Précautionneusement, Selene avançait le long des voitures. L’homme avait beau être blessé, il avait peut-être toujours la force de pointer une arme et tirer dans sa direction. Arrivée à l’endroit où il s’était réfugié, elle jeta d’abord un œil avant de se révéler : il était simplement là. Trop faible pour se relever, une main plaquée sur son flanc rougeoyant, une flaque d’eau rougie sous lui. La musicienne le fixa dans ses yeux rendus fiévreux pas la douleur, laissant penser un instant qu’elle allait l’épargner – ou en tout cas, ne pas l’achever.

Finalement, elle secoua légèrement la tête en signe de négative et tendit son canon devant elle pour faire feu à bout portant. Deux balles dans la poitrine, une dans la tête. L’inconnu s’affaissait mollement, dans un râle qui évoquerait presque du soulagement. Sans doute son corps qui se relâchait enfin après s’être crispé en résistance à la mort promise par sa première blessure.

Le visage fermé, Selene se pencha alors sur lui pour lui faire les poches. Peut-être avait-il encore des munitions ou n’importe quoi d’autre d’utile ? Ensuite, elle ramassa son sac, toujours rempli des armes ennemies et tombé sur le bitume, ainsi que l’arbalète que le cadavre tenait dans sa main. C’était tellement triste en y pensant : ces morts auraient été parfaitement inutiles s’ils l’avaient écoutée ; s’ils l’avaient relâchée quand ils le pouvaient encore.

Dommage. Au moins, s’il y avait un peu de vrai dans ce qu’ils avaient raconté, alors tout l’essence qu’il y avait à récupérer serait pour eux. Était-ce cher payé ? Des vies humaines pour quelques litres de gazoles ? Oui… mais ils n’avaient pas vraiment le choix. Plus maintenant. La pianiste passa alors les anses de son sac pour les remettre sur son dos, remit la sécurité de l’arme à feux pour la coincer elle aussi dans sa ceinture et prit son arbalète à deux mains. Elles allaient aider ses amis à en finir désormais…

La tension redescendait un peu, alors le corps de Selene s'autorisa à lui faire ressentir les élancements de douleur qui lui brûlaient la cuisse et la base du cou. Ce n'était pas grand chose, rien que William ne saurait soigner en quelques minutes. Se servant toujours des épaves comme couverture, elle évoluait en direction de l'endroit d'où se trouvaient ses acolytes. Une fois à portée, la pianiste pu s'apercevoir d'à quel point la situation était critique : non seulement Duncan et Sarah étaient aux prises avec deux des inconnus, mais en plus les rôdeurs s'invitaient sur le tableaux. Conséquence évidente des coups de feux tirés à répétition.

Ils devaient parer au plus urgent : les vivants. Les morts, ils sauraient les gérer ou au pire, il suffirait de se replier. Malheureusement, Emma et son complice étaient trop sur le qui-vive, extrêmement attentifs. Une fois Selene à moins de quelques mètres, ils avaient vu passer sa silhouette gracile à travers les vitres d'une voiture jaune canari aux pneus crevés. Une salve de détonations fit exploser les fenêtres, couvrant son crâne mouillé de débris de verre. La jeune femme attendit alors deux secondes avant de jaillir de sa cachette, s'appuyer sur le capot de la mini et caler un œil dans le red dot pour décocher un carreau.

Celui-ci fusa à travers la pluie et se planta profondément dans la poitrine de l'homme, plein cœur. Il tituba en arrière, bousculer par la violence du projectile, et tomba à son tour. Emma était alors seule, encerclée par des ennemis, menacée par les charognes. De retour à l'abri de son capot, Selene cria par-dessus l'averse :

- C'est fini, "Emma" ! Tes amis sont morts. Lâche ton arme !

Duncan attrapa aussitôt l'arme qu'elle lui avait lancé, faisant rapidement feu afin d'essayer de se débarrasser de leurs assaillants, mais la précipitation ainsi que les blessures ne lui permirent pas d'atteindre son but, toutefois. Cela permit de déborder encore davantage leurs adversaires, si ils continuaient d'échanger des tirs, au fur et à mesure, ils pourraient sans doute réussir à s'approcher suffisamment pour les prendre à défaut et les neutraliser.

Toutefois, les râles des rôdeurs qui s'approchaient de plus en plus leur rappelaient qu'ils n'avaient plus le droit à l'erreur, ou du moins, pas à long terme, si ils ne voulaient pas servir de casse croûte à quelques mordeurs... Continuant de garder le contact visuel avec le viking, Sarah envisagea une nouvelle fois de faire feu... Jusqu'à ce qu'un carreau d'arbalète, sorti de nulle part vienne se loger dans la poitrine de l'homme qui lui faisait face. Selene avait fini par revenir, malgré quelques blessures, elle semblait indemne et prête à en terminer, ça tombe bien, la blonde n'avait pas l'intention de s'éterniser ici. Profitant de l'effet de surprise créé par sa leader, la jeune femme s'avança vers Emma pour la braquer avec son Desert Eagle " Tu ferais mieux de l'écouter... " l'invitant d'un signe de tête à baisser son fusil, ce que la femme qui lui faisait face finit par faire.

S'approchant alors d'elle, Sarah lui prit le fusil des mains avant de le poser au sol et de l'écarter du pied, sortant alors son couteau en la regardant d'un air qui n'annonçait rien de bon. D'un geste vif, elle elle érafla l'épaule de Emma " Comme ça on est quittes. " , se reculant de quelques pas, elle ne s'attendait toutefois pas à une réaction aussi spontanée de la jeune femme qui chercha à se jeter sur elle. La blonde lutta pendant quelques secondes pour reprendre le dessus, et finit par lui planter son couteau en plein ventre " Et puisque tu trouves encore la force de la ramener... " , impitoyable, Miller sortit doucement la lame avant de l'enfoncer de plus belle, finissant par l'extraire et s'écarter définitivement, laissant Emma tomber au sol. Sarah passa une main dans ses cheveux trempés avant de récupérer le fusil. Elle n'avait pas forcément voulu en arriver là, mais le temps n'était plus aux considérations morales, ils n'avaient clairement pas été les premiers à montrer de l'hostilité, ils étaient juste prudents, et ils avaient été remerciés par de l'ingratitude, cette attitude la dépassait complètement... La menace humaine désormais écartée, Sarah fit signe à ses deux partenaires, pour leur montrer que les rôdeurs étaient désormais à quelques pas d'eux, le problème ne pouvait désormais plus être ignoré.

L'étau se resserrait sur le duo ennemi. L'homme au nez cassé avait déjà échappé à la mort par deux fois et là il semblait visiblement paniqué ? La chance finirait par tourner et il devait le savoir ? Caché aux côtés d'Emma, il ne cessait de gesticuler. Peut être était il entrain de dire à la jeune femme qu'il devait prendre la fuite ? Le musicien quand à lui profitait pleinement de cette situation. Pendant que le duo discutait, Duncan continuait sa progression. Il évita de faire feu sur ses adversaires de peur de louper à nouveau son coup et par la même occasion vider le chargeur pour rien. Alors il se dissimulait tant bien que mal mais en avançant moins rapidement qu'à l'accoutumé à cause de sa jambe douloureuse.

Soudainement, le barbu s'étonna de voir ses ennemis ouvrir feu dans leur dos. Pourquoi tiraient ils  de cette manière ? Attentif, Duncan examina ce que pouvait être leur cible ? A sa plus grande surprise, il constata que l'étudiante était de retour. Elle n'était plus captive. Elle avait de la ressource et avait réussie à se libérer de sa prison. C'était une très bonne nouvelle. Excellente même ! Maintenant ils avaient l'avantage de la supériorité numérique.

Confiant et heureux de voir son amie revenir dans le jeu, le grand gaillard fut encore plus satisfait de voir le carreau de la jeune femme se planter en pleine poitrine de l'homme au nez cassé. ¤ Dommage, j' aurais bien aimé m'en occuper moi même ! ¤ Pensa aussitôt le magasinier. Quoiqu'il en soit, la situation commençait à prendre meilleure tournure.

Sarah profita pleinement de la situation et se rapprocha suffisamment pour tenir en joue la dénommée Emma. A ce moment, Duncan arrêta sa course. Les femmes étaient à l'honneur. Elles avaient réussies à elles deux ce que lui essayait depuis des heures maintenant. Mais l'affrontement ne s'arrêta pas là. Emma était vraisemblablement bornée et stupide puisqu'elle décida d'engager un combat au corps à corps contre la blonde ? Grossière erreur de sa part. La suite, le barbu s'en doutait. La blonde avait définitivement éliminé Emma.

C'était une bonne chose de faite mais les problèmes n'en étaient pas terminés pour autant. En effet, les macchabées, eux, continuaient à avancer sur les rescapés. Duncan qui en avait ras le bol dégaina à nouveau le Glock que Sarah lui avait confié et dégomma une première cible en pleine tête. Cette fois ci la chance était avec lui. Il détourna ensuite son regard vers ses deux amis en leur déclarant : - « C'est pas encore finit ! » A eux trois ils réussiraient à en venir à bout mais il fallait néanmoins faire vite.

- Mais qu’est-ce que tu fous ?! grommela Selene en voyant Sarah s’approcher pour désarmer Emma.

Il n’était pas question de l’épargner : elle l’avait trahie une fois, la sentence était irrévocable. Appuyée sur le capot de la voiture jaune, la musicienne avait rechargé son arbalète et se tenait prête à tirer. Bien sûr, ça dégénéra ; ce fut au tour de la blonde d’en venir aux mains, luttant contre la dernière représentante de son groupe. Combative jusqu’au bout. L’étudiante n’avait pas décoché son carreau, craignant de toucher son alliée dans la manœuvre, et ce ne fut finalement pas un mal : Sarah venait de planter sa lame dans le ventre de son adversaire.

Non sans un regard dédaigneux, elle quitta sa planque pour rejoindre ses amis. Plus que cinq rôdeurs en vue après que Duncan eut explosé un premier crâne, c’était jouable. Selene dressa son arbalète et s’appliqua à stabiliser son tir avant de percer le crâne d’une charogne qui se faisait dangereusement proche. Elle recula de plusieurs pas, arracha son carreau de la poitrine de sa récente victime pour le recharger dans son arme. Tout en se préparer pour un deuxième tir, elle expliquait brièvement :

- C’était un piège, deux autres attendaient là-bas. Ils ont essayé de me garder enfermée, son coup parti, un autre corps tombait ; inutile de s’étendre pour détailler dans quel état devaient être ses ravisseurs ratés, les camions étaient là ceci dit. Peut-être que ça, ce n’était pas un mensonge.

Tirant de son carquois un nouveau projectile, elle songea qu’ils allaient également devait trépaner Emma et ses deux amis. L’ironie du sort serait que l’un d’eux se fasse mordre sur ce pont parce qu’ils leur avait laissé le temps de se transformer.