Elle fait une petite moue. Oui, distraction appréciable, c'est le bon terme. Elle ne s'ennuie pas avec lui, c'est déjà un début. Et puis, une part d'elle aime bien l'idée qu'un homme comme lui revienne chercher sa compagnie alors que des filles comme elle, il peut en trouver quinze sans difficultés et les mettre dans son lit dans la foulée. Mais non : c'est dans le sien qu'il veut finir, et plus d'une fois de ce qu'elle en comprend. Les hommes sont si étranges, soupire-t-elle simplement en se dégageant de ses bras un instant.

Elle plante sur lui un regard sérieux : Tu n'as pas vraiment ton mot à dire, je te signale. Surtout pas quand on est aussi mal placés que toi pour parler, n'est-ce pas lui qui a des maitresses justement, et qui ne s'en est pas caché ? Allons bon, elle ne prendra pas de remarque de sa part là-dessus. Même si elle ne fréquente personne. Oui si tu veux, ajoute-t-elle d'un ton détaché, même si son coeur s'est légèrement emballé à l'idée qu'il revienne encore.

Et un rire lui échappe : Disons que tu n'es pas très généreux mais pas mauvais non plus, souligne-t-elle pour ménager son égo : Enfin, après j'imagine que je saurais sur la durée si tu peux vraiment t'améliorer : Tu as une marge de progression, ajoute-t-elle d'un ton taquin : Mais je ne sais pas pourquoi, je pensais qu'avec autant de filles à ton tableau de chasse, je m'amuserais beaucoup plus !

Il la fixe quelques instants en silence. Avant de souffler, pensif. « Etrange ? Pourquoi donc ? » Et au reste, il a quand même la décence de grimacer, un brin mal à l’aise. Même s’il reprend, tout aussi sérieux. « Et si je te disais que je n’ai pas envie de voir quelqu’un d’autre ? » Ce qui serait plus que surprenant et pourtant, on ne peut plus exact. Depuis qu’il l’a croisée, il ne pense qu’à elle et ça, c’est assez exceptionnel pour qu’il ne puisse pas se contenter d’ignorer ce fait. Et, à son oui, il a un bref sourire, se contentant d’un « bien … » soufflé à mi-voix.

Du reste, il a tout de même un rire qui se répercute autour de nous. « Trop aimable de ta part. » Forcément, son égo est quelque peu piqué au vif et il lève un sourcil quand elle continue. Il se refait brusquement sérieux avant de se redresser un instant, plus gêné qu’autre chose. « J’ai un tableau de chasse très fourni en effet. Mais peut-être que jusque-là, je ne me suis intéressé qu’à mon plaisir personnel. » Et il ajoute, détournant les yeux. « Et peut-être que tu me donnes envie de changer ça. » Sans lui laisser vraiment le temps de réagir, il enchaine, lui piquant la cigarette des lèvres. « Tu aurais quelque chose à boire ? »

Parce que vous vous agrippez à celle qui vous fera courir, peut-être pour rien, souffle-t-elle en levant le regard vers lui. Il en est bien la preuve. Parce qu'elle ne tombe pas en pamoison pour lui, voilà qu'il sent une resistance, ou un challenge. Presque, Maxine devient une sorte de récompense acceptable pour lui, comme si... Eh bien, comme si elle valait vraiment quelque chose. Pourtant, il fera vite le tour d'elle à n'en pas douter, pour aller courir la prochaine qui lui semblera sortir de l'ordinaire également.

La rouquine a un soupir avant de se raidir : Pardon ? Mais qu'est-ce qu'il raconte ? Ce n'est pas possible, il est tombé sur la tête. Et pourquoi soudainement tu n'aurais pas envie ? Voilà qu'il se découvre une conscience et des sentiments, et à son sujet en plus de ça ? Non mais ce qu'il ne faut pas entendre. Elle lui passera suffisamment vite l'envie de jouer les jolis-coeurs. Au frigo, souffle-t-elle en saisissant son t-shirt, qu'elle renfile.

Tu as le droit de me décapsuler une bière aussi, ajoute-t-elle alors qu'il s'exécute, qu'elle lui indique où trouver de quoi faire. Et... Première surprise ? A peine parvient-il à retirer la capsule qu'une gerbe de bière lui échappe : Ne me mets pas de la mousse partout ! S'exclame-t-elle en bondissant sur ses jambes : La prochaine fois, on va chez toi, surtout si tu as prévu de retapisser mon appart

Il lui lance un regard curieux, laissant filer un silence pensif à sa remarque. Peut-être qu’elle a raison. Surement même. C’est bien la première fois qu’il doit faire un effort pour passer du temps avec quelqu’un, que ça ne lui tombe pas tout cuit dans le bec. Et il aime ça. Autant que ledit temps passé avec elle. Est-ce qu’il va finir par se lasser ? Difficile à dire, ça ne lui est jamais arrivé. Et ça l’intrigue, autant être honnête. « Et c’est un problème ? » De s’agripper à elle donc. Si tant est que le terme soit réellement approprié.

Et il se contente d’un haussement d’épaules à sa question. « Aucune idée. Peut-être que je n’ai juste pas envie de courir après plusieurs personnes à la fois. C’est bien trop fatigant. Et probablement mauvais pour mon amour-propre. » Soufflé d’un ton plus léger avant qu’il ne finisse par aller récupérer deux bières dans le frigo. Il laisse pourtant filer un juron quand la bière déborde, surtout qu’elle en rajoute une couche. « Ca va ! Je gère ! » Bon, pas tellement, mais au moins, il a fini par avoir le réflexe de la mettre au-dessus de l’évier. Avant de lancer un regard surpris à l’attention de la rousse. « Tu aurais envie ? De venir chez moi ? » Il est bien conscient du fossé qu’il y a entre leurs deux existences et se demande à quel point ça ne fera que la refroidir à l’idée qu’ils se revoient par la suite. Pourtant, il ajoute, plus sérieux, alors qu’il finit par revenir vers elle et par lui tendre la bière. « Je vais nettoyer les dégâts. » Bon, il n’est peut-être pas particulièrement efficace, mais il a le mérite d’essayer. « Si tu veux … je suis disponible le weekend prochain. » Et seul accessoirement.  Est-ce que ça sous-entend une envie de la voir plus régulièrement ? Certainement, mais il n’est clairement pas prêt à le dire à haute voix.

Pour toi ? Sans doute un peu, souffle-t-elle en réponse en haussant les épaules, l'air de dire que c'est davantage le problème de Yuan que le sien de toute évidence, mais qu'elle dit ça pour l'aider aussi. Qu'il ne s'attache pas à elle. Surtout pas. Maxine est ce genre d'électron libre qui ne se fixe nulle part. Dans un an ? Elle sera probablement partie dans un autre état, sans vraiment chercher à garder contact avec les gens présents ici. Elle préfère ça à toutes les déceptions qui vont dans ce genre de configuration.

Donc tu as prévu de me courir après ? Rit-elle avec une ironie assumée, avant de soupirer. Franchement, elle en a entendu des choses un peu absurdes mais celle-ci est merveilleuse. Enfin, qu'importe : c'est son problème à lui, n'est-ce pas ? Elle le scrute tenter de nettoyer les bêtises qu'il a fait avant de soupirer de plus belle. Et de profiter de ta maison de riche ? Sérieusement, tu me demandes si j'ai envie ? L'interroge-t-elle. Mais qu'est-ce qui ne tourne pas rond chez lui ?

Tu viens de mars et tu as tout juste établi la communication avec la planète terre ou comment ça se passe ? Demande-t-elle avec une grimace d'incompréhension en le fixant. Il veut quoi ? Que cet appartement miteux devienne sa garçonnière peut-être ? Il y a plus de problèmes dans son logement que dans sa vie entière, et il croit qu'elle va l'inviter squatter régulièrement avec ça ? Ok, va pour le weekend prochain, ajoute-t-elle en haussant les épaules. Je finis mon service dans la soirée le samedi mais je peux venir après, annonce-t-elle. C'est bon pour toi ? Bref. On peut s'y remettre ? A la partie amusante.

Il se contente d’un bref haussement d’épaules à sa répartie. « Je suis habitué à gérer les problèmes. » Et celui-là ne lui semble pas si insurmontable. Grossière erreur dont il n’est pas encore pleinement conscient. Mais ça viendra probablement – au pire moment. Du reste, il se fend d’un sourire franchement amusé. « Je n’ai rien de plus intéressant de prévu dans mon emploi du temps en ce moment. Alors… pourquoi pas. » Ca n’a pas l’air de lui poser problème de toute façon.

C’est un rire silencieux qui lui échappe à sa question. « Tu pourrais ne pas avoir envie. Je ne suis pas dans ta tête et je me garderais bien de supposer ce qu’il peut y avoir dedans. » L’idée de la voir là-bas a quelque chose d’improbable. Et de plaisant, sans qu’il n’arrive réellement à saisir pourquoi. Et, quand elle enchaine, il attrape une serviette en papier, griffonnant dessus l’adresse et quelques chiffres. « Les codes d’entrée. » Il boit quelques gorgées de sa bière, sans répondre directement à sa question, avant de l’entrainer avec lui sans se faire prier.

***
Et il se demande, le soir venu, si elle viendra vraiment. Ils ont pourtant échangé beaucoup de messages durant ces derniers jours, à propos de sujets totalement improbables. Il s’est même étonné lui-même de lui en dire autant, même si, de son côté, il n’a eu le temps de rien, même pas de passer manger au restaurant où elle travaille. Pour la première fois depuis longtemps, il se sent presque lassé de la vie qu’il mène, sans en comprendre les raisons.

Il a laissé un Tao ravi de partir en weekend à Los Angeles avec sa mère et a préféré éviter de dire qu’il ne passerait pas tout ce temps libre tout seul ici. Probablement qu’il devra aborder le sujet si ça se reproduit. Mais ce serait une mauvaise idée, à n’en pas douter. Finalement, il se laisse tomber plus qu’il ne s’installe vraiment dans le canapé, un verre de whisky à la main, se pinçant l’arête du nez. Il ne devrait pas attendre autant son arrivée, c’est juste ridicule. Et il se surprend presque à espérer qu’elle ne vienne pas, pour couper pour de bon avec cette histoire qui n’a pas le moindre sens.

Sauf qu’il entend toquer. Il a un bref sourire à la voir dans l’embrasure, laissant filer un silence à la fixer dans les yeux. « Salut… » Et il n’attend pas vraiment, la plaquant contre la porte qu’il vient de refermer, mettant de côté toutes les questions qui ne manqueront pas de tomber plus tard.

Se présenter dans le coin lui donne l'impression criante qu'elle dénote dans le décor. Mais devant la porte, Maxine chasse son envie d'opérer un demi-tour pour abandonner ce rendez-vous qu'elle trouve de plus en plus bizarre. Sans doute vaut-il mieux laisser là ce qui doit l'être. Cependant, sa main tapote contre la porte sans qu'elle ne le réalise, elle se sent idiote de ne pas réussir à prendre la bonne résolution pour l'instant. Un soupir plus tard, la porte s'ouvre.

Elle lui offre un sourire amusé en retour, rentre, n'a pas vraiment le temps d'aviser de la décoration que Yuan l'entraine et la plaque contre la porte pour prendre ses lèvres d'autorité. Voilà qui allume la machine, les amène tous les deux dans une étreinte plus ferme. Tout se passe de mots, alors qu'elle referme ses bras autour de ses épaules quand ils en ont fini. Il fallait me le dire si tu étais aussi pressé de me voir, rit-elle doucement.

Je serais arrivée plus tôt, avant de se raviser : Non, je viens de mentir, j'aurais encore plus fait trainer ! Pour que l'attente soit insupportable évidemment. Et les retrouvailles aussi intenses que celles-ci. Au rendu, ils ont finalement peu l'occasion de se voir. Les échanges se poursuivent toujours sur leurs téléphones respectifs, une manière de garder le lien. Même si Yuan est un homme occupé qui a mieux à faire que flirter par message.

Elle se redresse et avise le cadre d'une photo. La curiosité la pousse à la saisir avec de se figer de stupeur vu ce qu'elle regarde : Attend, c'est elle ta femme ?! Fait-elle en lui fourrant le cadre sous le nez, comme si elle tombait sur quelque chose de complètement fou l'espace d'une seconde : Est-ce que tu es complètement stupide de te séparer d'elle ? Demande-t-elle, estomaquée par la situation.