La jeune femme faisait le vide, s’efforçant de ne plus penser à rien. Ni à sa fille, restée au camp ; ni à Juliet, entourée d’inconnus à Seattle ; ni aux membres de sa famille ici présent, qui pourraient ne pas revenir. En fait… tous, elle y comprit, pourraient ne pas revenir. A ses cheveux épinglés sur les côtés pour ne pas lui tomber dans les yeux, était accrochée la plume fendue que lui avait confiée Nima. Celle-ci avait également marqué son visage de peintures guerrières. C’était idiot mais… il y avait un véritable effet psychologique. Selene se sentait forte, concentrée, prête, mais droite. Sereine. La folie ne couvait plus comme une lame à double-tranchant, la rage ne la poussait plus comme un carburant inflammable. Quelque part, elle était… en paix. Étrangement.

Un à un, pour la énième fois, elle inspectait ses carreaux pour s’assurer qu’ils n’étaient pas abîmés. Une fois cela fait, ce fut au tour des poulies de son arbalète, puis au chargeur de son glock. Ce dernier termina calé dans le holster serré sur sa cuisse, quand son autre arme à projectile fut passée en bandoulière. Toujours pas de signal dans le talkie fixé à sa ceinture avec son couteau de chasse soigneusement aiguisé. Ils n’avaient plus qu’à attendre… et à croiser les doigts pour les autres.

Elle remonter la fermeture de son blouson en faux cuir jusqu'au col. Il faisait froid. Aux côtés d’Eli, la pianiste leva sur lui ses yeux glacier et le gratifia de l’ébauche d’un sourire timide. Sans réelle joie, plutôt encourageant. C’était la première fois qu’ils se battaient ensemble, si on occultait l’attaque d’American Dream sur la prison. C’était bizarre… comme si l’un et l’autre n’étaient pas censés se retrouver dans cette situation. C’était peut-être le cas. D’ailleurs à ce sujet, elle lui glissa avec une sincère résignation :

- Si je suis perdue là-bas, tu fais pas de connerie, ok ? Ses prunelles s’accrochèrent aux siennes, qu’il ne cherche pas à se défiler, si je suis perdue, tu me laisses et tu rentres pour Effy. Tu me promets ?

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Soyez prudents, souffla Andrea à ceux qui laissèrent la réunion.

Peu de temps après, eux-mêmes retrouvèrent les autres. Ceux qui attendaient après des réponses et une marche à suivre. Tout allait être incroyablement serré, il fallait que chacune de leurs actions soient quasiment à la seconde près pour que tout fonctionne correctement. Est-ce qu'elle avait peur ? Evidemment que oui. Parce qu'Andrea se sentait responsable de la survie de toutes les personnes présentes... Mais aussi parce qu'ils s'attaquaient à un monstre... Et ça n'était que la face émergée de l'iceberg en lui-même.

Elle tenta de se concentrer, de faire fi de tout le reste. Elle laissa à la pianiste l'occasion de s'isoler avant de prendre elle-même la parole vers ceux qui l'entouraient :

On sait qu'on vous en demande beaucoup, mais il faudra vraiment faire en sorte que le plan fonctionne, c'est notre seule chance de pouvoir l'emporter sur le nombre. Nous devons être organisés, structurés dans notre offensive. Sinon quoi, ils courraient à la catastrophe : Chaque groupe à l'intérieur du campement restera en contact, ne l'oubliez pas, justement pour s'assurer que ça fonctionnerait. Mais d'ici là, il faudrait attendre... Et espérer.

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Bien qu’il n’en laissait rien paraitre, le coeur de Valérian tambourinait férocement contre sa poitrine lorsqu’il sortit en compagnie des autres chefs pour venir à la rencontre des autres survivants. C’était le grand jour et une étrange adrénaline parcourait les veines de son corps, les gonflant d’une froide détermination. Une indéniable peur lui serrait en outre les tripes. Pas pour sa propre personne, mais pour tous ces gens qu’ils menaient au front, ce jour-là. Le groupe du checkpoint s’était déjà éloigné, et Valérian avait salué d’un vif signe de tête Yulia et Jaren avant que ceux-ci ne partent.

Les muscles de la mâchoire saillants, le grec se tint aux côtés des autres chefs et parcourut le reste du regroupement d’un regard indéchiffrable. Il était paré pour l’occasion d’un gilet pare-balles, à l’instar des autres Exilés.  

« Une fois le check-point franchit, le groupe chargé de la diversion, mené par Connor et Duncan, pénétrera dans la zone via la barrière Sud. Quant aux autres, ils contourneront le périmètre par l’Est, pour franchir le grillage plus au Nord (au niveau du mirador 5) et ensuite se déployer en plusieurs groupes, prenant les points stratégiques de la ville. »

Il regarda Andrea, à côté de lui. « Ces groupes-ci n’agiront qu’une fois le signal de la diversion donné. Comme l’a précisé Andrea, la vitesse et la coordination seront donc primordiales à la réussite du plan. »   

« Le but sera donc d’atteindre le plus rapidement possible les points stratégiques de George, et ainsi de couper court à la riposte adverse. S’il sera important d’agir simultanément, il sera également essentiel de couper au plus vite leurs communications, ce qui nous permettra d’empêcher les New Eden de contacter des renforts. » Ce qui les prendrait irrémédiablement de court. « Andrea et moi nous chargerons de superviser cette opération. Avec nous, viendront Milow, Otis, Joaquin et Ruby. »

Les yeux de Valérian trouvèrent ceux de Dana. « Il faudra également sécuriser l’armurie, située au centre de George. Dana, tu seras accompagnée de Yulia - en possession d’un talkie - de Jaren, Elisabeth et Cora pour ce faire. »

Il regarda ensuite Maes, Allïa, Anton et Isha. « Vous vous occuperez quant à vous de libérer d’éventuels prisonniers. Teresa et Emilie vous accompagneront à cet effet. »

Son regard quitta les Exilés et Valérian hocha la tête. « Quoiqu’il arrive, restez sur vos gardes. Si nous avons une idée de la structure de cette base, nous n’en connaissons cependant pas l’intégralité. Soyez donc prudents, et restez en contact les uns avec les autres. » Il se mordit les lèvres et lâcha enfin. « Merci à vous tous d’être là. Et bonne chance. »  

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Voir Joachim et Kaya filer avec les autres, ça fout une drôle de boule d'angoisse dans le ventre. Devoir me séparer d'eux, même pour moins d'une heure, c'est comme s'arracher un membre je crois. J'aimerais être avec eux pour pouvoir les protéger si quelque chose se passe, sauf que c'est pas à moi de décider de qui va faire quoi. Les autres - les chefs de chaque groupe - ont déjà un plan en tête, qu'ils nous transmettent entre temps. Je sais même pas quoi en penser, on peut pas dire que du lot, je suis forcément le plus réfléchi ou le plus stratège de toute façon. Andrea m'adresse pas la parole, toujours pas. Je sais juste que je resterais en compagnie de Kaya et Joachim après, pour approcher les habitants de George...

Il parait que des visages jeunes aideront à calmer, permettront en tout cas de pas créer une révolte, on aura sans doute trop de scrupules à s'en prendre à des personnes qui ont nos allures. Je pince les lèvres. Mes yeux se tournent vers Corray finalement, vu qu'ensuite, c'est sur ses épaules que reposera la responsabilité de l'opération.

Comment tu le sens ? Que je lui demande avec un bref sourire qu'est pas forcément hyper convaincu. J'ai hate que ça soit terminé, que je lui avoue de mon côté. J'espère que tout se passera bien, pour tout le monde. Et que personne tombera au combat.

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Ça en fait du monde autour de lui. Otis jette un œil vers quelques-uns des visages qui l’entourent. Cela a beau faire plusieurs jours qu’il les côtoie, il n’est pas à l’aise. Et ce qui s’annonce la nuit prochaine n’arrange pas les choses, évidemment. Est-ce qu’il regrette de s’être porté volontaire ? Non, pas vraiment. Il voulait être là pour soutenir ses amis, sa famille. C’est bien la première fois qu’il se joint à une mission aussi dangereuse, et forcément, il est stressé.

Heureusement la présence des siens, dont celle de Milow à ses côtés lui permet de rester plutôt serein pour l’instant. Couteau à sa ceinture, il est équipé de protections sportives – Bruce a insisté pour qu’il en mette – il vérifie le chargeur de son Beretta, comme son père lui a appris. Le moment est enfin venu pour lui de se prouver à lui-même qu’il est capable de se battre… Son père serait probablement fier de lui. Qu’importe, il doit se tenir prêt. Une fois le signal donné par les autres ils ne pourront plus faire marche arrière…

Un léger sourire étire ses lèvres quand Milow tente de le rassurer en posant sa main sur son épaule. « On… On se sépare pas hein ? » Ose-t-il souffler à mi-voix. Les autres de son équipe, il ne les connaît pas vraiment. Il n’a pas osé discuter plus que ça avec eux. Il connaît leurs prénoms et encore… Son regard se pose sur la métisse, celle qui n’a qu’un bras, elle l’impressionne ; puis ses yeux dérivent sur le grand brun qui donne les dernières directives aux différents groupes. Bordel… Qu’il aimerait être aussi sûr de lui que lui.

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