que j’avais failli a mon engagement.

Nager dans un tel bonheur a un prix. On ne s’en rend pas compte tout de suite, cela vient avec le premier passage de l’usurier qui vous rappelle que rien n’est éternel. Le jour ou Daemon avait disparu avec la voiture pour faire une diversion, j’avais été frappée par cette vérité : ce que nous avions tous les deux, ce qui m’était si cher, ce qui me semblait plus fort que tout ce que je pouvais imaginer, on pouvait le perdre.

Depuis la peur s’est doucement mais surement infiltrée dans cette bulle de bonheur que nous avions faite. Cette crainte affreuse qu’il me soit arraché, qu’on nous soyons privés que cette vie ensemble qui nous comble tant. Parfois, j’arrive a oublier, mais d’autres, comme ces derniers jours fiévreux ou il s’est débattu entre la vie et la mort, l’angoisse est là, plus vivace que jamais.

Daemon n’est pas seulement mon premier et unique amour, ni celui qui m’a vue, sans artifice ou préjugé, il est devenu ce roc autour duquel je me suis reconstruite. Je ne veux même pas envisager que l’univers puisse tourner sans cet homme si merveilleux et spontané. Je veux encore vivre ces petites choses, je veux pouvoir m’assoir sur un banc, 5 minutes avec lui, et regarder les gens tant qu’il y en a, entendre son rire qui lézarde les murs, qui sait surtout guérir mes blessures… je veux ca et plus encore.

Pas la peine de décrire mon soulagement de le voir se réveiller après des jours de torture a le voir lutter contre la fièvre en me sentant si impuissante. Avec prévenance, profitant qu’il semble conscient, j’essaye, au mieux, de lui apporter un peu de confort, le calant dans des coussins et lui tendant un verre d’eau, presque prête a lui faire un de ces plats préféré quand je croise mon regard. A nouveau, le doute et la peur arrivent pour teinter de sombre ce qui devrait n’être qu’un moment de joie.

Je le vois chercher a coté de lui comme si je pouvais m’adresser a quelqu’un d’autre et me fige, aussi nerveuse que tendue, tout en continuant de l’observer. Sa réponse, le début de ce qui ressemble a de la panique et ses questions me font pâlir. Même si je sais, au fond de moi, que ce n’est pas ça, d’une voix suppliante, je tente de lui dire.

« Daemon… si c’est une blague, je … je t’en prie… pas maintenant… »

Ses yeux trahissent bien trop d’émotions pour que je ne repense pas a ce soir ou il s’était cogné la tête et se pensait encore chez les divas. Je fais un effort surhumain pour ne pas me laisser gagner par un besoin irrationnel de pleurer. Je dois garder un semblant de calme, pour lui, quoiqu’il m’en coute. Avec douceur, malgré mes yeux trahissant cette crainte douloureuse, je tente de le rassurer :

« Calme toi, s’il te plait, tu es encore faible, tu as été très malade… »


Je sens qu’il en a besoin, comme s’il était en train de se noyer, pas la peine de faire quoique ce soit avant de lui avoir envoyer une bouée, aussi petite soit elle. Malgré le sentiment d’avoir un parpaing sr chaque épaule qui m’écrase, je tente, délicatement, de l’inciter a se remettre contre les oreillers, sans qu’il se sente forcé. Avec un ton que j’espère le plus apaisant possible, alors que dans mon crane, c’est le chaos, je me lance, avec maladresse :

« Daemon, tu es a la maison, tout va bien. L’ouragan est passé. Tout le monde va bien. Je veux que tu prennes le temps de te détendre et de respirer. Tu es en sécurité, d’accord ? Moi c’est Alex, tu… tu te souviens… de moi… ou.. enfin, de quoi tu te souviens ? »


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Re: Duck's stories

Mer 31 Aoû 2022 - 13:30

Ses yeux avaient papillonné un court instant, jusqu’à ce que le néant ne devienne un flou dérangeant. Jusqu’à ce que ce flou dérangeant ne devienne un net perturbant. Le visage d’une jeune femme brune se dessina devant lui. L’homme la scruta quelques secondes, analysant brièvement ses traits gracieux. Elle était belle et semblait douce. Sa peau était pâle, ses yeux clairs d’un vert éclatant le fixaient. Ses lèvres étaient pour l’instant scellées, n’affichant aucun sourire. La connaissait-elle ? Il était persuadé que non. Se connaissait-il ? Il ne saurait dire. Beaucoup de questions venaient percuter son crâne douloureux mais aucune réponse ne semblait vouloir s’offrir à lui.  

La brune à ses côtés concéda enfin à répondre à ses interrogations mais ne fît que semer encore plus de doutes terrifiants dans le maçon qui s’ignorait. Le vert que reflétaient les yeux de la femme paraissaient apeurés, peut-être même attristés mais il laissa l’homme de marbre. Il en était certain à présent, il ne connaissait pas cette femme. Son dos se décolla entièrement des coussins et, en appui sur ses mains, il grimaça.  

- Une blague ? répéta-t-il, désemparé

Son regard partit alors détailler l’environnement autour de lui. L’endroit n’était pas grand mais paraissait chaleureux. Il y avait une petite cuisine ainsi que des guirlandes lumineuses. Des petits lits, sans doute pour des enfants, ne se trouvaient pas loin de lui. Quelques jeux également ainsi que des gamelles au sol. Pourtant, il n’y avait ni enfants ni animal. Et là, juste à côté, sur une chaise, des vêtements soigneusement pliés. La femme continuait de parler alors que les yeux de l’homme glissèrent sur son propre torse. Pourquoi n’avait-il pas de t-shirt ? Était-ce le sien, sur cette chaise ? Il gesticula. Un tintement métallique attira son attention alors qu’il n’écoutait la femme que d’une oreille, le chaos dans son esprit occupant toute la place. Sa main gauche remonta lentement, saisissant ces drôles de plaques qui pendaient à son cou.  

- Je ne connais pas d’Alex souffla-t-il, presque ailleurs  

Il fronça les sourcils, tourna les plaques qu’il tenait entre ses doigts. Péniblement, il les inspecta, comme s’il ne les avait jamais vu. Il se concentra, déchiffrant les lettres gravées.  

- Daemon... Je ne connais pas de Daemon

Ce n’était pas ces lettres qui étaient gravées. Elles n’étaient en rien le prénom que la femme ne cessait de prononcer. Et, aussi stupide que cela soit-il, l’homme était persuadé que ce collier, ces plaques n’étaient pas là par hasard. Peut-être les portait-il pour une raison bien précise. Peut-être était-ce pour ne pas oublier. Ne pas oublier qui il était.  

- Jackson... murmura-t-il plus pour lui-même  

Puis, ses yeux glissèrent sur cette étrange marque sur son torse. À nouveau, il fronça les sourcils. Dans les yeux des autres, il ne devait avoir l’air que d’un homme perdu. Il se concentrait mais rien ne lui revenait. Seul un atroce vide, un trou béant. Une page désespérément blanche.

- Je m’appelle Jackson dit-il en levant les yeux vers la femme, tentant d’avoir une attitude sûre de lui.

Son regard continuait d’analyser le monde qui l’entourait. Était-ce une arme posée sur cette haute étagère ?  

- C’est... c’est toi qui m’a fait ça ? demanda-t-il sèchement en posant ses doigts sur la marque au fer rouge

Pourtant, ses yeux ne cherchaient pas à trouver ceux de la femme. Il avait bien d’autres idées en tête. Alors, d’un bond, il se releva, se jetant sur cette arme posée sur l’étagère. Et, sans crier gare, il dirigea cette arme vers la brune. Son air n’était pas menaçant et sa main tremblait.  

- Je ne suis pas Daemon... Qu’est-ce... Qu’est-ce que tu m’as fait ? Je... J’peux pas me souvenir

Et tout en gardant son arme pointée vers la femme, il recula. Sa main libre chercha, à tâtons, la poignée de la porte.  

- Je m’appelle Jackson répéta-t-il, comme pour se convaincre lui-même  

Peut-être que, s’il le répétait assez, ses souvenirs finiraient par revenir. Pourtant, il a tourné sa vie dans tous les sens, pour savoir si ça avait un sens l'existence mais tout semblait tourner à l’envers autour de lui.  

- Je m’appelle Jackson et tu vas me laisser sortir d’ici. Sinon je... Je... J’vais tirer. Je le ferais dit-il la voix peu assurée  

Sa main abaissa la poignée et, tel un chien à qui on ouvrait enfin la porte, l’homme se précipita dehors. Il courut sur quelques mètres avant de se mettre à tourner sur lui-même. Il ne reconnaissait rien. Pas toutes ces caravanes autour de lui, pas cet hôtel au loin, pas cette mer à l’horizon. La panique le gagna alors. Était-ce un mauvais rêve ?

- OU EST-CE QUE JE SUIS ? QU’EST-CE QUE TU M’AS FAIT?? hurla-t-il à l’attention de la brune, stoppant tout mouvement, portant ses mains sur ses tempes, fermant les yeux

L'homme se donna un brusque coup sur la tempe, comme si cela allait pouvoir remettre ses idées en place et que la page blanche allait pouvoir se remplir. Il n'était pas en colère. Il était seulement perdu, effrayé.


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Re: Duck's stories

Mer 31 Aoû 2022 - 16:56

Tout le monde rêve d’un happy end non ? Mais ça ne se finit pas toujours comme ça… la preuve est devant moi, a me regarder comme si j’étais une inconnue. Je viens de quitter un mauvais rêve pour plonger dans un autre cauchemar. Après le soulagement de le voir se réveiller, il y a l’horreur de me rendre compte qu’il ne va pas si bien que ça. Ses regards, ses gestes, sa façon de parler… c’est lui sans être lui. Je me fige, presque statufiée quand ses yeux se posent sur moi sans que j’y lise cette tendresse que j’ai presque toujours vue, comme si ce n’était plus mon Daemon. C’est presque un souffle suppliant que je prononce ce nom tant aimé qu’il ne reconnait pas.

« Daemon… »

Je l’observe, impuissante, regarder notre chez nous comme s’il était un étranger. Cet endroit si chaleureux que nous avons construit ensemble semble soudain terne et désuet dans l’éclat de ses prunelles bleutées. Je tressaute presque, comme s’il m’avait frappée, quand je l’entends dire ce que je redoute tant. Il ne se souviens pas de moi, comme il ne se souvient plus de qui il est. Je me reprends, même si je sens mes yeux piqués dangereusement, ma voix reste douce et je prends soin de bouger le moins possible.

« Tu me connais Daemon, c’est juste que tu as oublié. »

Je le vois toucher les plaques de Jackson, restées à son cou, avec la gourmette d’Ana et les alliances de son union avec Emma. Des objets chers a son cœur, presque des talismans pour lesquels il avaient pris des risques qui pouvaient paraitre fou quand ne connaissait pas l’histoire de ces bijoux. C’était plus qu’une part de son passé, c’était un fragment des personnes qui avaient tant compté pour lui et n’étaient plus de ce monde. Si, l’espace d’un instant, une petite flamme d’espoir s’allume dans mon cœur alors qu’il regarde ses pendentifs. La mince lueur dans ce vide de ténèbres qui semble presque tout envahir, est vite balayée quand il relève son visage vers le mien en m’expliquant s’appeler Jackson.

Je me sens comme en chute libre, sans trouver aucune prise a cette descente infernale et hors de contrôle. Je suis encore trop incrédule et épuisée pour bien mesurer la cruelle réalité. Je reste blême, incapable de formuler un seul mot alors qu’il semble sur de lui. Puis, ses doigts vont vers cette marque horrible que j’ai été contrainte de lui faire, le prix pour sa vie. Je déglutis péniblement, mes yeux verts toujours perdus dans les siens alors que l’accusation tombe sèchement. Il ne m’a pas parlé comme cela depuis si longtemps que j’avais oublié que cela était possible, un choc de plus qui ne m’aide pas a deviner ce qui est, pourtant, logique au regard de la situation. Il bondit vers son arme restée en en hauteur, l’attrape et la pointe sur moi.

Je pense que je n’aurais jamais pensé vivre cela et accuse le coup plus que je ne le montre. L’homme que j’aime, celui pour qui je donnerais ma vie et est plus encore, me menaçant avec cet air de bête traquée comme si j’étais son bourreau. Une part de moi se déchire pour autant, avec une lenteur presque gracieuse, le menton haut malgré la douleur, je me redresse en veillant a ne pas faire de geste qui pourrait être pris pour belliqueux. Ma main posée sur mon ventre, comme pour protéger notre enfant du drame qui se joue, je ne le quitte pas des yeux. Etrangement, je n’ai pas peur qu’il me tire dessus, a tors peut-être, mais je connais la nature de mon époux Je sais a quel point il est bon et ne ferait pas de mal a une personne sans une bonne raison. Ma voix me semble si petite, si fragile, si lointaine, alors que je lui dis :

« Tu peux sortir Daemon, tu n’as jamais été prisonnier ici… »

Je n’ai pas fini mes mots qu’il se précipite dehors. J’attrape mon sac et le suit comme je le peux, les jambes encore cotonneuses du le choc que je viens de vivre. Il ‘n’a pas été loin et semble plus perdu que jamais, cela me fend le cœur. Je lis la douleur sur ses traits et oublie tout ce que je peux ressentir d’autre que sa détresse alors que je m’avance vers lui avec précaution.

« Tu es a Cresend Bay, tu es avec des amis, en sécurité. Je ne sais pas ce qui t’arrive mais je veux t’aider, Daemon. »

J’ai un hoquet de surprise quand je le vois se frapper et ne réfléchis plus au risque que je prends alors que je pose ma main sur les siennes dans l’espoir fous qu’il ne se fasse pas plus de mal. Si je dois l’appeler Jackson pour le reste de nos vies ou accepter d’être une étrangère pour lui, j’accepterais du moment que cela peut l’empêcher de souffrir ou d’être aussi apeuré. Je l’aime plus que tout et cela me donne un regain de force presque inespérée. Je m’accroche au fait qu’il est vivant et a besoin d’aide, de mon aide, pour le moment, c’est tout ce qui doit compter. Toujours en faisant attention de garder la voix la plus calme et douce possible :

« Tu as été tres malade, des semaines avec une fièvre terrible. Cela a surement dû affecter ta mémoire. »


Je devrais avoir peur. Je devrais avoir mal. je devrais être inquiète. Evidemment que je suis tout ca a la fois, mais, plus que tout, je l’aime de toute mon âme, il n’a que lui, il n’y a jamais eu que lui et ca surpasse tout le reste. Quoiqu’il en coute, quoiqu’il se passe, je ferais ce qu’il faut pour qu’il aille bien, pour le délivrer de ce qui le ronge.

« Est-ce… est ce que tu veux qu’on marche un peu ensemble, ou juste retourner a la caravane manger un peu ? Laisser un peu de de temps a ta mémoire pour retrouver son chemin ? Tu as ma parole que tu es avec des gens qui tiennent a toi ici… je peux te le jurer sur mon bébé. Le reste, on peut y aller doucement si tu as besoin, mais ne te frappe plus, s’il te plait. »



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Re: Duck's stories

Jeu 15 Sep 2022 - 17:18

Ce n’était pas la première tempête à laquelle Daemon devait faire face. Ce n’était pas la première fois que les vagues venaient le submerger jusqu’à presque l’étouffer. Mais à chaque fois, il s’en était sorti. Il avait réussi à maintenir la tête hors de l’eau, à trouver le moindre petit filet d’air pour ne pas se laisser emporter, pour ne pas disparaître. Là était donc la nuance. Comment pouvait-il se battre pour ne pas s’effacer si lui-même ne savait ce qu’il avait à perdre ? Il n’avait plus personne pour qui se battre, pas même lui. Il n’avait plus rien, plus personne pour se repérer dans cette tempête. Plus de phare perdu en pleine mer, plus de roc auquel se tenir, auquel s’accrocher pour lutter contre les vagues.

Ou du moins, plus à sa connaissance. Pourtant ce phare, ce roc était là, sous ses yeux. Alex n’avait pas changé. Elle était la même. L’environnement non plus n’avait pas changé. Il était le même. La seule chose qui avait changé ici, c’était lui. L’homme n’était plus Daemon, n’était plus un maçon. Il n’était qu’un homme sans visage, sans histoire, sans souvenir. Sans passé, sans présent, sans futur. Seulement voilà, il ne s’en rendait pas réellement compte. La seule chose qu’il savait, c’est qu’il ne savait justement rien. Il n’avait aucune idée à quel point cela devait être difficile pour la brune face à lui, malgré le regard humide et le sursaut qui la secoua. Il ne pouvait pas se mettre à sa place parce qu’il n’avait aucune idée de ce qu’il représentait pour elle. Plus encore, il n’avait aucune idée de ce que pouvait être l’amour ou la tristesse. Il avait tout oublié, mis à part ce trou béant d’où émanait cette panique grandissante.

Cette angoisse, c’était la seule chose palpable à laquelle l’homme pouvait se raccrocher. Il n’y avait que ça de vrai, que ça qui l’animait et qui lui paraissait réel.

- C’est “juste” que j’ai oublié ? répéta-t-il, incrédule

Comment pouvait-elle paraître si douce, si calme en prononçant cette phrase ? La jeune femme ne devait peut-être pas prendre ça au sérieux. C’était sans doute ce contraste entre le chaos qui régnait dans son esprit et la quiétude apparente de la brune qui le força à bondir, à se saisir de cette arme et à la menacer. À dire vrai, cela ne tenait pas véritablement d’une menace mais plus d’une défense. Une défense dont il était persuadé d’avoir besoin pour sortir. Durant un court instant, l’homme fût déstabilisé d’entendre la brune lui affirmer qu’il pouvait sortir, qu’il n’avait jamais été prisonnier ici. Qu’était-il, alors ? C’était cette question qui tournait dans son esprit alors qu’il se mit à courir à l’extérieur. Et à chaque pas qu’il faisait, une nouvelle question venait pousser l’ancienne, jusqu’à créer un pêle-mêle douloureux et sans réponse.

La seule évidence qui le frappait plus que sa propre main à l’heure actuelle fût que la fuite était désuète. Son corps s’arrêta net tant le monde semblait tourner sans lui, bien trop rapidement. L’homme fût vite rejoint par la brune qui paraissait avancer à pas de loup vers lui, comme si elle approchait un animal sauvage. Par réflexe, il leva son arme vers elle, la main tremblante mais elle ne se déroba pas. Sa voix demeurait douce et à mesure qu’elle parlait, le bras du brun s’abaissait. Elle avait l’air sincère mais la sincérité n’était pas suffisante pour lui. Il sursauta lorsque les mains blanches se posèrent sur les siennes et un mouvement de recul le força à faire un pas en arrière. Ses yeux glissèrent sur le ventre arrondi, déduisant que la femme serait très bientôt maman. Pourquoi perdrait-elle son temps avec lui ?

- Tu... Pourquoi tu voudrais m’aider ? demanda-t-il, méfiant

Elle semblait le connaître mais l’homme se disait tout bonnement tu penses me connaître, je fais encore connaissance avec moi-même. Pourtant, son instinct lui soufflait de rester là, de l’écouter. Il fronça les sourcils.

- Qu’est-ce que j’ai eu ? dit-il, la voix toujours emplie de méfiance La fièvre... La fièvre ne peut pas effacer toute une vie... Tu... Tu m’as fait quelque chose?

Il ne saurait dire pourquoi mais une part de lui ne pouvait s’empêcher de la suspecter. Après tout, elle était le premier visage qu’il voyait. Le premier qui se dessinait devant lui. Le premier qui rentrait dans sa nouvelle mémoire, ses nouveaux souvenirs.

La voix de la jeune femme continuait de se vouloir douce et apaisante et l’homme se surprenait à l’écouter. Son regard perdu rencontra le vert émeraude. Ce vert qui paraissait, lui aussi, rassurant. Et pourtant, le brun avait beau se concentrer, ces yeux lui étaient inconnus. Rien ne lui revenait.

- Non, non... dit-il en secouant la tête

Il sentait ce nouveau vent de panique le gagner face au calme qui régnait chez elle. Alors, brusquement, à nouveau il se recula.

- Qu’est-ce que... qu’est-ce que ça changerait que je marche avec toi ou que je mange ? J’ai pas faim je... je veux juste des réponses !!


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Re: Duck's stories

Sam 17 Sep 2022 - 21:58

Je reste a le regarder, un peu figée, encaissant cette étrange distance entre nous, sans savoir comment je vais pouvoir lutter contre ce qui se passe. L’idée de l’avoir perdu pour toujours est trop douloureuse pour que j’arrive vraiment à l’appréhender, néanmoins, je me sens frissonner comme si un vent glacé était en train de se lever. C’est impossible de rester de marbre alors que je commence seulement a réaliser que tout ce que nous avons vécu ensemble a disparu pour lui en même temps que ses souvenirs, comme si tout ce qui a fait ce « nous » que j’aime tant ne se résumait qu’a cela. Il n’y a pas de mot pour qualifier la douleur de comprendre qu’aux yeux de la personne que j’aime plus que tout, je ne suis plus qu’une étrangère dont il se méfie. Mais cela n’est rien a côté de ce qu’il semble vivre : ses gestes, son regard, ses traits… tout trahi a quel point il est perdu et je ne peux surement même pas imaginer le cauchemar qu’il est en train de vivre. C’est la seule chose qui me donne la force de ne pas m’écrouler. Je n’ai pas le droit de me laisser aller, attendant qu’on vienne me tendre la main, alors que, plus que jamais, il a besoin de moi.

Je me fais violence pour lutter contre ma propre panique en essayant de me concentrer sur lui. J’aimerais bien lui apporter des réponses, être pleines de certitudes mais le fait est que je ne sais pas ce qui se passe ni pourquoi il est amnésique. Je ravale mon envie de pleurer pour essayer de rester la plus maitresse de ma voix et mes gestes possible. Je ne bouge pas alors qu’il a un mouvement de recul, je me mordille juste la lèvre pour réprimer ma propre détresse d’être devenu un objet de défiance pour mon époux. Avec cette douceur qui a toujours été mienne, je tente de répondre a sa question.

« Je veux t’aider parce que tu en aurais fait pareil avec moi Daemon. Tu as toujours été là pour moi quand j’en ai eu besoin. Même si tu as oublié, pour le moment, je t’avais promis d’être là pour toi quoiqu’il arrive… »

Dans les bons comme les mauvais moments, pour le meilleur et pour le pire, dans la santé comme la maladie… Un serment que je compte plus que tout honorer jusqu’à mon dernier souffle. J’ai vraiment peur qu’il parte en courant au meilleur de nulle part, qu’il se mette en danger sans que je sache le rattraper. Autant dire que je suis soulagée que, pour le moment, il semble me donner une chance de discuter avec lui... cela me redonne aussi un peu d’espoir. Naïvement, une petite part de moi espère vraiment qu’il se souvienne un peu de moi, assez pour me faire confiance, même inconsciemment. Nulle cause n'est perdue... s'il y a encore un pauvre fou prêt à se battre pour elle, une pauvre folle en l’occurrence. Qu’elle que soit les épreuves, je ne compte pas me résigner a voir mon âme sœur rester dans cet oubli qui le ronge. J’essaye de continuer a lui expliquer ce qui lui est arrivé, sans donner trop de détails, comme pour inciter sa mémoires a se réveiller pour en savoir plus :

« Tu es resté en pleine tempête pour retrouver des enfants en danger, on a d’abord cru à un mauvais coup froid mais ca c’est aggravé. Tu as eu une sorte de pneumonie, pendant des jours tu as lutté contre la fièvre… j’ai… j’ai vraiment eu peur Daemon. »


Ma voix se casse a cette simple petite phrase qui résume si parfaitement les nuits d’angoisse à son chevet, impuissante a le voir se battre contre une fièvre dévorante, arrivant a peine a lui faire boire remède et tisane ou rafraichir son corps brulant dans cet espoir vain de l’aider dans son combat. Je prends soin de prononcer le plus possible son prénom, comme si cela pourrait lui donner un peu plus de force jusqu’à ce qu’il l’accepte comme le sien. Ce n’est peut-être qu’un maigre fils avec ses souvenirs perdus, mais c’est le seul que j’ai pour le moment.

« Je n’ai fais que veiller sur toi et te soigner du mieux que je l’ai pu, Daemon. Je sais que je t’en demande beaucoup, mais je peux te jurer de toute mon âme que te faire du mal est la dernière chose dans ce bas monde que je pourrais faire… »

Comme j’ai cette certitude, peut être idiote, que lui aussi ne pourrait rien me faire, même sans sa mémoire. Je le regarde avec inquiétude en le voyant secouer la tête. Je meurs d’envie d’aller vers lui, de le toucher, de lui prendre la main pour le ramener vers notre foyer comme si cela suffirait pour le sauver de ce qu’il vit, mais les choses sont loin d’être si simple. Je me raidis en le voyant reculer redoutant plus que tout son départ, néanmoins, j’arrive a résister a mon impulsion d’aller vers lui. J’ai la certitude qu’un seul pas de trop pourrait le faire disparaitre pour de bon.

« Je … je ne sais pas ce qui t’arrive vraiment Daemon. Je… Je voudrais… mais je sais que tu es épuisé avec ta fièvre, que tu dois être affamé car tu as eu du mal a te nourrir. Je répondrais a toute tes questions pendant le repas, si tu es d’accord. Et aussi… »

J’ai un maigre sourire un peu timide, ne sachant pas trop si c’est une bonne idée.

« Il y a une personne qui ne va pas tarder a se réveiller qui sera surement ravie de te revoir, sans compter une autre a qui tu as manqué terriblement. »

Ana qui n’avait de cesse d’appeler son « Dada » et n’avait pas bien compris ce qui se passait, ressentant juste mes angoisses et ma fatigue. La voir saurait peut etre raviver ses souvenirs. Quant a Winter, il avait été tellement triste et collant avec Daemon que j’avais dû le mettre de temps en temps au chenil si je ne voulais pas l’avoir entre moi et le malade. Je tends doucement la main vers mon mari, les yeux dans les siens avec une invitation muette a me suivre.

« Tu peux garder ton arme si ca te rassure.»



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Re: Duck's stories

Mer 5 Oct 2022 - 17:50

Les sourcils de l’homme se froncèrent un instant. Pendant un court moment, les questions ne se bousculaient plus en masse dans son crâne. Il scrutait la femme en face de lui et, alors que les interrogations s’étaient tues, une semblait prendre maintenant entièrement procession de son esprit. Ses yeux s’ancrèrent sur le visage de la brune, avec un air probablement perplexe cherchant tout bonnement à savoir si elle était sincère ou non. Elle en avait tout l’air mais les doutes continuaient à l’envahir, l’angoisse de ne rien se souvenir n’aidant pas. Se connaissaient-ils donc réellement ? Qu’avaient-ils pu donc partager pour que les yeux émeraude ne brillent autant de larmes en le regardant, pour qu’elle affirme avec douceur et pourtant conviction qu’il aurait fait de même si les rôles eurent été inversés, pour qu’elle ne garantisse qu’il l’avait déjà aidé par le passé ?  

La tentation d’y croire aveuglement était forte, intense même. Car peut-être qu’en faisant confiance à cette inconnue, l’homme retrouverait son chemin, retrouverait son prénom, retrouverait son histoire. Mais était-il ce genre d’homme ? Ce genre d’homme à accepter de croire la première personne qu’il croise, d’accorder sa confiance si facilement parce que le visage d’en face paraît doux et sincère ? Voilà que les questions revenaient au grand galop pour lui frapper le crâne. Il ne savait pas quel genre d’homme il était. Il ne savait pas qu’elle était bien plus que “la première personne qu’il croise”. Alors, il secoua la tête, dans l’espoir vain de se remettre les idées en place.

- Je... Je me souviens pas avoir été là pour toi, je ne sais même pas qui tu es... finit-il par balbutier à voix basse  

Pourtant, il ne demandait qu’à la croire mais il n’y parvenait pas. Tout était bien trop en désordre dans son esprit. Ses pensées s’entremêlaient entre l’espoir et le désespoir, entre l’envie d’y croire et l’horrible sensation qu’il devait douter de tout. Mais la jeune femme continuait de parler, répondant à ses interrogations, ajoutant des détails. Etaient-ils réels, ces détails ? Une fois encore, il ne saurait dire. Elle lui conta l’histoire d’une tempête, d’enfants perdus qu’il aurait recherché puis d’une pneumonie. Ces enfants, étaient-ils les siens ? Ou était-il seulement le genre d’idiot qui risquerait sa vie pour n’importe quel être vivant sur cette planète Terre ? Mais la voix de la brune se brisa, lui faisant relever les yeux vers elle ; lui faisant à nouveau froncer les sourcils. Elle semblait réellement avoir eu peur pour lui ou bien elle était une excellente comédienne. À nouveau, les contradictions venaient embrumer son esprit instable. Aucun son ne voulait donc s’échapper d’entre ses lèvres sèches et ce fût en silence que l’homme laissa la brune parler, sans l’interrompre. Ses pensées fusèrent, silencieusement, d’un extrême à l’autre. Et pourtant, il finit par acquiescer d’un signe de tête la proposition de l’inconnue car, maintenant que l’adrénaline semblait quitter peu à peu son corps, il sentait que son estomac se tordait douloureusement dans tous les sens, tout comme sa tête qui n’était pas en reste.  

Devant le sourire qu’afficha la jeune femme, le brun pencha légèrement la tête sur le côté, l’incompréhension encore accrochée à son visage fermé et perdu.  

- Je ne me souviens de personne lâcha-t-il, un peu sèchement lorsqu’elle affirma qu’il avait manqué à d’autres.  

Son regard glissa vers la main tendue et, après une courte hésitation, il se décida à se mettre en route, sans pour autant saisir cette main qu’il ne reconnaissait plus. Sa propre main, en revanche, se resserra autour de son arme.  

- Je vais la garder oui, juste au cas où

Savait-il s’en servir ? Il l’ignorait. Et d’ailleurs, pourquoi avait-il une arme à portée de main comme cela ? Était-il une sorte de malfrat ? Il suivit la femme, prenant soin de rester à deux pas derrière elle. Juste au cas où elle déciderait de s’en prendre à lui. Un court silence s’installa avant que l’homme ne se racle la gorge.

- Qui est le plus fou des deux, le fou ou le fou qui le suit ? demanda-t-il, ironiquement  

Il finit par revenir à l’endroit où il s’était réveillé. Des tas de caravanes s’éparpillaient, ci et là. Et cette fois-ci, l’homme prit le temps de regarder, d’analyser. Ils étaient vraisemblablement tous nomades ou très pauvres pour vivre dans ces conditions. Quelques portes de caravanes s’ouvrirent au moment où d’autres personnes pointèrent le bout de leurs nez. La plupart d’entre eux le regardèrent avec un large sourire aux lèvres, l’interpelant par un “Daemon !” ou un “Dada !” venant d’une personne au style particulier. L’un d’entre eux affirma même être heureux de le revoir sur pieds mais l’homme se referma sur lui-même, les jaugeant, retrouvant son attitude de bête traquée. Il remonta même légèrement son bras, prêt à braquer quiconque s’approcherait de trop près. Et pourtant, une fois de plus, ces individus paraissaient sincères mais peut-être était-ce tout bonnement une supercherie. Peut-être avait-il déjà vu un film comme cela par le passé, l’histoire d’un homme pensant vivre une vie normale mais étant en réalité enfermé dans une fausse ville, entouré de comédiens. La femme qui l’accompagnait sembla saisir son désarroi et il la vit chasser poliment ces personnes, une par une, d’un léger signe de main ou d’une légère négation de la tête.  

Mais il y eut un être qu’elle ne parvint pas à écarter. Un aboiement fît retourner brusquement l’homme qui leva son arme en direction de la source du bruit, paniqué. Mais le labrador à l’œil manquant détourna aisément le revolver pour se jeter sur lui, remuant la queue et le gratifiant de plusieurs léchouilles un peu trop baveuses. L’homme se tétanisa un instant, regardant la femme, l’interrogeant du regard avant de se détendre complètement.  

- Sa... Salut toi dit-il un peu hésitant  

Sa main libre finit par venir se perdre sur le crâne velu du chien et pendant un bref instant, un sourire timide vint même courber le coin de ses lèvres. Il ne connaissait pas cet animal mais lui semblait le connaitre et... L’aimer ? Se laissant alors un peu aller, faisant un peu tomber ses remparts, l’homme s’accroupit devant le canidé qui redoubla de joie.  

- C’est... le mien ? demanda-t-il, toujours envahi par le doute à la femme  

Et alors qu’il vit cette dernière prête à ouvrir la porte de la caravane dont ils venaient de sortir, l’homme se redressa, comprenant que c’était ici qu’il allait devoir retourner. Il la laissa d’abord entrer, comme méfiant et finit par s’y engouffrer à son tour, talonné par le chien qui semblait décidé à ne pas le lâcher. Son regard se perdit sur l’intérieur de cette caravane et pourtant, il ne broncha pas, restant adossé à la porte. Hésitant un instant, il finit par oser demander quelque chose.  

- Je... Tu es qui, pour moi ? J’veux dire... C’est quoi notre lien pour que tu veuilles absolument m’aider et que tu aies l’air si... touchée ?

Mais à peine eut-il finit sa phrase qu’un sursaut l’anima. Des pleurs, semblables à ceux d’un nourrisson, résonnèrent dans la caravane.

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Re: Duck's stories

Dim 9 Oct 2022 - 15:34

[color=#0033ff][color=« Tu ne te souviens pas d’eux, mais ils pourront peut-être t’aider à te souvenir ? »[/color]

Toute cette défiance est comme une fine douche d’acide qui me tombe dessus, pour autant, je fais face, pleine de cette résolution ferme de ne me concentrer que sur le fait que je dois rester forte pour l’aider. Ma main tendue vers lui brule presque de ce vide immense de ne pas ressentir la chaleur de la sienne. Je me rends seulement compte a quel point j’ai besoin de son contact, d’être prêt de lui, de sentir sa peau sur la mienne, son odeur… Je ne peux que laisser doucement resserrer mes bras contre mon ventre, ressentant un frisson désagréable de ce vide qui fait tressaillir mon petit locataire de nombril.

« Si ca te rassure Daemon, garde la, mais, s’il te plait, soit prudent avec, il y a des enfants ici qui sont adeptes des bêtises à la chaine. »

Marcher a ses cotés en ressentant cette distance que son amnésie nous impose est un supplice. Plus que jamais j’ai besoin de le toucher, d’être contre lui. Nous croisons plusieurs personnes que je suis obligée de congédiée quand ils veulent parler a mon époux. L’homme amical et toujours prêt a la discussion a disparu derrière un Daemon sur le qui-vive. Anatole m’interroge du regard avec une inquiétude visible.

« Ca va aller. J’irais apporter Ana a Connor tout a l’heure, tu peux le prévenir ? »


Et comme ca, je pourrais leur expliquer la situation délicate. Anatole n’en demande pas plus et nous fait un petit signe avant de s’éclipser. Il n’a peut-être pas tout deviner mais il en a assez compris pour laisser de l’espace au maçon. Prise d’une envie folle et d’un doute, je profite que son attention soit accaparée par le départ d’Anatole, je fais semblant de trébucher. Il pourrait me laisser tomber, mais il n’en fait rien. L’homme que j’aime, celui qui bondit toujours au secours des autres est toujours là. Il a oublié qui il était mais c’est toujours lui. Spontanément, Daemon me rattrape et je reste figée comme un animal devant les phares d’une voiture alors qu’il me touche. Je ne voudrais pas qu’il me relâche… jamais…  Je suis troublée par cette étreinte trop fugace et me contente de relever la tête, pour plonger mes yeux dans les siens et bredouiller un :

« Merci »


Je voudrais rester là, je voudrais voir son visage s’illuminer, qu’il me serre dans ses bras avec tendresse et que nous restions enlacés, mais c’est, hélas, impossible. Winter déboule comme un boulet de canon velu et affectueux, trop heureux de revoir son maitre enfin réveillé.

« Baisse ton arme… il est gentil… »

Si je me crispe prête a intervenir en voyant Daemon lever son arme, je me détends rapidement en observant sa réaction face au jeune chien borgne. Le fait que, instinctivement, il lève les yeux vers moi pour m’interroger, comme si, au final, il avait quand même un peu confiance en moi, me redonne un peu plus d’espoir. Je lui souris et opine du chef avant de lui confirmer :

« Oui Daemon. Depuis que tu lui as sauvé la vie, il t’a adopté. Il s’appelle Winter. Avant toi il avait un très mauvais maitre et il était dans un triste état quand on l’a trouvé. »

Je l’observe, avec ses gestes doux, se mettre a genoux pour mieux accepter les attentions de notre chien qui ne cache pas sa joie de le retrouver. Je l’envie tellement que cela soit facile pour lui. Si je me désespère de voir un déclic en Daemon, je note bien son attitude et retrouve, quelques instants, mon mari avec ce petit air presque serein quand il caresse l’épaisse fourrure de Winter.

Nous reprenons le reste de chemin vers notre caravane, je lui laisse le temps de découvrir ce qui a été notre cocoon. Même si le rangement n’est pas aussi parfait que je ne voudrais, du fait de ces derniers jours éprouvants, cela reste douillet, propre et chaleureux. Les enfants ont fait des bouquets de fleurs pour lui que j’ai mis dans plusieurs vases. Tout est plutôt bien organisé pour que nous soyons bien installés. Sans tarder, je sors une poêle pour commencer a cuisiner un plat qu’il aimait quand je me fige a sa question.

Je plonge, a nouveau les yeux vers lui et me mordille la lèvre hésitante. J’ai terriblement peur que de lui dire qui je suis le fasse fuir a nouveau, qu’il m’accuse de mensonge ou qu’il se sente prisonnier avec une inconnue sans me laisser une chance de raviver sa mémoire autrement. Car même si je dois organiser une table de black Jack ou le ramener au jardin japonais pour simuler une noyade, je compte bien me battre contre ce nouveau coup du sort. Par chance, je n’ai pas a répondre. Ana choisi ce moment pour faite une diversion et je vais la lever. La petite a les traits encore bouffie de sommeil et l’air un peu perdue quand je vais la prendre.

« Qui c’est qui a fait une grosse sieste ? Viens par la ma puce. »

Je la sors de son petit coin lit. Elle me fait souvent l’effet d’une belle petite poupée avec ses boucle blonde et ses grands yeux bleus. J’ai appris a ne plus voir le fou en elle et a juste la trouver merveilleusement belle, douce et câline. Pour beaucoup, dans le camp, elle ne fait pas de bruit, pleure peu et est sage, surtout a coté du turbulent Elliot, mais la vérité est qu’elle est très bavarde du haut de ses quelques mots, mais seulement avec quelques personnes.  Les yeux encore ensommeillés, elle se redresse soudain dans mes bras et gesticule, en tendant les mains vers Daemon.

« DADA !! DADA !!! Pu dodo ? Câlin Dada !!! Câlin ! »


Elle ne peut pas comprendre, elle, ce qui se passe et aussi que l’homme a qui elle quémande de l’attention ne se souvient plus d’elle. Avec précaution, j’explique a mon époux :

« Je te présente Ana, c’est ma fille. Tu m’aides beaucoup pour l’élever et tu as toujours veillée sur nous depuis qu’elle est née. Tu… tu veux bien la prendre ? »


Je vois bien un éclat de détresse dans les yeux de mon mari. Je le connais assez pour deviner qu’il a peur de mal faire et aussi qu’il ne va pas savoir résister aux petits bras potelés s’agitent vers lui ou au un regard implorant d’Ana.

« Dada !!
- Ne t’inquiète pas, tu as juste a la prendre dans tes bras et te faire confiance.»

Je lui fais signe de s’assoir devant la table avant de lui confier, délicatement la toute petite fille. Winter prend ça pour un signe et vient, d’autorité, se poser contre les jambe de Daemon, si ce n’est sur ses pieds. Je le laisse refaire connaissance avec Ana en retournant m’appliquer a lui faire un burger avec des pommes rissolées façon frites comme il les adore. Du coin de l’œil je les observe et voit ma fille passer sa main sur le menton de Dameon avant de rire pour lui annoncer en retirant ses doigts de son menton mal rasé.

« Dada !! Pique !! Pique Dada !! Pas grave !! J’taime ! Calin ! »


Elle pose sa tête au creux de son cou pour caler son petit corps contre lui et téter son pouce en signifiant bien être. Je le laisse faire, meumeumant, sans vraiment m’en rendre compte, hungry etes tout en cuisinant. Difficile de ne pas sourire en voyant le tableau. Le pauvre, le voilà avec un labrador presque coucher sur ses pieds et un bébé qui a pris ses aises dans ses bras. Avec amusement je lui dis :

« Je crois que tu en as deux qui ne te laisseront plus partir. Si tu veux, après le repas, tu pourras prendre une douche si cela te fait plaisir, je te ferais une diversion. Par contre ne force pas trop, tu as été alité longtemps, des que tu es fatigué n’hésite pas a le dire. »

Je présente au mieux son « burger post apo »  avec du pain que je finis de toaster, un œuf au plat par-dessus et du fromage fondu dedans et de la viande cuite comme il l’aime. Sans piment, difficile de faire du ketchup, mais avec les tomates de l’été en coulis et un peu d’astuce, j’arrive à faire un substitut assez acceptable. Je récupère Ana après l’avoir servi et pose la demoiselle dans sa chaise haute en face de lui avant de sortir une purée de fruit mélangé a du lait pour lui donner. Elle ne quitte pas des yeux le maçon tout en en babillant dans son langage plein de choses. Elle en a lui dire visiblement.

« Bon appétit !! »

Je donne le gouter a Ana en observant aussi Daemon avec ces idées folles que ses papilles pourraient lui redonner quelques souvenir. Je lui annonce déjà la suite.

« J’ai du gâteau au pommes si tu as encore de la place après ? Quant a toi Melle, on ouvre grand la bouche !!! allez !! haaaaaa ! voila c’est bien ! »

L’espace de quelques secondes j’en oublie la situation, retrouvant un instant de cette vie de famille que son amnésie est en train de nous voler.
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