Ok, ça sera Moonrise Kingdom, annonce-t-elle d'un ton ferme en esquissant un grand sourire. Quand il se rapproche, son souffle se suspend à cette proximité. Elle le fixe tandis qu'il se moque de sa manière de boutonner sa chemise : Qui te dit que je ne le fais pas exprès ? Demande-t-elle soudainement en conservant son sourire. Elle a un rire finalement, alors qu'ils se mettent en route, et ne tardent pas à prendre ce repas qu'elle a attendu, au bas mot, toute la journée. C'est suffisant pour l'impressionner visiblement, même si Max n'a pas de réponses à lui fournir : c'est comme ça.

La partie de billard est cependant une autre histoire pour eux. Elle gagne la première manche, mais se loupe à la deuxième, et l'alcool lui fait échouer largement à la troisième. C'est lui qui ressort vainqueur, et qui ne manque pas de le lui rappeler. Boudeuse, elle lève un regard furieux vers lui : Tu sais quoi ? Personne n'aime les gagnants qui se la pètent ! lui souffle-t-elle en le désignant de son index : Per-sonne ! Et elle encore moins que les autres. Simplement parce qu'elle est très mauvaise perdante. C'est sans le regarder et sans lui dire un mot qu'ils regagnent l'hôtel, et qu'elle regagne sa chambre.

Jusqu'à l'entendre frapper de l'autre côté de la porte. Maxine inspire profondément et se saisit d'un coussin dans la foulée : Ouvre la porte, et tu verras, lâche-t-elle d'un ton cinglant. Il se laisse tenter, visiblement. Avant de se recevoir dans la figure le coussin qu'elle tenait dans sa main quelques secondes avant. C'est déjà un soulagement de pouvoir se venger de cette manière. Elle laisse sa moue boudeuse pour un sourire satisfait : Et-toc, glisse-t-elle alors en haussant les épaules, avant de se glisser sur le lit et saisir la télécommande : Ramène-toi, le film est vraiment bien !

Et elle dit ça en tapotant sur l'autre coussin de son lit, avant de s'allonger dessus, et se mettre déjà en position de visionnage. Le film est plutôt long, mais elle l'a vu et revu à chaque fois, au point de pouvoir déjà donner les dialogues à Yuan, qui prend place à côté d'elle. Dans son oeillade, le même air d'enfant qu'elle a toujours eu devant les choses qui lui plaisaient, qui parlaient directement à son cœur. La prochaine fois, il faudra penser au pop corn ! Ajoute-t-elle.

« C’est noté. » Il n’a pas la moindre idée du film dont elle parle, mais elle a l’air tellement assurée qu’il ne lui vient pas l’idée de protester. Et il lui lance une œillade amusée à sa question, se contentant de souffler, non sans se rapprocher un peu plus. « Oh, je vois. J’en prends bonne note alors. »

Le reste de la soirée se déroule particulièrement bien. Ils n’ont de cesse de trouver des sujets de discussion aussi improbables que variés durant le diner et la partie de billard lui apporte une satisfaction qu’il n’essaie même pas de cacher. Surtout à la voir aussi contrariée. Et il a un rire quand elle le désigner de l’index. « J’essaierais de m’en remettre. » Un clin d’œil, alors qu’il lui décoche une révérence exagérée pour lui ouvrir la porte une fois arrivés à l’hôtel.

Le coussin qu’il se prend en pleine figure quand il passe le pas de la porte le conforte dans l’idée qu’elle est passablement rancunière. Mais autant dire que ça ne fait que l’amuser un peu plus. Il se décide à s’installer à côté d’elle, tendant les jambes alors qu’il finit par se laisser totalement happer par le film. Il en oublie, pendant une poignée de minutes, tout ce qui peut les entourer et, alors que le générique de fin défile, il se décide enfin à tourner les yeux vers elle. Pour voir le regard brillant de la jeune femme. « J’avoue. C’est un très bon film. » Soufflé dans un murmure avant qu’il ne hoche la tête « Je note le pop-corn pour la prochaine fois. »

Le coussin qu’il a pris entre ses mains est lancé en direction de la rouquine et il la fixe quelques secondes, avant de se rapprocher d’elle. Et d’effleurer un des boutons de sa chemise. « Il te faut un coup de main si j’ai tout compris. » Oui, sa définition de l’amitié peut laisser un peu à désirer mais, en cet instant, il ne s’interroge pas vraiment.

Un très bon film ? Ses yeux se posent sur son voisin, en plissant le regard, comme s'il venait de lui parler en turc à cet instant. Est-ce qu'il a pris un coup sur la tête ? Ou alors est-ce le coussin qui lui a bousculé les quelques neurones qu'il lui reste ? Non, sur le coup, elle suppose que c'est son gros égo qui empêche sa matière grise de fonctionner correctement. Voilà qui semble terriblement logique, à cet instant : Seulement un très bon fil- elle se reçoit le coussin dessus et n'a pas le temps de râler, encore moins de finir sa phrase avec tout ça : Sérieusement ?!

Elle grogne, va pour renchérir quand il se rapproche d'elle soudainement et qu'elle peut sentir sa main venir effleurer la ligne de boutons sur sa chemise. Le souffle coupé un instant, Max tente de ne pas se laisser destabiliser par la situation, même si c'est plus laborieux qu'elle ne l'admettra. Un rire soufflé, un sourire moqueur et provocateur, elle plisse le regard : Effectivement, je ne suis pas très adroite de mes dix doigts, je pourrais me casser un ongle sans ton aide, ajoute-t-elle tout bas, en soutenant ses yeux. Son coeur bat sans doute un peu trop vite, son souffle se fait lent et profond pour se contrôler un maximum.

Elle n'est pas au bout de ses peines, d'autant plus lorsqu'il s'exécute, que la peau de ses doigts effleure la sienne. Des petits picots de chair de poule, elle pince les lèvres quand elle sent la fraicheur de la pièce sur son derme désormais exposé par le geste de l'homme. Formidable, articule-t-elle toujours tout bas, alors qu'il se rapproche pour venir saisir ses lèvres et qu'elle plante deux doigts sur sa bouche pour qu'il n'aille pas plus loin : Maintenant tu peux rejoindre ta chambre, je devrais m'en sortir avec le reste, certifie-t-elle avec un sourire : Et tu auras besoin de repos pour demain, ajoute-t-elle avec un clin d'œil complice, et un air clairement moqueur : Bonne nuit ?

Pendant une seconde, il se demande ce qu’il a pu rater, à voir le regard qu’elle pose sur lui. Et, finalement, il comprend. Se fend alors d’un rire à sa réaction. « Un excellent film. Tu préfères ? Un des meilleurs que j’ai pu voir. » Mais, de fait, il n’a pas beaucoup de références en la matière, alors il n’est pas sûr que ce qu’il peut dire a le moindre impact.

Et puis, il oublie un peu cette histoire, alors qu’il est focalisé à défaire les boutons de la chemine de la rousse. Il sait pertinemment que c’est une mauvaise idée, mais difficile de faire marche arrière, surtout à sa répartie. Le moment a quelque chose d’improbable et il ne se souvient plus de la dernière fois où il s’est senti comme ça. Ca pourrait presque l’amuser et, d’une certaine façon, c’est le cas.

Mais il est surpris quand elle pose deux doigts sur ses lèvres. « Oh. Je vois. » Une longue inspiration alors qu’il est secoué par un rire silencieux. Et qu’il embrasse les deux doigts avant de les relâcher. Son regard reste ancré dans le sien quelques secondes avant qu’il ne se décide à se relever enfin. « Si tu changes d’avis… » Sans vraiment attendre de réponse, il fait une retraite savamment calculée en direction de la salle de bains, histoire de garder un semblant de contenance. Pour autant, la douche n’est pas du luxe, même si, au final, il se retrouve à rire de nouveau de sa propre situation. Définitivement, cette femme, c’est quelque chose.

Il semble surpris de sa réaction, mais ne le prend pas mal. Un bon point pour lui, tout de même : Merci pour ta disponibilité mais je devrais savoir me retenir, plaide Max en haussant les épaules, avant d'avoir un air moqueur : Ou à défaut, me débrouiller toute seule, petit signe de la main, elle le scrute quitte la chambre pour passer dans la salle de bain, très vite pour entendre la douche s'allumer. A elle de partir dans un fou rire de circonstances. Si elle est très fière de sa blague, elle n'est tout de même pas forcément très avisée durant le reste de la nuit.

Est-ce qu'elle hésite à le rejoindre ? Oui. Même si elle ne l'admettra pas, hors de question ne serait-ce que d'évoquer cette éventualité. De fait, le sommeil la fuit, l'envie lui étreint le ventre, elle résiste parfaitement à l'éventualité de profiter de sa présence et aux premières heures de soleil passant à travers le volet, Max n'a que ses regrets et son obstination. Elle se maudit intérieurement, avant de se lever. Aucun commentaire lorsqu'ils se retrouvent sur cette mention, alors qu'ils partagent un petit déjeuner ensemble.

Plus tard, au point de rendez-vous, ils ont le droit à toute une formation pour ce qui va suivre. Max a du mal à le cacher : elle trépigne comme une enfant, impatiente : Tu es prêt ? Demande-t-elle à l'homme alors qu'ils vont pouvoir s'y mettre, chacun avec un accompagnateur évidemment. Ils sont débutants, il n'y a pas un monde où ils auront le droit de manipuler un engin comme celui-ci par eux-même : Ca va être trop cool ! Ajoute-t-elle en sautillant sur place, un sourire scotché sur les lèvres.

Il est de nouveau secoué par un rire à sa répartie. « Tu es terrible Max. Terrible. » Sa langue glisse sur ses lèvres alors qu’il se décide enfin à partir. Et clairement, la douche n’est pas de trop, même s’il peut l’entendre partir en fou-rire. Ca ne l’aide pas vraiment, bien au contraire. Mais en vérité, ça ne rend cette histoire un peu plus piquante.

Et le lendemain, il se contente d’un léger sourire en coin, se contentant de lui demander si elle a bien dormi. L’ambiance est un brin électrique, mais il doit se l’avouer, il adore ça. Arrivé au point de rendez-vous, il est possible qu’il s’amuse à la frôler l’air de rien, avant de hocher la tête. « Evidemment que je suis prêt. Je me suis bien reposé. J’espère que toi aussi. » Un clin d’œil malicieux, alors qu’il s’incline exagérément pour la laisser entrer dans le bâtiment. Et c’est comme ça qu’ils se retrouvent tous les deux à écouter avec plus ou moins d’attention les consignes du moniteur. « Sois sérieuse un peu. » soufflé avec un sourire qu’il peine à cacher.

Après de longues minutes, il a une profonde inspiration, alors qu’ils descendent de la voiture pour grimper la côte qui sera leur point de départ. « Pas trop nerveuse ? » Un petit coup d’épaule en passant avant qu’il ne récupère son casque et qu’il ne s’éloigne avec Jim, son accompagnateur.

La suite est tout simplement… parfaite. La course jusqu’au rebord de la falaise, le saut dans le vide et ce moment où ses pieds ne touchent plus terre. Il a un cri de joie alors que son visage s’illumine. Et il oublie tout le reste, alors qu’il se retrouve à planer dans le ciel. Il aperçoit du clin d’œil le parapente de Max et c’est un « whooohoooo » qui résonne dans l’air, alors que Jim brandit une caméra pour les filmer tous les deux. Les minutes s’enchainent, de pur plaisir, jusqu’à ce qu’il touche de nouveau la terre ferme, quelques instants avant la rousse. A peine le temps de se détacher qu’il se précipite vers elle, le regard brillant et un sourire jusqu’aux oreilles. « C’était… » Il n’a même pas de mots pour ça. C’est sans réfléchir qu’il va saisir sa nuque pour l’embrasser, poussé par l’adrénaline qui lui donne l’impression de couler dans ses veines. « … parfait. C’était parfait. »

Mais je m'ennuie ! Râle-t-elle. La fatigue la rend intenable, mais elle n'a clairement pas suffisamment bien dormi pour réussir à se concentrer plus de quelques instants en réalité, et si c'est frustrant pour son voisin, il n'imagine même pas pour elle. Heureusement, le cours se termine. Elle n'en a retenu que la moitié, comptera sur son guide pour l'autre moitié. Tout ce qu'elle veut, c'est profité de son expérience de toute façon, et se sentir parfaitement libre de vivre, d'être, de ses mouvements. Enfin défaite de ce quotidien éprouvant.

En l'air, Maxine a l'impression qu'il n'y a plus rien pour la retenir. Elle n'éprouve plus ses peurs, ses souffrances, elle ne craint plus d'échouer, de ne pas être suffisante, d'abandonner, de partir. Le vent qui s'engouffre dans ses cheveux, balaie son visage, et fait rougir ses joues. Le pic d'adrénaline est là pour la porter alors, et en atterrissant, c'est lui qui vient la rejoindre, mu par son enthousiasme, il n'a pas le temps de finir sa phrase qu'il attrape son visage pour l'embrasser. Elle n'a pas vraiment l'occasion non plus de réagir, seulement la surprise est là pour lui répondre. Ah oui, vraiment ? Parfait donc. Elle a du mal à cacher son sourire sur le coup, c'est ridicule mais...

Elle se sent bien aussi. Se mordillant la lèvre, elle ne réfléchit pas plus loin. Elle est à deux doigts de reprendre ses lèvres que l'instructeur exige qu'ils se rassemblent. Elle le relâche : On a de la route pour rentrer, souffle-t-elle alors, pour lui faire signe de se dépêcher. Quitte à ne pas revenir à Seattle trop tard, autant partir dès maintenant. Ils rendent leurs équipements, et gagnent la voiture ensemble, dans un silence qui n'a rien de gênant. Ce n'est qu'au bout d'une bonne heure de route, à ne faire que des chemins au milieu des bois, qu'elle sent son souffle se creuser : Tu penses qu'on peut s'arrêter ? Demande-t-elle sans croiser le regard de Yuan. Pourtant, elle cacher ses yeux un temps : J'ai très envie de toi et j'ai besoin de prendre l'air pour faire passer ça, souffle-t-elle avec détachement.