Voilà une situation dans laquelle je me serais bien passée de me retrouver. Une tentative d'assassinat. Devrais-je voir cela comme une quelconque marque flatteuse que mon influence devient menaçante pour quiconque souhaiterait aller à l'encontre des progrès que je tente d'apporter à notre communauté ? En un sens, je préfère largement le voir de la sorte. Cependant, la douleur est bien loin d'être agréable. La première opération m'a sauvé la vie, mais une infection a failli m'emporter par la suite. Autant dire que la seconde a été plus difficile encore à supporter.

Un léger gémissement de douleur m'échappe alors que j'émerge lentement, ayant pour réflexe de vouloir bouger comme j'en ai eu l'habitude pendant des années. Voilà que de mauvais souvenirs se rappellent à moi, faisant remonter dans ma mémoire les moments passés après l'opération m'ayant privée de mon appareil reproducteur dans sa totalité.

Pourtant je suis tirée de mes pensées par une voix, ainsi qu'une chaleur réconfortante entourant ma main. Un sourire étire faiblement mes lippes, encore comme endormi, alors que je tourne la tête vers Jacob. Il en faut bien plus pour me tuer... Une tentative d'humour, maladroite et peut-être déplacée, mais n'ayant pour seul but que de se montrer rassurant. Pour lui ou moi ? Certainement un savant mélange des deux. Comment vas-tu ? Ne me dis pas que tu es resté à mon chevet tout ce temps. Car je ne suis en rien la seule à avoir besoin de repos, comme il le dit si bien.

Je penserai à transmettre ce message à mes détracteurs, dis-je sans me départir de ce léger sourire ornant le coin de mes lèvres. Si la situation est passablement inquiétante, cela va de soi, je préfère la prendre à contre-pied afin de ne pas m'enfermer dans une angoisse quelconque. Il en faudra bien plus pour me réduire au silence.

Lorsque Jacob s'approche de mon lit, j'ai le réflexe de bouger un petit peu pour tenter de m'approcher à mon tour. Voilà une idée qu'il aurait été judicieux de s'abstenir de mettre en pratique, car une grimace de douleur déforme fugacement mes traits et cette vive décharge me fait serrer davantage la main du brun dans la mienne.

Balayant cet incident d'un revers de la main imaginaire, je me concentre davantage sur l'homme à mes côtés. Ses mots m'inquiètent, me faisant froncer légèrement les sourcils. Coincé ici ? Que t'est-il arrivé ? Est-ce que ça va ? Difficile pour moi de dissimuler l'inquiétude qui me saisit, et qui s'entend aussi bien dans ma voix qu'elle se lit dans mes iris.

Je n'en ai eu que peu d'échos, il semblerait que l'on tienne à me tenir à l'écart de mes devoirs le temps que j'aille mieux. Ce qui, comme tu dois t'en douter, m'exaspère au plus haut point, dis-je dans un soupir las. Si je comprends les motivations qui poussent les autres à tenter de me préserver, cela témoigne aussi de la faiblesse qu'ils associent à ma personne. Et voilà bien une chose que je ne peux supporter.

Venant serrer la main du brun, que je caresse lentement du bout de mon pouce, je garde mon regard plongé dans le sien alors que je reprends la parole. Si tu veux m'en parler, tu sais que je serai toujours là pour t'écouter. Il semblerait que rien ne saurait me tenir à l'écart de cet homme. Pas même la plus ardente des volontés. Certainement car au plus profond de moi, j'ai pleinement conscience que c'est à ses côtés que je souhaite me trouver. Que je ressens enfin cette capacité de pouvoir respirer pleinement sans cette gêne constante que j'ai pu éprouver pendant bien des années.

Je l'écoute alors me parler succinctement de ce qu'il s'est passé dans les égouts, découvrant alors que je dois sa vie à une intervention de la part de Kit. Quel agaçant pied de nez de la vie. Me voilà redevable envers cet énergumène. Serrant les dents afin de contenir la douleur que provoque le déplacement vers le côté que j'effectue, je tends mon autre main pour venir la placer sur la joue de l'homme, caressant son visage avec une tendresse que je ne peux dissimuler. Je suis heureuse que tu aies survécu. Et nous punirons les coupables de cet incident quand ils seront identifiés. Quant à moi... Je vais m'en sortir, je t'en fais la promesse.