« Non, pas spécialement, c’est de la curiosité. » Elle penche la tête sur le côté, amusée. « Je suis enfant unique, mais le fils de mon beau-père est plus âgé que moi. J’ai récolté un grand frère sans rien demander. » Et si leurs débuts ont été difficiles, de par la faute de Jena d’ailleurs, qui n’acceptait pas cet intrus dans sa vie, maintenant, ils s’entendent bien et elle lui est redevable d’avoir veillé sur elle quand elle ne me méritait pas forcément et l’envoyait balader… Elle se demande si Locke a des difficultés avec sa fratrie également. Pas toujours facile d’être l’aîné. Mais est-il le plus raisonnable pour autant ? Ses fréquentations, sa moto… Cela n’en fait pas vraiment un premier de la classe qui assume tout, du moins, à première vue.

« Aïe. » Elle a une petite grimace en imaginant les chutes et les poignets fracturés. « C’est sans doute plus sain que l’alcool, la drogue ou les jeux. » Elle retient une petite remarque sur l’addiction au sexe, qui peut aussi être très sympa. Après… Il faut reconnaître qu’aucune addiction n’est vraiment souhaitable. Être dépendant de quelque chose et en ressentir le manque est un signe d’alerte certain. Même si elle ne va pas saouler Locke avec ça, parce qu’à l’heure actuelle, qu’il soit drogué à l’adrénaline l’arrange plutôt qu’autre chose. Et si Jena ne peut pas encore se sauver avec le beau brun, elle lui fait la promesse de l’attendre. C’est donc plutôt excitée qu’elle le quitte pour retourner à son boulot, sous le regard mi amusé, mi inquiet, de sa collègue. Naturellement, elle n’échappe pas à une petite leçon de morale. Fais attention. On ne sait jamais. Tu joues avec le feu. Même si il est terriblement sexy. Des conseils que Jena balaie d’un revers de la main, bien décidée à profiter de la vie. Et de ce beau specimen.

Les heures qui suivent lui paraissent des années d’ailleurs, alors que l’heure de terminer refuse d’arriver. C’est terrible. La jeune femme est impatiente, mais servir les consommations plus vite ne sert malheureusement à rien. Elle jette de fréquents regards vers Locklan et ses potes, comme pour vérifier qu’il ne se lasse pas ou ne trouve pas une fille disponible plus rapidement. Mais non. Il attend, lui offre quelques sourires charmeurs. L’heure vient enfin, et Jena récupère sa veste en jean, avant de filer sans demander son reste. Même si, une fois dehors, elle se compose une attitude plus digne. Elle le rejoint en se retenant de sautiller d’impatience. Un grand sourire se dessine sur son visage alors qu’il l’invite et elle ne se fait pas prier, enfilant le casque, avant de monter à califourchon derrière lui. Naturellement, ses mains enserrent la taille du motard. L’inconnu… Si il lui arrive quelque chose, personne ne le saura jamais… Et pourtant, elle ne ressent pas de peur actuellement. « Je suis à toi pour les prochaines heures beau brun. » Elle caresse brièvement le ventre de Locke, avant de rire et de croiser ses doigts. Elle pourrait se tenir autrement mais ce serait dommage de ne pas profiter de la chaleur de son conducteur n’est-ce pas ?

Elle était vraiment belle, et sûre de l’être. Je ne pouvais m’empêcher de la dévorer du regard, de haut en bas. L’attente valait le coup. Je lui offris un sourire resplendissant à la voir si impatiente de quitter son travail pour me rejoindre. Je l’étais aussi de passer un tête-à-tête avec elle, surtout alors qu’elle attisait le feu comme personne. Ses mains m’étreignirent avec force pour s’agripper à moi sur la selle de la moto, sa caresse à mon ventre ne m’échappa pas, tout comme son rire et sa remarque soufflée à mon oreille. C’étaient autant de promesses que nous passerions un bon moment ensemble, hors du temps.

Les cheveux au vent, la chaleur de son corps pressé dans mon dos m’aidait à oublier un peu l’étreinte plus froide de la nuit noire. Nous traversions les rues de Seattle lancés à pleine vitesse. Je ne me formalisai même pas de griller un feu à un carrefour. Je slalomai entre les rares voitures encore présentes à cette heure tardive avec une aisance sans pareille, sans me soucier du code de la route. Je prenais uniquement ma dose de sensations fortes, et peut-être aussi que je crânais un peu devant Jena. J’aurais pu continuer longtemps à rouler, mais la promesse d’une étreinte charnelle avec la belle brune me força à ralentir à hauteur d’un love hôtel plus à l’écart de l’agitation du centre-ville.

J’arrêtai la moto sur le parking pour me retourner vers elle. « Ca te va ? » Je l’aidai à retirer le casque, le calant sous mon bras avant de l’entraîner à ma suite à l’intérieur. Ce n’était pas la première fois que je commandais une chambre pour passer du bon temps avec une fille ici même. Le personnel avait l’habitude de me voir. Je demandais une chambre selon l’humeur du moment. Pour Jena, la suite rouge me paraissait tout à fait avisée. Je réglais ensuite la note avant de l’inviter à me suivre. Pour cette nuit, il n’y aurait plus que nous deux au monde.

En poussant la porte, je ne m’attendais pas aux quelques ajustements qu’ils avaient fait pour aménager un peu l’espace. « Depuis quand ils ont une cage avec des menottes ? » Je soufflai un bref rire, avant de secouer la tête sans m’en formaliser. En dehors des quelques accessoires proposés, il y avait surtout un lit d’une taille impressionnante qui trônait au milieu de la pièce, cerné par des rideaux rouges. Une odeur d’huile essentielle flottait dans l’air et les lumières tamisées du lieu nous plongeaient aussitôt dans une ambiance plus intimiste une fois la porte refermée.

A peine mon casque posé sur le buffet tout proche, je plaquai Jena contre le mur à côté de la porte pour l’embrasser longuement, sans l’once d’une retenue. Je me débarrassai de mes gants et de ma veste en cuir de motard avec une certaine forme d’empressement, pour être plus libre de mes mouvements, sans quitter une seule fois ses lèvres. J’avais envie de la prendre sauvagement contre ce mur sans même attendre que nous atteignions tous deux le lit. Nous aurions toute la nuit pour récidiver ailleurs. Dans ce lit, dans le jacuzzi, ou encore dans cette cage si ça l’amusait.

C’est carrément enivrant. La vitesse, la sensation de liberté… Même si une partie de moi se crispe devant la conduite un peu dangereuse de Locklan. Il maîtrise complètement son véhicule, mais ce sont plus les autres qui lui font peur. C’est un garçon libre et sauvage et cela se confirme. Elle resserre parfois son étreinte autour de lui, se raccrochant au motard par instinct. Et ce n’est pas déplaisant. Si sa mère la voyait, elle ferait une syncope, et cela lui donne juste envie de rire. Elle se sent bien, malgré la fatigue, qui lui paraît dérisoire alors que l’excitation prend le pas. Mais cela doit bien se terminer et elle avise le love hôtel, ce qui la fait sourire. Quand il coupe le moteur, elle descend et retire le casque, ébouriffant sa crinière brune au passage. « Habitué des lieux ? » Elle demande avec une moue espiègle. Elle ne sait pas si la réponse va lui plaire. Après, elle ne se fait aucune illusion concernant un mec comme lui. Il lui suffit de claquer des doigts pour en ramener une. Ou de sourire simplement, ça marche aussi très bien. Il va sûrement lui répondre que oui.

Elle lui emboite le pas et remarque que oui, il s’y connaît alors qu’il demande sans faillir une chambre pour eux. Le mec de l’accueil doit en voir défiler des nanas… Ce qu’il en pense ? Mystère et elle s’en fiche. Au moins, il est gentleman alors qu’il l’invite pour cette petite sauterie. Elle se fige quand même en voyant la cage tandis qu’il joue les surpris. « Ah cela ne fait pas partie de tes fantasmes ? » Il a l’air sincèrement étonné tandis qu’il rit, amusé de cette petite touche personnelle. Jena plaisante, mais sa raison lui souffle quand même qu’elle ne sait rien de lui et que c’est peut-être un sadique qui aime attacher ses conquêtes et leur fouetter le cucul… Est-ce qu’elle aimera ça, elle n’en sait rien. « C’est particulier ici… » Elle n’a jamais couché dans ce genre d’atmosphère. C’est plus « classe » que ce dont elle est habituée. Plus que des chiottes de bar ou des capots de voitures en tous cas. Et plus intime aussi.

J’haussai les épaules avec un sourire équivoque, quand Jena me demanda si j’étais un habitué des lieux. Je ne préférais pas répondre ouvertement à cette question, même si elle se doutait déjà de la réponse. Ce n’était effectivement pas ma première fois dans ce love hôtel. Je connaissais la route par cœur. « Tu as apprécié la balade en moto ? » Ca m’intéressait davantage de recueillir ses impressions à ce sujet. J’avais cru l’entendre rire tout contre moi, et c’était le meilleur compliment qu’elle aurait pu me faire.

La suite réservait son lot de surprises. Je préférais la détromper rapidement par rapport à ce que j’espérais de cette soirée. « Jamais fait dans une cage, et toi ? » Un sourire amusé vint étirer mes lèvres. « Je suis pas fermé à de nouvelles expériences après, mais le lit et le jacuzzi sont super confortables. » Sauf que je ne pris même pas la peine de l’entraîner vers l’un ou l’autre, bien trop avide d’en découdre avec la belle brune, au grand regard noisette et au sourire si contagieux. Elle était loin d’être timide, brûlante du même feu dévorant que moi. Je n’avais aucun doute que cette soirée serait exceptionnelle.

Oui, il vaut mieux qu’il ne réponde pas. Elle a été idiote de poser cette question, la réponse, elle la connaît et n’a pas spécialement envie de l’entendre, même si elle ne se fait aucune illusion sur le palmarès de ce type. Il est bien trop sexy pour ne pas avoir une belle collection de conquêtes. Et elle ne sera qu’un trophée de plus. Est-ce que cela la dérange ? Pas vraiment, après tout, elle sait très bien à quoi s’attendre en fréquentant ce genre de mec. Un coup d’un soir. Allez, peut-être plusieurs, si c’est vraiment exceptionnel et que ça matche bien entre eux et voilà tout. Elle met ça de côté, pour afficher un grand sourire à sa question sur la moto : « Oui, c’était enivrant. Et excitant ! » Flippant aussi, avec la vitesse, mais elle est jeune, peut-être encore inconsciente de ce genre de danger. L’adrénaline fournie lui suffit.

Même si l’intérieur de la chambre a de quoi faire encore grimper cette hormone en flèche. Et d’autres. Il y a peut-être un peu d’appréhension aussi en voyant le décor et les accessoires. Il est mignon, mais pourvu que ce ne soit pas un tordu, pervers sexuel qui aime bien fesser sa copine. Elle ne sait pas si elle adhérerait à ce délire, même si elle n’a jamais essayé. « Moi non plus. » Elle s’interrompt un instant, avant de rajouter : « Par contre les menottes, je connais. » Et cela ne lui déplairait pas de l’attacher. Ou même d’être attachée, mais pas pour le premier coup. De toute façon, ils sont trop affamés pour se livrer à ce genre de jeu pour commencer.



Et ce qui ne devait être qu’une petite aventure sans conséquences se poursuit… Pendant des semaines, des mois. Avec des hauts et des bas. Ils s’aiment, avec passion, ils se séparent, se retrouvent, aussi accrocs l’un que l’autre. Pourtant, elle est décidée à vraiment rompre cette fois. Quel avenir a-t-elle avec Locklan ? Il paillonne. Ils ne se sont rien promis… Pourtant, elle demeure interdite en voyant les deux traits sur le test de grossesse. Ses doutes se confirment et elle fond en larmes… Cela vient bouleverser tous ses projets. Ses études… Et surtout, elle ne sait pas quoi faire… Avorter ? le garder ? Elle s’est montrée inconsciente… Ils ne se voient plus avec Locklan… Mais aucun doute qu’il est le père, elle, elle n’a pas papillonné ailleurs. Après des heures à tergiverser, elle prend rendez-vous chez le médecin. Pour être sûre. Et l’embryon est bien là, accroché, niché en son sein… Alors elle rappelle Locke pour se voir. Une fois devant sa porte, elle hésite, le cœur battant, l’estomac en vrac… Finalement, elle frappe à la porte, qui finit par s’ouvrir sur lui. Ses sens s’affolent. Pourquoi lui fait-il tant d’effet ? Ce n’est pas juste. Elle sent ses jambes flageoler. « Salut. » Elle a un sourire un peu crispé en entrant à l’intérieur. « Locke, j’ai quelque chose à te dire… » Nerveusement, elle se triture les cheveux, laissés libres aujourd’hui. Puis, elle cesse et plante son regard déterminé dans celui de son amant : « Je suis enceinte. » La nouvelle lui fait l’effet d’une bombe alors qu’elle montre un aplomb qu’elle est loin de ressentir…