Cez a peut-être tendance à exagérer, quand il gueule à qui le veut qu’il a des nerfs d’acier, mais à côté de la gerbille ? C’est presque s’il fait pas preuve d’humilité. Le môme tourne et flippe et c’est pas pour radoucir l’Acconci. Le plan a l’air simple pourtant, juste maitriser le flux, croiser les doigts un peu aussi, et éclater les crânes qui viennent au fur et à mesure. « Oui tu bourres. » Putain il est sourd en prime ? Ou alors l’accent. Putain il a doit pas être natif de la langue. « Tu pousses la porte sur leur gueule. »  L’équipe de Babel on devrait les appeler, c’est vraiment pas le moment de foirer la communication pourtant. Sinon ils sont définitivement plus que mal barrés.

Mais la gerbille bouge, le lâche enfin, et Cesare remet les gants pour mieux attraper son arme. Fusil sur la table plus éloignée, de quoi le chopper et s’enfermer dans la chambre si ça tourne mal, il garde que le marteau dans son poing. L’encouragement écope d’un mouvement de crâne. Je sais, qu’il répondrait bien si la tension avait pas toute entière élue domicile dans sa mâchoire. Dernier souffle pour se motiver, on y croit, ça va marcher. Un regard au môme qu’a toujours une question plus con à poser. « Normalement. » Cesare se fend d’un petit sifflement. C'est vraiment pas la peine de faire du bruit pour attirer tout ce qui traine dans le quartier.

Le court silence qui suit est bien glaçant, mais ça à l’air de mordre. Cesare rouvre un peu la porte, de quoi voir quelques têtes galérer dans leur ascension. « Okay ils sont plusieurs. » Comme un léger coup de flippe, c’est pas vraiment l’endroit le mieux éclairé par ici. Il recule de deux pas pour se préparer. « Et tu bloques le deuxième compris ? » Dire qu’il remet sa vie entre les mains d’une gerbille, au moins en partie. Mais le premier cadavre fait son entrée, plus le temps de réfléchir.

Premier cible, premier tombé. Le marteau est toujours efficace pour fendre un crâne. Corps repoussé à la rache, Cesare arme déjà pour réceptionner le lot suivant. Si Dani arrive à tenir sa position pour au moins les deux suivants, tout devrait bien se passer.

Le petit sait tenir une porte, première bonne nouvelle de la soirée. Maintenant c’est à lui de s’en sortir avec ce qu’il laisse filtrer. Pourquoi dans ses plans, c’est toujours lui qui finit en collé-serré avec les morts plein de dents ? Il a bien douze raisons, toutes plus flatteuses pour lui que le reste du monde. La vérité ? Il est probablement surtout un peu con. Le premier cadavre est rejeté, un peu en vrac, mais au moins pas dans ses pieds. « Go. Et tu me fais la même. »

Eh jusque-là, le plan est en train de marcher. Il lui en faut peu pour prendre la confiance au Cesare. Mais le truc qui déboule par la porte est pas ce dont il a l’habitude. Y a un cadavre d’enfant qui s’avance et le bras manquant est pas pour lisser ses mouvements. Erratique à souhait, le rôdeur semble à peine savoir lui-même où il veut aller. Merde. C'est pas pour simplifier. Premier foirage, Cez envoie le marteau dans le vent et des petites mains agrippent la veste de moto qu’il a sur lui.

Putain.

Réflexe reptilien, bien plus que planifié, de lui coller une balayette pour finir au sol avec. Essayez de viser un truc qui vous arrive à la taille avec une masse avant de juger. Au moins le rattrapage est correct. C'plus simple maintenant qu'il a moins de raison de balancer. En un coup de plus y a des synapses bien ancrées dans le parquet. Mais pas le temps de souffler. Même pas vraiment d’espérer. Reste des râles et vaut mieux pas que ceux-là se multiplient s’ils veulent pas avoir de la compagnie. Déjà Cesare revient sur ses pieds, merci l’adrénaline. Il s'est pas senti se relever.

« Vas-y on les finit. » Il en oublie peut-être un peu de chuchoter mais faudrait pas trop lui en demander. Ils étaient cinq en bas, deux d’étalés à jamais. Ça va pas durer une éternité, même si y a comme un relan de bile qui lui crame l’estomac là tout de suite. C’est pas passé très loin de la fin tragique. Surtout bouffé par un môme merde, ce serait vraiment indigne de lui.

Fais gaffe, fais gaffe, il voudrait bien l’y voir lui. Ca s’abat pas pareil une petite merde d’un mètre vingt qui se balance dans tous les sens. Au moment où la crâne se brise, il a déjà quinze excuses toutes trouvées sur pourquoi c’est arrivé. Pas sa faute, celle de l’obscurité, il pouvait pas trop bien analyser. Mais un regard sur le côté et celles-là sont oubliés. Y a deux corps de plus qui déboulent en trombe, un au sol, gueule grande ouverte pour le bouffer. Il capte à peine le manège du deuxième et Dani qui s’esquive de justesse pour pas se faire attraper. Il a un peu plus urgent sur le feu, comme sa propre vie. Et aussi vite il est de retour sur ses pieds.

Le cadavre lève bien un bras vers sa jambe, sur un malentendu il aurait bien pu le toucher, mais le marteau s’abat et le tas décomposé retombe. Allez. Au moins c’est fait. Souffle plus fort qu’il voudrait, l’adrénaline se chassera pas toute seule de lui, il lance un regard à la gerbille. « Je t’ai dit que ça passait. » C’est qu’il tente quand même. Même essoufflé, même en s’étend retrouvé au sol comme un cake de pas y arriver, même en enjambant le dernier tombé, il tente vraiment de faire croire que tout ça, ce bordel, c’était totalement son plan. Qu'il a tout prévu Cesare.

« Normalement on en a qu’un en bas. On le fume, on fout un meuble devant la porte et ça devrait passer. » Une commode en vrac attirera peut-être l’attention d’un vivant qui regarde mais les rôdeurs devraient au moins plus venir les emmerder. Juste de quoi espérer une nuit tranquille, en tous cas plus qu’elle l’a été. Le rital est déjà à mi-chemin du couloir quand il se retourne vers la gerbille. « Suis moi. J’vais avoir besoin que tu fasses le pet devant la porte pendant que je ramène de quoi la bloquer. » Il croit vraiment s’en tirer sans rien foutre ? Parole d’Acconci, le môme s’en sortira pas aussi vite. Mais penché sur l’escalier, il entend pas un râle.

Il s’est grand même pas barré avec le bordel qu’ils ont fait. Normalement il aurait dû être attiré, au moins dans les marches. Il a réussi à se coincer ? S’arracher une patte sur le trajet ? Trop de possibilités, et après une grosse seconde à faire semblant de réfléchir, Cez descend. Peu importe où il est, faut le déglinguer avant d’espérer dormir. En plus il a toujours son sac à récupérer.