Aux paroles d’Otis, elle le serra dans ses bras avec une certaine force. Laissant une larme couler le long de sa joue, ça faisait beaucoup pour elle, tant sur le plan physique que moral et elle avait clairement besoin de se reposer « Et si on allait se coucher Otis ? Nous n’avons jamais dormis ensemble que je sache non ? » Ce serait une étape en plus pour elle, la première. Faire confiance à Otis pour partager le même lit qu’elle.

Dans les draps, elle se laissa aller à lâcher, un peu avant de s’endormir, sentant la présence du métis à ses côtés : « Merci pour tout. »
7 janvier 2020.

« Otis ! » Elle entra dans la caravane avec un sourire franc, qu’elle n’avait simplement plus eu depuis des mois. Depuis ce qui lui était arrivé, elle trouva Otis, en train de cuisiner, à la regarder comme si elle venait d’un autre monde. La rousse s’avança jusqu’à son petit ami et lui dit avec joie : « J’ai une bonne nouvelle. J’ai parlé avec Bill Roth, de la cage, hier. » Ah ça ils avaient parlés, c’était même impressionnant de voir à quel point ils avaient parlés.

« Il m’a proposé un poste à la cage, je vais remplacer Zola dans la gestion du cabaret. J’ai… commencé hier soir. » Oui, ça s’était fait à une vitesse qui l’avait elle-même surprise, elle était allé à la cage simplement pour dire qu’elle ne travaillerait plus en tant que danseuse et elle se retrouvait finalement avec une promotion et un nouveau patron. L’univers était parfois étrange, parfois bien fait, parfois douloureux, mais à cet instant, elle avait, dans son malheurs, une chance : « Je me dois de te remercier, sans toi, jamais je n’aurai eu le courage de quitter le RoV et de trouver ce travail. » Elle se sentait mieux que jamais, protégée par les gros bras des expandables et la compagnie d’Alex, elle appréciait plutôt la jeune femme.

De long en large, elle lui expliqua le principe des accords qu’elle avait noué avec Bill, à ses yeux, les plus importants : « Devant tout le monde, on va devoir faire semblant de ne pas être ensemble, mais tu pourrais venir me voir autant que tu veux là où j’habiterai. » Elle se laissa aller à s’assoir contre lui, le serrant doucement dans ses bras. C’était encore difficile pour elle d’aller plus loin, elle ne se sentait pas encore la force de faire plus. Mais c’était un début.

« Avec l’histoire des rapports avec New Eden, il faudra être discret, mais c’est déjà un progrès, lui au moins, il ne tentera pas de se mettre entre nous. »

La présence de Lucy à ses côtés lui a fait un bien fou. Otis profite de chaque seconde passée auprès de la rousse depuis son arrivée au campement. Alors qu’elle est partie depuis la veille, le jeune homme commence à trouver le temps long. Il sait pourtant qu’il ne doit pas s’habituer à tout ça. La jeune femme finira par partir, c’est ce qui a été convenu. Quand elle ira mieux, qu’elle aura trouvé une solution, un endroit où vivre, elle devra partir. Le métis redoute ce moment, appréciant évidemment ces moments aux côtés de sa belle. Pour ne pas laisser l’inquiétude prendre le dessus, il a passé une bonne partie de la journée à dessiner, cloîtré dans son van.

C’est en fin de journée qu’il se décide à cuisine, commençant à avoir un peu faim. C’est à peu près au même moment que la porte s’ouvre et que Lucy fait son entrée dans le van. Il l’accueille avec un grand sourire, délaissant brièvement le contenu de la casserole qui cuit doucement sur le réchaud. Il s’assoie sur le bord du lit, ne pouvant s’empêcher de lui sourire encore. Il ne met pas longtemps à remarquer son sourire, elle a l’air si enthousiaste comparé aux dernières semaines. C’est alors qu’elle lui explique avoir une bonne nouvelle pour lui. Elle lui parle alors de Bill Roth et de la cage. Il l’écoute avec attention, notant les détails importants de son discours dans un coin de sa tête. Lorsqu’elle vient s’asseoir sur ses genoux, il passe doucement l’un de ses bras autour de sa taille. Puis lorsqu’elle termine enfin, il prend à son tour la parole, le regard plongé dans celui de la rousse. « C’est une très bonne nouvelle. » Il laisse planer un léger silence avant de replacer une de ses mèches flamboyantes derrière son oreille. « Bill est un gars bien. Je pense que tu peux lui faire confiance. Et pour ce qui est de ne pas se montrer ensemble, je ne pense pas que ça pourra être pire que lorsque tu vivais au motel… Au moins il n’y aura pas d’ado désagréable pour me refouler… » Il laisse échapper un rire, repensant à la dernière fois où il s’est rendu au motel.

Lucy fit entrer Otis dans la chambre, sa nouvelle chambre, qu’elle avait maintenant dans ce qui était son nouveau foyer… La rousse se sentait… soulagée de le voir ici, elle n’avait pas peur du jugement, pas comme quand elle était au motel, où elle avait peur de croiser le regard désapprobateur d’Oxana. Ici, elle croiserait le regard amusé de Bill et des autres GB et dans le pire des cas, ils se contenteraient de l’ignorer non ?

La rousse n’était pas encore totalement installée, il manquait encore de personnalité à l’endroit, mais c’était un bon début : « Ce n’est pas encore aussi confortable que le motel, mais on s’y fait. » La rousse se défit de son manteau, elle éprouvait un étrange stress, agréable mais terrifiant aussi. Ce n’est pas pour rien qu’elle avait amené ici, elle voulait lui parler oui, de certaines choses, de rien, du travail, mais elle avait besoin aussi de lui avouer une chose.

En premier lieux, elle entama la discussion sur un sujet qui n’avait rien à voir : « Le travail n’est pas très différent de ce qu’il était avant, mais je ne me sens plus aussi pressée, je me sens calme et en sécurité. » Avant de finalement laisser tomber le sujet, sans même attendre de réponse de la part du métis, Lucy voulait avancer, aller au cœur du sujet, même si pour ça elle avait l’impression de sauter dans le vide :

« ça fait combien de temps qu’on est ensemble Otis ? Six mois maintenant ? » Elle s’approcha de lui pour le pousser sur le lit… peu assurée, elle voulait cependant lui marquer son affection. Elle s’assit sur ses genoux et l’embrassa doucement. La rousse laissa ses cheveux s’échapper quand elle chercha le creux du cou du métis. Elle avait peur de ce qu’elle se préparait à faire, de ce qu’elle se préparait à dire pour lui.

« Tout ce que tu as fait pour moi Otis… J’ai… je pense que je t’aime, sincèrement. » Elle le pensait, le savait-elle réellement ? En avait-elle une certitude profonde et immuable ? Non… Son cœur balançait encore entre tous ses sentiments. Elle avait peur d’aller trop vite, de se précipité comme elle l’avait fait avec Anna. Mais Otis avait prouvé sa fidélité et la force de ses sentiments.

Elle se doutait qu’il répondrait par quelque chose d’approchant, mais elle se sentait faible de le dire de cette façon. Lucy le serra dans ses bras en attendant qu’il lui réponde…

Le métis se laisse guider par Lucy, ils rejoignent la nouvelle chambre de la rousse. Lorsqu’ils passent la porte, Otis observe la pièce, sourire aux lèvres. Elle sera bien ici, se dit-il alors que la jeune femme lui dit qu’elle n’est pas complètement installée, lui se contente d’acquiescer avant de lui répondre. « Je pourrais faire un peu de peinture pour que tu te sentes comme chez toi. » Il détailla les murs un instant, cela ne lui prendrait qu’une demi-journée, tout au plus…

Alors que Lucy se défait de son manteau, l’artiste continue d’observer la pièce, réfléchissant aux aménagements possibles pour que sa petite amie se sente bien ici. Il l’écoute à nouveau quand elle lui explique qu’elle se sent en sécurité ici. Un léger sourire apparaît sur les lèvres du jeune homme, lui aussi se sent soulagé depuis qu’elle s’est installée ici. Il s’apprête d’ailleurs à lui répondre mais la rousse change de sujet, revenant à leur relation. Il prend un air songeur quand elle lui demande s’il sait depuis combien de temps ils sont ensemble. Il la laisse le repousser vers le lit sur lequel il s’assoit. Elle s’installe sur ses genoux alors qu’elle s’empare doucement de ses lèvres. Il savoure ce baiser bref avant de rouvrir les yeux. « Oui. Six mois, même un peu plus je crois. » Dit-il en souriant un peu plus.

Le regard ancré dans celui de la jeune femme, il sourcille légèrement, ne comprenant pas ce qu’elle veut lui dire. Lucy ne tarde pas à lui avouer ses sentiments pour lui et il sent son cœur s’emballer dans sa poitrine. Il passe ses mains autour d’elle avec douceur avant de lui sourire, touché par ses mots. Serrant un peu plus leur étreinte, sa voix finit par résonner dans la pièce, teintée d’une malice qui le surprend lui-même. « Tu le penses seulement ? Ou bien tu en es sûre ? » Son sourire s’agrandit et il ne tarde pas à reprendre, de peur qu’elle le prenne mal. « Je te taquine, ne t’en fais pas. » Il reprend un air plus sérieux avant de continuer « Je suis content d’avoir pu t’aider. Tout ça, je ne l’aurais pas fait si… Je l’ai fait parce que je tiens à toi. Je t’aime Lucy. » Beaucoup.

Ses mains viennent attraper le visage de la jeune femme qu’il vient embrasser passionnément mais toujours avec retenue pour ne pas la brusquer. Lorsque le contact entre leurs lèvres se rompt enfin, ses yeux ne quittent pas les siens. Il pourrait rester là pendant des heures.

Lucy était au fond de son lit, la jambe immobilisée par une attèle. Bill et les autres se montraient particulièrement avenants, en dépit de l’imprudence manifeste dont elle avait fait preuve en se déplaçant seule. Une fois sa blessure traitée et stabilisée, elle avait demandé à ce qu’Otis vienne la voir, qu’elle puisse lui parler et dresser un portrait robot de son agresseuse :

« Otis… je suis contente de te voir. » Elle lui fit un sourire, montrant sa jambe, tâchant de minimiser l’impact et la gravité de sa blessure : « J’ai fais une mauvaise rencontre il y a deux jours et ça s’est assez mal terminée. Mais ça va aller, ne t’en fais pas. Je veux juste dresser son portrait-robot s’il te plait. » Le ton était presque péremptoire, mais il fallait ça, elle refusait de perdre plus de temps tant qu’elle n’aurait pas fait le portrait robot, surtout qu’elle voulait aussi lui parler d’une chose important.

Ils auraient tout le temps de parler après : « C’est une adolescente d’un mètre soixante, les cheveux chatain qui descendent en dessous des épaules. Je dirais qu’elle les yeux clairs… » La rousse, très calmement, comme si elle était en train de réciter une recette de cuisine. Toute la scène était encore claire dans son esprit. Otis était talentueux, si bien qu’il réussit assez rapidement à mettre en place un portrait très ressemblant de la jeune femme.

Quand ce fut fait, elle tira le métis jusqu’à elle, Lucy avait quelque chose à lui dire, une chose qui lui trottait dans la tête depuis un moment et c’était l’occasion ou jamais d’en parler avec lui : « Dans la série des nouvelles… je ne sais pas si c’est une bonne ou une mauvaise Otis… mais… ça va faire trois semaines de retard dans mes règles. Elles ont toujours été très régulière, même quand je mourrais de faim. » Lucy savait que ça pouvait tout et rien dire, elle pouvait simplement être malade, ne pas avoir de sang ou ne pas l’avoir remarqué, ça ne serait pas la première fois. Cependant, elle avait l’impression que c’était plus que ça. Aucune certitude, mais une sacrée impression.

Quand Otis arrive à la cage ce jour-là, il ne s’attend pas vraiment à ce qu’on l’interpelle de la sorte. Il est venu rendre visite à Lucy, comme d’habitude, mais… Quand on lui annonce qu’elle est blessée et actuellement dans son lit pour se remettre, le métis presse le pas jusqu’à sa chambre, très inquiet. Il ne prend même pas la peine de frapper, faisant brusquement son apparition dans la pièce. Il retrouve la rousse allongée sur son lit, visiblement blessée à la jambe. Il ne tard pas à s’asseoir près d’elle, attrapant doucement sa main pour la serrer très fort dans la sienne. « Que s’est-il passé ? » Sa petite amie lui raconte alors sa rencontre avec une adolescente avant de le rassurer. Elle va bien.

Elle lui demande ensuite de dessiner le portrait de celle qui l’a agressée et le dessinateur s’empresse de sortir un carnet et des crayons, se mettant rapidement au travail, aidé par les descriptions données par Lucy. Après quelques minutes, le résultat semble convenir à la jeune femme. Otis détache la feuille de son carnet avant de la tendre à Lucy. « Je pourrais en faire d’autres si besoin… » Il imaginait mal Bill laisser passer ça…

Encore chamboulé de l’avoir retrouvée dans cet état, Otis prend une profonde respiration avant de lui sourire ; soulagé qu’elle aille bien. Il a vraiment eu peur. Il range nerveusement ses affaires, les plaçant à leur place. Il vérifie plusieurs fois le contenu de son sac avant d’être à nouveau interpellé par la voix de Lucy qui le tire doucement vers lui. Alors qu’elle parle, il relève les yeux vers elle jusqu’à se figer complètement. Qu’est-ce qu’elle vient de dire là ? Le métis la regarde avec de grands yeux, tellement abasourdi qu’il peine à prononcer quelques mots. « Tu… Tu es enceinte ? » Sur l’instant cela lui fait vraiment peur et il sent son rythme cardiaque s’accélérer brusquement. Il prend une profonde inspiration avant de reprendre, avec tout autant de difficulté. « Tu ? Tu as fait un test pour en être sûre ? » Peut-être qu’ils s’inquiètent pour rien ? Mais comment réagira-t-il si c’est le cas ? Cette idée l’inquiète un peu… Il ne s’est jamais imaginé père alors forcément c’est un peu flippant. Quoi qu’il en soit, il n’abandonnera pas Lucy… Mais il ne sait pas quoi faire, vraiment pas…

« Une adolescente a voulu me voler ma nourriture et elle m’a tirée dessus dans un élan de frustration, quand j’ai refusé de lui céder. » Lucy ne voulait pas en parler plus que ça à Otis, il risquerait la crise de panique et, vraiment, ce n’était pas l’essentiel de leur conversation maintenant, elle

« Pour ce qui est de… nous. » Elle sorti péniblement plusieurs bâtonnet de plastiques de sa table de chevet. Des tests de grossesses, de diverses marques, tous avec le point commun de donner une indication allant dans le sens des soupçons de la jeune femme : « Les tests ne sont plus très fiables, ils sont périmés, mais j’en ai fais plusieurs et beaucoup pointait vers le positif, ça plus mon retard de règles. » ça faisait quelques indices, il faudrait attendre encore un peu pour en avoir la certitude évidement, mais c’était encore un autre problème.

Ce qui occupait l’esprit de la rousse c’était la réaction d’Otis, en espérant qu’il ne ferait pas de crise de panique ou quoi que ce soit. Après tout, il savait être brave, mais il savait aussi paniquer et ça… c’était déjà plus inquiétant.

Lucy était réellement inquiète pour lui : « Otis ? ça va ? Mon cœur ? » Il semblait un peu sous le choc, en même temps c’était guère surprenant, ce genre de nouvelles pouvaient marquer plus d’un homme et surtout dans ce contexte de fin du monde. Lucy posa une main rassurante sur celle de son petit amis, guettant une quelconque réaction dans son regard : « La première question à se poser… Tu… tu penses quoi de cette nouvelle ? » La rousse ne savait pas quoi penser de ça pour le moment, elle envisageait autant de s’en débarrasser, du fœtus, que de le garder, beaucoup de sa décision tiendrait à ce qu’Otis, lui, dirait.

Le jeune homme avait dit qu’il l’aimait après tout, ça pourrait être une bonne occasion de voir si c’était des paroles en l’air ou sincère. Lucy elle, était certaine d’une chose, Otis s’était frayé un chemin en elle et il n’était pas envisageable de garder cet enfant s’il ne voulait pas s’en occuper.