Bon, Isaiah ne semble pas vouloir se donner la peine d’argumenter aujourd’hui et déjà il file avec les clefs. Je dois avouer que ça m’amuse un tout petit peu de l’embêter, mais la situation n’est pas assez détendue pour que je me permette de sourire ou d’apprécier l’air renfrogné de mon coéquipier. Je me retourne plutôt vers Isha, qui me fait une… révérence ?

Je fronce les sourcils bien malgré moi. Dans le genre subtil et se fondre dans la masse, on repassera. M’enfin, la mention d’un beau bordel à venir me fait passer outre tout le reste. Go pour les escalators, je veux partir d’ici au plus vite.

Encore une fois, on repassera pour la subtilité. Est-ce qu’il y a seulement une seule personne dans ces escaliers qu’Isha n’a pas bousculés ? Je le suis dans son sillage tout en serrant les mâchoires. Mon estomac commence à se nouer, il y a trop de monde, je me sens coincée… Je me mords l’intérieur de la joue pour essayer de me concentrer, de ne pas laisser mon anxiété monter.

- Hmm ? Isaiah ?! Mon mec ? Dieu merci non. Que je ronchonne en imaginant le calvaire que ce serait.

Je ne suis pas une grande bavarde d’ordinaire, mais ça sort tellement de nulle part que ça m’aide un peu à faire focus, à ne pas paniquer. C’est quand même… un peu surréaliste quand il me demande ce que je fais de mes journées quand je ne suis pas poursuivi par un gang de fils de pute… Je n’ai pas trop le temps de répondre que des cris proviennent du rez-de-chaussée.

Mon regard passe de la foule en bas à Isha et… je comprends immédiatement. Putain de merde… Il m’attrape par le bras et m’entraine à sa suite, nos sans dire qu’il a mal calculer son timing. Bon, il se permet une petite blague hein, parce que visiblement tout est une blague pour lui… Moi je jure entre mes dents serrer, entrainer à sa suite faute de meilleure option. On arrive sur le palier et il me relâche pour mieux attraper ma main cette fois et m’entrainer je ne sais où.

Angus trouve tout.

J’ai à peine le temps de lire l’affiche artisanale que je me retrouver dans cette boutique, alors qu’Isha se plaque d’un bord de la porte pour jouer aux espions. Un type hurle pour savoir qui vient de débarquer de la sorte dans sa boutique et je m’imagine déjà me prendre du calibre douze dans la tronche.

L’arme finit par se baisser et… visiblement le proprio connait Isha. Je bats quelques fois des paupières, j’ai du mal à tout capter là. Il semble y avoir un paiement et on nous invite dans l’arrière-boutique. Pourquoi je fais confiance ? Pourquoi je me laisse entrainer ? Si ça se trouve, c’est un piège…

Entre la foule qui panique en dehors de la boutique, les ordures qui apparemment nous suivaient et ce possible piège… Bon le type se présente, me passe un compliment et me demande ce qu’il peut pour moi… On va dire que j’ai peut-être choisir le moins pire des scénarios au final ? Mon cœur bat quand même à tout rompre dans ma poitrine. Je m’appuie sur le premier meuble en vue et je souffle un coup. Je hais les endroits remplis de gens. Surtout quand ça part en couille. Je me passe une main sur le visage et essaie de reprendre mon sang-froid.

- Euhm… je cherchais quelques outils et appareils pour notre vignoble. Aller, je vais me concentrer sur ça et pas le fait qu’un gang de connards va chercher rétribution sous peu. J’ai besoin de quelques pièces de rechange en fait. Pour les cuves et le pressoir… Dites, vous avez une sortie à l’arrière ? Je passe du coq à l’âne, mais j’ai besoin de savoir si on est acculé ou si on à une sortie de secours…

Je reste a observer le bordel. Pour le moment c’est plus des gens qui flippent, des petites frappes qui en profite pour tenter de tirer des trucs ou régler des comptes, ce qui, inévitablement, fait que d’autres veulent se défendre, bref, rien de bien méchant. Comme je le pensais les trous de balles du chaos vont jouer la sécurité et penser nous cueillir a la sortie. Je prends le talkie et lâche un :

« J’ai besoin d’un temps.
- Et moi de t’étriper. »

Je souris comme un con avant de lâcher ma vigie pour suivre des yeux Angus et la petite IF l’appareil rivé a l’oreille. J’ai un sourire un peu con en imaginant la gueule de Winston.

« T’es sérieux ? Tu te souviens comment ca c’est finis au quartier russe ???
- T’es défaitiste, c’était notre premier jet. Bon, je peux l’avoir mon temps !
- En plus le mec que tu m’as envoyé c’est pas un poème et tu vas être heureux de voir ce qu’ils ont comme besti...
- T’es mignon mais tu me raconteras ta vie plus tard. J’AI BESOIN D’UN TEMPS »

Il soupire. Même si on se cherche un peu, on s’est suffisamment sorti le cul de la merde et on a traversé assez d’enfers pour ne pas se lâcher. J’ai confiance en lui et j’aime a penser que la réciproque est vraie.

« 45 min max… fais gaffe a ton cul… ils sont en train de se regrouper.
- T’en a 35 et gaffe au tiens aussi. »

Je range le talkie et m’approche d’Angus qui a déjà sorti un fatras d’objets de tailles diverses sur ce qui lui sert de comptoir. En fait, y’a rien qui me parle a part un tourne bouchon en sarment de vigne. C’est le seul truc dont je vois l’utilité. Mon ancien boss, Valerian, qui nous faisait chier avec son vin bouché du nez, il en avait comme ca pour ouvrir ses bouteilles.

« J’ai bien une sortie mais cela vous ramène sur le hall, j’en suis bien désolé Melle. Pour ce que vous cherchez, venez voir ce que j’ai dans l’arrière-boutique… mais je vous préviens, c’est plus volumineux et je ne sais pas trop a quoi tout sert. »

Il nous fait signe de le suivre vers un épais rideau défraichi qui sent les trucs anti mite des mamies d’autrefois. Derrière, c’est un vaste espace de stockage qui doit facilement faire dans les 40 m2, plein d’étagères jusqu’au plafond ou s’entasse vraiment de tout dans une logique qui n’appartient qu’a Angus.

« Les pièces atypiques et celles liées a l’agriculture sont par ici Melle, je vous laisse jeter un œil. Par contre, la maison ne fait pas crédit, nous acceptons les paiements en munitions, ou nourriture qui se conserve ou médicaments. Je ne prends plus de bétails vivants ni d’alcool. Evidemment, je vous fais la réduction soutien a la cause. »

Je sais pas si j’adore ce type ou s’il me gave, mais il me fait marrer avec ca façon de parler. C’est le genre de mec utile qui n’a pas survécu grâce a sa force brute. Autant dire que je ne me doute pas que si les NE passent, ils auront aussi la réduc soutien a la cause. Apres, ira-t-il me balancer en sachant que son neveu est dans mes hommes ? C’est un pari que je suis obligé de prendre. Je confirme a la brunette, avec une pointe d’humour :

« T’as 20/25 min pour fouiner. Je t’avoue que si tu peux éviter de me dire que c’est une brouette ou une charrue que tu veux, ca m’arrangerait. »

Je capte que mon super plan n’avait pas prévu un taux d’encombrement élevé… bah c’est pas grave, on improvisera. Ca fera râler Winston mais je vais gérer. Je gère toujours. Très poliment, après avoir échangé quelques banalités a savoir si j’avais testé la nouvelle forgeronne, alors que je lui indique préférer attendre le retour de Kara, en espérant qu’elle se repointe un jour. Les rumeurs la disent morte, moi je la pense tout aussi immortelle que moi. Ouai, bon, ok, si je savais je fermerais ma gueule. L’homme se renseigne un peu plus sur ce que cherche ma camarade et commence a lui rassembler d’autres article  du coup, moi aussi j’aide, en profitant pour faire la causette tout en pouffant de trouver des trucs genre coiffe d’indien ou cendrier en forme de bite. Ok, j’avoue, j’ai pas résisté a essayer la coiffe et le cendar a disparu dans mon sac, mais on est pas obligé de tout ce dire non plus.

« Comme ça, l’autre c’est pas ton mec ? Du coup.. t’es un peu du genre celib quoi ? Sinon, tu crois que si après ca je te propose une p’tite bières ou un Monopoly, ca te brancherait ?  Enfin, tu m’as toujours pas dit a par le jus de raisin et le shopping post apo ce que t’aimait bien. »

J’ai pas le temps de comprendre qu’Angus passe derrière moi et me donne un livre « la drague pour les nulles » avant de retourner à ses occupations

« C’est cadeau de la maison. »

Je regarde le livre, je regarde Angus, je regarde la fille, je suis pas sur de capter. Je finis par hausser les épaules et le mettre dans mon sac. Je le filerais a Joe, elle aime bien lire, ca lui fera surement plaisir. Rapidement, on entend une clochette : quelqu’un arrive dans la boutique, je me tends comme un chat prêt a sauter sur sa proie, la main sur mauricette, alors qu’Angus me fait signe de temporiser. Je tends l’oreille et me déstresse. L’homme entré parle bien du bordel mais est la pour essayer de revendre des trucs qu’il a trouvés, surement volés. Tout va bien. Je souris a la brune avant d’ajouté :

« Sinon, t’aime l’escalade ? »

Pas de sortie arrière qui me permettrait d’éviter tout le chaos du centre commercial… Je me mords l’intérieur la joue avec un peu trop de force et c’est un goût ferreux qui teinte doucement ma bouche. J’entends bien Isha sur un talkie, mais le dénommé Angus me déroule un inventaire sous les yeux. J’ai du mal à me concentrer vu mon anxiété, je ne peux m’occuper que d’une chose à la fois… J’imagine que je peux faire confiance à Isha ? C’est lui après tout qui m’a ramené ici et qui joue les gardes près de la porte…

Mon regard balaie rapidement ce que me présente le marchand et je ne trouve pas du tout ce que je cherche dans cette sélection. Je suppose qu’il le voit, car rapidement il me propose d’aller voir son espèce d’entrepôt, caché derrière un rideau qui a vu de meilleurs jours.

Là, c’est limite une caverne d’Ali Baba. En d’autres circonstances, j’aurais peut-être pu sourire, mais là je suis trop tendue, trop… nerveuse.

- C’est ce que nous avons pour troquer. Que je rassure le propriétaire de l’endroit.

Avec une petite hésitation, je m’avance un peu dans cet entrepôt. C’est que c’est un cul-de-sac au fond, ce n’est pas pour me rassurer si jamais les connards que nous fuyons nous retrouvent ici. Le plus vite je fouille, le plus vite on s’en va…

- Non, je cherche des jauges pour les cuves, quelques poulies, des barres filetées, de quoi faire des filtres. Donc des trucs plus volumineux que ce que me montrait Angus avant, mais pas de la machinerie intransportable sans charrette.

Bon, mon temps est compté aussi et… je me dépêche. Il n’y a pas beaucoup de lumière ici et je sors de mon sac à dos une lampe de poche. Il faut que je la crinque un petit peu pour la recharger, mais bien vite un faisceau de lumière s’en dégage. Je passe la première étagère et je vais vers la seconde. Là je repère déjà quelques jauges à pression. Super ! Pendant que je les examine de plus près, Isha reprend la parole et…

Je dois cligner des paupières quelques fois en réalisant ce qu’il se passe. Je relève le nez dans sa direction et… Je pince les lèvres pour ne pas pouffer de rire. C’est… juste tellement surréaliste. J’ai l’impression qu’un malheur va me tomber sur la tête à tout moment et en même temps j’ai ce type qui tente maladroitement de me draguer. C’est juste… tellement maladroit que je ne peux pas me fâcher en fait ! Je ne peux pas l’envoyer chier comme je l’aurais fait avec n’importe qui d’autre. C’est juste trop… absurde.

- L’escalade ?! Oui, là je pouffe de rire bien malgré moi. Je reviens à mes jauges et les tends à Angus pour continuer de fouiller. Pas le moment Isha. Je ne suis pas intéressée non plus. Par personne. Ce n’est pas que lui quoi… Je veux juste le préciser, parce que pour une fois je ne veux pas être vache.

Il est en train de m’aider, alors qu’il aurait pu vaquer à ses occupations, je lui dois bien ça du coup.

Je laisse la p’tite nana gérer avec Angus pour les paiements, perso je m’investis a l’aider a chercher ces machins même si je n’ai aucune idée de ce qu’elle veut. Ouai, bon, en même temps, si les hommes comprenait ce que veulent vraiment les femmes, ca serait p’etre pas l’apocalypse, je dis ca, je dis rien. Une coiffe indienne sur la tête, un cendrier bite et il livre sur la drague pour les nulles dans mon sac a dos Hello Kitty je continue de farfouiller et pouffe en trouvant un t shirt « catch me if you can ». Putain, il me le faut trop celui là :

« La prochaine fois que je croise des NE, je veux porter ça ! C’est trop la classe !»

J’écoute ce qu’elle me demande, toujours pas sur de bien saisir ce qu’elle cherche, tout en me déshabillant pour l’enfiler sans trop de pudeur. Je parle du T shirt, je vous connais assez pour devoir préciser. Je réfléchi un peu avant de lui dire. C’est avec sérieux que je lui indique :

« Les cuves, t’as pas plus simple qu’aller voir la forgeronne du coin ? Je te le dis sec, on aura pas le temps d’y aller aujourd’hui mais je sais ou elle crèche. J’ai comme dans l’idée que ca serait… plus calme, chez elle. »

A la base je me serais méfié de cette nana qui a un rire d’otarie, mais vue que c’est le plan cul de mon BFF, j’imagine que ca en fait une nana sure. Sans quitter ma coiffe je change de rayon et revient avec une de ces énormes boites de rangement en plastique bien dégueulasse. Dedans y’a des poulies en plus en moins bon état.

« Pour les barres, tes trucs pour mettre des rideaux, ca irait ? Il en a pas mal mais les gens les veulent surtout pour en faire des lances. Pour les filtres il te faut quel genre ? Plus que du tissu ? »

Bon, mon approche a pas l’air de fonctionner des masses. Pourtant c’était pas si mal que ca ? Je ris doucement avant de lui avoué, un peu penaud.

« Oh je vois… Tu sais moi aussi je sors d’un truc un peu compliqué… On arrête pas de me dire que je dois aller de l’avant mais je crois que je ne suis pas très doué pour ça. »

Je relevé un œil malicieux vers elle pour enchainé, avec plus d’humour et un clin d’œil digne d’une sortie de dragueur du dimanche :

« Sans compter que tu ne fais pas d’effort. T’es bien trop jolie pour que je ne perde pas mes moyens. »

Puis mon visage redevient plus grave :

« Par contre, je suis hyper sérieux pour l’escalade. Tu en as déjà fait ? Ou du saut a l’élastique mais vraiment avec un élastique enfin, t’as le vertige quoi ? Parce que j’aimerais bien te dire que c’est pour un pote mais j’ai peur que ca soit vraiment pour nous »

Je réalise que je suis quand même pas délicat. Winston l’a dit que j’étais trop bourrin dans ma façon de demander les choses, bon, c’était pendant un interrogatoire musclé avec un NE, mais il n’empêche qu’il a peut-être raison. C’est avec toute la maladresse du monde que je tente de me rattraper :

« Sache que quoi qu’il arrive, je juge pas hein… tu vois, moi je sais pas tirer, enfin, avec une arme, sinon je me débrouille vachement bien, enfin, y’a jamais eu de plainte et je sais pas pourquoi je te dis ca. »

Je ferme yeux et soupire. Putain, quand il faut tuer des gens je suis bon, mais pour le reste, j’ai pas l’impression de briller. Je passe ma main sur mon visage puis, avec un air penaud et un grand sourire, je lui tends la main

« On peut reprendre au début plutôt ? Salut, moi c’est Isha et je vais surement te proposer de t’envoyer en l’air mais de la plus chaste des façons. T’es partante ? »

- J’ai déjà les cuves, mais peut-être qu’elle pourrait me modifier certains composants… Je réfléchis tout haut pour le coup. J’ai bien quelques valves fatiguées tiens, puis il y a le tuyau pour la deuxième cuve. Encore, le pressoir je pourrais revoir la manivelle aussi…

J’avoue ne pas avoir pensé à cette forgeronne. Il faut dire que ça ne fait pas longtemps que j’ai entendu parler de ses services dans le coin. Puis… comme la plupart des instruments sont plutôt en acier inox, je n’ai pas pensé que je pourrais tout de même y mélanger d’autre type de métaux… Autrefois, jamais de la vie je ne l’aurais fait, mais aujourd’hui…

- Non, trop fragile les tringles à rideaux. Pour les filtres… dans un monde idéal, les filtres exprès, sinon si je trouve un tissu comme… du coton à fromage. Je ne crois pas que Tori en est à fabriquer ce genre de tissus pour l’instant.

Je fouine pendant ce temps, écoutant d’une oreille Isha qui tente de me proposer un rendez-vous ou un coup d’un soir. Je lui lâche que je ne suis pas intéressée, mais gentiment. Il faut dire que malgré que ces propos soient un peu… hauts en couleur ? Créatif on va dire plutôt, il reste respectueux jusqu’ici dans son comportement. Il me raconte qu’il sort d’un truc compliqué et qu’on lui dit qu’il doit aller de l’avant.

- C’est ce qu’on me dit aussi. Que je souffle en me concentrant plutôt sur mes recherches.

Je vais de l’avant maintenant, je réalise simplement que j’ai besoin de travailler sur moi-même avant de me lancer dans quoi que ce soit.

- Pffff… Je pouffe de rire. Oui, je l’ai souvent entendu celle-là, mais ça faisait longtemps ce genre de badinage. Je secoue la tête de gauche à droite, ayant quand même du mal à y croire vu la situation.

Tout ça… bien ça me détend l’air de rien. Je suis bien moins sur les nerfs malgré l’urgence. Ça m’a permis de retrouver mon sang-froid en fait. Je relève un regard curieux quand il me dit qu’il était sérieux pour l’escalade.

- Je n’ai pas le vertige, mais je n’ai jamais rien fait de tout ça. Je comprends par contre que ça à l’air de faire partie du plan d’Isha et je mentirais si je disais que ça m’inquiète pas un peu.

Bon, après… impossible de ne pas poser ma main à mon front vu comment il s’embourbe tout seul. Ça me fait rire néanmoins. Il est maladroit, y a pas à dire. Trop direct aussi, mais bon. Je ne ressens pas ça comme une menace jusqu’ici, l’instinct me souffle que je n’aie pas à le craindre pour l’instant.

Je lui tends la main en retour, non sans un sourire hilare.

Je la regarde, un peu emmerdé, alors qu’elle me décrit des choses que je visualise surement pas comme il faut. Pour moi, une valve c’est dans un moteur, comme la jauge et tout le reste. Quand elle me parle de coton a fromage, je pense qu’on est un peu trop a drogueland pour moi. Au moins ca explique pourquoi elle m’a pas encore frappé et qu’elle se marre a mes conneries. D’où qu’on fringue des fromages ? Et puis, pourquoi ca serait pas le même coton que pour nous ? Bref, dans le doute, je me contente dans la sacrosainte formule consacrée et reconnue pour gérer ce genre de discussion qui n'ont aucun sens :

« Ouai, c’est pas faux… »

Du coton a fromage, sans deconner ? Elle a été trouver ca où ? Je la soupçonne quand même d’un peu me prendre pour un con. Si elle est pas intéressée, y’a des moyens plus simples que de me parler de polyester a gruyère. Bon, pas sur que ca m’arrête non plus. Dans tous les cas, elle a l’air de vraiment chercher et dans sa liste, certains mots font sens. Mon côté « je lâche jamais rien » fait que je me lève pour aller lui chercher un carton bien lourd dans une partie de la zone de stockage que je connais sacrement bien et que je lui ramène.

« Les seules valves que tu risques de trouver ici sont là et as aussi des bouts de manivelle a ma connaissance. Faut fouiller dans ce merdier. »

C’est que des pièces de mécanique. Je lui sors rapidement tout ce qui y ressemble de près ou de loin pour lui soumettre. Au moins on a un sujet de conversation qui est plus sérieux que de savoir la collection printemps automne du gouda cette année.

« Et toi… t’y arrives ? A aller de l’avant je veux dire ? J’ai un peu l’impression que les gens qui me disent ca, bah, ils vont bien, alors ils se rendent pas compte que dire ca, bah … ca me fait surtout me sentir un peu minable parce que je n’y arrive pas bien. »

Voir pas du tout. Je ne peux pas décrocher de Clochette et de trop de choses, je suis enlisé dans un passé qui m’a bousillé et dont je ne pense pas que je pourrais jamais me sortir. Soyons honnête « aller de l’avant » ca n’a pas plus de sens que de mettre un stringe en satin a une tome de brebis ou de me parler de fromaconerie. Ouai, comme la franc-maçonnerie, mais avec du fromage a raclette.

Bon, j’avoue, possible que je me prenne un peu les pieds dans le tapis et quand je dis un peu, c’est parce que j’ai pas forcément envie de tout vous raconter. Mais au moins, elle se marre et ne tente pas de me frapper. C’est déjà ca. On se sert la main sans qu’elle me donne son prénom, bon bah, dans le doute, je trouve qu’elle a une dette a s’appeler Brigitte. Par contre je me fais plus pensif et sérieux quand elle me dit ne jamais avoir fait d’escalade ou de saut dans le vide avant d’hausser les épaule. Il faut bien un début a tout non ? Sans compter que ca pourrait être pire, elle pourrait avoir le vertige.

« Et bien, ca sera ton baptême. Parce que, spoile alerte, on va pas sortir du store par la porte. Mais t’inquiète, je sais vachement bien attacher les gens et je suis hyper doué pour grimper tout ce qui se grimpe. Ca va le faire ! »

Angus en profite pour revenir, il a expédié ses clients.

« Vous trouvez ce que vous cherchez ?
- J’y pense, t’as des petits poneys ? Il me manque toujours Rainbow Dash.. et des petites voitures ? J’aimerais bien des petites voitures aussi.»

Il sourit et déniche rapidement ce que je lui demande mais avant qu’on ait discuté du prix, sa clochette de porte raisonne a nouveau et il s’éclipse encore, me laissant seul avec le carton de jouet. Etrangement, ca n’a pas l’air d’être les objets les plus demandé vu la couche de poussières. A croire qu’il y a plus de gosse… ou qu’ils n’ont plus le temps de jouer. Je fouille a la recherche de poney aillé préféré d Gemma quand je tends l’oreille et fait signe a Brigitte de ne plus bouger.

« Pourquoi voulez vous que je fasse une chose pareille…
- Je sais pas, p’etre parce que t’es vieux et que tu te pisses dessus.
- Mais si t’as rien a te reprocher et que Deadpool est pas la avec sa meuf, j’imagine que ca te gêne pas qu’on aille jeter un œil… »

Je chuchote a ma camarade, tout en me plaçant sur le côté de la porte en embuscade :

« On dirait que certains se sont fait pousser des couilles, va falloir rectifier ça rapidement… »

Silencieusement, je libère Mauricette de son attache de tissus qui la cachait. La coiffe d’indien sur la tête, le t shirt « catch me if you can » sur le torse et l’épée en main, j’attends sagement de voir si les types viennent vers la réserve se faire égaliser les bourses.

si tu veux avancer:

Isha me dit que je ne trouverai pas ce que je cherche ici aujourd’hui et… je crois qu’il a raison. Je lâche un soupire bien malgré moi. Parce que je sais que je manque de temps. Que je ne pourrai pas aller ailleurs qu’ici pour l’instant. Pour quelques jours peut-être même, vu la présence des… pillards ? Connards ? Esclavagistes ? Violeurs sans morale ? Aller savoir, mais ils méritent une raclée…

Je crois qu’il vaut mieux arrêter mon shopping du coup. Je relève quand même les yeux vers Isha, alors que notre conversation un peu trop sérieuse se poursuit entre les rangs d’étagères emplies d’objets.

- Doucement. Je n’y croyais pas avant, mais je ne peux pas nier le chemin que j’ai fait jusqu’ici. C’est vrai par contre que c’est énervant quand ils disent ça. C’est toujours ceux qui vont bien ou qui n’ont jamais rien vécu de grave qui donne ce genre de leçon. Plus rarement, ceux qui s’en sont sortis aussi, mais ils sont plus rares à mon sens.

Je me fige quand même un tout petit instant quand Isha me dit qu’on ne sortira pas par la porte et donc… forcément que ça a à voir avec le toit. Je cligne quelques fois des paupières à la suite cependant. Il le fait exprès ? Il doit le faire exprès… Il ne s’en rend pas compte peut-être ? C’est impossible de faire des innuendos à ce point. Je pince les lèvres pour ne pas sourire. Encore plus difficile lorsqu’il est question de petits poneys… Non parce que, c’est amusant, mais ce n’est pas le moment. Surtout pas quand j’entends la clochette de l’entrée, puis les paroles qui suivent.

J’ai une flopée de jurons qui menacent de passer mes lèvres. Je suis acculée dans la réserve d’une boutique, sans échappatoire… Mon cœur se met à battre la chamade et je sens l’Adrénaline qui commence à faire son bout de chemin dans mes veines. Je sors instinctivement mon couteau, laissant ma carabine sagement rangée. Un petit endroit comme celui-ci, il vaut mieux ne pas nous faire éclater les tympans.

Je me rapproche de l’entrée de cette réserve, mes doigts passés dans les anneaux du poing américain de mon couteau de combat. Je ne suis pas d’humeur. Je suis même en rogne par la tournure que prend la journée. À demi cachée par une étagère, j’attends impatiemment qu’un de ces connards ose entrer. Je suis en colère de me retrouver coincée comme ça et c’est une question de survie à ce point. Hors de question de me faire embarquer ou tuer par ces fils de putes.

Alors, aussitôt qu’une de ces tronches de merde passe le rideau, je fonce. J’abats la lame de mon couteau une première fois directement dans le torse de mon adversaire, mais celui-ci a bougé juste à temps pour que ça ne lui soit pas mortel. Un cri lui échappe néanmoins, alors que je retire mon arme de sa chair. Il tente de riposter, mais j’évite sans peine en en faisant un pas de côté tout en reprenant un élan. Et là… ma lame s’enfonce dans sa gorge avec une facilité qui n’est plus déconcertante pour moi depuis bien longtemps.

Je fais un bond vers l’arrière pour me préparer à attaque la prochaine menace, tandis que le type lui tombe à genou en se tenant la gorge, glissant finalement au sol en se vidant de son sang.

Spoiler: