Une fois les rats dépecés par Isaac, elle en a mangé, oui. Parce qu’elle n’a pas eu le choix et qu’elle avait vraiment la dalle. Ensuite, la marche a repris. Toujours la même, rythmée par les jeux, les discussions, et les carnets qui trainent un peu partout. Isalín s’y serait presque intéressée, mais elle a été distraite par le malaise de Rafael, juste à coté d’elle.

- Euh… ça va ? Demande-t-elle à l’unisson du doyen.

C’est là que les tunnels décident de faire un caprice. Le plafond se fissure, soudainement. L’adolescente reçoit de la poussière sur le coin du nez, éternue, et comprend ce qui menace de se passer.

- Oh, merde !

Agissant instinctivement, elle s’élance vers son aîné inconscient pour essayer vainement de le soulever. Elle n’arrive à rien, jusqu’à ce que Tomas vienne l’aider. A deux, ils peuvent soutenir leur allié, tandis que les murs gémissent en chœur. Ils y sont presque quand tout s’effondre. Presque.

Une pierre dégringole et vient perturber le pied d’appui d’Isalín, juste assez pour qu’elle se sente trébucher et lâche Rafael pour ne pas l'entrainer dans sa culbute. Elle tente de récupérer le déséquilibre en effectuant une roulade, vaguement réussie en vérité, mais ça ne la sauve pas. Un énorme bloc de roche se décroche, se fracture, et chute. L’un des lourds fragment vient lui écraser la main qui lui sert d’appui et l’avant-bras en prime.

Le cri de douleur qui lui échappe est instinctif. Elle en a les larmes aux yeux et n’arrive plus à se relever. Couverte de poussière, elle est prise de tremblements nerveux, le membre momentanément coincé. Les autres pourront la dégager mais elle, elle est trop occupée à essayer de noyer la souffrance dans sa respiration et dans une incantation :

- Putainputainputainputain…

Spoiler:

Je m’attelais à faire rôtir, sans la peau, nos rats… assez peu attentif à ce qui pouvait m’entourer : « Raf’ ? » il s’est effondré d’un coup comme ça, je me suis précipité sur lui, avec Isalin et c’est à ce moment que les dieux ont décidés que notre chemin allait devenir plus ardu : « Merde. » Les pierres pleuvant, j’ai réussi à trainer un peu Raf' à l'aide d’Isalin, mais la fille de Loki a reçu une punition au nom de son père.

Lors de sa chute, une pierre est venu s’écraser sur son avant-bras, produisant un craquement reconnaissable entre mille : « Isalin ! » Le hurlement strident qu’elle poussa aurait pu repousser Fenrir, j’en étais certain. J’ai laissé tomber mon fardeau pour me précipiter au chevet de ma protégée. Mes mains venant bloquer son bras pour éviter qu’elle ne tire dessus ou qu’elle ne bouge trop :

« Regarde-moi Isa, ne regarde pas ton bras. Tomeo ! Aide-moi pour le rocher. » Ce n’était pas une roche très lourde, je dirais entre 15 et 25 kilos, mais il y avait le bras de la jeune femme en dessous, il fallait faire les choses comme il fallait sinon ça risquait d’aggraver sa blessure. Heureusement, j’allais avoir de l’aide de la part du grand gaillard. A la lueur de nos torches, je voyais son torse luisant de sueur, se recouvrir doucement de poussière blanchâtre.

Nos regards se sont croisés pendant qu’on se plaçait autour du rocher : « Tiens le rocher pendant que je commence à trancher les chairs » Je ne comptais pas couper le bras d’Isa, loin de là, mais c’était pour détourner l’attention de la jeune femme et éviter qu’elle ne se concentre sur la douleur. Car elle allait avoir très mal.

Spoiler:

Il s’apprêtait à répondre à Isaac et à Isalín, mais le sol ne lui en laissa pas vraiment le temps. Pas du tout, même, le bruit de l’effondrement couvrant quasiment la voix de la jeune fille. S’il n’avait pas compris tout de suite ce qu’il se passait, alors que Tomas et Isalín le portait, l’atterrissage rude sur le sol le fit recouvrer ses sens, et sortir un peu de sa léthargie. Le souffle coupé un bref instant, il finit par se relever au bout de quelques secondes – une éternité, lui semblait-il – bien plus conscient que juste avant l’éboulement. Clignant des yeux, il regarda ses sauveurs, s’apprêtant à les sauver avant de réaliser que, s’il n’avait rien eu, c’était grâce à  Isalín qui avait tout pris à sa place. Un peu choqué, et se sentant coupable, il s’approcha d’elle, à genoux, déglutissant difficilement. « On va te sortir de là, et Tomeo s’occupera de ta blessure. C’est un super médecin. Je l’ai vu panser les plaies d’Abigail après qu’elle se soit une balle dans le bide, et elle s’en est très bien sortie ! Et on fera même en sorte que tu souffres pas. » Il blablatait, pour essayer de la distraire. Sans certitude.

Regardant autour de lui, il chercha à repérer Tomeo, qui semblait s’en être sorti sans encombres, et lui fait signe de venir. « On peut… On peut utiliser mon bâton. Pour servir d’attelle. » Ca lui coûtait, de dire ça. Pas sentimentalement, parce qu’il en avait laissé un dans son logement à Fort Nisqually, mais parce qu’il n’aurait plus de moyen de se battre après ça. Mais… Il verra. Peut-être qu’il resterait assez du bâton, si nécessaire. Peut-être.

Il continuait à parler à la jeune fille, pendant que Tomeo et Tomas essayaient de retirer la pierre. « Je te faciliterai la vie, une fois sortis d’ici. Je porterai tes affaires, et je t’aiderai autant que je peux. Je te proposerai bien de te faire la cuisine, mais je crains de t’intoxiquer, et que ça soit encore moins bon que le rat… je pourrai t’amener à manger au moins. A défaut. » Il s'interrompit un instant, en entendant Tomas, lui adressant un regard perdu. Euh... Il déconnait là ? Il avait bien entendu le bruit, lui aussi, mais quand même... « Hum... Enfin, je t'aiderai autant que possible. Je pourrai même t'apprendre à manier le bâton d'un bras, à manger avec une seule main, à tout faire, d'une main, en fait, le temps que l'autre se rétablisse ! Je suis tombé d'un mur d'escalade, quand j'étais plus jeune, et j'ai mis pas mal de temps à consolider mon bras. Enfin, j'étais pas très sage, faut dire. Du coup j'ai appris. Et... hum, ça m'a été bien utile, quand je me suis cassé la main, plus tard. »

Spoiler:

Ne pas regarder son bras, elle devrait pouvoir faire. Le pire, c’est que pour l’instant, elle ne sens étrangement plus rien. Comme si son bras n’a tout simplement pas existé. Ses larmes ont tracé des sillons humides dans la poussière marronnâte qui la recouvre, ses yeux se lèvent sur Rafael qui essaye de la rassurer sur les compétences de médic de Tomeo.

- Okokok, elle hoche la tête, renifle et regarde ailleurs comme on lui a demandé, okokok…

Elle inspire et expire profondément. Isalín sourit piteusement à l’hispanique qui propose de l’aider quand ils seront rentrés. Oh oui, ce qu’elle a envie de rentrer… c’est bien la preuve que Nisqually est devenu sa maison : elle ne songe qu’à retrouver son mobil’home, son lit et ses amis. Brusquement, c’est Tomas qui balaye ses espoirs et la fait blêmir sous la couche de crasse qui masque ses traits.

- Hein ?! Nonononononon v-vous allez p-pas couper m-m-mon bras, pas vrai ?! T-Tomeo ? Vous allez faire ça ? Nononon s’il vous plait ! J-j’vais bien ! Faut juste e-enlever la pierre et ç-ç-ça va ! L’islandaise sanglote de plus belle, paniquée, et n’entend plus ce que lui raconte Rafael, Andrea ! Ils v-vont vraiment faire ça ?!

Du coup, elle ne peut pas s’empêcher de regarder ce membre que le norvégien à proposer de trancher. Finalement, elle préfèrerait presque rester comme ça…

Spoiler:

Quand on pense que la situation ne peut pas empirer… On se rend compte qu’on est bien naïf. Alors que mes compagnons s’inquiètent pour Rafaël et que je me saisis de mon sac pour aller voir, un sinistre craquement résonne au dessus de nous, signe que la galerie est en train de lâcher. Sans davantage y réfléchir, je m’écarte alors de ma position et cours vers l’autre sens, rejoignant mes compagnons en catastrophe. Isalin et Tomas, plus rapides et plus proches de Rafaël, le tirent avec eux et le sauvent in extremis. Le vacarme est infernal et la poussière me fait tousser, alors que je tente de voir un peu l’étendue des dégâts une fois que tout est terminé. Les plaintes d’Isalin m’interpellent. Déjà, tout le monde est là, c’est bien. Personne n’est resté coincé de l’autre côté, ou en dessous. Andrea s’inquiète la première. « Ca va. » Je réponds laconiquement, alors que je me précipite vers Isalin, rejoignant Tomas. « Ok. » En même temps, c’est important. Raf, quant à lui, recouvre ses esprits et se met à parler… beaucoup. Je retiens surtout qu’il me propose son bâton en attelle pour la jeune femme.

Pourtant, quand il parle de trancher les chairs, je le regarde de travers, interloqué. La pauvre Isalin souffre le martyr et est déjà en panique, pas le moment de plaisanter là-dessus quoi. Et Raf qui essaie de calmer le jeu. « Non mais, n’essayez pas d’aider en fait. » Je soupire, mécontent et essaie de capter l’attention de la jeune fille. « Isalin, regarde moi. Je ne vais pas te couper le bras. Personne ici ne va le faire. » Je réponds d’un ton assuré. « On va te dégager, je vais t’examiner et on va immobiliser ton bras si il est fracturé. » Il n’y a rien à faire d’autre de toutes façons. « Encore un peu de courage. » Et elle en a déjà énormément fait preuve à son jeune âge. « Tomas, à trois on soulève.  Isalin, prend une grande inspiration. » Je compte alors et à trois, nous soulevons la pierre. Mouvement douloureux pour elle, mais je ne lui laisse pas le temps de s’apitoyer. « Je vais regarder d’accord ? Doucement, tu vas m’aider. Raf, pète ton bâton. Isaac, prends des bandages dans mon sac et donne les moi. » Je me concentre sur ma tâche en essayant d’être le plus délicat et doux possible. « Faudrait en profiter pour voir si on peut remonter par l’éboulement, on ne sait jamais. » Si le plafond s’est effondré, il y a possiblement une brèche vers le niveau au dessus. « Tu veux quelque chose pour la douleur, Isa ? »

Spoiler:

Isaac n’eut pas de réponse à sa question. Brusquement, le plafond au-dessus de leurs têtes se mit à craquer à de nombreuses reprises avant de céder subitement. « Faut pas rester là ! » Clama le vieux Greene alors que Tomas et Isalin se précipitaient vers Rafaël pour lui éviter d’être enseveli. Le doyen du groupe se mit à courir, évitant un très gros bloc de pierre, juste à temps.

Malheureusement pour eux, Isalin se retrouva prise au piège, le bras coincé sous un gros morceau de roche. Isaac rejoint rapidement les autres, prêt à les aider pour tirer la plus jeune de là. La pauvre souffrait et se retrouver dans cette situation risquait de la faire paniquer. Ce fut sans compter la remarque de Tomas qui fit sourciller le cavalier. « Tomas… Ce n’est pas comme ça que... » Il comptait vraiment la rassurer ainsi ? Isaac lui lança un regard sévère, lui priant de se taire. Puis lorsque Tomeo lui demanda d’aller chercher de quoi réaliser un bandage, il s’exécuta. Pendant ce temps, les autres dégagèrent le bras de la jeune femme.

L’ancien éleveur ne tarda pas à revenir avec les bandages demandés par le pompier. « Dis-moi si je peux t’aider à faire quelque-chose… »Heureusement que Tomeo était là pour gérer la situation. Alors il reprit les dires de ce dernier, en s’adressant notamment à Tomas et Andrea « Tomeo a raison, il faudrait peut-être aller voir si l’éboulement a créé une brèche… Il n’a pas besoin que nous soyons tous autour d’Isalin, il sait ce qu’il fait… »

Spoiler:

Il va falloir revoir la manière de rassurer une jeune fille je crois, marmonna Andrea en fronçant les sourcils, avisant Tomas longuement.

Elle était un peu sur le cul, il fallait l'admettre. Si ses bourreaux lui avaient dit ça avant de trancher son bras, elle n'aurait pas été du tout rassuré tout compte fait, ils s'étaient contentés de ne rien dire à l'époque, à part de rester tranquille à l'évidence. Une sorte de démangeaison la prit à son poignet absent, et la métisse tâcha de rationnaliser :

On peut faire une pause, le temps pour Isalin de récupérer ses esprits, souffla-t-elle alors, avisant la jeune fille d'un regard qui se voulait rassurant. Elle était forte. La douleur devait être violente pour elle mais Andrea ne s'inquiétait pas pour elle parce qu'elle savait qu'elle saurait se débrouiller. Tu as de la chance, tu auras une super plâtre en rentrant au campement, j'aurais le droit de dessiner dessus ?

Elle avisa le jongleur d'un signe de la tête :

Rafael, viens, on regarde s'il y a une sortie possible par là, fit-elle ensuite. Ca laissera l'occasion à Isalin de respirer un peu, elle était déjà bien entourée. Elle comptait sur Isaac pour assurer la sécurité de tout le monde de toute façon.