La ronde se déroulait sans souci, ils avaient fait presque le tour de la propriété tout étant à la lisière de la clairière et pas très loin du lac. Thomas se tenait tranquille. Il avait sûrement compris qu’elle erreur il avait faite. Il était plus attentif qu’au début, regardant ce que Caroline lui montrait de temps à autre sur le chemin.

Il répondit à sa question, sûr de lui. Le tournevis il n’y avait pas dire était devenue une vraie arme blanche. C’était étonnant de voir que chaque personne avait leur propre outil grigri sur le terrain : entre la batte, la pelle, la clé à molette (elle sourit lorsqu’elle pensa à lui) aujourd’hui, tout objet lourd que l’on pouvait bien enfoncer dans la chair devenait une arme redoutable. Mais Caroline avait toujours du mal à se battre au corps à corps. Une fois, elle a failli y passer. Son arme à elle : son Beretta.

« J’ai un couteau avec moi. Malheureusement je ne suis pas très … corps à corps. Je m’entraine au camp pour essayer de tuer les morts sans faire de bruit. J’ai un Beretta que j’utilise en cas d’extrême urgence. Mais forcément, je préfère mille fois l’utilisé plutôt qu’à être à deux centimètres d’un rôdeur pour essayer de le faire tomber ». Elle n’osait pas le dire mais cette proximité avec un cadavre, elle en avait peur sur le moment. Mais ce n’est pas pour ça qu’elle abandonnerai de faire des missions à l’extérieur. D’ailleurs des sorties, elle en faisait fréquemment.

« Oui, je me sens utile sur le terrain. Peut-être que ça doit venir du fait que j’ai vécu en extérieur. Je suis une femme qui aime bouger. La routine, très peu pour moi. Après ça peut être contradictoire avec le fait que j’ai peur d’un mort proche de moi. Mais je ne sais pas … peut-être qu’au fond aussi, j’ai l’espoir de retrouver des personnes dehors. Même si les chances sont réduites et proche de 0%. » Elle pensait à ses parents naturellement. Il était difficile de se dire que ses proches étaient mort, sans les avoirs vu les jours de panique et même après. Ils ne quittaient jamais ses pensées … même la nuit.

« Et vu que tu es nouveau ici, je présume que tu n’as pas commencé les sorties à l’extérieur ? » Comme tout nouvel arrivant au camp, il devait faire ses preuves pendant un temps avant de pouvoir jouir de tous ses droits au ranch. En partie, ils devaient lui faire confiance avec le temps. Mais s’il commençait à s’intégrer comme il l’a fait il y a quelques minutes, il ne l’accepteraient pas plus longtemps.

Au loin, je pouvais deviner le scintillement de la lumière de la lune sur les flots calmes et paisible de ce lac de montagne. De l’autre côté du sentier, je pouvais voir la lueur chaleureuse du ranch se rapprocher petit à petit, signe que notre tour de ronde était à présent bientôt terminé. Qui sais, après cette discussion, j’aurais peut-être enfin une nuit paisible, ce ne serait pas de refus.

J’écoutai sa réponse à ma question. C’est bien qu’elle prenne du temps pour s’entrainer au corps à corps. J’ai déjà vu un homme, trop sûr de son talent de tireur se faire bêtement avoir lorsqu’il tomba tout simplement à court de munitions, entourés par les morts qu’il avait attiré avec ses propres coups de feu.

Je l’écoutais également me parler de ses raisons qui la poussaient à aller en expédition à l’extérieur. Se rendre utile, éviter la routine et espérer retrouver des gens. Comme beaucoup de gens, elle avait surement des proches dont le destin lui était inconnu et d’une façon ou d’une autre, elle voudrait être fixé en quelque sorte. Je n’ai pas vraiment de personne à qui je tenais vraiment. Mes parents étant mort bien avant ça, la seule personne dont j’aurais pu peut-être m’inquiéter, c’était mon ex-femme, mais je n’avais aucune idée de ce qu’elle avait fait après notre séparation ou si elle était encore dans l’Etat de Washington.

« Non, je n’ai pas encore commencé. Mais, j’espère que ça va arriver assez vite. Je serais plus utile là-bas, sur le terrain, qu’ici à glandouiller sur un sentier. Après, y’en faut des gens pour faire des tours de ranch hein, mais je ne pense pas vraiment que ce soit mon truc tu vois. Et puis sortir retourner me confronter au monde, c’est aussi une manière de pas oublier pourquoi je suis venu. »

Petit à petit, la douce lumière du ranch se rapprochai petit à petit alors que nous émergions de l’ombre des arbres, côte à côte. Contrairement à ce que je venais de dire, je serais bien resté encore un peu, ne serait-ce que pour sentir la présence humaine et surtout vivante de Caroline à mes côtés.


« Bon. On dirait que c’est bientôt fini d’ailleurs. C’était… »

Qu’est-ce que je pouvais dire ? Chiant ? Enervant ? Frustrant ? Réconfortant ? Rassurant ? Tranquille ? Surement tout ça à la fois, même si pas en même temps. Je levais les yeux au ciel, semblant réfléchir, pour dire un truc intelligent pour une fois, mais comme rien ne me venait, je la regardais à nouveau et conclut finalement :

« Nan, oublie. Ça nous a fait une belle ballade et puis voilà. »

T.H.

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Spoiler:

Le tour allait bientôt toucher à sa fin. Ils passèrent à la lisière du lac. De là, ils pouvaient voir le reflet de la lune sur l’eau. Quelque chose de simple et de tellement beau. Avec cette vie, ils n’avaient pas le temps de faire attention aux petites choses qui formaient un tout. Et pourtant, ce petit tour avec Thomas n’était pas si désagréable. Elle connaissait un peu plus la personne qui l’accompagnait. Un homme qui souhaitait s’en sortir et oublier son passé. Il souhaitait un avenir meilleur, peut-être mieux entouré. En tout cas, une chose est sûre : il devait s’en sortir avec l’alcool. Mais pas grâce aux autres. Grâce à lui car c’était un combat personnel. S’il avait besoin de quelqu’un pour en parler pour mieux vaincre cette manie, elle pouvait être là bien évidemment. Il le savait, donc pas besoin d’en rajouter.

Elle sourit à la réponse de son binôme. « On glande pas sur le sentier on sécurise le ranch allez un petit effort tu vas y arriver » dit-elle sur le ton de l’humour. « Par contre dis-toi que tu seras utile sur le terrain certes, mais ici il faudra mettre la main à la patte. Ce n’est pas la dernière fois que tu feras un tour de garde. Il y aura également du matos à réparer, vaisselle, linge, rangement et j’en passe. C’est la dure vie d’un camp ». Elle sourit mais ce qu’elle disait était on ne peut plus sérieux. Il n’aura pas vraiment le choix s’il voulait être accepté.

« Oui c’est bientôt fini. Je vois que tu as l’air déçu. » Ironique mais en même temps il ne terminait pas sa phrase. Une fois à l’entrée du ranch, seule une ou deux lumières étaient allumées au ranch. Des rêveurs ou des insomnies. « Voici la fin. Belle ballade comme tu as dit » elle s’arrêta « Oh attend j’oubliais ». Elle ouvrit son sac pour lui tendre son bien « Tiens, prend là » Elle était sûre d’elle. Après tout il fallait un début de confiance et c’était une belle occasion pour lui de montrer l’exemple. « Je te la rends mais fais attention. Je te fais confiance. Ne me fait pas le regretter ». Ça devait bien sonner comme un conseil et non pas une menace. Il saisit sa flasque « Allez bonne nuit je monte me coucher ». Un sourire en guise de bonsoir – ou plutôt bonne nuit – et elle prit la direction des chambres, l’esprit tranquille. Elle ne perdra pas de vue Thomas pour les prochains jours, connaissant désormais sa faiblesse …

Arrivant devant le ranch, je soupirai légèrement d’ennui à l’évocation des taches de la vie de tous les jours qui risquait de m’attendre. Plus par principe que par réel dégout de ces activités, retrouver un quotidien normal était au final, plutôt une bonne chose à mes yeux. Bon, je devrais faire de vrais efforts on dirait, la vaisselle et le linge, ce n’était pas vraiment mes domaines de prédilection. Cependant, la trentenaire avait raison, si je voulais rester, je devrais mettre la main à la pâte. J’avais presque oublié ce que c’était de vivre de façon sédentaire.

Elle me tendit ma flasque. Je la pris d’une main pas sure d’elle, me demandant si c’était un piège avant qu’elle me dise qu’elle me faisait confiance. Je fus surpris, et ne sut quoi répondre sur le coup. Confiance. Bordel, je sais pas si elle avait raison de me faire confiance, mais depuis le départ de ma femme, on ne me l’avait que peu adressé, et encore moins par rapport à l’alcool.

Ouvrant la bouche bêtement avant de la refermer, me disant que j’avais l’air con, je la regardais s’éloigner après qu’elle m’ait souhaité bonne nuit, lui répondant peut-être un peu tard :

« Bonne nuit Caroline »

Je restai encore quelques minutes seule dehors, appréciant le calme et la sérénité de cette nuit au ciel étoilé, regardant de temps à autre la flasque dans ma main, comme en proie à l’hésitation. Je finis par la remettre dans mon sac, et rentrer dans le ranch, me dirigeant à mon tour vers ma chambre.

T.H.