Noah.

La remarque lui arrache un instant de flottement, alors qu'elle peine à réaliser ce qu'est en train de dire Alec. Comment Noah aurait-il pu parlé, alors qu'elle s'en était tenue à la version officielle ? A moins... Qu'il n'ait surpris une conversation ? L'idée lui donne envie de hurler de colère, quoi qu'elle ne s'en abstienne pour ne pas aggraver son cas. Tu mens. C'est bien la seule chose qu'elle trouve à redire. Son regard sans doute un peu perdu sur l'instant, alors qu'elle se force à reprendre d'une voix contenue.

J'ai rien à dire. Parce que j'ai rien à avouer.

Tasya... Qu'est-ce qui avait pu se dire sur Tasya ? Pourquoi était-elle estimée responsable au juste ? Son coeur s'emballe à l'idée qu'il puisse arriver quelque chose à la brune, mais tenter de parler maintenant, c'était prendre le risque d'aggraver encore plus une situation déjà critique.

Tasya n'a rien fait. Ray non plus, et moi non plus. Je ne sais pas ce que Noah à pu dire, mais on à rien fait.

N'aurait-elle pas dû tenté de se défendre ? D'assurer qu'il s'agissait d'un simple malentendu ? Craindre l'enfer, même, concernant cette sanction évoquée ? Elle n'en savait rien. Mais sans doute qu'elle ne devait plus avoir grand chose à perdre, pour prendre un tel risque. Sans doute.

Comme si t'attendais pas que ça.

C'était comme un verrou qui avait sauté, sitôt qu'il avait évoquer que ce serait sa faute si Tasya était écrouée. Sans doute qu'elle l'aurait assassiné du regard, si elle avait pu, alors qu'il lui offrait ce sourire satisfaite qui la ramenait douloureusement à quelques mois en arrière, quand il l'avait violenté. Violenté Neela également, dans la plus grande impunité, et continuer à malmener l'indienne sitôt qu'il avait pu.

Alors, si elle bouillonnait déjà, l'évocation de la traîtrise de Noah et de cette promesse de venir la visiter fût sans doute la goutte de trop.

Tu es un incroyable fils de pute.

Les mots avaient franchi ses lèvres avant même qu'elle n'essaie de les taire. Accusant un silence alors qu'elle réalisait toute l'ampleur de la situation dans laquelle elle ne faisait que s'enfoncer drastiquement, avec cette étrange sensation de n'en avoir plus rien à faire. L'enfer était devenu un quotidien peut-être un peu trop doux, depuis quelques mois. Ou alors, la disparition de Cooper l'avait détruite suffisamment pour qu'elle n'en ait plus rien à faire. D'Alec, de ces lois stupides. De cette condition qui ne valait même pas le terme de vie, finalement.

C'est bien tout ce que tu es. Un énorme fils de pute.

Et si l'enfer existait, elle se promettait en silence de lui garder une place de choix, sitôt qu'elle irait la-bas.

Ce sourire avait eu le don de lui glacer le sang, et si elle se doutait de toute l'horreur dont Alec était capable, il n'empêchait. La suite ne fût qu'un enchaînement de violence et d'horreur que son cerveau sembla lui interdire d'assimiler, au stade que même la simple idée de hurler se bloqua dans sa gorge sitôt qu'elle avait croisé cette lame froide dans les mains du milicien, ou qu'il avait resserré ses phalanges contre sa trachée. Alors, quand la dite lame vint se rapprocher trop près de son oeil gauche, eut-elle un bref remerciement pour cette chape de plomb épaisse qui vint l'envelopper, au même titre que des bras presque trop doux pour être de mauvaise augure.

Ou alors, était-elle morte. N'était-ce pas une délivrance, plutôt qu'un châtiment ici bas ? Un moyen idéal de retrouver ses parents, ou même Cooper, si Jacob avait vraiment eu raison?

Pourtant, il n'en fût rien. Pas de lumière, pas de voix connue, moins encore de calme ou de jardin d'Eden ou le froid et la douleur n'existaient plus. D'avantage proche de la vallée de la mort, alors qu'elle réalise le mordant sur sa peau, toute cette violence que son corps semble encore vouloir encaisser quand elle n'attends pourtant que la fin. Et la douleur à cet orbite qu'elle sait pertinemment vide avec l'envie irrépressible de voir les dégâts qu'elle ne peut que supposer, avant d'aviser la bassine d'eau. Tremblante, suffocante, alors que l'air qui emplit ses poumons la brûle au même titre qu'un acide corrosif, et l'incite à plonger ses mains tuméfiés dans le liquide qui se teinte rapidement d'un rouge carmin qui s'écoule encore trop de son corps pour que ce soit signe de bonne augure. Même pas assez pour se frotter jusqu'à l'os. Pour un peu, et elle en aurait presque pesté. Sans réellement comprendre l'état de choc qui s'empare d'elle et la force à réagir mécaniquement, alors qu'elle commence à frotter. Priant pour un miracle.

Tasya est recroquevillée dans un coin, face à la porte. Elle a fini par se calmer. Elle a un frisson, elle a froid, sa nuisette ne lui couvre ni les jambes, ni les bras et cette cellule hostile lui semble glaciale. La mexicaine tremble, elle veut rentrer chez elle, retrouver Jacob, ses enfants. Est-ce qu'elle les reverra un jour au moins ? À cette idée, elle sent un nouveau sanglot la secouer.

La porte finit enfin par s'ouvrir et Alec débarque en la poussant du pied, sans ménagement. Elle va immédiatement s'asseoir face à lui. Lorsque son regard se pose sur les mains ensanglantées de l'homme puis sur le couteau, Tasya chancèle et sent son ventre se nouer. « À... À qui est ce sang ? » souffle-t-elle d'une voix angoissée. La mexicaine se doute que c'est celui de Phoebe et elle sent une nausée lui monter à la gorge.  « Qu'est ce que vous lui avez fait ? Est-ce qu'elle va bien ? » Les larmes lui montent aux yeux. Elle est pétrifiée. Est-ce qu'il l'a tuée ?

Devant sa question, elle se recroqueville un peu plus sur elle-même, ses yeux continuant à fixer le couteau. « Je.. Je ne sais pas ce que vous voulez que je dise.. » supplie-t-elle. Elle ne peut pas avouer la vérité, c'est impossible.