La musicienne ne perdit pas de temps pour se glisser par la fenêtre et William comprenait assez bien. Il n'avait pas réellement envie de perdre une minute de plus dans cet endroit maudit. Bien qu'ils aient enfin trouvé le butin, l'opération leur avait coûté plusieurs sueurs froides qu'il n'était pas prêt d'oublier. La jeune femme maintenant au sol, il laissa l'hispanique y aller après lui puis leur jeta les sacs un à un. D'un dernier regard vif, il explora la pièce pour s'assurer qu'ils n'oubliaient rien et se faufila lui-même par la fenêtre pour se jeter au sol. La hauteur du saut était jouable, mais à son âge, il le ressentit tout de même dans ses genoux, serrant les dents alors que sol arrêtait sa chute.

Ils n'avaient toutefois pas le temps de souffler. Ils n'étaient pas à la voiture encore et ils ne savaient pas où ils avaient atterri et qu'est-ce qui pouvait les arrêter entre ici et leur véhicule. En scrutant l'endroit du regard, William reconnu l'aspect distinctif d'une zone de quarantaine. Heureusement pour eux, aucun cadavre ne semblait être en mouvement pour le moment, et les draps blancs au sol indiquait probablement des infectés déjà abattu, ou peut-être pas. Dans sa description des lieux, l'ambulancier put reconnaître son véhicule de prédilection, là au milieu de la place, prêt à être utilisé et emporté. Il fit signe à ses compagnons d'avancer prudemment, ce dirigeant lentement en direction du véhicule d'urgence, analysant les environs à chaque pas entre les morts qui jonchaient le sol.

Il tira la porte coté conducteur qui s'ouvrit aussitôt. Un « Oui ! » Intérieur remplissait de joie l’aîné du groupe alors que la chance semblait tourner enfin. Montant à bord du véhicule, il chercha les clés, sous le siège ou dans le pare-soleil comme plusieurs conducteurs le faisait, mais rien... L'ambulancier regarda l'hispanique et la jeune femme à tour de rôle. Il ne connaissait pas suffisamment bien Hernando pour s'appuyer sur chacun de ses talents, et un élan de stéréotype l'enveloppa. Il faut admettre que l'homme avait un peu l'air d'avoir eu un passé de racaille, il devait avoir ce genre de talents, mais Will se contenta de rester vague.

- Un de vous deux sait faire démarrer une voiture sans les clés?

Heureusement pour eux, le stéréotype se confirma puisque l'éducateur acquiesça, s'avançant vers le côté conducteur de l'ambulance, le conducteur attitré s'écarta pour lui laisser la place. Tirant les fils sous le volant, il utilisa ses connaissances dans le démarrage de voiture pour faire ce toucher les fils. Le moteur ne ronronnait même pas sous les assauts du spécialiste. La batterie était peut-être à plat, se disait Will.

Assistant à l'échec de son ami, l'ambulancier tenta plutôt de s'écarter vers l'arrière et de glisser sa machette entre les portes du véhicule afin d'en ouvrir le loquet. La facilité avers laquelle il y arriva le déconcerta presque alors que la serrure s’enclencha pour laisser les portes lentement s'ouvrir devant lui. Alors que les portes s'ouvraient, il regardait à l'intérieur dans l'espoir qu'aucun rôdeur ne s’abattrait sur lui. Il gardait tout de même sa lame en main, paré à toute éventualité et il indiqua à ses compagnons sa réussite.

- Les portes arrières sont ouvertes au moins.

Un cimetière. Voilà où ils venaient de mettre les pieds en sautant par la fenêtre. Un instant, Selene craignit que les cadavres qui jonchaient le sol par centaines ne se relèvent, mais ils semblaient tous bel et bien inertes. Sans doute l’une des anciennes « zone de quarantaine » dans lesquelles avaient été emmenés les premiers malades. Une comme celle où son père devait être encore en train de reposer. Ravalant l’amertume, même la tristesse, qui tentait de percer son armure, la musicienne suivit William, qui leur désignait une ambulance.

Le Saint Graal ! Si jamais ils avaient la possibilité de faire repartir un tel engin, la jeune meneuse était certaine que le sort de son camp s’améliorerait sensiblement. Elle enjamba avec précaution plus de dépouilles qu’elle ne voulait en compter, et se heurta – comme ses complices – à l’arrière clos et aux clefs disparues. Ses yeux bleus scrutèrent les alentours pourtant, elle se baissa même pour voir sous le camion, mais force était de constater qu’elles étaient certainement en possession d’un rôdeur aujourd’hui.

A la question de l’ambulancier, elle haussa les épaules. Certes, elle avait eu de sales fréquentations pendant l’adolescence, mais aucun n’avait volé une voiture. Pas devant elle en tout cas, de sorte qu’elle n’avait pas d’autre référence que les films hollywoodiens sur la technique qui consistait à trafiquer les fils du démarreur. Hernando tenta sa chance, sachant visiblement ce qu’il faisait, mais l’euphorie retomba bien vite : plus de jus. L’ambulance était aussi muette que les corps qui l’encerclaient.

Ne restait plus qu’à essayer de piller le véhicule, à défaut de pouvoir l’emporter. Tandis que William forçait le mécanisme avec sa machette, Selene avait dégainé son arme pour le couvrir. Maintenu à deux mains, le revolver était pointé sur les portes qui cédèrent sans trop résister. Ils avaient un peu de chance dans leur déception : pas de mordeur à l’intérieur, mais d’autres médicaments ainsi que des bonbonnes remplies d’eau.

- Oh putain…, souffla la pianiste les paupières écarquillés par la surprise.

Elle n’aurait jamais pensé être aussi heureuse de découvrir de l’eau, mais c’était la dure réalité de leur nouveau monde : ils avaient besoin de boire, et leurs réserves les obligeaient à se rationner assez sévèrement. C’était un plus incontestable.

- On prend tout ce qu’on peut, précisa-t-elle en sachant que ses amis seraient de son avis, et on rentre.